Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... C... D... a demandé au tribunal administratif de Poitiers la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015.
Par un jugement n°1802501 du 16 décembre 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 février 2021, M. C... D..., représenté par Me Grasset, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 16 décembre 2020 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2014 et 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la procédure est irrégulière dès lors que la première intervention a eu lieu le 8 juin 2017 et que le contrôle s'est terminé le 13 décembre 2017 ; la durée de vérification a ainsi excédé le délai de six mois prévu du 4° du II de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales ;
- lors de la vérification de comptabilité, le vérificateur a pris des documents originaux sans respecter les formalités préalables à l'emport des documents comme la demande écrite au contribuable et la délivrance d'un reçu par le vérificateur ;
- le service n'était pas fondé à appliquer un rappel de TVA collectée et des majorations pour défaut tardif qui ne résultent que de la mauvaise transmission du dossier entre le SIE de Saintes et le SIE de Cognac lors du transfert de son siège social le 28 octobre 2014 ;
- s'agissant des bénéfices industriels et commerciaux, les encaissements correspondent non à des crédits professionnels mais à des remboursements de prêts faits à certains membres de sa famille ; les charges rejetées par l'administration représentent le loyer Belmont Auto et la location d'un bureau commercial à Chaniers ;
- la majoration de 40 % n'est pas justifiée.
Par deux mémoires enregistrés le 5 août 2021 et le 23 mars 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens développés par l'appelant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Nathalie Gay;
- les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public ;
- et les observations de Me Grasset représentant M. C... D....
Considérant ce qui suit :
1. M. C... D..., qui a exercé à titre individuel une activité de commerce de véhicules d'occasion à Chaniers (Charente-Maritime) en 2014 puis une activité d'entretien et de réparation de véhicules automobiles à Genté (Charente) en 2015, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015 au titre de ces deux activités, à la suite de laquelle l'administration l'a informé, par une proposition de rectification du 18 décembre 2017, de son intention de mettre à sa charge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2014 et 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015. M. C... D... relève appel du jugement du 16 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.
Sur les conclusions à fin de décharge des impositions :
En ce qui concerne la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales : " I. Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : / 1° Les entreprises industrielles et commerciales (...) / II. Par dérogation au I, l'expiration du délai de trois mois n'est pas opposable à l'administration : (...) 4° En cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité. Dans ce cas, la vérification sur place ne peut s'étendre sur une durée supérieure à six mois (...) III. En cas de mise en œuvre du I de l'article L. 47 A, les délais de trois ou six mois prévus, respectivement, au I et au 4° du II du présent article sont suspendus jusqu'à la remise de la copie des fichiers des écritures comptables à l'administration (...) ". Aux termes de l'article L. 47 A du même livre : " I. Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contribuable qui fait l'objet d'une vérification de comptabilité satisfait à l'obligation de représentation des documents comptables mentionnés au premier alinéa de l'article 54 du code général des impôts en remettant au début des opérations de contrôle, sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget, une copie des fichiers des écritures comptables définies aux articles 420-1 et suivants du plan comptable général (...) ". La date à laquelle la vérification sur place des livres et documents mentionnée à l'article L. 52 du livre des procédures fiscales doit être regardée comme ayant débuté est celle à laquelle le vérificateur commence à contrôler sur place la sincérité des déclarations fiscales.
3. Il résulte de la proposition de rectification du 18 décembre 2017 que M. C... D... a demandé, à la suite de la réception de l'avis de vérification du 28 avril 2017, le report de la première intervention au 8 juin 2017 au domicile de sa mère à Châteaubernard (Charente), ainsi que le confirme le courrier du 12 mai 2017. Toutefois, en raison de l'hospitalisation de l'intéressé le 8 juin 2017, la première intervention a été reportée au 26 juin 2017 ainsi que le confirme le courrier du 9 juin 2017. La seule production d'un " mandat de pouvoir " daté du 8 juin 2017 ne suffit pas à tenir pour établie la tenue de la première intervention à cette même date. Contrairement à ce que soutient l'appelant, la copie des fichiers des écritures comptables n'a pas été remise au vérificateur le 8 juin 2017 mais le 28 juillet 2017 ainsi que le confirment le courrier et le procès-verbal datés du même jour. Par suite, dès lors que les opérations de vérification se sont terminées le 13 décembre 2017, M. C... D... n'est pas fondé à soutenir que la vérification aurait excédé le délai de six mois prévu par le 4° du II de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales.
4. Si l'appelant soutient que le vérificateur aurait emporté irrégulièrement des documents originaux, il n'apporte aucun document probant permettant de corroborer ses affirmations relatives à cette irrégularité alléguée de la procédure.
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
5. Aux termes de l'article 302 septies A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " I. Il est institué par décret en Conseil d'Etat un régime simplifié de liquidation des taxes sur le chiffre d'affaires dues par les personnes dont le chiffre d'affaires, ajusté s'il y a lieu au prorata du temps d'exploitation au cours de l'année civile, n'excède pas 783 000 €, s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, ou 236 000 €, s'il s'agit d'autres entreprises. Ces limites s'apprécient en faisant abstraction de la taxe sur la valeur ajoutée et des taxes assimilées. / II. Le régime simplifié prévu au I demeure applicable pour l'établissement de l'imposition due au titre de la première année au cours de laquelle les chiffres d'affaires limites prévus pour ce régime sont dépassés. Cette imposition est établie compte tenu de ces dépassements. / Ces dispositions ne sont pas applicables si le chiffre d'affaires excède 863 000 € s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir le logement, et 267 000 € s'il s'agit d'autres entreprises (...) ". Aux termes de l'article 287 du même code : " 1. Tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est tenu de remettre au service des impôts dont il dépend et dans le délai fixé par arrêté une déclaration conforme au modèle prescrit par l'administration. (...) 3. Les redevables placés sous le régime simplifié d'imposition prévu à l'article 302 septies A déposent au titre de chaque exercice une déclaration qui détermine la taxe due au titre de la période et le montant des acomptes trimestriels pour la période ultérieure ". Aux termes de l'article 242 sexies de l'annexe II du même code : " Les entreprises placées sous le régime simplifié souscrivent chaque année, au plus tard le deuxième jour ouvré suivant le 1er mai la déclaration mentionnée au 3 de l'article 287 du code général des impôts suivant le modèle prescrit par l'administration (...) ".
