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13/06/2023 | FRANCE | N°21BX02086

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 13 juin 2023, 21BX02086


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de La Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 4 juin 2019 par lequel le maire de Salazie a accordé à M. C... A... un permis de construire n° 974 421 19 A 0006 en vue de la régularisation de l'extension d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée section AK n° 325 située 195 bis chemin des Fleurs Jaunes Les Hauts Mare à Goyaves, ainsi que la décision du 4 septembre 2019 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n°1901468 du 12 av

ril 2021, le tribunal administratif de La Réunion a annulé l'arrêté du 4 juin 2019 e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de La Réunion a demandé au tribunal administratif de La Réunion d'annuler l'arrêté du 4 juin 2019 par lequel le maire de Salazie a accordé à M. C... A... un permis de construire n° 974 421 19 A 0006 en vue de la régularisation de l'extension d'une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée section AK n° 325 située 195 bis chemin des Fleurs Jaunes Les Hauts Mare à Goyaves, ainsi que la décision du 4 septembre 2019 rejetant son recours gracieux.

Par un jugement n°1901468 du 12 avril 2021, le tribunal administratif de La Réunion a annulé l'arrêté du 4 juin 2019 et la décision du 4 septembre 2019.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 18 mai 2021, la commune de Salazie, représentée par Me Boissy, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 12 avril 2021 ;

2°) de rejeter la demande présentée par le préfet de La Réunion devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il ne comporte pas les signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- la demande de permis de construire concerne la régularisation de l'extension d'une construction à usage d'habitation existante, les documents d'insertion de la construction projetée dans son environnement proche et lointain n'étant que de simples photographies de l'existant ; le tribunal a commis une erreur de fait en considérant que le projet comprenait l'extension d'une maison d'habitation ; le secteur composé de petites constructions, appartenant notamment aux exploitants des terres agricoles voisines a été intégré à un secteur de taille et de capacité d'accueil limitées (STECAL) dans le cadre de la révision du plan local d'urbanisme afin d'autoriser la construction de maisons d'habitation ; ainsi, le tribunal a commis une erreur de droit en retenant le moyen tiré de la méconnaissance de l'article A2 du plan local d'urbanisme ;

- le terrain d'assiette du projet se situe en zone bleue B2u du plan de prévention des risques approuvé le 1er août 2019 et le projet n'emporte pas une augmentation de la surface de plancher, il n'implique que des travaux d'entretien et de réparation de l'extérieur et des travaux de réaménagement de l'intérieur ; ainsi, le projet est conforme aux dispositions de la zone B2u du plan de prévention des risques ; c'est à tort que le tribunal a appliqué le règlement de la zone R1 du plan de prévention des risques approuvé le 9 mars 2005 ;

- le projet est relatif à la régularisation de l'extension d'une construction existante et n'emporte pas augmentation de la surface du bâti, ni réduction des surfaces naturelles, agricoles ou forestières et ne peut être qualifié d'opération d'aménagement ou d'urbanisme au sens des dispositions de l'article L. 181-12 du code rural et de la pêche ; le moyen tiré de ce que le maire aurait dû s'opposer au permis de construire en raison de l'avis défavorable de la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers n'est donc pas fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nathalie Gay,

- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Le 29 janvier 2019, M. C... A... a demandé la régularisation de l'extension pour une surface de plancher de 81 m² d'une maison d'habitation d'une surface de 18 m² implantée sur la parcelle cadastrée section AK n° 325 située au 195 bis chemin Fleurs Jaunes Les Hauts Mare à Goyaves sur le territoire de la commune de Salazie. Par un arrêté du 4 juin 2019, le maire de Salazie a délivré le permis de construire sollicité. Le préfet de La Réunion a formé un recours gracieux par un courrier du 30 juillet 2019. Le 4 septembre 2019, le maire de Salazie a refusé de retirer l'arrêté du 4 juin 2019. La commune de Salazie relève appel du jugement du 12 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de La Réunion, saisi par le préfet, a annulé l'arrêté du 4 juin 2019 et la décision du 4 septembre 2019.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il ressort de la minute du jugement attaqué qu'elle a été signée par le rapporteur, le président et le greffier, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative cité au point précédent. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée aux parties ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. Aux termes de l'article R. 123-7 du code de l'urbanisme : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. / Les constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif et à l'exploitation agricole sont seules autorisées en zone A. (...) ". Aux termes de l'article A2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Salazie : " 2.2. Sont admis sous condition (...) 3. (...) une construction à usage d'habitation dans la limite maximum de 180 m² B..., ainsi que les bâtiments, ouvrages et travaux à usage agricole sous réserve que leur implantation soit liée et nécessaire aux besoins d'une exploitation agricole, notamment justifiée par la nécessité d'une présence permanente et rapprochée sur le site d'exploitation (...) ".

