Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société B... Promotion a demandé au tribunal administratif de Limoges de prononcer la décharge de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises auxquels elle été assujettie au titre de l'année 2014 et des majorations pour manquement délibéré qui lui ont été appliquées et correspondant aux suppléments d'impôt sur les sociétés et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises auxquels elle été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014 et au titre de l'année 2014.
Par un jugement n°1802021 du 4 février 2021, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 1er avril 2021, la société B... Promotion, représentée par Me Gaydon, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Limoges du 4 février 2021 en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des majorations pour manquement délibéré ;
2°) de prononcer la décharge des majorations pour manquement délibéré correspondant aux cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- pour chaque écriture redressée, il s'agit d'une erreur matérielle et non d'une omission volontaire ou d'un manquement délibéré à ses obligations ;
- les arguments selon lesquels il est un professionnel de l'immobilier depuis plus de quarante ans et que des rectifications identiques en matière de stocks ont été notifiées lors de précédentes rectifications en 2010 ne sont pas de nature à justifier l'application d'une majoration pour manquement délibéré ;
- le fait pour une entreprise de minorer dans des proportions significatives, sur sa déclaration de résultat, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés ne justifie pas non plus l'application des pénalités pour manquement délibéré.
Par un mémoire enregistré le 16 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens développés par la société B... Promotion ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... A... ;
- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société à responsabilité limitée (SARL) B... Promotion qui exerce une activité de promotion immobilière, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2014, à l'issue de laquelle l'administration l'a informée, par une proposition de rectification du 16 décembre 2016, de son intention de l'assujettir à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2014 et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises au titre de l'année 2014. Par une réclamation du 6 avril 2018, la société a accepté l'ensemble des droits notifiés mais contestait les majorations de 40 % prévues à l'article 1729 du code général des impôts. La société B... Promotion a demandé au tribunal administratif de Limoges la décharge du supplément de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises mis à sa charge et des majorations prévues à l'article 1729 du code général des impôts. Elle relève appel du jugement du 4 février 2021 du tribunal administratif de Limoges en tant qu'il a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des pénalités pour manquement délibéré.
Sur les conclusions à fin de décharge :
2. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. (...) le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. (...) 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient. / Les travaux en cours sont évalués au prix de revient (...) ". L'article 38 ter de l'annexe III à ce code dispose que : " Le stock est constitué par l'ensemble des marchandises, des matières premières, des matières et fournitures consommables, des productions en cours, des produits intermédiaires, des produits finis, des produits résiduels et des emballages non destinés à être récupérés, qui sont la propriété de l'entreprise à la date de l'inventaire et dont la vente en l'état ou au terme d'un processus de production à venir ou en cours permet la réalisation d'un bénéfice d'exploitation. / Les productions en cours sont les biens ou les services en cours de formation au travers d'un processus de production (...) ". Il résulte de ces dispositions que, si les éléments du stock proprement dit peuvent, le cas échéant, être évalués d'après le cours du jour et leur éventuelle dépréciation être constatée par une provision égale à la différence entre le prix de revient et le cours du jour, les productions en cours doivent être évaluées à leur seul prix de revient et ne peuvent éventuellement donner lieu qu'à une provision pour perte conformément au 5° du 1 de l'article 39 du code général des impôts. Aux termes du 1 de l'article 39 du même code, également applicable en matière d'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ".
3. Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions du 1 de l'article 39 du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
4. Il ressort de la proposition de rectification du 16 décembre 2016 que l'administration a remis en cause la déduction d'une somme de 1 600 000 euros correspondant à un ensemble immobilier à usage d'abattoir désaffecté situé avenue Ampère à Lons. Si la société B... Promotion fait valoir que cette écriture " Gascogne Limousin " était justifiée dès lors qu'elle avait présenté une promesse d'achat du 27 mars 2015 non remise en cause par l'administration, il est constant que cette promesse n'a pas été enregistrée et qu'aucun acte d'achat n'a été conclu en 2015 ni en 2016. Par suite, dès lors que la promesse d'achat ne constitue pas un engagement définitif, l'administration était fondée à réintégrer la somme de 1 600 000 euros au résultat fiscal de l'exercice clos le 31 décembre 2014.