6. Il résulte de la proposition de rectification du 18 décembre 2017 que M. C... D... a déposé ses déclarations récapitulatives CA 12 en cours de vérification le 28 juillet 2017 pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2014 et le 23 juin 2017 pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2015 pour des montants respectifs de 4 879 et 882 euros. Ces montants ont été pris en compte lors du calcul des rappels de TVA en tant que TVA collectée déclarée. Ainsi, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le service aurait appliqué à tort un rappel de TVA collectée et des majorations pour défaut et dépôt tardif de déclarations du fait d'une mauvaise transmission de dossier entre le SIE de Saintes et le SIE de Cognac à la suite du transfert de son siège social le 28 octobre 2014 à Genté. Par ailleurs, si M. C... D... fait valoir que l'administration n'a pas tenu compte de ce qu'il avait déjà payé le montant de la taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015, ce moyen met en cause l'existence de l'obligation de payer au sens de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales et relève du contentieux du recouvrement de l'impôt.
7. Il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification du 18 décembre 2017 qu'à la suite de l'exercice du droit de communication auprès d'établissements bancaires, l'administration a considéré certains crédits comme professionnels dans la mesure où ils étaient liés à la vente de véhicules identifiés. Ainsi, des encaissements de 13 496 euros en 2014 et 9 162 euros en 2015, en l'absence de justification de leur nature et de leur origine non professionnelle, ont été réintégrés en tant que revenus imposables dans les bénéfices industriels et commerciaux des exercices correspondants soit 11 247 euros HT pour 2014 et 7 652 HT euros pour 2015. M. C... D..., à qui incombe la charge de la preuve en application de l'article 193 du livre des procédures fiscales, fait valoir qu'une partie de ces sommes correspond à des remboursements de prêts consentis à des proches mais se borne à produire à l'appui de ses affirmations trois attestations peu circonstanciées et datées de 2017, 2018 et 2020 qui ne permettent pas de justifier ses allégations.
8. Aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) ". En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. En ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.
9. En premier lieu, il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification du 18 décembre 2017 que l'administration a remis en cause un montant de 6 500 euros déduit au titre des charges locatives, en l'absence de justification de contrat de location. Lors de la réponse aux observations du contribuable, l'administration a abandonné cette rectification à la suite de la production du bail pour la location d'un terrain nu à Médis conclu avec la SARL Belmont Autos. En première instance, l'administration a, en application de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales, demandé le rattachement de cette charge locative de 6 500 euros à la location de l'établissement de Chaniers et soutient qu'elle est légitime à opérer ce rattachement. M. C... D... produit un bail d'une durée de deux ans, daté du 26 novembre 2013, conclu avec M. A... B... pour un bureau commercial situé 64 rue des Passereaux à Chaniers pour un loyer de 500 euros par mois. Ainsi, ce seul document ne permet pas de tenir pour établie une charge locative pour ce local excédant, pour l'année 2014, le montant de 6 500 euros admis en déduction par l'administration.
10. En second lieu, l'appelant produit un bail pour un terrain nu situé à Medis (Charente-Maritime) conclu le 14 février 2014 avec la SARL Belmont Autos prévoyant un loyer mensuel de 1 250 euros HT, gratuit jusqu'au 15 mars 2014, puis ramené à 1 000 euros HT pour la période du 15 mars 2014 au 28 février 2015. Si l'article 4 de ce contrat stipule que les locaux, objet du bail, seront utilisés par le preneur à usage de toutes activités liées à la vente de tous véhicules, à l'exclusion de toutes autres, l'appelant n'apporte aucune explication quant à l'intérêt pour l'exploitation de son entreprise, dont le siège social est à Chaniers à environ 40 km de Médis, de louer un terrain nu. Par ailleurs, si l'appelant verse au dossier deux quittances de loyer de 11 000 euros en 2014 et 4 000 euros en 2015, datées du 29 septembre 2018, établies par la SCI Belmont Autos alors que la société bailleresse la SARL Belmont Autos a été liquidée amiablement et radiée le 6 avril 2017, l'administration est fondée à soutenir que ces montants excèdent ceux prévus par le contrat de location du 14 février 2014. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif n'a pas admis le caractère déductible de ces charges locatives.
En ce qui concerne la majoration de 40 % :
11. M. C... D... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de ce que la majoration prévue au b) du 1 de l'article 1728 du code des impôts est injustifiée. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.
12. Il résulte de ce qui précède que M. C... D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête présentée par M. C... D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C... D... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré après l'audience du 24 janvier 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Elisabeth Jayat, présidente,
Mme Nathalie Gay, première conseillère,
Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 21 février 2023.
La rapporteure,
Nathalie GayLa présidente,
Elisabeth Jayat
La greffière,
Virginie Santana
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX00725 2