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28/09/2023 | FRANCE | N°23BX00494

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 28 septembre 2023, 23BX00494


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2022 par lequel la préfète de la Gironde a ordonné son transfert aux autorités autrichiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile et d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 2205428 du 24 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête

enregistrée le 17 février 2023, M. A..., représenté par Me Aymard, demande à la cour :

1°) d'a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2022 par lequel la préfète de la Gironde a ordonné son transfert aux autorités autrichiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile et d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 2205428 du 24 octobre 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 17 février 2023, M. A..., représenté par Me Aymard, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 24 octobre 2022 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 septembre 2022 par lequel la préfète de la Gironde a ordonné son transfert aux autorités autrichiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour renouvelable en vue de ses démarches d'admission au statut de réfugié, ou subsidiairement, de réexaminer sa situation dans un délai de huit jours à compter de la notification du jugement, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour pendant ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 200 euros à verser à son conseil en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué méconnait les dispositions de l'article 4 du règlement n° 604/2013 du Parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 ;

- il méconnaît les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 relatif à la mise en œuvre de la clause discrétionnaire ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des pièces, enregistrées le 12 avril 2023, le préfet de la Gironde a informé la cour du transfert vers l'Autriche de M. A..., réalisé le 6 avril 2023.

M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 12 janvier 2023.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Pauline Reynaud.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant afghan, né le 1er janvier 2001 à Nangarahar, a déclaré être entré irrégulièrement sur le territoire français le 10 mai 2022 en provenance d'un autre État membre de l'Union européenne. L'intéressé s'est présenté le 1er juin 2022 au guichet de la préfecture de la Gironde pour y solliciter l'asile. Le relevé de ses empreintes décadactylaires ayant révélé qu'il avait formé une première demande d'asile en Autriche, la préfète de la Gironde a saisi les autorités autrichiennes le 3 juin 2022 d'une demande de reprise en charge de l'intéressée sur le fondement de l'article 18-1 b) du règlement (UE) n° 604/2013. Celles-ci ont donné leur accord explicite le 16 juin 2022. Par arrêté en date du 29 septembre 2022, la préfète de la Gironde a ordonné le transfert de M. A... aux autorités autrichiennes, l'Autriche apparaissant comme l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile. M. A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux l'annulation de l'arrêté du 29 septembre 2022. L'intéressé relève appel du jugement n° 2205428 du 24 octobre 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a déclaré, lors de sa présentation au guichet de la préfecture le 1er juin 2022, comprendre la langue dari. L'intéressé s'est vu remettre le jour même, dès le dépôt de sa demande d'asile, la brochure A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " et la brochure B " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' ". Ces documents, qui comportent l'ensemble des informations prescrites par les dispositions de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013, lui ont été remis en langue farsi (perse), langue dialectalement proche du dari. Ces documents comportent notamment les informations relatives aux critères de détermination de l'État responsable de la demande d'asile, de la hiérarchie de ces critères, de la possibilité pour le demandeur de solliciter la suspension du transfert, de son droit d'accès aux données personnelles collectées. Il ressort par ailleurs du compte-rendu de l'entretien individuel de M. A..., d'une durée de soixante minutes, que l'intéressé a reçu à nouveau, et oralement, les renseignements relatifs aux règlements communautaires avec l'assistance d'un interprète en langue dari. M. A... a notamment déclaré " avoir compris les informations concernant le déroulement de la procédure Dublin expliqué lors de l'entretien ". Il n'a formulé à cette occasion aucune réserve ni aucune observation sur la compréhension des brochures qui lui ont été remises en langue farsi. Dans ces conditions, M. A... doit être regardé comme ayant reçu par écrit, puis oralement, et dans une langue qui lui est compréhensible, l'information mentionnée à l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

4. En second lieu, aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement (...) 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à un autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable au titre des critères définis aux articles 8 à 11 et 16. Les personnes concernées doivent exprimer leur consentement par écrit ". En vertu de l'article L. 571-1 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile : " Lorsque l'autorité administrative estime que l'examen d'une demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat qu'elle entend requérir, en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, il est procédé à l'enregistrement de la demande (...). Le présent article ne fait pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne dont l'examen de la demande relève de la compétence d'un autre Etat. ". Enfin, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales prévoit que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

5. M. A... se prévaut de son jeune âge, du fait qu'il a vécu un périple particulièrement difficile pour rejoindre la France où réside son frère titulaire de la protection subsidiaire et du fait que l'arrêté attaqué aurait pour effet de les séparer et de le laisser démuni et isolé. Ces circonstances ne sont toutefois pas de nature à justifier, à elles seules, la mise en œuvre de la clause discrétionnaire. M. A... ne démontre pas davantage qu'il encourrait un quelconque risque pour sa sécurité en cas de transfert aux autorités autrichiennes, lesquelles ont accepté de le reprendre en charge afin d'examiner sa demande d'asile. Par suite, la préfète de la Gironde n'a pas commis d'erreur manifeste en ne faisant pas application des dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013. Pour les mêmes raisons, elle n'a pas davantage méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

6. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à ce que l'Etat soit condamné au versement d'une somme d'argent au titre des frais de justice ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente de chambre,

Mme Bénédicte Martin, présidente assesseure,

Mme Pauline Reynaud, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 septembre 2023.

La rapporteure,

Pauline Reynaud La présidente,

Evelyne Balzamo,

Le greffier,

Christophe Pelletier La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX00494


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX00494
Date de la décision : 28/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: Mme Pauline REYNAUD
Rapporteur public ?: Mme GAY
Avocat(s) : AYMARD

Origine de la décision
Date de l'import : 08/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-09-28;23bx00494 ?
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