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31/05/2023 | FRANCE | N°21BX01341

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 31 mai 2023, 21BX01341


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) TMG Holding a demandé au tribunal administratif de Poitiers la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 28 février 2014 ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1802361 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa

demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires en réplique enregi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) TMG Holding a demandé au tribunal administratif de Poitiers la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 28 février 2014 ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1802361 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires en réplique enregistrés les 31 mars 2021, 25 avril et 7 septembre 2022, F..., représentée par Me Goimier, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1802361 du tribunal administratif de Poitiers du 4 février 2021 ;

2°) de prononcer la décharge, en droits, intérêts de retard et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 28 février 2014 pour un montant de 26 194 euros ainsi que des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2013 et 2014 pour un montant de 92 842 euros ;

3°) de modifier la détermination du déficit reportable remis en cause au titre de l'exercice clos le 28 février 2014 ;

4°) d'annuler la décision du 9 août 2018 de rejet de sa réclamation préalable ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur les conclusions à fin de décharge :

- elle n'a pas commis d'acte anormal de gestion lors de la vente des trois immeubles dont l'administration a considéré, à tort, que le prix avait été minoré : le contexte économique dans lequel elle se trouvait et les difficultés financières, notamment de trésorerie, auxquelles elle a dû faire face en 2012 et 2013 expliquent la vente en urgence et le prix de vente retenu ; elle n'avait d'autres choix que de céder ses biens dans des mauvaises conditions, ce qui permet de renverser la présomption d'acte anormal de gestion ;

- l'intention de M. B... et de Mme D... de recevoir une libéralité n'est pas établie et, en tout état de cause, l'écart de prix entre la valeur vénale et le prix de vente des biens ne permet pas de fonder à lui seul, une requalification en libéralité représentant un avantage constitutif d'une distribution de bénéfices au sens des dispositions de l'article 111 c du code général des impôts ;

- les prix de cession retenus étaient conformes à la valeur du marché et à la situation des biens ;

- elle pouvait déduire de son résultat imposable les dépenses qu'elle a enregistrées en entretien et en réparation au compte n° 615200, dès lors qu'elle apporte les justificatifs y afférents ; contrairement à ce qu'a retenu l'administration, ces dépenses n'augmentent pas la valeur vénale du bien et le service vérificateur ne pouvait les rajouter au prix de revient du bien ;

- la confusion de patrimoine avec la SARL Electro mag ne peut être qualifiée d'anormale dès lors qu'elle a été exclusivement réalisée dans l'intérêt de la situation du groupe dans son ensemble ;

- le mali de confusion n'est pas déductible au regard des dispositions de l'article 209 II bis du code général des impôts, dès lors il n'y a pas d'incidence dans la mesure où cette moins-value à long terme de 274 803 euros n'a été imputée sur aucune plus-value de même nature, l'administration n'a donc pas été lésée de la comptabilisation de cette moins-value long terme.

Sur les pénalités :

- l'administration n'apporte pas la preuve du manquement délibéré, notamment s'agissant de la matérialité de l'élément intentionnel.

Par des mémoires en défense enregistrés les 18 octobre 2021, 23 mai et 3 octobre 2022, ce dernier non communiqué, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au non-lieu à statuer à hauteur des chefs de redressement abandonnés et au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la requête, dès lors qu'elle n'est assortie d'aucun moyen sur ce point, est irrecevable à hauteur du montant des impositions supplémentaires générés par la remise en cause partielle de la déduction de TVA opérée par la société suite à la vente du bien situé 35 rue de la Baraude à Saint-Georges-de-Didonne (rappel de TVA de 4 679 euros en droits et 1 872 euros en pénalités) ;

- les conclusions en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2013 et 2014 pour un montant de 92 842 euros sont irrecevables dès lors que ces rectifications n'ont pas été mises en recouvrement, compte tenu du résultat d'ensemble du groupe demeurant déficitaire ;

