Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Saint-Barthélemy d'annuler la délibération du 5 mars 2020 par laquelle le conseil exécutif de la collectivité de Saint-Barthélemy a retiré sa précédente décision du 5 décembre 2019 portant refus de permis de construire et a délivré à la société PRO B un permis de construire pour la réalisation de neuf logements ainsi que le rejet implicite de son recours gracieux formé le 17 avril 2020.
Par un jugement n° 2000018 du 19 octobre 2021, le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a annulé ces décisions.
Procédure devant la cour :
I - Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2021, sous le n°21BX04677, la collectivité de Saint-Barthélemy, représentée par Me Destarac, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 octobre 2021 :
2°) de rejeter la demande de Mme A... ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la motivation du jugement est insuffisante s'agissant du moyen tiré de la méconnaissance de l'article UR 6 du règlement de la carte d'urbanisme ;
- le motif tiré de la méconnaissance de l'article 71 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ne pouvait justifier l'annulation du permis de construire ; dès lors qu'il existait un titre créant une servitude de passage, il n'appartenait pas au juge de vérifier la validité de cette servitude ; en outre une éventuelle erreur dans l'attestation notariée n'aurait pas été de nature à fausser son appréciation ;
- le motif tiré de la méconnaissance de l'article UR 3 du règlement de la carte d'urbanisme est erroné en raison de l'existence d'un avis favorable du SDIS ainsi que d'un accès par voie privée ouverte à la circulation publique d'une largeur suffisante ;
- le motif tiré de la méconnaissance de l'article UR 6 du règlement de la carte d'urbanisme est erroné dès lors que les surfaces non closes situées au rez-de-chaussée ne devaient pas être prises en compte pour le calcul de la SHON ;
- il était possible de régulariser ces vices dans le cadre de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.
Par des mémoires en défense enregistrés les 2 mai et 21 novembre 2022, Mme A..., représentée par Me Collet, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la collectivité de Saint-Barthélemy en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;
- dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, ces décisions ont été prises en méconnaissance de l'article LO 6222-13 du code général des collectivités territoriales ; elles sont illégale en raison de l'incomplétude du dossier de demande, de l'existence d'une fraude, de la méconnaissance de l'article UR 9 du règlement de la carte d'urbanisme ;
- elles ont été prises en méconnaissance de l'article 2 du décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains applicable au 15 juillet 2007.
Par un courrier du 23 novembre 2022, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité, en application de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme, du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 2 du décret n°2002-120 du 30 janvier 2002 relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n°2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains applicable au 15 juillet 2007, qui a été soulevé dans le mémoire enregistré le 21 novembre 2022, soit plus de deux mois après la communication du premier mémoire en défense.
II - Par une requête, enregistrée le 21 décembre 2021 sous le n° 21BX04704, et un mémoire enregistré le 15 novembre 2022, la société PRO B, représentée par Me Ladaoui, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 19 octobre 2021 :
2°) de rejeter la demande de Mme A... ;
3°) de mettre à la charge de Mme A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le motif tiré de la méconnaissance de l'article 71 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ne pouvait justifier l'annulation du permis de construire dès lors qu'il ne lui appartenait que d'apporter la preuve de l'existence d'une servitude de passage et non d'établir sa validité ;
- le motif tiré de la méconnaissance de l'article UR 3 du règlement de la carte d'urbanisme est erroné dès lors que les caractéristiques de la voie d'accès mentionnées au dossier sont conformes ;
- le motif tiré de la méconnaissance de l'article UR 6 du règlement de la carte d'urbanisme est erroné dès lors que les surfaces non closes situées au rez-de-chaussée ne devaient pas prises en compte pour le calcul de la SHON ;
- il était possible de régulariser ces vices dans le cadre de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense enregistré le 2 mai 2022, Mme A..., représentée par Me Collet, conclut au rejet de la requête et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la collectivité de Saint-Barthélemy en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés ne sont pas fondés ;
- dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, ces décisions ont été prises en méconnaissance de l'article LO 6222-13 du code général des collectivités territoriales ; elles sont illégales en raison de l'incomplétude du dossier de demande, de l'existence d'une fraude, de la méconnaissance de l'article UR9 du règlement de la carte d'urbanisme.
