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21/11/2023 | FRANCE | N°21BX02701

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 21 novembre 2023, 21BX02701


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Technical Systems SRO a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2013.

Par un jugement n°1902758 du 29 avril 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juin 2021, la société Technical Systems SRO, représentée par Me Hasenohrlova,

demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 29 avril 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Technical Systems SRO a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2013.

Par un jugement n°1902758 du 29 avril 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 juin 2021, la société Technical Systems SRO, représentée par Me Hasenohrlova, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 29 avril 2021 ;

2°) d'annuler la décision du 11 février 2019 par laquelle la direction spécialisée du contrôle fiscal a rejeté sa réclamation formée à l'encontre des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2010 et le 31 décembre 2013.

Elle soutient que :

- la décision du 11 février 2019 a été prise par une autorité incompétente ;

- elle méconnaît les articles 256 A, 259 et 283 du code général des impôts dès lors que son activité n'est pas imposable à la taxe sur la valeur ajoutée en France.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 décembre 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Technical Systems SRO ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 10 mars 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 31 mars 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République socialiste tchécoslovaque tendant à éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur les revenus, signée à Paris le 1er juin 1973 ;

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Michaud,

- les conclusions de M. Gueguein, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Technical Systems SRO est une société de droit slovaque, créée en 2008, ayant son siège social déclaré à Pieštany en Slovaquie et dont l'associée unique est une ressortissante slovaque. Le gérant de cette société est un ressortissant slovaque, M. B... A.... Cette société a développé une activité de sous-traitance de pose de panneaux photovoltaïques sur le territoire français pour le compte d'entreprises françaises notamment entre 2010 et 2013. En 2015, elle a fait l'objet d'une vérification générale de comptabilité qui a porté sur la période du 3 janvier 2008 au 31 décembre 2013. À l'issue des opérations de contrôle, le service l'a informée, par une proposition de rectification du 30 mai 2016, de son intention de l'assujettir à la taxe sur la valeur ajoutée à raison des prestations de services réalisées en France entre le 1er janvier 2010 et le 31 décembre 2013. Au terme de la procédure, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée augmentés de majorations et de pénalités lui ont été réclamés selon la procédure de taxation d'office, pour les montants de 320 665 euros au titre de l'année 2010, 877 918 euros au titre de l'année 2011, 770 177 euros au titre de l'année 2012 et 165 071 euros au titre de l'année 2013, soit un total de 2 133 821 euros. Par une décision du 11 février 2019, l'administration fiscale a rejeté la réclamation formée par la société Technical Systems SRO à l'encontre de ces rappels de taxe sur la valeur ajoutée. Par un jugement du 29 avril 2021, dont la société Technical Systems SRO fait appel, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de la société tendant à la décharge de ces rappels de taxe.

2. En premier lieu, les vices qui entachent la décision par laquelle la réclamation d'un contribuable est rejetée sont sans influence sur le bien-fondé de l'imposition contestée ou sur la régularité de la procédure d'établissement de cette imposition. Il suit de là que le moyen tiré de l'incompétence du fonctionnaire du signataire de la décision de rejet de la réclamation de la société est inopérant.

3. En second lieu, aux termes de l'article 256 A du code général des impôts : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une des activités économiques mentionnées au cinquième alinéa, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention. / (...) / Les activités économiques visées au premier alinéa se définissent comme toutes les activités de producteur, de commerçant ou de prestataire de services, y compris les activités extractives, agricoles et celles des professions libérales ou assimilées. (...) ". Aux termes de l'article 259 du même code : " Le lieu des prestations de services est situé en France : 1° Lorsque le preneur est un assujetti agissant en tant que tel et qu'il a en France : a) Le siège de son activité économique, (...) ". Aux termes de l'article 283 du même code : " 1. Aux termes de l'article 283 du même code : " 1. La taxe sur la valeur ajoutée doit être acquittée par les personnes qui réalisent les opérations imposables, sous réserve des cas visés aux articles 275 à 277 A où le versement de la taxe peut être suspendu. (...). 2. Lorsque les prestations mentionnées au 1° de l'article 259 sont fournies par un assujetti qui n'est pas établi en France, la taxe doit être acquittée par le preneur. (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions que lorsque le lieu des prestations de services se trouve en France parce qu'elles sont fournies à des assujettis remplissant les conditions définies à l'article 259 du code général des impôts, le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée afférente est le prestataire qui les fournit s'il est lui-même établi en France. Doit être regardé comme tel le prestataire qui a en France un établissement stable depuis lequel les prestations sont fournies et qui présente un degré suffisant de permanence et une structure apte, du point de vue de l'équipement humain et technique, à rendre possibles, de manière autonome, les prestations de services considérées. Dès lors que celles-ci peuvent être rattachées à un tel établissement, il n'y a pas lieu de rechercher si ce rattachement est fiscalement plus rationnel qu'un rattachement au siège de l'activité économique du prestataire.