- les moyens développés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 7 septembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée en dernier lieu au 12 octobre 2022 à 12:00 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- et les conclusions de M. Gueguein, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société par actions simplifiée (SAS) TMG Holding a fait l'objet, du 16 avril au 29 juin 2015, d'une vérification de comptabilité portant sur l'ensemble des impôts au titre de la période du 1er mars 2011 au 28 février 2014. Par une proposition de rectification du 25 août 2015, l'administration fiscale a informé Me Thomas Humeau, représentant légal de F..., qu'elle envisageait, dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, d'une part, de mettre à la charge de la société des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) au titre de la période du 1er janvier 2013 au 28 février 2014 en raison de la réévaluation du prix de cession d'un immeuble achevé depuis moins de 5 ans au cours de l'exercice clos en 2014 et de la régularisation de la TVA afférente aux opérations réalisées sur cet immeuble et, d'autre part, de rehausser son résultat des exercices clos en 2013 et 2014 en raison de la réintégration, tout d'abord, d'un profit de TVA à raison de ces rappels de TVA, ensuite, de dépenses afférentes à l'actif immobilisé, mais également, de la différence entre la valeur de marché de trois biens immobiliers cédés par la société en 2013 et le prix de vente stipulé dans l'acte et, enfin, de l'annulation d'une moins-value à long terme de 274 803 euros constatée par la société, au titre de l'exercice clos 2013, lors de la réalisation d'une confusion de patrimoine avec la SARL Electro mag. L'imposition supplémentaire, résultant des rappels de TVA, a été mise en recouvrement le 18 juillet 2016 pour un montant total final de 26 194 euros, 18 710 euros en droit et 7 484 euros en pénalités, tandis que le supplément d'impôt sur les sociétés n'a pas été mis en recouvrement eu égard à la situation déficitaire du groupe. Par courrier du 29 juin 2017, la société TMG Holding a présenté une réclamation préalable, rejetée par courrier du 9 août 2018. Par la présente requête, F... relève appel du jugement du 4 février 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande de décharge de ces impositions et de rétablissement du déficit reportable remis en cause au titre de l'exercice clos le 28 février 2014.

Sur l'étendue du litige :

2. Il résulte de l'instruction que, postérieurement à l'introduction de la requête, l'administration fiscale a abandonné deux chefs de redressement résultant de la réintégration au résultat, au titre de l'exercice clos le 28 février 2013 d'une charge d'un montant de 2 413,53 euros TTC et du mali de confusion d'un montant de 274 802,69 euros. Les conclusions de la requête de la SAS TMH Holding sont, dans cette mesure, devenues sans objet. Il n'y a, par suite, pas lieu d'y statuer.

Sur les fins de non-recevoir opposées en défense par l'administration fiscale :

3. En premier lieu, si la société requérante demande la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2013 et 2014 pour un montant de 92 842 euros, il résulte de l'instruction que les rectifications n'ont pas donné lieu à la mise en recouvrement d'impositions, compte tenu du résultat d'ensemble du groupe demeurant déficitaire. Dès lors, ces conclusions sont dépourvues d'objet et par suite irrecevables.

4. En second lieu, par la présente requête, la société TMG Holding demande, entre autre, la décharge des rappels de TVA qui lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2013 au 28 février 2014 pour un montant de 26 194 euros. Toutefois, la TVA collectée et la TVA déductible constituent deux chefs de redressement distincts, et la société n'articule aucun moyen à l'encontre du rappel de TVA déductible ni aucun moyen de procédure commun à la contestation des deux chefs de redressement. Par suite, comme l'oppose à juste titre l'administration en défense, la requête, dès lors qu'elle n'est assortie d'aucun moyen sur ce point, est irrecevable à hauteur du montant des impositions supplémentaires générés par la remise en cause partielle de la déduction de TVA opérée par la société suite à la vente du bien situé 35 rue de la Baraude à Saint-Georges-de-Didonne, correspondant à un rappel de TVA de 4 679 euros en droits et 1 872 euros en pénalités.

Sur le bien-fondé des impositions contestées et de la détermination du déficit reportable au titre de l'exercice clos le 28 février 2014 :

5. Il résulte de l'instruction que suite à la procédure de vérification en litige, l'administration a réintégré dans le résultat de la société contrôlée, au titre des exercices clos en 2013 et 2014, tout d'abord un profit de TVA en raison de rappels de TVA, ensuite, la différence entre le prix de vente de trois biens et la valeur vénale qu'elle a retenue, mais également, des dépenses immobilisées et enfin, a annulé une moins-value à long terme au titre de l'exercice clos 2013 suite à une confusion de patrimoine avec la SARL Electro Mag, ce dernier chef de rehaussement ayant été abandonné, ainsi qu'il a été dit ci-dessus. La société requérante conteste le déficit reportable à la clôture de l'exercice 2014.