Par un mémoire enregistré le 24 juin 2022, la collectivité de Saint Barthélemy, représentée par Me Destarac, conclut aux mêmes fins que la société PRO B et demande qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme A... au tire de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le motif tiré de la méconnaissance de l'article 71 du code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ne pouvait justifier l'annulation du permis de construire dès lors que le dossier comportait un titre attestant de l'existence d'une servitude de passage ; en outre une éventuelle erreur dans l'attestation notariée n'aurait pas été de nature à fausser son appréciation ;
- le motif tiré de la méconnaissance de l'article UR 3 du règlement de la carte d'urbanisme est erroné ;
- le motif tiré de la méconnaissance de l'article UR 6 du règlement de la carte d'urbanisme est erroné ;
- il était possible de régulariser ces vices dans le cadre de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... D...,
- les conclusions de M. Romain Roussel Cera, rapporteur public,
- et les observations de Me Collet, représentant Mme A....
Considérant ce qui suit :
1. A la demande de Mme A..., le tribunal administratif de Saint-Barthélemy a annulé la délibération du 5 mars 2020, par laquelle la collectivité de Saint-Barthélemy a retiré sa précédente délibération du 5 décembre 2019 portant refus de permis de construire et a délivré à la société PRO B un permis de construire pour la réalisation de neuf logements, ainsi que le rejet implicite du recours gracieux formé le 17 avril 2020. Par deux requêtes enregistrées sous les numéros 21BX04677 et 21BX04704, la collectivité de Saint-Barthélemy et la société PRO B relèvent appel de ce jugement. Ces requêtes étant dirigées contre le même jugement, il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.
Sur la régularité du jugement :
2. Après avoir rappelé les dispositions applicables de l'article UR 6 du règlement de la carte d'urbanisme applicable au projet, les premiers juges ont estimé, au point 18 du jugement attaqué, qu'au vu de la configuration des constructions et de la circonstance que les cuisines pouvaient être fermées sans l'intervention de travaux supplémentaires, leurs surfaces devaient être prises en compte pour le calcul de la surface hors œuvre nette du projet. Ce faisant, le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments, a suffisamment précisé les motifs qui l'ont conduit à considérer que ces espaces ne pouvaient être considérés comme des surfaces non closes situées au rez-de-chaussée au sens de ce règlement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement sur ce point doit être écarté.
Sur les moyens d'annulation retenus par le tribunal administratif :
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article 71 de l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy :
3. Aux termes de l'article 71 de l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy, applicable en l'espèce s'agissant d'une demande de permis de construire enregistrée avant le 1er juillet 2019 : " A. Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : (...) 12° Si le terrain est desservi par une servitude de passage, la preuve de l'existence de cette servitude ou, à défaut, une autorisation de passage (...) ".
4. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
5. Il ressort des pièces du dossier que pour établir l'existence d'un accès à la parcelle AR88, terrain d'assiette du projet, le dossier comportait une attestation notariale établie le 23 juillet 2019 qui indiquait que cette parcelle bénéficiait d'une servitude de passage sur la parcelle AR297 située au droit de la voie publique mais non contigüe à la parcelle AR88, que le notaire était missionné pour constituer une servitude sur les parcelles AR300, AR304, AR74 et AR78 afin de compléter cette servitude pour assurer un accès total depuis la voie publique et qu'en cas d'échec à régulariser cette servitude de manière amiable, le terrain bénéficiait d'une servitude de passage légale par " destination du père de famille " sur les parcelles A74 et AR78 conformément aux dispositions des articles 692 et suivants du code civil. Ainsi, cette attestation ne permettait pas d'établir l'existence d'une servitude complète à partir de la voie publique passant par la parcelle AR297 et il ressort des plans cadastraux figurant au dossier qu'un passage par les parcelles AR74 et AR78 ne permettait pas un accès au terrain puisqu'elles ne sont pas contigües à la parcelle AR88. A cet égard, le plan de masse sur lequel se fonde la collectivité de Saint-Barthélemy, sur lequel est représenté un accès direct à la voie publique depuis la parcelle AR78, ne respecte pas la configuration et les limites des parcelles figurant sur les plans cadastraux. Enfin, l'existence d'une voie privée ouverte à la circulation publique qui desservirait la parcelle AR88, dont se prévaut la collectivité, ne peut être regardée comme établie par la production d'une simple photographie aérienne où apparaît une voie d'accès à des propriétés avoisinantes. Ainsi, les pièces du dossier ne permettaient pas d'établir l'existence d'une servitude permettant l'accès à la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et cette insuffisance a été de nature à fausser l'appréciation de l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation relative à l'accessibilité du terrain d'assiette depuis la voie publique.
