Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Herri Ondoan a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2019 par lequel le maire d'Urrugne a sursis à statuer sur la demande de permis de construire qu'elle a présentée en vue de l'édification d'un ensemble immobilier comportant huit villas, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux.
Par un jugement n°2000198 du 12 juillet 2022, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 15 septembre 2022 et 30 mars 2023, ce dernier non communiqué, la SARL Herri Ondoan, représentée par Me Delhaes, demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n°2000198 du 12 juillet 2022 du tribunal administratif de Pau ;
2°) d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2019, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux ;
3°) d'enjoindre au maire d'Urrugne de délivrer l'autorisation sollicitée, ou à défaut, de réexaminer sa demande ;
4°) de mettre à la charge de la commune d'Urrugne la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal, son projet n'est pas de nature à compromettre ou à rendre plus onéreux l'exécution du futur plan local d'urbanisme (PLU) de la commune d'Urrugne ;
- le futur PLU est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors que le terrain d'assiette du projet ne possède aucun potentiel agricole et est situé dans un secteur déjà urbanisé, desservi par les réseaux publics.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 mars 2023, la commune d'Urrugne, représentée par Me Cambot, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'appelante de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de M. Gueguein, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le 31 mai 2019, la SARL Herri Ondoan a déposé une demande de permis de construire en vue de l'édification d'un ensemble immobilier comportant huit villas sur une parcelle cadastrée section AY n°243p, d'une superficie de 2112 m2, située chemin d'Agorreta à Urrugne. Par arrêté du 24 juillet 2019, le maire d'Urrugne a sursis à statuer sur sa demande. Par courrier du 20 septembre 2019, la SARL Herri Ondoan a formé un recours gracieux à l'encontre de cette décision, rejeté par une décision implicite du maire née le 23 novembre 2019. La SARL Herri Ondoan relève appel du jugement du 12 juillet 2022 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 24 juillet 2019, ensemble la décision de rejet de son recours gracieux.
Sur la légalité de la décision du 12 juillet 2019 :
2. Aux termes de l'article L. 153-11 du code de l'urbanisme : " (...) L'autorité compétente peut décider de surseoir à statuer, dans les conditions et délai prévus à l'article L. 424-1, sur les demandes d'autorisation concernant des constructions, installations ou opérations qui seraient de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan dès lors qu'a eu lieu le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable. ". Aux termes de l'article L. 424-1 du code de l'urbanisme : " (...) Il peut être sursis à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations dans les cas prévus au 6° de l'article L. 102-13 et aux articles L. 153-11 et L. 311-2 du présent code et par l'article L. 331-6 du code de l'environnement. (...) Le sursis à statuer doit être motivé (...) ".
3. Un sursis à statuer ne peut être opposé à une demande de permis de construire qu'en vertu d'orientations ou de règles que le futur plan local d'urbanisme pourrait légalement prévoir, et à la condition que la construction, l'installation ou l'opération envisagée soit de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse son exécution.
4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le conseil municipal d'Urrugne a, par une délibération du 29 juin 2015, prescrit la révision plan local d'urbanisme de la commune. Le débat sur les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durables (PADD) s'est tenu lors de deux séances du conseil municipal les 24 mai 2016 et 11 décembre 2017. Par délibération du 3 novembre 2018, le conseil communautaire a arrêté le projet de plan local d'urbanisme (PLU). Il ressort de ce document que les auteurs du PLU entendent classer le terrain litigieux en zone agricole définie par le rapport de présentation comme les parties du territoire communal, équipées ou non, à protéger en raison de leur potentiel agronomique, biologique ou économique, et plus spécifiquement en secteur Acu représentant les terrains identifiés comme coupure d'urbanisation et ayant une vocation ou un usage agricole. Ne sont prévus comme devant être autorisés en secteur Acu, aux termes du projet de règlement annexé à la délibération du 3 décembre 2018, que les constructions agricoles nécessaires à la mise aux normes des exploitations agricoles et l'extension des bâtiments d'exploitation agricole et d'élevage existants, ainsi que certains travaux sur des constructions existantes. Par suite, eu égard à la nature du projet consistant en la réalisation d'un ensemble immobilier comportant huit villas, ce dernier est de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan.