5. Il résulte de l'instruction que l'administration a rejeté les décotes directes pratiquées par la société B... Promotion sur la valeur du stock immobilier pour les opérations Alençon 1, Alençon 2 et Chatillon-sur-Indre pour une somme totale de 498 000 euros. La société appelante explique ces décotes, s'agissant de l'opération Alençon 1, par le fait qu'il s'agissait d'une " queue de programme " difficilement commercialisable, concernant l'opération Alençon 2, par la lenteur des procédures d'obtention des autorisations administratives et du versement des subventions d'ouverture du cinéma concerné, et quant à l'opération Chatillon-sur-Indre, par la revente par lots d'un terrain acheté par la commune pour un euro. Toutefois, la société appelante n'apporte aucun élément probant permettant de justifier de la réalité et du montant de la perte de valeur ainsi retenue. Dès lors, l'administration a pu à bon droit réintégrer dans les résultats de l'exercice clos en 2014 la perte de 498 000 euros.
6. Il résulte de l'instruction que la société B... Promotion a acquis des terrains en mars 2014 afin de réaliser deux opérations de promotion immobilière, les programmes Excelmans à Châteauroux et IUFM de Bourges et a fait réaliser des travaux importants sous-traités à la SA B..., pour des montants respectivement de 1 334 684 euros HT et 1 269 466 euros HT comptabilisés en charges, sans procéder à une comptabilisation en stock à l'actif du bilan du prix de revient des productions en cours. La société B... promotion fait valoir que les travaux n'ont pas accru la valeur vénale des immeubles sur lesquels ils ont été effectués et que leur prix a été déclaré dans les produits taxables les années suivantes. Toutefois, la société appelante n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations. Par suite, la société appelante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que l'administration a réintégré les sommes de 1 334 684 euros et 1 269 466 euros dans ses résultats de l'exercice clos en 2014.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la société B... Promotion n'est pas fondée à invoquer l'absence de bien-fondé des impositions mises à sa charge à l'appui de sa demande en décharge de la majoration.
8. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Pour établir un tel manquement, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.
9. Pour justifier l'application de la majoration pour manquement délibéré, l'administration a relevé dans la proposition de rectification du 16 décembre 2016, en premier lieu, que M. B..., dirigeant de la société, avait la qualité de professionnel de l'immobilier depuis plus de quarante ans et qu'il connait le marché ainsi que les règles fiscales qui y sont attachées, en deuxième lieu, que des rectifications identiques avaient été notifiées à la société lors de précédentes vérifications et en troisième lieu, que les minorations représentaient des proportions significatives, les rectifications s'élevant à 4 932 974 euros alors que le bénéfice déclaré était de 4 875 156 euros soit une minoration de 100 % et en ce qui concerne la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, le rappel correspondant à 86 % du montant acquitté de la cotisation. Il n'est pas sérieusement contesté par la société appelante, qu'au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, l'administration avait procédé à des rectifications en matière de stocks pour un montant de 763 563 euros au titre de 2007 et 1 717 114 euros au titre de 2008, rectifications qui avaient été acceptées par la société. Ainsi, la société ne pouvait ignorer qu'une promesse de vente était insuffisante pour justifier d'une charge dans la mesure où la vente n'était pas encore intervenue, ni que les achats de biens devaient faire l'objet d'une neutralisation par une écriture de variation de stocks. Par suite, eu égard à la nature et aux montants des sommes réintégrées et au caractère répété des manquements constatés, l'administration doit être regardée comme apportant la preuve qui lui incombe du bien-fondé des pénalités prévues par les dispositions du a de l'article 1729 du code général des impôts.
10. Il résulte de tout ce qui précède que la société B... Promotion n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des pénalités prévues à l'article 1729 du code général des impôts correspondant aux cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2014 et aux rappels de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2014.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande la société B... Promotion au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête présentée par la société B... Promotion est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société B... Promotion et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 25 avril 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
Mme Claire Chauvet, présidente assesseure,
Mme Nathalie Gay, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2023.
La rapporteure,
Nathalie A...La présidente,
Elisabeth Jayat
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX01353 2