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02/11/2023 | FRANCE | N°23BX01172

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 02 novembre 2023, 23BX01172


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 25 août 2022 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra, le cas échéant, être renvoyé.

Par un jugement n° 2202676 du 30 mars 2023, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une

requête enregistrée le 29 avril 2023, M. B..., représenté par Me Cottet, demande à la cour :

1°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 25 août 2022 par lequel le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra, le cas échéant, être renvoyé.

Par un jugement n° 2202676 du 30 mars 2023, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 29 avril 2023, M. B..., représenté par Me Cottet, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 30 mars 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Vienne du 25 août 2022 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Vienne de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois sous astreinte de 200 euros par jour de retard et de lui délivrer, dans l'attente, un titre de séjour provisoire ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 200 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision de refus de séjour a été édictée par une autorité incompétente ;

- cette décision est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle a été prise au terme d'une procédure irrégulière faute de consultation préalable de la commission du titre de séjour et alors qu'il remplit les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour de plein droit sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est également entachée d'une " erreur de fait " en ce qu'elle retient qu'il ne justifie pas de liens familiaux suffisamment intenses, anciens et stables ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est enfin entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle et omet de prendre en considération l'intérêt de son enfant à naître ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français a été édictée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi a été édictée par une autorité incompétente ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour.

Par ordonnance du 13 juin 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 1er septembre 2023.

Un mémoire présenté par le préfet de la Vienne a été enregistré le 20 septembre 2023.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 27 juillet 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Kolia Gallier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant dominicain né le 23 mars 1993, indique être entré en France le 17 juin 2015. Il a sollicité, auprès des services de la préfecture de la Vienne, son admission au séjour en se prévalant de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 25 août 2022, le préfet de la Vienne a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra, le cas échéant, être reconduit. M. B... relève appel du jugement du 30 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les moyens communs aux décisions attaquées :

2. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, le préfet de la Vienne a donné délégation à la signataire de l'arrêté litigieux, Mme Pascale Pin, secrétaire générale de la préfecture de la Vienne, par un arrêté du 12 juillet 2022 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le lendemain, pour signer tous actes, arrêtés et décisions relevant des attributions de l'Etat dans le département de la Vienne notamment les décisions entrant dans le champ d'application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté litigieux doit, par suite, être écarté.

3. L'arrêté contesté vise les textes dont il fait application, notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Chacune des décisions litigieuses comportent également les considérations de fait, relatives à la vie privée et familiale de M. B..., sur lesquelles elles se fondent. L'arrêté est, par suite, suffisamment motivé.

Sur les moyens propres à la décision de refus de séjour :

4. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. "

5. M. B... expose être entré en France le 17 juin 2015 pour rejoindre sa mère et sa sœur dont il justifie, pour la première, de la régularité du séjour en France par la production d'une carte de résident valable jusqu'en 2028 et, pour la seconde, de la nationalité française par la production de sa carte nationale d'identité. Il indique, par ailleurs, vivre depuis 2019 avec une compatriote en situation régulière en France dont il attendait un enfant à la date du refus de séjour attaqué. Toutefois, il ne ressort des pièces du dossier aucun obstacle à ce que la cellule familiale de M. B... se reconstitue en République dominicaine dont sa compagne est également originaire. En particulier, si le requérant soutient que sa compagne a eu plusieurs enfants d'une précédente relation, dont l'un est français, il n'en justifie par aucun élément et ne soutient ni n'établit que cet enfant entretiendrait avec son parent français des relations faisant obstacle à ce qu'il suive sa mère dans son pays d'origine. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. B..., qui ne justifie que d'une inscription dans un centre de formation des apprentis pour l'année 2018-2019 et d'un contrat d'apprentissage auquel il a été mis un terme durant la période d'essai au mois d'octobre 2018, ou sa compagne exercerait en France une activité professionnelle ou associative de nature à consolider leur insertion dans la société française. Enfin, ainsi que le relève la décision de refus de séjour attaquée, le requérant est père d'un enfant mineur qui vit en République dominicaine et il n'établit pas l'intensité des relations qu'il entretient avec sa mère et sa sœur, qui vivent à Rennes. Dans ces conditions, le refus de séjour opposé à M. B... n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris. Il ne méconnaît pas, par suite, les dispositions et stipulations précitées et le moyen tiré de " l'erreur de fait " qu'aurait commise le préfet en retenant que l'intéressé ne justifie pas de liens familiaux suffisamment intenses, anciens et stables sur le territoire national doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le refus de séjour contesté n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.

6. Aux termes de l'article L. 432-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour qui est saisie pour avis par l'autorité administrative : / 1° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer ou de renouveler la carte de séjour temporaire prévue aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-13, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21, L. 423-22, L. 423-23, L. 425-9 ou L. 426-5 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; / 2° Lorsqu'elle envisage de refuser de délivrer la carte de résident prévue aux articles L. 423-11, L. 423-12, L. 424-1, L. 424-3, L. 424-13, L. 424-21, L. 425-3, L. 426-1, L. 426-2, L. 426-3, L. 426-6, L. 426-7 ou L. 426-10 à un étranger qui en remplit effectivement les conditions de délivrance ; / 3° Lorsqu'elle envisage de retirer le titre de séjour dans le cas prévu à l'article L. 423-19 ; / 4° Dans le cas prévu à l'article L. 435-1. " Le préfet n'est toutefois tenu de saisir la commission que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement les conditions mentionnées à ces articles, et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent.

7. Il résulte de ce qui précède que M. B... ne remplit pas les conditions pour bénéficier de la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions dont il se prévaut. Dès lors, le préfet de la Vienne n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant de lui opposer un refus de délivrance de titre de séjour.

8. Aux termes de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

9. La décision refusant le séjour à M. B... n'a ni pour objet ni pour effet de le séparer de sa fille, qui est née trois mois et demi après l'arrêté du préfet de la Vienne. Le requérant ne saurait, en outre, reprocher au préfet de ne pas avoir pris en considération l'intérêt de son enfant à naître dont il ressort des pièces du dossier qu'il ne l'avait pas informé. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées ne peut, par suite, qu'être écarté.

Sur les moyens propres à la décision d'éloignement :

10. Aucun des moyens dirigés contre la décision de refus de séjour n'ayant été accueilli, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté.

11. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 et alors que M. B... ne se prévaut d'aucune circonstance qui ferait obstacle à ce que sa cellule familiale se reconstitue en République dominicaine où il a un enfant mineur, les moyens tirés de ce que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle doivent être écartés.

Sur le moyen propre à la décision fixant le pays de destination :

12. Les moyens dirigés contre le refus de séjour ayant été écartés, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté.

13. Il résulte de ce tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Sa requête doit, par suite, être rejetée en toutes ses conclusions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 2 octobre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Jean-Claude Pauziès, président,

Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Kolia Gallier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 novembre 2023.

La rapporteure,

Kolia GallierLe président,

Jean-Claude Pauziès

La greffière,

Stéphanie Larrue

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 23BX01172 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01172
Date de la décision : 02/11/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PAUZIÈS
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL CERA
Avocat(s) : COTTET

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-11-02;23bx01172 ?
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