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26/09/2023 | FRANCE | N°21BX03856

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 26 septembre 2023, 21BX03856


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 24 avril 2019 par lequel le directeur interrégional des services pénitentiaires de Bordeaux a refusé de reconnaître imputables au service les arrêts de travail dont elle a bénéficié du 1er septembre 2013 au 31 décembre 2013.

Par un jugement n° 1901497 du 28 juillet 2021, le tribunal administratif de Pau a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 octobre

2021 le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour

1°) d'annuler ce jugement d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 24 avril 2019 par lequel le directeur interrégional des services pénitentiaires de Bordeaux a refusé de reconnaître imputables au service les arrêts de travail dont elle a bénéficié du 1er septembre 2013 au 31 décembre 2013.

Par un jugement n° 1901497 du 28 juillet 2021, le tribunal administratif de Pau a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 5 octobre 2021 le garde des sceaux, ministre de la justice, demande à la cour

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 28 juillet 2021 ;

2°) de rejeter les conclusions présentées par Mme A... devant le tribunal administratif.

Il soutient que les dispositions applicables du décret n°88-442 du 14 mars 1986 n'imposent plus la rédaction d'un rapport du médecin de prévention avant que la commission de réforme ne statue sur l'imputabilité au service d'un accident.

Par un mémoire enregistré le 9 mars 2023, Mme A..., représentée par Me Leplat, conclut au rejet de la requête, à ce qu'il soit enjoint au ministre de la justice de réexaminer sa situation et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre des frais exposés pour l'instance.

Elle soutient que la requête d'appel est tardive et que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu :

- le décret n° 88-442 du 14 mars 1986 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., surveillante brigadier 4ème échelon à la maison d'arrêt de Pau a été victime, le 4 mai 2013, d'un accident sur son lieu de travail qui a été reconnu imputable au service. Par une première décision du 15 janvier 2015, la directrice interrégionale des services pénitentiaires de Bordeaux a décidé que " cet accident n'était pas imputable au service à compter du 1er septembre 2013 ". Cette décision a toutefois été annulée par un jugement du tribunal administratif de Pau n° 1500578 du 22 mars 2017. La procédure a été reprise par l'administration et, suivant l'avis émis par la commission de réforme départementale le 21 mars 2018, le directeur interrégional des services pénitenciers de Bordeaux, par une décision du 24 avril 2018, a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des arrêts de travail accordés à Mme A... du 1er septembre 2013 au 31 décembre 2013 et, en conséquence, de rembourser les frais médicaux engagés au titre de cette période. Le ministre de la justice relève appel du jugement du 28 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Pau a annulé cette décision .

2. En premier lieu, aux termes de l'article 18 du décret susvisé du 14 mars 1986 relatif à la désignation des médecins agréés, à l'organisation des comités médicaux et des commissions de réforme, aux conditions d'aptitude physique pour l'admission aux emplois publics et au régime de congés de maladie des fonctionnaires, dans sa version en vigueur du 16 mars 1986 au 24 février 2019 : " Le médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical ou à la commission de réforme est informé de la réunion et de son objet. (...) il remet obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 26, 32, 34 et 43 ci-dessous. (...) ". L'article 26, alors en vigueur, du même décret précise que " Sous réserve du deuxième alinéa du présent article, les commissions de réforme prévues aux articles 10 et 12 ci-dessus sont obligatoirement consultées dans tous les cas où un fonctionnaire demande le bénéfice des dispositions de l'article 34 (2°), 2° alinéa, de la loi du 11 janvier 1984 susvisée. Le dossier qui leur est soumis doit comprendre un rapport écrit du médecin chargé de la prévention attaché au service auquel appartient le fonctionnaire concerné. ". Enfin le deuxième alinéa du 2° de l'article article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat alors en vigueur précise les droits attachés à l'imputabilité au service des accidents et maladies des fonctionnaires de l'Etat.

3. Ces dispositions prévoient que le dossier soumis à l'avis de la commission de réforme doit comporter un rapport écrit du médecin de prévention, ainsi que le rappelle le ministre lui-même dans ses écritures. La méconnaissance de cette obligation est de nature à priver les intéressés d'une garantie.

4. En outre, si le ministre fait valoir que les dispositions de l'article 18 du décret du 14 mars 1986, dans leur version en vigueur du 24 février 2019 au 30 mai 2020, n'imposent plus la remise à la commission de réforme de ce rapport, ces dispositions n'étaient pas encore en vigueur à la date de la décision en litige, soit le 24 avril 2018 et non le 24 avril 2019 comme indiqué par erreur dans le dispositif du jugement attaqué.

5. Enfin, le ministre de la justice reconnait dans ses écritures de première instance et ne conteste pas en appel que la commission de réforme a rendu son avis concernant Mme A... sans qu'un rapport écrit du médecin de prévention ait préalablement été joint au dossier qui lui était soumis ou que ce médecin ait assisté à la réunion de la commission. Par suite, le ministre n'est pas fondé à soutenir que la décision du 24 avril 2018 ne serait pas intervenue au terme d'une procédure irrégulière privant Mme A... d'une garantie.

6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête, que le ministre de la justice n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé la décision du 24 avril 2018 par laquelle il doit être regardé comme ayant décidé que les arrêts de travail et les soins dont a bénéficié Mme A... à compter du 1er septembre 2013 n'étaient pas imputables à l'accident de service survenu le 4 mai 2013. Par suite, sa requête doit être rejetée.

7. Par ailleurs, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au ministre de la justice de réexaminer la demande de Mme A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

8. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il y a également lieu, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du ministre de la justice est rejetée.

Article 2 : Il est enjoint au ministre de la justice de réexaminer la demande de Mme A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme A... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2023 à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 26 septembre 2023.

Le rapporteur,

Manuel C...

Le président,

Laurent Pouget

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N°21BX03856 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX03856
Date de la décision : 26/09/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POUGET
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : LEPLAT JULIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-09-26;21bx03856 ?
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