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10/10/2023 | FRANCE | N°23BX01286

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 10 octobre 2023, 23BX01286


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2022 par lequel le préfet de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de la vienne de lui délivrer un titre de séjour.

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2022 par lequel le préfet

de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2022 par lequel le préfet de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de la vienne de lui délivrer un titre de séjour.

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 22 septembre 2022 par lequel le préfet de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination et d'enjoindre au préfet de la vienne de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 2202857, 2202858 du 11 avril 2023, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté du l'arrêté du 22 septembre 2022 par lequel le préfet de la Vienne a refusé à Mme D... et M. A... la délivrance d'un titre de séjour et a enjoint au préfet de la Vienne de procéder au réexamen de leur demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 23BX01286 le 11 mai 2023, le préfet de la Vienne demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2202857 ; 2202858 du 11 avril 2023 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme D... devant le tribunal administratif de Poitiers.

Il soutient que :

- c'est à tort que le tribunal administratif de Poitiers a retenu le motif d'annulation tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant dès lors que la demande de titre de séjour présentée ne l'a pas été en qualité d'étudiant ; la mention d'un refus de titre de séjour portant la mention étudiant est une simple erreur de plume sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ;

- de fait, l'arrêté attaqué n'a pas pour effet de séparer l'enfant de ses parents dès lors que ces derniers font tous deux l'objet de mesures d'éloignement et la circonstance qu'ils soient de nationalité différente n'est pas de nature à rendre impossible la reconstitution de la cellule familiale avec leur enfant dans l'un ou l'autre des pays.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juin 2023, Mme D..., représentée par Me Zoro, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge du préfet de la Vienne le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle fait valoir que les moyens invoqués par le préfet de la Vienne ne sont pas fondés.

Mme D... a obtenu le maintien du bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 24 août 2023.

II. Par une requête enregistrée sous le n° 23BX01287 le 11 mai 2023, le préfet de la Vienne demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2202857 ; 2202858 du 11 avril 2023 du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Poitiers.

Il soutient que :

- la demande de titre de séjour présentée par M. A... ne l'a pas été en qualité d'étudiant ; la mention d'un refus de titre de séjour portant la mention étudiant est une simple erreur de plume sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué ; les dispositions relatives au titre de séjour étudiant, et les conditions de délivrance de ce titre n'ont pas été étudiées ; les ressources de l'intéressé n'ont été étudiées que sous l'angle de l'insertion dans la société française dans le cadre du titre de séjour " vie privée et familiale " ; en outre, le requérant n'a pas formé de demande de titre de séjour en qualité étudiant mais a sollicité un changement de statut.

M. A... a obtenu le maintien du bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 24 août 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Pauline Reynaud.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant ivoirien né le 19 décembre 1993, est entré en France le 8 septembre 2015 sous couvert d'un visa de long séjour délivré en qualité d'étudiant. L'intéressé a obtenu la délivrance d'un titre de séjour portant la mention étudiant, régulièrement renouvelé jusqu'en mars 2022. M. A... a sollicité le 9 novembre 2021 la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Mme D..., ressortissante gabonaise née le 25 juin 1997, est entrée en France le 21 octobre 2015 sous couvert d'un visa de long séjour délivré en qualité d'étudiante. L'intéressée a bénéficié d'un titre de séjour portant la mention étudiant, renouvelé jusqu'au 24 octobre 2020. Mme D... a sollicité, le 12 octobre 2021, la délivrance d'un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". Par deux arrêtés du 22 septembre 2022, le préfet de la Vienne a rejeté les demandes formées par M. A... et Mme D..., leur a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler ces arrêtés. Par un jugement n° 2202857-2202858, du 11 avril 2023, le tribunal administratif de Poitiers a annulé les arrêtés du 22 septembre 2022 et enjoint au préfet de la Vienne de procéder au réexamen de leur demande de titre de séjour. Le préfet de la Vienne relève appel de ce jugement.

2. Les requêtes présentées par le préfet de la Vienne concernent la situation de M. A... et de Mme D..., couple de ressortissants étrangers, et présentent à juger des questions connexes. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même jugement

Sur le bien-fondé des motifs d'annulation retenus par le tribunal :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour en qualité d'étudiant de M. A... :

3. Aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "étudiant" d'une durée inférieure ou égale à un an. / En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sous réserve d'une entrée régulière en France et sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ".

4. D'une part, il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Vienne a expressément rejeté, à l'article 1er de la décision du 22 septembre 2022, la demande de délivrance d'un titre de séjour de M. A... en qualité d'étudiant. Le préfet a également pris en compte, dans la décision attaquée, les éléments relatifs aux études suivies par M. A... ainsi qu'aux moyens d'existence de l'intéressé, ainsi que le prévoient les dispositions précitées de l'article L. 422-1. Dans ces conditions, nonobstant la circonstance que M. A... a sollicité un changement de statut et la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", il ne ressort pas des pièces du dossier que le rejet de la demande de titre de séjour en qualité d'étudiant résulterait d'une erreur de plume. D'autre part, pour rejeter cette demande de titre de séjour en qualité d'étudiant, le préfet de la Vienne mentionne l'inscription de M. A... en doctorat à l'université de Poitiers pour l'année 2022/2023 mais indique que les pièces versées au dossier attestent seulement d'une activité professionnelle sur les mois de septembre, octobre 2021 et février, mars 2022, et que M. A... ne justifie ainsi pas disposer de ressources stables et régulières ni de moyens d'existence suffisants. Il ressort toutefois des pièces du dossier que M. A... justifie de fiches de paie jusqu'en juin 2022, puis du versement de l'aide au retour à l'emploi en août et septembre 2022. Le préfet de la Vienne a ainsi commis une erreur de fait, laquelle a eu une incidence sur le sens de la décision attaquée. Par suite, le préfet de la Vienne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé la décision du 22 septembre 2022 portant refus de titre de séjour en qualité d'étudiant pour ce motif, ainsi que, par voie de conséquence, l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

En ce qui concerne l'arrêté du 22 septembre 2022 pris à l'encontre de Mme D... :

5. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que Mme D... et M. A... sont parents d'un enfant, B..., né le 24 mai 2021, résidant avec eux sur le territoire français. Dans ces conditions, compte tenu de ce qui a été dit au point 4, et de la circonstance que M. A... et Mme D... ne sont pas de la même nationalité, en prenant la décision attaquée, le préfet de la Vienne a méconnu les stipulations précitées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Dans ces conditions, la décision portant refus de titre de séjour doit être annulée, ainsi que, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination.

7. Il résulte de ce qui précède que le préfet de la Vienne n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté du 22 septembre 2022 pris à l'encontre de Mme D... et lui a enjoint de réexaminer leur situation.

Sur les frais liés au litige :

8. Mme D... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, leur avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Zoro, avocat de Mme D..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Zoro de la somme de 1 500 euros.

DECIDE :

Article 1er : Les requêtes du préfet de la Vienne sont rejetées.

Article 2 : L'Etat versera à Me Zoro, avocat de Mme D..., une somme de 1 500 euros au titre des dispositions combinées des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et des outre-mer, à M. C... A... et à Mme E....

Copie en sera adressée au préfet de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 19 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente de chambre,

Mme Bénédicte Martin, présidente assesseure,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 octobre 2023.

La rapporteure,

Pauline Reynaud La présidente,

Evelyne Balzamo, Le greffier,

Christophe Pelletier La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX01286, 23BX01287


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX01286
Date de la décision : 10/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Pauline REYNAUD
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : ZORO;ZORO;ZORO

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-10-10;23bx01286 ?
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