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24/05/2023 | FRANCE | N°21BX01041

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 24 mai 2023, 21BX01041


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 25 septembre 2019 par laquelle le président de la communauté de communes Sud Charente 4B lui a infligé la sanction disciplinaire de l'avertissement.

Par un jugement n° 1902780 du 29 décembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2020, M. C... A..., représenté par

Me Hoepffner, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 décembre 2020 ;

2°) d'annule...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 25 septembre 2019 par laquelle le président de la communauté de communes Sud Charente 4B lui a infligé la sanction disciplinaire de l'avertissement.

Par un jugement n° 1902780 du 29 décembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 mars 2020, M. C... A..., représenté par Me Hoepffner, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 décembre 2020 ;

2°) d'annuler la décision du 25 septembre 2019 précitée du président de la communauté de communes Sud Charente 4B ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes Sud Charente 4B la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A... soutient que :

- la décision attaquée a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que son dossier individuel, qu'il a consulté le 14 décembre 2018, ne comportait aucun témoignage écrit de ses accusatrices relatif aux faits qui lui sont reprochés, ce qui l'a privé de la possibilité de saisir les autorités judiciaires d'une plainte pour faux témoignage et dénonciation calomnieuse ;

- la sanction qui lui a été infligée ne repose sur aucun élément sérieux si ce n'est de vagues accusations calomnieuses contenues dans deux rapports des 14 et 20 novembre 2018 dépourvus de toute valeur probante et ne précisant aucune date, que ne viennent corroborer aucun témoignage ni aucune condamnation pénale prononcée à son encontre alors que la charge de la preuve d'établir les faits reprochés repose sur l'administration qui a engagé les poursuites disciplinaires ;

- la communauté de communes a du reste admis implicitement que la matérialité des faits n'était pas établie puisqu'elle a produit en première instance une lettre d'une autre collègue de travail écrite le 2 décembre 2020, soit plus d'un an après la décision litigieuse, qui constitue un témoignage de complaisance ;

- le manquement aux règles de déontologie qui lui est reproché est invoqué sans aucune précision des règles qu'il aurait enfreintes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 septembre 2022, la communauté de communes Sud Charente 4B, représentée par Me Gomez, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Au cours de l'audience publique, ont été entendus :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Madelaigue, rapporteure publique,

- et les observations de Me Lagrue, représentant la communauté de communes Sud Charente 4B.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., fonctionnaire titulaire du grade d'adjoint technique territorial de deuxième classe a été recruté par la communauté de communes Sud Charente 4B (Charente) à compter du 1er janvier 2012 pour occuper les fonctions d'agent de restauration collective au sein de la cuisine centrale de Barbezieux. Par une décision du 25 septembre 2019, le président de la communauté de communes lui a infligé la sanction disciplinaire de l'avertissement en raison de faits, commis dans l'exercice de ses fonctions, assimilables à un harcèlement sexuel et un manquement aux règles déontologiques. M. A... relève appel du jugement du 29 décembre 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 19 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors en vigueur : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. / (...) Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée à droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier. (...) ". Aux termes de l'article 89 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, alors en vigueur : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : / Premier groupe : / l'avertissement ; (...) ". Aux termes de l'article 4 du décret du 18 septembre 1989 relatif à la procédure disciplinaire applicable aux fonctionnaires territoriaux : " L'autorité investie du pouvoir disciplinaire informe par écrit l'intéressé de la procédure disciplinaire engagée contre lui, lui précise les faits qui lui sont reprochés et lui indique qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel au siège de l'autorité territoriale et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix. (...). ".

3. Une sanction ne peut être légalement prononcée à l'égard d'un agent public sans que l'intéressé ait été mis en mesure de présenter utilement sa défense. S'agissant des sanctions du premier groupe, dont fait partie, pour les fonctionnaires territoriaux, l'avertissement, cette garantie procédurale est assurée, en application des dispositions de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983, par l'information donnée par l'administration à l'intéressé qu'une procédure disciplinaire est engagée et qu'il dispose du droit à la communication de son dossier individuel et de tous les documents annexes, ainsi qu'à l'assistance des défenseurs de son choix.

