Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 4 septembre 2019 par lequel le maire de Pouillon a sursis à statuer sur sa demande de permis de construire une maison individuelle sur la parcelle cadastrée section AL n° 297, route d'Estibeaux.
Par un jugement n°1901767 du 30 avril 2021, le tribunal administratif de Pau a annulé l'arrêté du 4 septembre 2019 et enjoint à la commune de Pouillon de réexaminer la demande de permis de construire de M. B... dans un délai de deux mois suivant la notification du jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 26 juillet 2021, la commune de Pouillon, représentée par l'AARPI Sphère Avocats, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 30 avril 2021 ;
2°) de mettre à la charge de M. B... la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- un sursis à statuer sur une demande de permis de construire peut être décidé même si un certificat d'urbanisme positif a été précédemment délivré ;
- dans le cadre de l'élaboration du plan local d'urbanisme de la commune, il est envisagé de classer le terrain de M. B... en zone agricole, de sorte que la réalisation d'une maison sur ce terrain compromettrait l'exécution du futur plan.
Par un mémoire enregistré le 7 novembre 2022, M. B..., représenté par Me Lonné, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la commune de Pouillon en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés sont infondés.
Par une ordonnance du 7 janvier 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 16 janvier 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Sébastien Ellie ;
- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public.
Une note en délibéré présentée par le cabinet SELARL BassetetMacagno pour la commune de Pouillon a été enregistrée le 10 octobre 2023.
Une note en délibéré présentée par Me Lonné pour M. B... a été enregistrée le 11 octobre 2023.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a déposé le 3 avril 2019 une demande de permis de construire pour la construction d'une maison individuelle d'une surface de 92 m² sur la parcelle cadastrée section AL n° 297, route d'Estibeaux, sur le territoire de la commune de Pouillon, terrain pour lequel il avait obtenu un certificat d'urbanisme tacite le 10 janvier 2018. Par un arrêté du 4 juin 2019, le maire de Pouillon a sursis à statuer sur cette demande, au motif qu'un plan local d'urbanisme intercommunal était en cours d'élaboration. La commune de Pouillon relève appel du jugement du 30 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Pau, saisi par M. B... de la légalité de cette décision portant sursis à statuer, a annulé l'arrêté du 4 septembre 2019 et enjoint au maire de la commune d'examiner la demande de permis de construire déposée par M. B... dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
2. Aux termes de l'article L. 600-4-1du code de l'urbanisme : " Lorsqu'elle annule pour excès de pouvoir un acte intervenu en matière d'urbanisme ou en ordonne la suspension, la juridiction administrative se prononce sur l'ensemble des moyens de la requête qu'elle estime susceptibles de fonder l'annulation ou la suspension, en l'état du dossier ".
3. Pour l'application de ces dispositions, il appartient au juge d'appel, saisi d'un jugement par lequel un tribunal administratif a prononcé l'annulation d'un acte intervenu en matière d'urbanisme, de se prononcer sur le bien-fondé de tous les moyens d'annulation retenus au soutien de leur décision par les premiers juges et d'apprécier si l'un au moins de ces moyens justifie la solution d'annulation. Dans ce cas, le juge d'appel n'a pas à examiner les autres moyens de première instance. Dans le cas où il estime en revanche qu'aucun des moyens retenus par le tribunal administratif n'est fondé, le juge d'appel, saisi par l'effet dévolutif des autres moyens de première instance, examine ces moyens. Il lui appartient de les écarter si aucun d'entre eux n'est fondé et, à l'inverse, de se prononcer, si un ou plusieurs d'entre eux lui paraissent fondés, sur l'ensemble de ceux qu'il estime de nature à confirmer, par d'autres motifs, l'annulation prononcée par les premiers juges.
4. Aux termes de l'alinéa 3 de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable ".
5. Il résulte de ces dispositions qu'un sursis à statuer ne peut être opposé à une demande de permis de construire qu'en vertu d'orientations ou de règles que le futur plan local d'urbanisme pourrait légalement prévoir, et à la condition que la construction, l'installation ou l'opération envisagée soit de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse son exécution.
