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29/03/2023 | FRANCE | N°21BX01940

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 29 mars 2023, 21BX01940


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler la décision du 25 juin 2019 par laquelle le maire de La Désirade a rejeté sa demande d'octroi d'un congé de longue maladie.

Par un jugement n° 1901140 du 9 février 2021, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 10 mai 2021 et le 10 décembre 2021, Mme B... C..., représentée par Me Krebs, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement

n° 1901140 du tribunal ;

2°) d'annuler la décision du 25 juin 2019 en litige ;

3°) d'enjoindre au mai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe d'annuler la décision du 25 juin 2019 par laquelle le maire de La Désirade a rejeté sa demande d'octroi d'un congé de longue maladie.

Par un jugement n° 1901140 du 9 février 2021, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 10 mai 2021 et le 10 décembre 2021, Mme B... C..., représentée par Me Krebs, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1901140 du tribunal ;

2°) d'annuler la décision du 25 juin 2019 en litige ;

3°) d'enjoindre au maire de La Désirade de lui octroyer un congé de longue maladie à compter du 17 octobre 2018 ou de procéder à un nouvel examen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de la commune de La Désirade la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient, en ce qui concerne la recevabilité de son appel, que :

- sa requête n'est pas tardive dès lors qu'elle a été enregistrée avant l'expiration du délai de distance qui est de trois mois ;

Elle soutient, au fond, que :

- l'article 107 de la loi du 26 janvier 1984 relative à la fonction publique territoriale ne permet pas aux fonctionnaires territoriaux employés à temps non complet, dont la durée de travail est inférieure à un certain seuil, d'être affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités territoriales ; elle se trouve ainsi privée de la possibilité de solliciter un congé de longue maladie en application de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 ; or l'article 107 de la même loi est contraire au principe de non-discrimination en raison du sexe consacré par l'article 157 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et les articles 5 et 9 de la directive 2006/54/CE du 5 juillet 2006 ;

- en raison de l'inconventionnalité de l'article 157, la décision en litige doit être annulée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juillet 2021, la commune de La Désirade, représentée par Me Bichara-Jabour, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme C... la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête d'appel a été enregistrée tardivement ; au fond, que tous les moyens de la requête doivent être écartés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 91-298 du 20 mars 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... A...,

- les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique,

- et les observations de Me Krebs représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... est adjointe technique territoriale employée par la commune de La Désirade (La Guadeloupe) pour un temps de travail hebdomadaire de 27 heures. Le 20 juin 2019, elle a demandé au maire de cette commune l'octroi d'un congé de longue maladie en application de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984. Le maire de La Désirade a rejeté sa demande par une décision du 25 juin 2019 dont Mme C... a demandé l'annulation au tribunal administratif de la Guadeloupe. Mme C... relève appel du jugement rendu le 9 février 2021 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la légalité de la décision du 25 juin 2019 :

2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, en vigueur à la date de la décision attaquée : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. " Aux termes de l'article 107 de la même loi : " Le fonctionnaire nommé dans un emploi à temps non complet doit être affilié à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, s'il consacre à son service un nombre minimal d'heures de travail fixé par délibération de cette caisse. (...) / Le fonctionnaire titularisé dans un emploi permanent à temps non complet qui ne relève pas du régime de retraite de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales est affilié à une institution de retraite complémentaire régie par l'article L. 4 du code de la sécurité sociale. ".

3. Par une délibération du 3 octobre 2001, le conseil d'administration de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) a fixé le seuil d'affiliation des fonctionnaires territoriaux à temps non complet aux 4/5èmes de la durée légale hebdomadaire de travail des fonctionnaires à temps complet, soit à vingt-huit heures.

4. Il est constant que Mme C... est employée à temps incomplet par la commune de la Désirade où elle travaille à raison de 27 heures par semaine. En conséquence, et en application des dispositions précitées de l'article 107 de la loi du 26 janvier 1984, elle ne relève pas du régime de retraite de la CNRACL.

5. Il s'ensuit que la demande d'octroi d'un congé de longue maladie, que Mme C... a présentée au titre du 3° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984, était régie par les dispositions de l'article 35 du décret du 20 mars 1991, portant dispositions statutaires applicables aux fonctionnaires territoriaux nommés dans des emplois permanents à temps non complet, lequel est inclus dans le chapitre IV de ce décret intitulé : " Dispositions relatives à la protection sociale des fonctionnaires territoriaux ne relevant pas du régime de retraite de la caisse nationale de retraites des agents de collectivités locales ". Aux termes l'article 35 du décret du 20 mars 1991 : " Le fonctionnaire ne bénéficie pas des dispositions (...) du 3° (...) de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 (...) ". Aux termes de l'article 36, inclus dans le même chapitre IV, du même décret : " En cas d'affection dûment constatée le mettant dans l'impossibilité d'exercer son activité, nécessitant un traitement et des soins prolongés et présentant un caractère invalidant et de gravité confirmée, le fonctionnaire bénéficie d'un congé de grave maladie pendant une période maximale de trois ans. Dans cette situation, il conserve l'intégralité de son traitement pendant une durée de douze mois. Le traitement est réduit de moitié pendant les vingt-quatre mois suivants. (...) ".

6. C'est donc par une exacte application des dispositions précitées, ce qui n'est au demeurant pas contesté par Mme C..., que le maire de La Désirade a, par la décision attaquée du 25 juin 2019, rejeté la demande de congé de longue maladie dont il était saisi en précisant qu'un congé pour grave maladie pouvait être sollicité le cas échéant.

7. Mme C... fait néanmoins valoir que les dispositions de l'article 107 de la loi du 26 janvier 1984 méconnaissent l'article 157 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ainsi que les articles 5 et 9 de la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du du 5 juillet 2006, relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité des chances et de l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail, en ce qu'ils instituent une discrimination indirecte fondée sur le sexe dans les conditions d'accès à un régime professionnel de sécurité sociale, contraire aux exigences du principe de non-discrimination découlant de ces normes européennes.

8. Un tel moyen est toutefois inopérant à l'encontre de la décision attaquée dès lors que l'exclusion, dans le cas de Mme C..., du bénéfice du congé de longue maladie prévu au 3° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 résulte de l'article 35 du décret du 20 mars 1991 et non de son affiliation à l'IRCANTEC conformément à l'article 107 de la même loi. Au demeurant, Mme C... est en mesure de bénéficier de l'article 36 du même décret, qui ouvre droit, pour les fonctionnaires non affiliés à la CNRACL, à un congé de grave maladie offrant une protection équivalente à celle du congé de longue maladie, et dont elle n'a pas demandé à bénéficier.

9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée à la requête d'appel, que Mme C... n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais d'instance :

11. Les conclusions présentées par Mme C... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées dès lors que la commune de La Désirade n'est pas la partie perdante à l'instance d'appel. En revanche, il y a lieu de faire application de ces dispositions en mettant à la charge de Mme C... la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la commune et non compris dans les dépens.

DECIDE

Article 1er : La requête n° 21BX01940 de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Mme C... versera à la commune de La Désirade la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et à la commune de La Désirade.

Délibéré après l'audience du 6 mars 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Florence Demurger, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

M. Anthony Duplan, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2023.

Le rapporteur,

Frédéric A...

La présidente,

Florence Demurger

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de la transformation et de la fonction publiques, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX01940 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01940
Date de la décision : 29/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DEMURGER
Rapporteur ?: M. Frédéric FAÏCK
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : KREBS

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2023-03-29;21bx01940 ?
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