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13/12/2022 | FRANCE | N°21BX04670

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 13 décembre 2022, 21BX04670


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A... C... épouse B... D... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté en date du 26 février 2021 par lequel la préfète de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100841 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et d

es pièces complémentaires enregistrées les 23 décembre 2021 et 9 novembre 2022, Mme A... C... épo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A... C... épouse B... D... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté en date du 26 février 2021 par lequel la préfète de la Vienne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2100841 du 8 juillet 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces complémentaires enregistrées les 23 décembre 2021 et 9 novembre 2022, Mme A... C... épouse B... D..., représentée par Me Gomez, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 juillet 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 26 février 2021 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Vienne de lui délivrer un titre de séjour temporaire d'une durée d'un an, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que l'arrêté attaqué :

- est entaché d'erreur d'appréciation de la réalité et du sérieux de ses études ;

- est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle et familiale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2022, la préfète de la Vienne conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens de Mme A... C... épouse B... D... ne sont pas fondés.

Mme A... C... épouse B... D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 28 avril 2008 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme F... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E... A... C... épouse B... D..., ressortissante tunisienne née le 18 mars 1984 à Tataouine (Tunisie), est entrée en France le 23 décembre 2016 sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant " renouvelé jusqu'au 14 décembre 2019. Le 4 décembre 2019, elle en a sollicité le renouvellement. Par un arrêté du 26 février 2021, la préfète de la Vienne a refusé de lui délivrer ce titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée à l'issue de ce délai. Mme A... C... épouse B... D... relève appel du jugement du 8 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 11 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent accord, dans les conditions prévues par sa législation ". Aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ". (...) ".

3. Le renouvellement de la carte de séjour portant la mention " étudiant " est subordonné, notamment, à la justification par son titulaire de la réalité et du sérieux des études qu'il a déclaré accomplir. Il appartient ainsi au préfet de rechercher à partir de l'ensemble du dossier et notamment au regard de sa progression dans le cursus universitaire, de son assiduité aux cours et de la cohérence de ses choix d'orientation, si le demandeur peut être regardé comme poursuivant avec sérieux les études entreprises.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... C... épouse B... D..., autorisée à séjourner en France afin d'y poursuivre ses études universitaires, s'est inscrite au titre de l'année 2016-2017 en diplôme universitaire d'art thérapie à l'Université de Poitiers. Si elle justifie son échec en indiquant qu'elle n'a pu entreprendre ses études de façon sérieuse et assidue qu'au second semestre en raison de son arrivée en cours d'année, elle ne l'a pas davantage obtenu l'année suivante en 2017-2018. Alors qu'elle indique que celui-ci n'était pas pertinent pour mener son projet professionnel à bien, elle s'y est tout de même de nouveau inscrite pour l'année 2019-2020 avant de finalement y renoncer. Au titre de l'année 2018-2019, elle s'est inscrite en licence professionnelle " UFR Sciences humaines et arts " à l'Université de Poitiers qu'elle n'a pas validée. Ni son poste en qualité d'adjointe d'animation territoriale, occupé du 31 août 2018 au 5 juillet 2019, ni sa participation au projet " Université Populaire des Parents " de l'association " Le Toit du Monde ", de janvier 2018 à janvier 2019, ne sauraient expliquer ses difficultés eu égard au faible nombre d'heures d'investissement qu'ils exigeaient. Au titre de l'année 2019-2020, elle s'est inscrite en licence de sociologie à l'Université de Poitiers et a été ajournée. Mme A... C... épouse B... D..., qui a donné naissance à un enfant le 20 septembre 2019, se prévaut de son état de grossesse pathologique et verse au dossier deux certificats médicaux, en date des 25 septembre 2019 et 15 mars 2021, aux termes desquels " son état de santé pendant sa grossesse a nécessité du repos " et " sa grossesse ne lui a permis de finaliser son année de licence ". Ces seuls éléments ne suffisent pas à justifier que son état de santé serait à l'origine de ses résultats insuffisants aux examens et devrait être regardé comme ayant été un obstacle à la poursuite normale de ses études en 2019-2020, année au cours de laquelle elle n'a d'ailleurs bénéficié d'une exemption scolaire que pour une durée d'un mois et demi, fin septembre. Enfin, la requérante s'est inscrite pour les années 2020-2021 et 2021-2022 à une formation de technicienne en intervention sociale et familiale à l'Institut régional du travail social (IRTS) de Poitiers. Il ressort des pièces du dossier, notamment de plusieurs attestations, que si l'intéressée s'y est fortement impliquée, elle ne produit aucun élément tendant à démontrer la réussite à cette formation ou la validation d'un quelconque autre diplôme en cinq années d'études. Dans ces conditions, la préfète de la Vienne a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, refuser de renouveler le titre de séjour dont Mme A... C... épouse B... D... bénéficiait en qualité d'étudiant compte tenu de l'absence de progression dans ses études supérieures.

5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme A... C... épouse B... D... est entrée régulièrement en France en 2016, accompagnée de ses deux enfants âgés de 3 et 4 ans, nés en Tunisie. Elle ne justifie toutefois pas d'autres attaches familiales sur le territoire français et ne conteste pas avoir conservé des liens avec son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans et où résident son conjoint, sa mère et une de ses sœurs. Par ailleurs, si l'intéressée produit plusieurs attestations témoignant de sa volonté d'intégration, ces dernières sont peu circonstanciées et ne permettent pas de caractériser l'existence, en France, de liens stables, anciens et durables. En outre, Mme A... C... épouse B... D... ne saurait être regardée comme justifiant d'une insertion professionnelle ancienne en France au seul motif qu'elle a travaillé en tant que qu'adjointe d'animation territoriale du 31 août 2018 au 5 juillet 2019, du 8 février 2020 au 6 mars 2020, et du 20 juin 2020 au 2 septembre 2020. Enfin, si elle fait valoir que ses deux premiers enfants, nés les 13 février 2013 et 15 septembre 2014 à Tataouine (Tunisie), sont scolarisés en France depuis l'année scolaire 2018-2019, elle n'établit pas que ceux-ci ne pourraient poursuivre leur scolarité dans leur pays d'origine, où ils ont vocation à suivre leur mère et rejoindre leur père. Dès lors, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la préfète de la Vienne n'a pas, en refusant de renouveler le titre de séjour de Mme A... C... épouse B... D..., commis une erreur manifeste dans l'appréciation de la situation personnelle de l'intéressée.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... C... épouse B... D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... C... épouse B... D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... A... C... épouse B... D..., à Me Gomez et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la préfète de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2022, à laquelle siégeaient :

Mme Florence Demurger, présidente,

Mme Karine Butéri, présidente-assesseure,

M. Anthony Duplan, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 décembre 2022.

La présidente-rapporteure,

Florence F...

La présidente-assesseure,

Karine Butéri

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21BX04670 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX04670
Date de la décision : 13/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DEMURGER
Rapporteur ?: Mme Florence DEMURGER
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : LAVALETTE AVOCATS CONSEILS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-12-13;21bx04670 ?
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