En ce qui concerne la cession des trois immeubles à un prix minoré :

6. Aux termes des dispositions de l'article 39 du code général des impôts, applicables à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : "Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges ...". Aux termes de l'article L. 17 du livre des procédures fiscales : " En ce qui concerne les droits d'enregistrement et la taxe de publicité foncière ou la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'elle est due au lieu et place de ces droits ou taxe, l'administration des impôts peut rectifier le prix ou l'évaluation d'un bien ayant servi de base à la perception d'une imposition lorsque ce prix ou cette évaluation paraît inférieur à la valeur vénale réelle des biens transmis ou désignés dans les actes ou déclarations. La rectification correspondante est effectuée suivant la procédure de rectification contradictoire prévue à l'article L. 55, l'administration étant tenue d'apporter la preuve de l'insuffisance des prix exprimés et des évaluations fournies dans les actes ou déclarations. ".

7. S'agissant de la cession d'un élément d'actif immobilisé, lorsque l'administration, qui n'a pas à se prononcer sur l'opportunité des choix de gestion opérés par une entreprise, soutient que la cession a été réalisée à un prix significativement inférieur à la valeur vénale qu'elle a retenue et que le contribuable n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause cette évaluation, elle doit être regardée comme apportant la preuve du caractère anormal de l'acte de cession si le contribuable ne justifie pas que l'appauvrissement qui en est résulté a été décidé dans l'intérêt de l'entreprise, soit que celle-ci se soit trouvée dans la nécessité de procéder à la cession à un tel prix, soit qu'elle en ait tiré une contrepartie. Lorsque l'administration fiscale procède à l'évaluation de la valeur vénale d'un bien en se référant à des transactions qui ont porté sur des immeubles situés à proximité du lieu de situation de celui-ci, il lui appartient de retenir des termes de comparaison relatifs à des ventes qui ont porté sur des biens similaires intervenues à une date peu éloignée dans le temps de celle du fait générateur de l'imposition.

S'agissant de l'évaluation de la valeur vénale des immeubles cédés :

8. Il résulte de l'instruction qu'au titre de la période vérifiée, M. A... B... détenait la totalité du capital de F... et en assurait la présidence. Il était également associé à 49%, détenant 490 parts sur un total de 1000 parts, de la société civile immobilière Bleu Azur, sa compagne, Mme C... D..., étant associée de cette même société, à hauteur de 51%, détenant 510 parts. Au cours de l'année 2013, F..., représentée par M. B..., a vendu à la SCI Bleu Azur, représentée par Mme D..., deux appartements d'une superficie respective de 39,79 m² et 48,85 m², situés 21 avenue des Platanes et 52 avenue de Rochefort à Royan, le premier, vendu loué, cédé pour un prix de 60 000 euros et le second, vendu libre de tout locataire, pour un prix de 70 000 euros. Cette même année, F... a également vendu à Mme D... une maison d'habitation d'une superficie de 79,81 m2 sur un terrain de 157 m², située 35 rue de la Baraude à Saint-Georges-de-Didonne, vendue louée, pour un prix de 130 000 euros. Il résulte de l'instruction que Mme D... était titulaire du bail depuis le 1er avril 2012 et que M. B... et Mme D... ont occupé cette maison à titre de résidence principale jusqu'au 31 décembre 2018. Le service vérificateur a remis en cause les prix de vente pratiqués et a considéré qu'en consentant ces conditions de vente, la TMG Holding avait renoncé sans contrepartie à un produit et s'était ainsi livré à un acte anormal de gestion.

9. En ce qui concerne, d'une part, l'évaluation de la valeur vénale de l'appartement situé 21 avenue des Platanes à Royan, il résulte de l'instruction que la SAS TMH Holding a acquis ce bien le 21 décembre 2010 pour un prix de 100 000 euros et l'a revendu le 18 décembre 2013 à la SCI Bleu Azur pour un montant de 60 000 euros, soit 1 507,91 euros du m². Comme l'ont à juste titre retenu les premiers juges, la circonstance alléguée par la requérante que le bien ait été vendu loué ne peut être retenue pour justifier d'un tel écart de prix, dès lors qu'il résulte de l'instruction, et notamment de l'acte d'acquisition du 21 décembre 2010, que le bien était déjà loué lors de l'achat. En outre, si la société requérante soutient également que le marché a connu, au cours de l'année 2013, une baisse de l'ordre de 3,8% sur les appartements en vente à Royan, cette baisse ne peut justifier des écarts de prix consentis. Par ailleurs, il ne résulte pas des photographies produites que l'état général du bien soit d'une particulière vétusté. Enfin, contrairement à ce que la société TMG Holding soutient, l'administration a retenu, pour procéder à l'évaluation de la valeur vénale du bien, trois transactions réalisées en mars, juillet et décembre 2013 qui ont porté sur des immeubles situés à proximité, d'une superficie comparable et dans un laps de temps rapproché. Il résulte de ces comparaisons que le prix au m² s'établit à une moyenne de 2 990,19 euros rapportant la valeur vénale de l'appartement cédé à 118 980 euros, soit quasiment le double du prix de vente consenti.