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article UR 3 du règlement de la carte d'urbanisme de Saint-Barthélemy :
6. Aux termes de l'article UR 3 du règlement de la carte d'urbanisme de Saint-Barthélemy, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " " Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique directement ou par le biais d'une voie privée ou d'une servitude de passage. Lorsqu'un terrain est accessible depuis plusieurs voies, l'accès posant le moins de problème de sécurité peut être imposé. / Les voies privées et les servitudes de passage doivent correspondre aux besoins du projet (...) ". L'autorité compétente et, en cas de recours, le juge administratif doivent s'assurer qu'une ou plusieurs voies d'accès au terrain d'assiette du projet pour lequel un permis de construire est demandé permettent de satisfaire aux exigences posées par ces dispositions. A cette fin, pour apprécier les possibilités d'accès au terrain pour le propriétaire ou les tiers, il leur incombe de s'assurer de l'existence d'une desserte suffisante de la parcelle par une voie ouverte à la circulation publique et, le cas échéant, de l'existence d'un titre créant une servitude de passage donnant accès à cette voie.
7. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 5, l'existence d'une servitude sur la voie privée traversant les parcelles AR300, AR74 et AR78 n'était pas établie par l'attestation notariale du 23 juillet 2019 et la servitude de passage légale par " destination du père de famille " sur les parcelles A74 et AR78 ne permettait pas la desserte de la parcelle. En outre, le dossier de demande de permis de construire ne comportait pas de précisions sur les caractéristiques de la voie d'accès au terrain. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit, l'ouverture à la circulation de la voie privée passant sur les parcelles AR297, AR300, AR74 et AR78, qui ne ressortait d'aucune pièce du dossier de demande, n'était pas non plus établie par les pièces du dossier. Dans ce contexte, en l'absence de preuve de l'existence d'une servitude sur cette voie privée au profit de la parcelle d'assiette du projet, les éléments produits par la société dans son recours gracieux concernant sa largeur n'étaient pas de nature à pallier ces insuffisances. Enfin, dès lors que le caractère privé des voies qu'ils doivent emprunter ne peut être opposé aux services publics d'incendie et de secours, les informations figurant dans la notice descriptive de sécurité et l'avis favorable du service départemental d'incendie et de secours, qui sont fondés sur les caractéristiques de cette voie privée, ne sont pas de nature à établir l'existence d'une voie d'accès utilisable par le propriétaire et les tiers correspondant aux besoins du projet. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article UR 3 du règlement de la carte d'urbanisme devait être accueilli.
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article UR 6 du règlement de la carte d'urbanisme de Saint-Barthélemy :
8. Aux termes de l'article 12 de l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy : " (...) La surface hors œuvre nette d'une construction est égale à la surface hors œuvre brute de cette construction après déduction : (...) des surfaces hors œuvre des toitures terrasses accessibles, des balcons, des loggias, des cages d'ascenseur (...) ainsi que des surfaces non closes situées au rez-de-chaussée ". L'article UR 6 du règlement de la carte d'urbanisme, dans sa rédaction applicable à l'espèce, fixe quant à lui les valeurs maximales de surface hors œuvre nette constructibles.
9. Il est constant que la société pétitionnaire, compte tenu de la superficie de son terrain et des règles posées par l'article UR 6 du règlement de la carte d'urbanisme, était autorisée à construire une surface hors œuvre nette maximale de 498,5 m2. Il est en outre constant que, pour parvenir à la surface hors œuvre nette de 331 m2 mentionnée dans sa demande de permis de construire, la pétitionnaire n'a pas pris en compte la superficie des cuisines, qu'elle estimait constituer " des surfaces non closes situées au rez-de-chaussée ". Il ressort toutefois des pièces du dossier que les cuisines des habitations du projet, qui se trouvent sous le toit de la structure principale, sont de forme rectangulaire, fermées par des murs sur leur largeur, adossées sur une longueur au mur porteur des chambres et des salles de bains et sur l'autre, ouvertes sur les salons, eux-mêmes situés sous un auvent ouvert vers l'extérieur en continuité de la structure principale. Eu égard à cette configuration et à leur destination, les cuisines prévues au projet, qui se trouvent au cœur du bâtiment, ne peuvent être regardées comme des surfaces non closes au sens du c) de l'article 12 de l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy et ce alors même qu'elles ne comportent pas de mur sur l'un de leur côté. Dans ces conditions, leur superficie devait être prise en compte pour calculer la surface hors œuvre nette du projet.
10. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que le permis en litige méconnaissait l'article 71 de l'ancien code de l'urbanisme ainsi que les articles UR 3 et UR 6 du règlement de la carte d'urbanisme de Saint-Barthélemy.