5. En second lieu, aux de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme : " Le règlement fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ". Aux termes de l'article L. 151-9 de ce code : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. Il peut préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être faits ou la nature des activités qui peuvent y être exercées et également prévoir l'interdiction de construire. Il peut définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées. ". Aux termes de l'article R. 151-22 du même code : " Les zones agricoles sont dites " zones A ". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles ". Il résulte de ces dispositions qu'une zone agricole, dite " zone A " du plan local d'urbanisme a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.
6. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme, qui ne sont pas liés par les modalités existantes d'utilisation du sol, de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.
7. Il ressort des pièces du dossier que la commune d'Urugune s'est notamment assigné, au travers de la révision de son PLU, deux objectifs, fixés par le PADD, tenant, d'une part, à la protection du cadre naturel et patrimonial constitutif d'une identité paysagère entre la corniche et la Rhune et, d'autre part, à la maitrise de son développement urbain conformément à la loi littoral. Dans ce cadre, le rapport de présentation du PLU litigieux identifie des secteurs de densification et des secteurs de coupures d'urbanisation, couvrant, pour ces derniers, la majeure partie du territoire communal situé entre la RD n°810 et le littoral. Il définit en zone agricole un secteur Acu, représentant, comme indiqué au point 4, les terrains identifiés comme coupure d'urbanisation et ayant une vocation ou un usage agricole. La requérante soutient que le classement de la parcelle AY n°243p dans ce secteur est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle ne présente pas de potentiel agronomique, biologique et économique, qu'elle est située dans un secteur déjà urbanisé, desservi par les réseaux publics et qu'elle ne représente pas une coupure d'urbanisation mais une dent creuse au sein d'un secteur déjà urbanisé, le quartier d'Agorreta.
8. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la parcelle litigieuse est située au nord du bourg d'Urrugne distant d'environ 1,3 kilomètres. Elle s'insère en contrebas de la route départementale n°810, reliant Saint-Jean-de-Luz à Urrugne, à proximité de l'échangeur de l'autoroute A63 et d'un centre commercial E. Leclerc implanté de l'autre côté de la RD n°810. Elle est exploitée, par des cultures de maïs, et listée par le rapport de présentation dans la synthèse des enjeux du diagnostic agricole. Si elle jouxte le quartier d'Agorreta, secteur urbanisé et identifié dans les capacités de densification de la commune, il ressort des pièces du dossier qu'elle s'ouvre au sud et à l'ouest sur de vastes espaces naturels qui s'étendent jusqu'à la corniche et qui marquent ainsi une coupure d'urbanisation entre le bourg d'Urrugne et le quartier d'Agorreta, et plus au nord la commune de Ciboure. Dans ces conditions, elle ne constitue pas une dent creuse. Ainsi, et sans que la constructibilité de parcelles situées à proximité n'ait d'influence, les auteurs du futur PLU, qui ne sont pas liés par les modalités existantes d'utilisation du sol et qui ont justifié dans le rapport de présentation les choix opérés en matière d'urbanisation du territoire communal et de préservation des secteurs agricoles et naturels, n'ont pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en projetant de classer la parcelle AY n°243p en zone agricole, Acu.
9. Il résulte de tout ce qui précède que le maire d'Urrugne a fait une exacte application des dispositions précitées de l'article L. 153-11 et L. 424-1 du code de l'urbanisme en opposant un sursis à statuer à la demande présentée par la SARL Herri Ondoan et que la société n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 24 juillet 2019 et de la décision de rejet de son recours gracieux.
Sur les frais liés au litige :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Urrugne qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme demandée par la requérante au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la SARL Herri Ondoan la somme de 1 500 euros à verser à la commune d'Urrugne au même titre.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Herri Ondoan est rejetée.
Article 2 : La SARL Herri Ondoan versera la somme de 1 500 euros à la commune d'Urrugne en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Herri Ondoan et à la commune d'Urrugne.
Délibéré après l'audience du 4 juillet 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
Mme Nathalie Gay, première conseillère,
Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juillet 2023.
La rapporteure,
Héloïse A...
La présidente,
Elisabeth Jayat
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au préfet des Pyrénées-Atlantiques en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N°22BX02491