10. En ce qui concerne, d'autre part, l'évaluation de la valeur vénale de l'appartement situé 52 avenue de Rochefort à Royan, il résulte de l'instruction que la SAS TMH Holding a acquis ce bien le 22 mars 2011 pour un prix de 112 000 euros et l'a revendu le 22 octobre 2013 à la SCI Bleu Azur pour un montant de 70 000 euros, soit 1 433 euros du m². Il résulte de l'acte de vente du 22 octobre 2013, que ce bien a été cédé libre de tout locataire et que les termes de comparaison retenus par l'administration sont relatifs à trois transactions réalisées en janvier, février et mai 2013 qui, contrairement à ce que soutient la société requérante qui ne parvient pas à démontrer l'inverse, ont porté sur des immeubles situés à proximité, d'une superficie comparable et dans un laps de temps rapproché. Il résulte de ces comparaisons que le prix au m² s'établit à une moyenne de 2 500,53 euros rapportant la valeur vénale de l'appartement cédé à 122 150 euros, soit plus de 78 % supérieur au prix de vente consenti. S'agissant des comparables avancées par la société, il ne résulte pas de l'instruction que ces propositions soient plus pertinentes que celles apportées par l'administration.

11. En ce qui concerne enfin, l'évaluation de la valeur vénale de la maison située 35 rue de la Baraude à Saint-Georges-de-Didonne, il résulte de l'instruction que la SAS TMH Holding a acquis ce bien le 21 juillet 2011, en état de futur achèvement, pour un prix de 169 500 euros, soit 141 722,41 euros hors taxes et 21 304 euros de TVA, et l'a revendu, après avoir effectué les travaux, le 9 octobre 2013 à Mme D... pour un montant de 130 000 euros, soit 108 696 euros hors taxes et 21 304 euros de TVA, correspondant à un prix de 1 362 euros du m². Comme l'ont à juste titre retenu les premiers juges, s'il résulte de l'instruction que le bien a été cédé loué, la titulaire du bail de location étant l'acquéreur, Mme D..., cette circonstance ne peut justifier d'une baisse de prix. En outre, il résulte de l'instruction que la société TMH Holding a effectué des travaux, et notamment la pose d'une cuisine, de nature à augmenter la valeur vénale du bien. Enfin, les termes de comparaison retenus par l'administration sont relatifs à trois transactions réalisées en avril, septembre et octobre 2013 qui ont porté sur des immeubles situés à proximité, d'une superficie comparable et dans un laps de temps rapproché. Il résulte de ces comparaisons que le prix au m² s'établit à une moyenne de 2 701,68 euros rapportant la valeur vénale de la maison cédée à 215 621 euros, soit plus de 60% supérieur au prix de vente consenti.

S'agissant de l'absence d'intérêt pour la société, de contrepartie ou de nécessité de vendre :

12. S'il résulte de ce qui précède que les cessions des trois immeubles ont été consenties à un prix significativement inférieur à leur valeur vénale, la société requérante soutient qu'elle s'est trouvée dans la nécessité de procéder à la cession à un tel prix compte tenu des difficultés financières que traversait le groupe et notamment l'une de ses filiales, la société GED.

