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26/10/2023 | FRANCE | N°22BX02922

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 26 octobre 2023, 22BX02922


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... C... G... a demandé au tribunal administratif de la Guyane, d'une part d'annuler l'arrêté du 14 septembre 2020 par lequel le préfet de la Guyane lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Par un jugement n° 2001130 en date du 29 septembre 2022, le tribunal administratif de la Guyane a rej

eté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... C... G... a demandé au tribunal administratif de la Guyane, d'une part d'annuler l'arrêté du 14 septembre 2020 par lequel le préfet de la Guyane lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer un titre de séjour, ou à défaut de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.

Par un jugement n° 2001130 en date du 29 septembre 2022, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 novembre 2022, Mme F... C... G..., représentée par Me Frédéric Biais, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de la Guyane du

29 septembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 septembre 2020 du préfet de la Guyane ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou subsidiairement de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- le jugement s'est abstenu de répondre au moyen tiré de la compétence liée du préfet au regard des dispositions de l'article L. 313-11, 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté :

- le signataire de l'acte était incompétent ;

- l'arrêté est entaché d'une insuffisance de motivation au regard des articles L. 211-1 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration, alors qu'il ne précise pas que ses enfants sont de nationalité française et qu'elle est en relation de concubinage avec M. B... ;

- l'arrêté méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors que les conditions de délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale " étaient réunies ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur d'appréciation de sa situation personnelle et familiale au regard des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors qu'elle vit en relation de concubinage avec M. B... et qu'elle est intégrée sur le territoire français.

Par ordonnance du 14 mars 2023, la clôture d'instruction a été fixée au 14 avril 2023 à 12h00 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les observations de Me Biais, représentant Mme C... G....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... G..., ressortissante dominicaine née le 29 septembre 1994, est entrée en France en 2010. Au cours de l'année 2017, elle a déposé une demande de titre de séjour auprès du préfet de la Guyane, qui a été implicitement rejetée. Par un jugement du 31 décembre 2019, le tribunal administratif de la Guyane a annulé la décision implicite de rejet, dont le préfet n'avait pas communiqué les motifs, et a enjoint au préfet de la Guyane de réexaminer sa demande. Le 3 février 2020, elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en invoquant les deux enfants français nés en 2016 et 2019 de son union avec un ressortissant français. Par un arrêté du 14 septembre 2020, le préfet de la Guyane a refusé de lui délivrer un titre de séjour. Mme C... G... relève appel du jugement n° 2001130 du 29 septembre 2022 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Pour rejeter la demande de Mme C... G..., le tribunal administratif de la Guyane a estimé qu'elle ne pouvait utilement invoquer les dispositions du 7° de

l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle a présenté sa demande de titre de séjour sur le fondement du 6 ° de cet article. Toutefois, il résulte tant des arguments présentés à l'appui d'un défaut de motivation de la décision attaquée, à laquelle il était reproché de s'être abstenue de préciser la nationalité française des enfants et la vie maritale alléguée, que des dispositions citées dans le mémoire complémentaire présenté devant le tribunal, que la requérante entendait se prévaloir de son droit au séjour en qualité de parent d'enfant français, lequel était prévu non par le 7° de l'article L.313-11, invoqué à tort, mais bien par le 6° de ce même article, sur le fondement duquel elle avait présenté sa demande. En s'abstenant de se prononcer sur le bien-fondé du rejet de sa demande en qualité de mère d'enfants français, le tribunal a entaché son jugement d'une irrégularité. Le jugement doit donc être annulé.

3. Il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 14 septembre 2020 relatif au refus de délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale ".

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du préfet de la Guyane :

4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté litigieux, portant seulement refus de séjour, a été signé par M. A... D..., chef du bureau de l'éloignement et du contentieux, qui, au regard des visas, aurait reçu délégation de signature. Toutefois, aucun élément du dossier ne permet d'apprécier ni la date, ni l'étendue de cette délégation, alors que la décision attaquée ne comporte aucun éloignement. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'arrêté du 14 septembre 2020 doit être accueilli.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable, " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant. ".

6. Il ressort des pièces du dossier que, pour motiver sa décision de refus de délivrance du titre de séjour sollicité, le préfet de la Guyane, qui reconnait que M. B..., de nationalité française, a reconnu dans les jours suivant leur naissance les deux enfants de la requérante nés en 2016 et 2019, indique aussi que Mme C... G... ne justifie pas d'une communauté de vie avec lui, qu'elle se déclare sans emploi, qu'elle ne démontre pas que le père des enfants contribue à leur entretien et à leur éducation, et qu'elle n'a entrepris aucune démarche visant à obtenir une pension alimentaire. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. B... atteste d'une vie commune avec l'intéressée depuis janvier 2014 et avec leurs enfants, laquelle est corroborée par les parents de celui-ci et divers témoins, dont les attestations ne sauraient être écartées pour la seule raison qu'elles sont postérieures à la décision attaquée. Dans ces conditions, la participation du père à l'éducation et l'entretien des deux enfants est établie et les conditions prévues par les dispositions précitées étant remplies, le refus de titre de séjour doit être annulé.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... G... est fondée à demander l'annulation du refus de titre de séjour. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'enjoindre au préfet de lui délivrer le titre sollicité, dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt.

8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros à verser à Mme C... G... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de la Guyane n°2001130 du

29 septembre 2022 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 14 septembre 2020 du préfet de la Guyane est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Guyane de délivrer à Mme C... G... une carte de séjour " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Mme C... G... une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F... C... G..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de la Guyane.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

M. Olivier Cotte, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 26 octobre 2023

La présidente-assesseure,

Anne Meyer

La présidente, rapporteure

Catherine E...Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22BX02922 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX02922
Date de la décision : 26/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Catherine GIRAULT
Rapporteur public ?: Mme ISOARD
Avocat(s) : SELARL BIAIS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-10-26;22bx02922 ?
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