6. Pour annuler la décision portant sursis à statuer sur la demande de permis de construire déposée par M. B... sur une parcelle située en zone naturelle habitée (Nh) dans le plan local d'urbanisme en vigueur, le tribunal administratif de Pau a considéré que le projet de M. B... n'était pas de nature à compromettre l'exécution du futur plan, au regard de sa faible ampleur et de sa contiguïté avec des parcelles construites. Toutefois, la réalisation d'une construction nouvelle de 92 m² dans un secteur où l'urbanisation est diffuse, éloigné de la zone urbanisée de la commune et dont le classement en zone agricole est envisagé afin de protéger les espaces naturels, est de nature à compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme. Dans ces conditions, compte tenu de la nature du projet, de la situation de la parcelle, au milieu d'une zone à vocation agricole et naturelle que les auteurs du plan local d'urbanisme ont entendu préserver, et du parti d'urbanisme envisagé, le maire de Pouillon, en opposant un sursis à statuer à la demande de M. B... au motif qu'elle était de nature à compromettre l'exécution du futur plan local d'urbanisme, n'a pas entaché sa décision d'une erreur d'appréciation. C'est donc à tort que les premiers juges ont annulé l'arrêté en litige au motif qu'il était entaché d'une telle erreur.
7. Il y a lieu d'examiner, au titre de l'effet dévolutif de l'appel, l'autre moyen soulevé par M. B... à l'encontre de la décision de sursis à statuer du 4 septembre 2019.
8. Aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date de délivrance du certificat d'urbanisme du 10 janvier 2018 : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. / Lorsqu'une demande d'autorisation ou une déclaration préalable est déposée dans le délai de dix-huit mois à compter de la délivrance d'un certificat d'urbanisme, les dispositions d'urbanisme, le régime des taxes et participations d'urbanisme ainsi que les limitations administratives au droit de propriété tels qu'ils existaient à la date du certificat ne peuvent être remis en cause à l'exception des dispositions qui ont pour objet la préservation de la sécurité ou de la salubrité publique. / Lorsque le projet est soumis à avis ou accord d'un service de l'État, les certificats d'urbanisme le mentionnent expressément. Il en est de même lorsqu'un sursis à statuer serait opposable à une déclaration préalable ou à une demande de permis (...) ". Il résulte par ailleurs des dispositions précitées de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme dans leur rédaction en vigueur à la date de délivrance du certificat d'urbanisme du 10 janvier 2018 qu'une décision de sursis à statuer sur une demande de permis de construire ne peut être prise que lorsque le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable a eu lieu.
9. Il résulte de la combinaison des articles L. 410-1 et L. 153-11 du code de l'urbanisme que tout certificat d'urbanisme délivré sur le fondement de l'article L. 410-1 a pour effet de garantir à son titulaire un droit à voir toute demande d'autorisation ou de déclaration préalable déposée dans le délai indiqué examinée au regard des règles d'urbanisme applicables à la date de la délivrance du certificat. Figure parmi ces règles la possibilité de se voir opposer un sursis à statuer à une déclaration préalable ou à une demande de permis, lorsque sont remplies, à la date de délivrance du certificat, les conditions énumérées à l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme.
10. Il ressort des pièces du dossier que la commune de Pouillon et la communauté de communes du Pays d'Orthe et Arrigans ont chacune débattu à deux reprises des orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable, les 13 avril 2017 et 29 juin 2017 puis le 22 octobre 2018 et le 6 novembre 2018 à la suite des observations des personnes publiques consultées. Si les orientations générales ont évolué entre les deux débats, le débat au sens des dispositions de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme doit être regardé comme ayant eu lieu le 29 juin 2017, date à laquelle le débat sur les orientations générales avait été clos tant devant le conseil municipal que devant le conseil communautaire. Dans ces conditions, à la date du certificat d'urbanisme du 10 janvier 2018, les conditions posées par l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme pour opposer un sursis à statuer à une demande ultérieure de permis de construire étaient réunies, le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement durable de la commune ayant eu lieu et le projet de M. B... étant susceptible de compromettre l'exécution du futur plan.
11. Il résulte de ce qui précède que la commune de Pouillon est fondée à soutenir que c'est à tort le tribunal administratif de Pau a annulé la décision du 4 septembre 2019 par laquelle le maire de Pouillon a sursis à statuer sur la demande de permis de construire présentée par M. B....
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Pouillon, qui n'a pas la qualité de partie perdante, la somme que demande M. B... au titre des frais engagés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme de 1 500 euros à verser à la commune de Pouillon en application des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 30 avril 2021 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Pau est rejetée.
Article 3 : M. B... versera la somme de 1 500 euros à la commune de Pouillon en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Pouillon et à M. A... B....
Délibéré après l'audience du 26 septembre 2023 où siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
M. Sébastien Ellie, premier conseiller,
Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2023.
Le rapporteur,
Sébastien Ellie
La présidente,
Elisabeth Jayat
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne à la préfète des Landes en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°21BX03264