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05/10/2023 | FRANCE | N°22BX02997

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 05 octobre 2023, 22BX02997


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 27 juin 2022 par lequel la préfète de la Charente a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2201905 du 24 novembre 2022, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Rahm

ani, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 24 n...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 27 juin 2022 par lequel la préfète de la Charente a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 2201905 du 24 novembre 2022, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 6 décembre 2022, M. A..., représenté par Me Rahmani, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 24 novembre 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 27 juin 2022 de la préfète de la Charente ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Charente de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus de séjour a été édictée par une autorité incompétente ;

- cette décision est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle lui oppose une condition non prévue par l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni par aucun autre texte, de durée suffisante d'exercice d'une activité professionnelle,

- elle est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; d'une part, la préfète n'a pas apprécié la durée de son activité professionnelle en considération de son statut de demandeur d'asile et n'a pas tenu compte, à tort, de la promesse d'embauche produite à l'appui de sa demande ; d'autre part, il a rendu à la collectivité des services justifiant que lui soit délivré le titre sollicité ;

- la décision d'éloignement est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour.

La requête a été communiquée à la préfète de la Charente qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Kolia Gallier a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant malien né le 31 décembre 1990, indique être entré en France le 9 mai 2017 et a présenté une demande d'asile le 15 mai suivant. Cette demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 28 février 2018, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 4 septembre 2018. L'intéressé a sollicité, auprès des services de la préfecture de la Charente, son admission au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14, devenu l'article L. 435-1, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 27 juin 2022, la préfète de la Charente a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A... relève appel du jugement du 24 novembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Ainsi que l'ont retenu les premiers juges, la préfète de la Charente a donné délégation à la signataire de l'arrêté litigieux, Mme Nathalie Valleix, secrétaire générale de la préfecture de la Charente, par un arrêté du 22 avril 2022 régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture le même jour pour signer tous actes, arrêtés et décisions relevant des attributions de l'État dans le département de la Charente, notamment les décisions de refus de séjour et d'éloignement. La circonstance que cet arrêté de délégation, de nature réglementaire et qui a été régulièrement publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, n'ait pas été produit au dossier est sans incidence. Le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision de refus de séjour doit donc être écarté.

3. Aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. (...) ". En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifierait d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité professionnelle ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi. Il appartient, en effet, à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

4. M. A... se prévaut, d'une part, de services rendus à la collectivité et produit au soutien de ses écritures deux attestations de fonctionnaires de police affectés au commissariat de police d'Angoulême indiquant qu'il a spontanément apporté son concours à une opération de maintien de l'ordre et été à plusieurs reprises mis à contribution lors d'interventions sensibles dans un " quartier de reconquête républicaine ", ainsi que pour participer à des séances d'identification de suspects. Tous deux attestent de sa fiabilité lors de sa coopération à des enquêtes judiciaires, de son comportement exemplaire et de ses qualités morales. M. A... ajoute que son intégrité physique est menacée compte tenu de son identification par certains individus comme informateur des services de police mais cette indication n'est corroborée par aucune pièce du dossier. Les éléments dont se prévaut le requérant ne sont pas, à eux seuls, de nature à caractériser des considérations humanitaires ou un motif exceptionnel justifiant une admission exceptionnelle au séjour.

5. D'autre part, la préfète de la Charente, dont il ne ressort pas des termes de la décision litigieuse qu'elle n'aurait pas tenu compte de la qualité ponctuelle de demandeur d'asile de M. A..., a pu sans commettre d'erreur de droit retenir parmi d'autres éléments d'appréciation qu'il ne justifiait pas d'une ancienneté de travail suffisante pour prétendre à une admission exceptionnelle au séjour. À cet égard, l'intéressé justifie avoir exercé une activité d'agent de maintenance du 20 août 2018 au 13 janvier 2019 à raison de seize heures par mois et produit une promesse d'embauche en qualité d'agent de sécurité du 10 mai 2019, réitérée le 2 février 2020. Il produit également une attestation d'un employeur datée du 1er mai 2020 indiquant son besoin de circuler durant la période du premier confinement pour exercer une mission de sécurité privée dans un site recevant du public mais n'apporte aucune précision sur cette activité, ni le temps durant lequel il l'aurait exercé. M. A... se prévaut enfin d'un contrat de travail à durée déterminée conclu avec une entreprise du bâtiment pour exercer une activité de plaquiste à plein temps du 1er mars 2022 au 31 mai 2022. Si le requérant reproche à la préfète de la Charente de ne pas avoir regardé comme crédible une promesse d'embauche en qualité de couvreur qui lui aurait été faite au mois d'octobre 2021, cette pièce n'est pas produite au dossier de sorte que l'appréciation de la préfète ne saurait être regardée comme sérieusement contestée sur ce point. Au vu de ces éléments, il ne ressort pas des pièces du dossier l'existence d'un motif exceptionnel justifiant la délivrance à l'intéressé d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ". Par suite, la préfète n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. Le requérant ne peut utilement se prévaloir des orientations fixées par la circulaire du 28 novembre 2012 relative aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière, qui se bornent à énoncer des orientations générales destinées à éclairer les préfets dans l'exercice de leur pouvoir de régularisation, sans les priver de leur pouvoir d'appréciation.

7. Aucun des moyens dirigés contre la décision de refus de séjour n'ayant été accueilli, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Sa requête doit, par suite, être rejetée en toutes ses conclusions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Charente.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Luc Derepas, président de la cour,

M. Jean-Claude Pauziès, président de la 1ère chambre,

Mme Kolia Gallier, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2023.

La rapporteure,

Kolia GallierLe président,

Luc Derepas

La greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 22BX02997 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22BX02997
Date de la décision : 05/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. DEREPAS
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL CERA
Avocat(s) : RAHMANI

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-10-05;22bx02997 ?
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