5. Il est constant que la parcelle cadastrée section AK n° 325 est classée en zone A du plan local d'urbanisme de la commune de Salazie approuvé le 13 juillet 2006. Il ressort des pièces du dossier et notamment du dossier de demande de permis de construire que les travaux envisagés consistent en une extension pour une surface de plancher de 81 m² d'une maison à usage d'habitation d'une surface de plancher de 18 m². Eu égard à l'ampleur du projet en proportion de la surface de la construction existante, les travaux en litige doivent être regardés non comme une extension mais comme une construction nouvelle. Il ne ressort d'aucune pièce du dossier que M. C... A... serait agriculteur ni que cette construction à usage d'habitation serait liée et nécessaire aux besoins d'une exploitation agricole. La circonstance que la commune envisage de classer le terrain d'assiette du projet en secteur de taille et de capacité d'accueil limitées (STECAL) dans le futur plan local d'urbanisme est sans incidence sur la légalité de l'arrêté du 4 juin 2019 qui est appréciée à la date de son édiction. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal administratif de La Réunion a jugé que le permis de construire litigieux méconnaissait les dispositions de l'article A2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune de Salazie.

6. En vertu de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, l'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles, en particulier pour les inondations, qui ont notamment pour objet de délimiter les zones exposées aux risques, en tenant compte de leur nature et de leur intensité, d'y interdire les constructions ou la réalisation d'aménagements ou d'ouvrages ou de prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités. L'article L. 562-4 du même code précise que " Le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique. Il est annexé au plan d'occupation des sols, conformément à l'article L. 126-1 du code de l'urbanisme (...) ".

7. Les prescriptions d'un plan de prévention des risques naturels prévisibles, destinées notamment à assurer la sécurité des personnes et des biens exposés aux risques en cause et valant servitude d'utilité publique, s'imposent directement aux autorisations de construire, sans que l'autorité administrative soit tenue de reprendre ces prescriptions dans le cadre de la délivrance du permis de construire. Il incombe à l'autorité compétente pour délivrer une autorisation d'urbanisme de vérifier que le projet respecte les prescriptions édictées par le plan de prévention et, le cas échéant, de préciser dans l'autorisation les conditions de leur application.

8. Il ressort des pièces du dossier que la parcelle cadastrée section AK n° 325 était classée à la date de la décision contestée en zone R1, zone d'aléa élevé à très élevé, du plan de prévention des risques naturels (PPRN) de la commune de Salazie approuvé le 9 mars 2005. Il résulte du règlement du PPRN applicable à cette zone que sont interdits tous travaux, constructions, installations et activités de quelque nature qu'ils soient à l'exception de travaux dans lesquels ne figurent pas les constructions à usage d'habitation. En l'espèce, l'extension projetée doit être regardée comme une construction nouvelle ainsi qu'il a été indiqué au point 5 et, au demeurant, cette extension est supérieure à 10 m² et n'est pas justifiée par une mise en conformité obligatoire, seule exception admise par les dispositions applicables à la zone R1 du règlement du PPRN. En tout état de cause, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le permis de construire aurait pu être complété de prescriptions spéciales de nature à prévenir les risques d'atteinte à la sécurité publique résultant de la situation du terrain. Ainsi, en accordant le permis de construire permettant la régularisation d'une construction à usage d'habitation, le maire de Salazie a méconnu les prescriptions du règlement du PPRN approuvé le 9 mars 2005. Enfin, s'il résulte de l'instruction que le site d'implantation de la construction projetée est classé en zone B2u du plan de prévention plan de prévention des risques naturels prévisibles " Inondations et mouvements de terrain " approuvé en juillet 2019, le projet ne remplit pas les conditions exigées par l'article 9.2 du règlement de ce plan tenant à la réalisation d'une étude technique préalable. Par suite, le vice entachant le permis de construire en litige tiré de la méconnaissance du PPRN ne peut être regardé comme étant régularisé.

9. Il résulte de ce qui précède que la commune de Salazie n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de La Réunion a annulé l'arrêté du 4 juin 2019 par lequel le maire de Salazie a accordé à M. C... A... un permis de construire n° 974 421 19 A 0006 en vue de la régularisation de l'extension d'une maison d'habitation au lieu-dit Mare à Goyaves, ainsi que la décision du 4 septembre 2019 rejetant le recours gracieux formé par le préfet de La Réunion.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la commune de Salazie au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : La requête présentée par la commune de Salazie est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Salazie, à M. C... A... et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au préfet de La Réunion.

Délibéré après l'audience du 23 mai 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Nathalie Gay, première conseillère,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 juin 2023.

La rapporteure,

Nathalie GayLa présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX02086 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02086
Date de la décision : 13/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : BOISSY AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-06-13;21bx02086 ?
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