5. D'une part, une vérification de comptabilité de la société Technical Systems SRO a été opérée entre le 4 février 2015 et le 25 mai 2016 au domicile du gérant de cette société situé à Lormont en Gironde et une demande d'assistance administrative a été adressée aux autorités administratives slovaques le 19 mars 2015 sur le fondement de l'article 28 de la convention fiscale entre la France et la Tchécoslovaquie signée le 1er juin 1973 à laquelle les autorités slovaques ont répondu le 31 décembre 2015. Les renseignements que l'administration a recueillis à l'occasion de cette opération ont révélé que cette société travaille depuis 2010 sur le territoire français pour des entreprises françaises dans le cadre de contrats de sous-traitance, de sorte qu'entre 2010 et 2013, la part du chiffre d'affaires de l'entreprise réalisé en France était supérieure à 98%. Il en ressort également que le gérant de la société requérante et sa compagne, directrice administrative et commerciale de la société, résidaient ensemble au cours de la période vérifiée à une adresse située à Lormont en Gironde, depuis laquelle étaient rédigés en français les devis, contrats et factures de cette entreprise. Il résulte également de l'instruction et notamment des indications non utilement contredites sur ces points de la proposition de rectification du 30 mai 2016, que selon les statuts de la société, l'organe statutaire de la société est son gérant, seul habilité à agir et à signer des documents au nom de la société de manière autonome, que l'activité de pose de panneaux photovoltaïques en France ne nécessitait aucune structure en Slovaquie, que les entreprises françaises pour le compte desquelles travaillait la société requérante fournissaient sur place l'essentiel des matériaux, que la gestion administrative et commerciale de la société s'exerçait à partir du domicile personnel de M. A... situé à Lormont, que ce dernier signait tous les contrats pour lesquels il s'engageait au nom de la société et qu'en sa qualité de dirigeant de la société, il a exercé de manière permanente sur l'intégralité de la procédure vérifiée, ses pouvoirs de direction depuis la France, et en particulier depuis son adresse personnelle à Lormont. Par ailleurs, il résulte également de l'instruction que la directrice administrative et commerciale, qui parle couramment le français, était l'interlocutrice des clients de l'entreprise, s'occupait du suivi des documents contractuels, et organisait également l'intervention, le détachement et l'hébergement de salariés slovaques détachés pour réaliser des prestations en France. Les éléments produits par la société requérante concernant la situation personnelle de son gérant et ses intérêts en Slovaquie ne suffisent pas à contredire les affirmations de l'administration fiscale qui ressortent des opérations de vérification, d'autant que le ministre des finances slovaque indique, dans un courrier du 10 mars 2020 adressé à son homologue français, que le gérant de la société requérante a le centre de ses intérêts économiques en France. Dans ces conditions, et alors même que le siège social et le compte bancaire de l'entreprise ont été fixés en Slovaquie, pays dans lequel réside son associé unique et se tiennent ses assemblées générales, que les déclarations fiscales de la société ont été déposées en Slovaquie au titre des exercices 2008 à 2013, que la société fournissait la main d'œuvre d'origine slovaque et aurait acquitté un impôt slovaque sur les sociétés, la société Technical Systems SRO doit être regardée comme disposant d'un établissement stable situé en France présentant un degré suffisant de permanence et une structure apte, du point de vue de l'équipement humain et technique, à rendre possibles, de manière autonome, les prestations de services considérées.

6. D'autre part, il est constant que les entreprises pour le compte desquelles la société requérante a travaillé en France entre 2010 et 2013 ont la qualité de preneur assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ayant le siège de leur activité économique en France au sens du 1° de l'article 289 du code général des impôts. Par ailleurs, il résulte du point précédent que le prestataire, à savoir la société requérante, est établie en France. Il en résulte que la société requérante était redevable de la taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2010 à 2013.

7. Il résulte de ce qui a été dit aux points 3 à 6 que c'est à bon droit que l'administration fiscale a estimé que la société Technical Systems SRO était redevable de la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2013.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la société Technical Systems SRO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Technical Systems SRO est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Technical Systems SRO et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.

Délibéré après l'audience du 24 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Sébastien Ellie, premier conseiller,

Mme Edwige Michaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 novembre 2023.

La rapporteure,

Edwige MichaudLa présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX02701


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02701
Date de la décision : 21/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Edwige MICHAUD
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : HASENOHRLOVA-SILVAIN

Origine de la décision
Date de l'import : 25/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-11-21;21bx02701 ?
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