11. Toutefois, lorsque le juge d'appel estime qu'un moyen ayant fondé l'annulation du permis litigieux par le juge de première instance est tiré d'un vice susceptible d'être régularisé par un permis modificatif, et qu'il décide de faire usage de la faculté qui lui est ouverte par l'article L. 600-5-1, il lui appartient, avant de surseoir à statuer sur le fondement de ces dispositions, de constater préalablement qu'aucun des autres moyens ayant, le cas échéant, fondé le jugement d'annulation, ni aucun de ceux qui ont été écartés en première instance, ni aucun des moyens nouveaux et recevables présentés en appel, n'est fondé et n'est susceptible d'être régularisé par un permis modificatif et d'indiquer dans sa décision de sursis pour quels motifs ces moyens doivent être écartés.
12. En l'espèce, les vices mentionnés aux points 5 et 7, tirés de l'absence de titre de nature à établir l'existence d'une servitude permettant l'accès à la parcelle et de la méconnaissance de l'article UR3 du règlement de la carte d'urbanisme de Saint-Barthélemy en l'absence de pièces de nature à établir l'existence d'une voie d'accès adaptée aux besoins du projet depuis la voie publique, sont susceptibles d'être régularisés, au besoin par l'instauration d'une prescription subordonnant la délivrance de ce permis à la création d'une servitude de passage adaptée au projet. Le vice retenu au point 9, tiré du dépassement de la valeur maximale de surface hors œuvre nette constructible, est également susceptible d'être régularisé sans modifier l'économie générale du projet. Par suite, il y a lieu d'examiner les autres moyens présentés par Mme A... en première instance et en appel.
Sur les autres moyens invoqués :
13. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier qu'une copie de l'ordre du jour de la réunion du conseil exécutif de Saint-Barthélemy du 5 mars 2020 a été transmise au préfet le 2 mars précédent. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article LO 6222-13 du code général des collectivités territoriales, qui manque en fait, doit être écarté.
14. En deuxième lieu, l'article 71 de l'ancien code de l'urbanisme de Saint-Barthélemy prévoit que le dossier de demande de permis de construire doit comporter : " (...) 5° Deux documents photographiques au moins permettant de situer le terrain respectivement dans le paysage proche et lointain et d'apprécier la place qu'il y occupe. (...) 6° Un document graphique au moins permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction dans l'environnement, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et des abords. Lorsque le projet comporte la plantation d'arbres de haute tige, les documents graphiques devront faire apparaître la situation à l'achèvement des travaux et la situation à long terme (...) ".
15. D'une part, la seule photographie annotée produite par Mme A... n'est pas de nature à établir que la localisation du terrain d'assiette serait erronée sur le document graphique d'insertion du projet figurant au dossier de la demande de permis de construire. Au demeurant, comme l'ont retenu les premiers juges, à supposer même que ce document comportait des imprécisions quant à la localisation du terrain d'assiette dans son environnement, le plan de situation, également joint au dossier, permettait à l'autorité administrative de situer ce terrain d'assiette et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'un éventuel décalage de l'implantation du projet dans le document d'insertion a été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur son insertion dans l'environnement ainsi que sur son impact visuel.
16. D'autre part, si le dossier de permis de construire ne comportait pas le document graphique prévu au 6° de l'article 71 précité, permettant notamment de visualiser la plantation des 250 amarres créoles prévues par le projet, le document intitulé " volet paysager " figurant au dossier de permis de construire permettait d'identifier le futur lieu de plantation de ces amarres sur le terrain d'assiette du projet. Dans ces circonstances, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'absence de ce document graphique a été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
17. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier que les mentions de l'attestation notariée relatives à l'existence d'une servitude sur la parcelle AR297 et aux démarches en cours de régularisation d'une servitude complémentaire sur les parcelles AR300, AR304, AR74 et AR78 traduisaient la réalité de la situation à la date du dépôt du dossier de demande. Contrairement à ce que soutient Mme A..., les circonstances que la mention relative à l'existence par défaut d'une servitude " par destination du père de famille " sur les parcelles AR74 et AE78 a été ultérieurement démentie par une décision de justice et que la société a postérieurement engagé des démarches en reconnaissant le caractère enclavé de la parcelle ne sont pas de nature à permettre de considérer qu'à la date de dépôt du dossier, la pétitionnaire avait connaissance du caractère erroné de cette déclaration, établie par son notaire, et ce quand bien même le juge civil a postérieurement jugé que ce document constituait un faux. Ainsi, les imprécisions quant à l'étendue et la nature de la servitude d'accès au terrain figurant au dossier ne sauraient caractériser, dans les circonstances de l'espèce, une manœuvre frauduleuse destinée à tromper l'administration. Par suite, le moyen tiré de ce que la délibération autorisant le permis de construire litigieux serait fondée sur une fraude doit être écarté.
