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09/11/2023 | FRANCE | N°21BX02548

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 09 novembre 2023, 21BX02548


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 20 mars 2019 par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 24 octobre 2018, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1902131 du 4 mai 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 j

uin 2021, Mme B..., représentée par la SCP Denizeau, Gaborit, Takhedmit et associés, demande ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 20 mars 2019 par laquelle le directeur général du centre hospitalier universitaire (CHU) de Poitiers l'a placée en congé de maladie ordinaire à compter du 24 octobre 2018, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 1902131 du 4 mai 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 14 juin 2021, Mme B..., représentée par la SCP Denizeau, Gaborit, Takhedmit et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 4 mai 2021 ;

2°) d'annuler la décision du directeur général du CHU de Poitiers du 20 mars 2019, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au CHU de Poitiers de la placer en congé de longue maladie à compter du 24 octobre 2018 et de régulariser sa situation financière, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du CHU de Poitiers la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision du 20 mars 2019 est insuffisamment motivée en ce qu'elle n'était pas accompagnée de l'avis du comité médical alors même que l'autorité décisionnaire s'en est remise à cet avis ;

- sa situation relevait d'un congé de longue maladie puisque toutes les conditions prévues par les dispositions textuelles étaient remplies, et elle ne pouvait être, pour cette raison, placée en congé de maladie ordinaire ; elle était dans l'incapacité d'exercer ses fonctions, ce qui n'est pas contesté ; elle bénéficie de soins prolongés contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, et sa maladie présente un caractère invalidant et grave, avec un taux d'incapacité de 20 % et, s'agissant de la seule maladie professionnelle et sans tenir compte de la lombarthrose, des souffrances endurées évaluées à 3 sur 7, un déficit fonctionnel permanent de 10 % et un besoin d'assistance par une tierce personne de trois heures par semaine.

Par un mémoire en défense enregistré le 1er juillet 2022, le CHU de Poitiers, représenté par la SCP KPL avocats, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la requérante de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la décision plaçant Mme B... en congé de maladie ordinaire a implicitement rejeté la demande de congé de longue maladie ; en l'absence de demande de communication des motifs de cette décision implicite, le moyen tiré de l'absence de motivation doit être écarté ;

- la maladie de Mme B... ne nécessite pas une prise en charge médicale et des traitements prolongés et ne présente pas un caractère invalidant ; d'ailleurs, à l'appui de sa demande, l'intéressée n'a produit qu'un certificat médical peu circonstancié.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le décret n° 88-836 du 19 avril 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Olivier Cotte,

- les conclusions de Mme Charlotte Isoard, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., agent des services hospitaliers qualifié depuis 1998, titularisée depuis janvier 2007 au centre hospitalier universitaire de Poitiers, a présenté en 2006 une pathologie du rachis lombaire se traduisant par une hernie discale L4-L5 et L5-S1, pour laquelle elle a été opérée en octobre 2007. Cette maladie a été reconnue imputable au service et ses arrêts de travail du 18 octobre 2006 au 21 septembre 2008 ont été pris en charge au titre de la maladie professionnelle. En 2017, Mme B... s'est à nouveau plainte de douleurs du rachis lombaire et les examens d'imagerie ont mis en évidence une discopathie dégénérative au niveau de la zone opérée. Le directeur général du CHU a reconnu imputables au service, au titre d'une rechute de la maladie de 2007, les arrêts de travail du 25 mai au 27 juillet 2018 et du 27 août au 23 octobre 2018, par une décision du 11 janvier 2019. Par une décision du même jour, devenue définitive, il a placé Mme B... en congé de maladie ordinaire à compter du 24 octobre 2018, date retenue pour la consolidation de l'état de santé de l'intéressée. Le 28 janvier 2019, Mme B... a demandé à bénéficier d'un congé de longue maladie. Par une décision du 20 mars 2019 confirmant le maintien de Mme B... en congé de maladie ordinaire à compter du 24 octobre 2018, le directeur général du CHU a rejeté sa demande. Le recours gracieux présenté par Mme B... a fait l'objet d'une décision implicite de rejet. Saisi par l'intéressée, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de ces deux décisions, par un jugement du 4 mai 2021, dont Mme B... relève appel.