13. Il résulte de l'instruction que la société GED, détenue à 100% par la société TMG Holding, a rencontré des difficultés financières à compter de l'année 2013, la conduisant à fermer un des deux magasins qu'elle exploitait sous l'enseigne " Expert " à Rochefort. Dans ce contexte, le Crédit agricole lui a adressé un courrier le 6 juin 2013 la mettant en demeure de rembourser ses crédits dans un délai de 60 jours. Si la société requérante soutient qu'elle a été contrainte de vendre les trois biens, financés par des crédits souscrits auprès de la même banque, dans l'urgence et à des prix minorés, compte tenu du rapport de force dans lequel elle se trouvait par rapport à cette banque, il résulte toutefois de l'instruction que les trois cessions sont intervenues entre octobre et décembre 2013, postérieurement au délai de 60 jours impartis par le Crédit agricole et à la mise en redressement judiciaire de la société GED intervenue le 19 septembre 2013. En outre, il résulte de l'instruction que la société GED était titulaire d'une créance de 464 190,02 euros à l'encontre de la société TMG Holding au 1er mars 2013 et cette dernière n'a pas procédé au remboursement de cette créance au cours de l'exercice clos en 2014, y compris après avoir cédé les biens dont elle est propriétaire. Au contraire, la société GED a consenti un abandon de créance à sa société mère de 240 000 euros au cours de l'exercice clos en 2014. Dans ces conditions, quand bien même le produit des ventes aurait permis le remboursement anticipé des emprunts souscrits par la société TMG Holding pour l'acquisition des trois biens, générant un apport de trésorerie de nature à rassurer les créanciers du groupe, aucun élément ne permet de considérer que cette dernière aurait été contrainte de vendre les trois immeubles dans l'urgence et à des prix minorés.

14. Il résulte de ce qui précède que les cessions ont été réalisées à un prix significativement inférieur à la valeur vénale des biens retenue par l'administration et que la société TMH Holding ne justifie pas qu'elle se serait trouvée dans la nécessité de procéder aux cessions à un tel prix, ni que l'appauvrissement qui en est résulté ait été décidé dans l'intérêt de l'entreprise, ou qu'elle en ait tiré une contrepartie. Par suite, et alors qu'au demeurant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, dans sa séance du 30 mai 2016, avait confirmé les valeurs vénales retenues par l'administration concernant ces trois biens, c'est à bon droit que l'administration a qualifié ces renonciations à recettes d'actes anormaux de gestion.

En ce qui concerne les dépenses relatives à l'actif immobilisé :

15. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) ".

16. Il résulte de ces dispositions que pour être inscrite en charge déductible du résultat imposable, la charge doit notamment se traduire par une diminution de l'actif net de l'entreprise. Les dépenses qui ont pour objet la mise en place des installations générales et techniques, la réalisation de nouveaux agencements, placard, nouvelles cloisons, ou encore l'aménagement ou la transformation d'installations existantes, ont donc pour effet, en règle générale, de faire entrer un ou plusieurs nouveaux éléments à l'actif du bilan ou d'augmenter la valeur ou la durée de vie des éléments auxquels elles se rapportent. Dès lors, elles sont immobilisables et déduites par voie d'amortissement. Lorsque des dépenses qualifiées " d'entretien ou d'aménagement " correspondent, en réalité, à des acquisitions de matériel, à des installations nouvelles ou à des améliorations d'installations anciennes, et ont, dès lors, pour résultat d'augmenter l'actif de l'entreprise, ces dépenses ne présentent pas le caractère de charges annuelles déductibles et doivent seulement donner lieu à l'amortissement que peuvent normalement comporter les matériels et installations en cause.

17. Au titre de l'exercice clos de l'année 2013, la société TMG Holding a comptabilisé en charge, au compte n° 615200 " entretien, réparation, bien " un montant de 26 719,99 euros. Le service vérificateur a considéré que les travaux correspondant ne se traduisaient pas par une diminution de l'actif net de l'entreprise, qu'ils devaient être considérées comme un élément constitutif du prix de revient du bien immobilier et a en conséquence procédé à la réintégration des charges comptabilisées en déduction du résultat fiscal.

18. Il résulte de l'instruction que la société requérant produit, pour justifier de la somme engagée, deux factures, la première, datée du 23 mars 2012, d'un montant de 5 500 euros relative à l'aménagement d'une cuisine au 35 rue de la Baraude à Saint-Georges-de-Didonne et la seconde, datée du 5 juin 2012, d'un montant de 2 413,53 euros, élément nouveau produit en appel, relative à des travaux d'entretien et d'aménagement de la cuisine de l'appartement situé 52 avenue de Rochefort à Royan. Si l'administration déclare prendre en compte, à l'occasion de la présente instance, cette dernière facture et abandonner le rehaussement opéré à raison de la réintégration au résultat de ces 2 413,53 euros TTC, ainsi qu'il a été dit au point 2, il résulte de l'instruction, en l'absence de tout autre élément apporté par la société requérante, que les dépenses correspondant au restant de la somme engagée, soit 24 306,46 euros, dont les 5 500 euros précités, doivent être regardés comme ayant pour résultat d'augmenter l'actif de l'entreprise et doivent seulement donner lieu à amortissement. C'est ainsi à bon droit que l'administration a réintégré cette somme au résultat de la société.