18. En quatrième lieu, aux termes de l'article UR 9 du règlement de la carte d'urbanisme de Saint-Barthélemy, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions ou installations sera assuré sur le terrain d'assiette du projet ou dans son environnement immédiat, en dehors des voies publiques. / Les places exigées au titre du stationnement se répartissent de la manière suivante : / Logement : / deux places de stationnement par logement, pour les logements d'une superficie supérieure à 100 m² de surface hors œuvre nette, une place supplémentaire par tranche ou fraction de tranche 100 m² de SHON. / (...) ".
19. Il ressort des pièces du dossier que le projet est composé de neuf logements dont la superficie est inférieure à 100 m2 de surface hors œuvre nette, surface des cuisines incluses. Il devait ainsi, en application des dispositions citées au point précédent, comporter au minimum dix-huit places de stationnement et non vingt-trois comme le soutient Mme A.... Par suite, alors que le projet prévoit vingt-deux places de stationnement, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.
20. En cinquième lieu, aux termes de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme : " Par dérogation à l'article R. 611-7-1 du code de justice administrative, et sans préjudice de l'application de l'article R. 613-1 du même code, lorsque la juridiction est saisie d'une requête relative à une décision d'occupation ou d'utilisation du sol régie par le présent code, ou d'une demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant une telle décision, les parties ne peuvent plus invoquer de moyens nouveaux passé un délai de deux mois à compter de la communication aux parties du premier mémoire en défense (...) ".
21. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002, relatif aux caractéristiques du logement décent pris pour l'application de l'article 187 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains applicable au 15 juillet 2007, a été soulevé pour la première fois par Mme A... dans son mémoire enregistré le 21 novembre 2022, soit postérieurement à l'expiration du délai de deux mois à compter de la communication aux parties, le 3 mai 2022, du premier mémoire en défense. Par suite, ce moyen est irrecevable en application des dispositions de l'article R. 600-5 du code de l'urbanisme.
22. Il résulte de tout ce qui précède qu'aucun des autres moyens invoqués par Mme A... n'est de nature à entraîner l'annulation du permis de construire délivré à la société PRO B.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l'urbanisme :
23. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en œuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. " Un vice entachant le bien-fondé de l'autorisation d'urbanisme est susceptible d'être régularisé, même si cette régularisation implique de revoir l'économie générale du projet en cause, dès lors que les règles d'urbanisme en vigueur à la date à laquelle le juge statue permettent une mesure de régularisation qui n'implique pas d'apporter à ce projet un bouleversement tel qu'il en changerait la nature même.
24. Ainsi qu'il a été dit au point 12, les vices tirés de l'absence de titre de nature à établir l'existence d'une servitude permettant l'accès à la parcelle et de la méconnaissance des articles UR 3 et UR 6 du règlement de la carte d'urbanisme de Saint-Barthélemy sont susceptibles d'être régularisés, Il y a lieu, dès lors, de surseoir à statuer, en application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et de fixer à la société PROB B et à la collectivité de Saint-Barthélemy un délai de quatre mois, à compter de la notification du présent arrêt, aux fins de notifier à la cour la mesure de régularisation nécessaire.
DECIDE
Article 1er : Il est sursis à statuer sur les requête de la collectivité de Saint-Barthélemy et de la société PRO B jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois, à compter de la notification du présent arrêt, imparti à la société PROB B et à la collectivité de Saint-Barthélemy pour notifier à la cour un permis de construire régularisant les vices tirés de l'absence de titre de nature à établir l'existence d'une servitude permettant l'accès à la parcelle d'implantation du projet et de la méconnaissance des articles UR3 et UR6 du règlement de la carte d'urbanisme de Saint-Barthélemy.
Article 2 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la collectivité de Saint-Barthélemy, à la société PRO B et à Mme B... A....
Délibéré après l'audience du 15 décembre 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 janvier 2023.
La rapporteure,
Christelle D...La présidente,
Marianne Hardy
La greffière,
Marion Azam Marche
La République mande et ordonne au représentant de l'Etat à Saint-Barthélemy en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX04677, 21BX04704 2