4. Il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'a relevé le magistrat du tribunal, que, préalablement au prononcé de la sanction litigieuse, le président de la communauté de communes Sud Charente 4B a, par un courrier du 6 décembre 2018 remis en mains propres, informé M. A... de l'engagement d'une poursuite disciplinaire à son encontre pour des actes, commis dans l'exercice de ses fonctions, assimilables à un harcèlement sexuel et un manquement aux règles de déontologie et qu'il disposait de la possibilité, d'une part, d'obtenir la communication de son dossier administratif selon les modalités qui y étaient précisées, d'autre part, de présenter des observations écrites ou orales et citer des témoins, et enfin, d'être assisté d'un ou plusieurs conseils de son choix lors de l'entretien auquel il était convoqué le 17 décembre suivant. Ayant effectivement consulté son dossier individuel le 14 décembre 2018 sans émettre d'ailleurs la moindre réserve quant à son contenu, l'intéressé a été reçu à un entretien le jour convenu, lors duquel l'ensemble des propos et agissements qui lui étaient reprochés par les deux collègues de travail concernées, qu'il a contestés à cette occasion, lui ont été clairement exposés. A cet égard, le requérant ne peut sérieusement faire grief à l'administration, eu égard à la nature des faits qui lui étaient reprochés, de ne pas avoir mentionné précisément, dans la décision attaquée, les règles déontologiques qu'il n'aurait pas respectées. Dans ces conditions, et alors qu'au surplus l'administration n'était pas tenue, s'agissant d'une sanction du premier groupe, de le convoquer, pour les besoins de la procédure contradictoire, à un entretien préalable, M. A... a été mis en mesure de présenter utilement sa défense. Si l'appelant fait valoir qu'il n'a pu saisir les autorités judiciaires d'une plainte pour faux témoignage et dénonciation calomnieuse en raison de l'absence, dans son dossier individuel, de témoignage écrit de ses accusatrices relatif aux faits qui lui étaient reprochés, cette circonstance n'est pas de nature, eu égard à ce qui vient d'être dit, à avoir privé l'intéressé d'une garantie. Le moyen tiré de ce que la décision attaquée aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière doit, dès lors, être écarté.

5. En second lieu, aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 précitée, alors en vigueur : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire (...) ". Il appartient à l'autorité investie du pouvoir disciplinaire d'établir les faits sur le fondement desquels elle inflige une sanction à un agent public.

6. Pour établir la matérialité des faits reprochés à M. A... ayant conduit au prononcé de la sanction litigieuse, la communauté de communes Sud Charente 4B produit un rapport hiérarchique établi le 14 novembre 2018 par l'agent d'encadrement de l'intéressé, le responsable du " pôle éducation jeunesse " et le responsable des ressources humaines, lesquels ont reçu en entretien une collègue de travail de M. A... qui était en poste à la cuisine centrale de Barbezieux entre le 8 septembre 2016 et le 5 mars 2017, faisant état de ce que le requérant " d'une manière générale se rapprochait souvent physiquement d'elle, jusqu'à se coller à elle ", l'intéressé lui ayant notamment " pincé une épaule " le 15 décembre 2016 et exercé une pression sur sa poitrine le 16 décembre 2016 lors de la préparation des repas. Le rapport précise que ces faits ont été confirmés par la responsable de la cuisine centrale. L'administration produit également un autre rapport établi le 20 novembre 2018 par la même responsable et contresigné par l'auteur des témoignages, indiquant qu'entre septembre 2017 et novembre 2018, M. A... a adopté à l'égard d'une autre collègue un comportement déplacé en formulant régulièrement à son attention des observations à caractère implicitement sexuel et en frôlant à plusieurs reprises ses fesses. Contrairement à ce que persiste à soutenir M. A... en appel, ces rapports, qui comportent l'énoncé de faits circonstanciés et concordants non sérieusement remis en cause par ses dénégations, sont suffisants pour établir la matérialité des faits reprochés à l'agent. La circonstance que l'administration a produit en première instance un témoignage complémentaire d'une troisième collègue de travail relatant des agissements analogues, daté du 2 décembre 2020, soit postérieur d'un an à la décision litigieuse, n'est pas de nature à remettre en cause la réalité des faits relatés dans ces rapports. Si M. A... fait valoir que ses évaluations professionnelles au titre des années 2016 à 2018 ne font état d'aucune observation quant à son attitude vis-à-vis de ses collègues de travail et que les faits qui lui sont reprochés n'auraient été dénoncés aux autorités judiciaires ni par les plaignantes ni par son employeur de sorte qu'il n'a fait l'objet d'aucune condamnation pénale, ces circonstances sont sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. A cet égard, l'appelant ne peut, en tout état de cause, utilement invoquer le principe de présomption d'innocence dès lors que la décision contestée prise à l'issue d'une procédure disciplinaire est indépendante des poursuites pénales qui auraient été susceptibles d'être engagées. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que la sanction reposerait sur des faits dont l'exactitude matérielle ne serait pas démontrée doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Sur les frais d'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la communauté de communes Sud Charente 4B, qui n'est pas dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à verser à M. A... la somme que celui-ci demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. A... la somme de 1 500 euros sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à la communauté de communes Sud Charente 4B la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et à la communauté de communes Sud Charente 4B.

Délibéré après l'audience du 24 avril 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Florence Demurger, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

M. Anthony Duplan, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 mai 2023.

Le rapporteur,

Anthony B...

La présidente,

Florence DemurgerLa greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne préfet de la Charente en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21BX01041


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01041
Date de la décision : 24/05/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DEMURGER
Rapporteur ?: M. Anthony DUPLAN
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : LAVALETTE AVOCATS CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/05/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-05-24;21bx01041 ?
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