En ce qui concerne les revenus distribués :

19. Comme l'ont estimé à juste titre les premiers juges, si la société requérante conteste que les rehaussements relatifs aux ventes des trois biens immobiliers à des prix minorés aient donné lieu à une imposition en tant que revenus distribués entre les mains des bénéficiaires, un tel moyen est inopérant s'agissant de la contestation du déficit reportable de la société à la clôture de l'exercice clos en 2014 et des impositions supplémentaires mises à la charge de la société.

En ce qui concerne les rappels de TVA résultant de la réévaluation du prix de cession de la maison située 35 rue de la Baraude à Saint-Georges-de-Didonne :

20. Aux termes de l'article 266 du code général des impôts : " (...) 2. En ce qui concerne les opérations mentionnées au I de l'article 257, la taxe sur la valeur ajoutée est assise : b. Pour les mutations à titre onéreux ou les apports en société sur : Le prix de la cession, le montant de l'indemnité ou la valeur des droits sociaux rémunérant l'apport, augmenté des charges qui s'y ajoutent ; La valeur vénale réelle des biens, établie dans les conditions prévues à l'article L17 du livre des procédures fiscales, si cette valeur vénale est supérieure au prix, au montant de l'indemnité ou à la valeur des droits sociaux, augmenté des charges. (...) ".

21. Il résulte de ce qui a été dit au point 11 que c'est à bon droit que l'administration a établi la valeur vénale de la maison située 35 rue de la Baraude à Saint-Georges-de-Didonne à 215 621 euros. Ainsi, le bien étant achevé depuis moins de cinq ans à la date de sa cession qui était soumise à ce titre à la TVA, l'administration a procédé, en application des dispositions précitées du code général des impôts, à la liquidation de la TVA collectée exigible sur la base de cette valeur vénale, cette dernière étant supérieure au prix de vente stipulé. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a procédé au rappel de TVA correspondant, à hauteur de 14 031 euros.

Sur les pénalités :

22. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt (...) entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Il incombe à l'administration, en application des dispositions de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, d'établir l'absence de bonne foi du contribuable pour justifier de l'application d'une telle majoration.

23. Il résulte de l'instruction qu'au vu de la date des promesses de vente et de la date de création de la SCI Bleu Azur intervenue en septembre 2013, dont les membres du couple formé par M. B... et Mme D... sont les deux seuls associés, que cette société a été créée dans le but notamment de racheter deux des trois immeubles visés aux points précédents, tandis que le troisième, dans lequel le couple élisait sa résidence principale, a été racheté par Mme D.... En outre, ces derniers, acteurs de l'ensemble des opérations, ne pouvaient ignorer que les prix de cessions des trois biens immobiliers étaient manifestement inférieurs à leur prix d'acquisition et à leur valeur vénale. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a retenu une majoration de 40% prévue en cas de caractère délibéré des manquements, s'agissant du rappel de taxe sur la valeur ajoutée relatif à la vente de la maison du 35 rue de la Baraude à Saint-Georges-de-Didonne.

24. Il résulte de ce qui précède que F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions pour ce qui concerne les impositions et déficits reportables restant en litige.

Sur les frais liés au litige :

25. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la société TMG Holding tendant au rétablissement de son déficit reportable à la clôture de l'exercice 2014 à concurrence du montant correspondant à la déduction des charges de 2 018 euros HT et de 274 802,69 euros au titre de l'exercice clos le 28 février 2013.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de F... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Me Humeau, liquidateur judiciaire de F..., et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Copie en sera adressée pour information au directeur du contrôle fiscal Sud-Ouest.

Délibéré après l'audience du 10 mai 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Nathalie Gay, première conseillère,

Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2023.

La rapporteure,

Héloïse E...

La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N°21BX01341


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01341
Date de la décision : 31/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Héloïse PRUCHE-MAURIN
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : CABINET TEN FRANCE

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-05-31;21bx01341 ?
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