2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

3. La décision en litige vise la loi du 9 janvier 1986 et le décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière, ainsi que la demande présentée par Mme B... le 28 janvier 2019. Elle fait également référence à l'avis défavorable rendu le 7 mars 2019 par le comité médical départemental, en indiquant que la condition tenant au facteur de gravité de la maladie n'était pas remplie et que les arrêts de travail relevaient de la maladie ordinaire. La décision comporte ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, et alors même que l'avis du comité médical n'était pas joint, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision doit être écarté.

4. Aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction alors applicable : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l' article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / (...) / Les dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas du 2° du présent article sont applicables aux congés de longue maladie (...) ". Aux termes de l'article 18 du décret du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction alors applicable : " Pour l'application de l' article 41 (3°) de la loi du 9 janvier 1986 susvisée, le ministre chargé de la santé établit par arrêté, après avis du comité médical supérieur, une liste indicative de maladies qui, si elles répondent en outre aux critères définis par ces dispositions législatives, peuvent ouvrir droit à congé de longue maladie après avis du comité médical. / Toutefois le bénéfice d'un congé de longue maladie demandé pour une affection qui n'est pas inscrite sur la liste prévue à l'alinéa précédent peut être accordé après l'avis du comité médical compétent. ". L'arrêté du 1er août 1988 relatif à la liste indicative des maladies pouvant ouvrir droit à un congé de longue maladie pour les agents de la fonction publique hospitalière renvoie à l'arrêté du 14 mars 1986 relatif à la liste des maladies donnant droit à l'octroi des congés de longue maladie, pour les agents de l'Etat.

5. D'une part, la lombosciatique dont souffre Mme B... ne figure pas sur la liste indicative des maladies donnant droit à l'octroi d'un congé de longue maladie. D'autre part, le comité médical départemental a rendu, le 7 mars 2019, un avis défavorable à l'octroi d'un tel congé en raison de l'absence de facteur de gravité. S'il est établi que Mme B... n'est pas en mesure de reprendre ses fonctions d'agent des services hospitaliers et qu'elle est atteinte d'un déficit fonctionnel permanent de 20 %, la moitié en lien avec la maladie professionnelle déclarée en 2007, l'autre moitié due à une lombarthrose évoluant pour son propre compte, il ressort également des pièces du dossier, et notamment du rapport d'expertise établi le 24 octobre 2018 par un rhumatologue, qu'elle n'est pas inapte à toute fonction en milieu hospitalier. Dans ces conditions, faute de présenter un caractère invalidant et de gravité confirmée, la pathologie lombaire dont est atteinte Mme B... ne remplit pas les conditions, prévues au 3° de l'article 41 précité de la loi du 9 janvier 1986, pour ouvrir droit à un congé de longue maladie, et le directeur général du CHU de Poitiers pouvait légalement rejeter la demande de l'intéressée.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande d'annulation de la décision du directeur du CHU de Poitiers du 20 mars 2019, ainsi que la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CHU de Poitiers, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme B... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de Mme B... la somme que le CHU de Poitiers demande au même titre.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le CHU de Poitiers sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au centre hospitalier universitaire de Poitiers.

Délibéré après l'audience du 10 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente assesseure,

M. Olivier Cotte, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 novembre 2023.

Le rapporteur,

Olivier Cotte

La présidente,

Catherine Girault

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21BX02548


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02548
Date de la décision : 09/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Olivier COTTE
Rapporteur public ?: Mme ISOARD
Avocat(s) : DENIZEAU GABORIT TAKHEDMIT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-11-09;21bx02548 ?
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