La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/06/2023 | FRANCE | N°22BX02986

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 30 juin 2023, 22BX02986


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 1er septembre 2021 par laquelle la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour mention " étudiant ", ensemble la décision implicite née le 16 novembre 2021 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2106904 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2022, M. B...

, représenté par Me Pornon-Weidknnet, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 1er septembre 2021 par laquelle la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour mention " étudiant ", ensemble la décision implicite née le 16 novembre 2021 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n° 2106904 du 7 juin 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 5 décembre 2022, M. B..., représenté par Me Pornon-Weidknnet, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 juin 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de la Gironde du 1er septembre 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer sans délai un titre de séjour portant la mention " étudiant " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'abroger l'arrêté litigieux et d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer sans délai un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 2 000 euros, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la préfète n'a pas suffisamment motivé sa décision et n'a pas procédé à un examen personnel et approfondi de sa situation ;

- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant refus de séjour porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, tel que garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la préfète n'a pas fait usage de son pouvoir discrétionnaire de régularisation alors que le requérant avait formulé une demande exceptionnelle dans sa demande de réexamen préalable à la saisine du tribunal ;

- compte tenu des éléments intervenus postérieurement à la décision contestée, il est demandé à la cour d'apprécier la légalité de cette décision à la date où elle statuera, conformément à la jurisprudence Stassen.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 avril 2023, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 29 septembre 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique, ont été entendus :

- le rapport de Mme Florence Demurger.

- et les observations de Me Pornon-Weidknnet, représentant le requérant.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant libanais né le 28 septembre 1996, est entré en France le 8 mars 2020 muni d'un visa C portant la mention " court séjour de circulation " valable jusqu'au 8 mars 2021. Le 23 juin 2021, il a sollicité un titre de séjour portant la mention " étudiant " sur le fondement de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 1er septembre 2021, à l'encontre duquel M. B... a formé un recours gracieux le 16 septembre 2021, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité. M. B... relève appel du jugement du 7 juin 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 1er septembre 2021 et de la décision implicite née le 16 novembre 2021 rejetant son recours gracieux.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui établit qu'il suit un enseignement en France ou qu'il y fait des études et qui justifie disposer de moyens d'existence suffisants se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " d'une durée inférieure ou égale à un an. / En cas de nécessité liée au déroulement des études ou lorsque l'étranger a suivi sans interruption une scolarité en France depuis l'âge de seize ans et y poursuit des études supérieures, l'autorité administrative peut accorder cette carte de séjour sous réserve d'une entrée régulière en France et sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Cette carte donne droit à l'exercice, à titre accessoire, d'une activité professionnelle salariée dans la limite de 60 % de la durée de travail annuelle ". Aux termes de l'article L. 412-1 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues aux articles L. 412-2 et L. 412-3, la première délivrance d'une carte de séjour temporaire ou d'une carte de séjour pluriannuelle est subordonnée à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 411-1 ". Il résulte de ces dispositions combinées que le préfet, en vertu de son pouvoir gracieux de régularisation, peut délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant au demandeur qui ne peut présenter un visa de long séjour pour des cas très particuliers et en tenant compte des motifs pour lesquels le visa de long séjour ne peut être présenté, du niveau de formation de l'intéressé, ainsi que des conséquences que présenterait un refus de séjour pour la suite de ses études.

3. Pour refuser de lui délivrer un titre de séjour en qualité d'étudiant, la préfète de la Gironde s'est uniquement fondée sur la circonstance que M. B... n'était pas en mesure de présenter le visa de long séjour prévu par les dispositions précitées et qu'il ne satisfaisait pas aux conditions d'exemption de présentation de ce visa. Toutefois, d'une part, la crise sanitaire liée à la pandémie de Covid-19 ainsi que la situation politique, économique et sociale que traverse le Liban, notamment en raison des évènements survenus le 4 août 2020 à Beyrouth, constituent autant de circonstances exceptionnelles de nature à avoir empêché M. B... de se procurer un visa de long séjour préalablement à sa demande de titre de séjour. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que, à la date de la décision attaquée, le requérant était inscrit en première année de Master " Sport Business " à l'ESGCV de Bordeaux, une formation dont la validation implique la réalisation d'un stage de plusieurs mois en milieu professionnel, qu'il est entré régulièrement sur le territoire français et qu'il justifie disposer de moyens d'existence suffisants. Dans ces conditions, en refusant de faire usage de son pouvoir gracieux de régularisation et de délivrer à M. B... une carte de séjour portant la mention " étudiant " sans que lui soit opposable l'absence de visa de long séjour, laquelle était le seul motif de refus retenu, la préfète de la Gironde a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.

4. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Il y a lieu, dès lors, d'annuler la décision de la préfète de la Gironde du 1er septembre 2021 portant refus de renouvellement de titre de séjour, ensemble le rejet du recours gracieux formé par l'intéressé.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution (...) ".

6. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement qu'il soit enjoint au préfet de la Gironde de délivrer à M. B... un titre de séjour portant la mention " étudiant " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, en revanche, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais d'instance :

7. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 29 septembre 2022. Par suite, son conseil peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1200 euros à Me Pornon-Weidknnet, sous réserve que ce dernier renonce à percevoir la part de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2106904 du 7 juin 2022 du tribunal administratif de Bordeaux est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 1er septembre 2022 par lequel la préfète de la Gironde a refusé la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " étudiant " à M. B... est annulé, ensemble le rejet du recours gracieux formé par l'intéressé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de la Gironde de délivrer à M. B... un titre de séjour portant la mention " étudiant " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Pornon-Weidknnet, avocat de M. B..., une somme de 1200 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me Pornon-Weidknnet et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 15 juin 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Florence Demurger, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

M. Anthony Duplan, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 juin 2023.

La présidente-rapporteure,

Florence Demurger

Le président-assesseur,

Frédéric Faïck

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 22BX02986


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX02986
Date de la décision : 30/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DEMURGER
Rapporteur ?: Mme Florence DEMURGER
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : PORNON-WEIDKNNET

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-06-30;22bx02986 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award