Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme E... C... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et contributions sociales qui lui ont été réclamées au titre des années 2014 et 2016 pour un montant total, en droits et pénalités de 397 778 euros.
Par un jugement n° 1900858 du 13 juillet 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et deux mémoires complémentaires, enregistrés les 8 octobre, 21 décembre 2020 et 8 juin 2022, Mme C..., représentée par Me Cordoliani, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de réformer le jugement n°1900858 du tribunal administratif de la Guadeloupe du 13 juillet 2020 ;
2°) de prononcer la décharge des pénalités de 40 % pour manquement délibéré qui lui ont été assignées au titre des cotisations supplémentaire d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2016 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- elle prend acte de la régularité de la procédure d'imposition suivie à son encontre ; elle ne conteste plus le bien-fondé de l'imposition ; elle maintient sa contestation de la qualification de manquement délibéré retenue par l'administration aux omissions relevées à son encontre ;
- elle n'a pas déclaré les versements effectués par le président de la société G2H à son profit en 2014 et 2016 car ces sommes correspondaient pour elle au prix de rachat de ses 20 962 actions par voie de diminution du capital non motivée par des pertes par ladite société ;
- l'existence de minorations notables et répétées de recettes déclarées ne suffit pas à établir la mauvaise foi du contribuable, s'agissant d'une même opération ;
- elle a été l'objet d'une manipulation avec tromperie sur l'opération en cause ; elle a été abusée par le président, avec manœuvre frauduleuse pour lui laisser croire que la société lui rachetait ses actions ;
- elle n'a aucun pouvoir de décision au niveau de la gestion de la société et ne peut se voir reprocher de s'être attribuée, en toute connaissance de cause, et de manière délibérée, ces versements considérés par l'administration comme des distributions irrégulières de bénéfices, alors que ces versements ont été effectués, de manière frauduleuse, et sans l'accord de l'assemblée des actionnaires par le président en exercice de la société G2H ;
- elle doit être considérée de bonne foi, n'ayant à aucun moment eu conscience que les sommes qui lui avaient été versées constituaient des distributions occultes de bénéfices ;
- les rappels évoqués au titre des revenus distribués à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers pour des comptes courants débiteurs et des bénéfices non déclarés à l'impôt sur les sociétés, ne la concernent pas ;
- l'intention délibérée dans les actes d'omission qui lui sont reprochés doit être écartée ; d'une part, elle ignorait les écritures comptables dont il s'agit, n'ayant jamais eu accès aux comptes de la société ; d'autre part, elle ne pouvait imaginer raisonnablement, que le protocole d'accord transactionnel qu'elle avait signé pour la rachat de ses parts sociales était un faux manifeste destiné à la tromper sur la finalité de l'opération projetée ;
- elle n'a jamais effectué des prélèvements excédentaires sur son soi-disant compte courant dans la société, et, de surcroît, à caractère répétitif, n'ayant exercé, ni en droit ni en fait, des fonctions de direction, ni participé à la gestion de l'entreprise, ayant été licenciée depuis 2008 ; elle est divorcée du président de la société, M. A... depuis 2009 ;
- la société G2H n'a pas respecté ses obligations de déclarations sur l'imprimé fiscal unique (IFU) qui lui incombait, et l'a ainsi privée de l'information, selon laquelle les sommes qui lui ont été versées représentaient des distributions de dividendes et non le prix de cession de ses actions ;
- elle est mère d'une enfant de neuf ans et a à sa charge, une sœur lourdement handicapée ; elle n'est pas une délinquante fiscale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2020, et un mémoire enregistré le 27 octobre 2022, qui n'a pas été communiqué, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 8 septembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 8 novembre 2022 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code du commerce ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... B...,
- et les conclusions de Mme Cécile Cabanne, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... était associée de la société G2H dont elle détenait 55 % des actions. A la suite d'une vérification de comptabilité de la société au titre des années 2014, 2015 et 2016, l'administration fiscale a constaté que Mme C... avait encaissé deux chèques, l'un de 250 000 euros le 8 juillet 2014, l'autre de 200 000 euros le 16 septembre 2016, de la part de la société, qui a inscrit ces sommes au débit du compte courant d'associé. L'administration fiscale a qualifié ces sommes de revenus distribués sur le fondement de l'article 109 1° du code général des impôts et les a imposées à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, au titre des années 2014 et 2016, pour un montant global, en droits et pénalités de 397 778 euros. Mme C... a contesté ces impositions, notifiées par proposition de rectification du 30 septembre 2017 et mises en recouvrement le 31 décembre 2017, par réclamations des 9 mars 2018 et 3 janvier 2019, respectivement rejetées les 7 septembre 2018 et implicitement le 3 juillet 2019. Par jugement n° 1900858 du 13 juillet 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté la requête présentée par Mme C..., demandant la décharge des impositions en litige et contestant leur bien-fondé. Par la présente requête, Mme C... relève appel de ce jugement, soutient devant la cour, dans le dernier état de ses écritures, ne plus contester ni la procédure d'imposition, ni son bien-fondé et demander la décharge des pénalités pour manquement délibéré de 108 516 euros dont ont été assortis les rappels d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux, qui lui ont été réclamés au titre des années 2014 et 2016.
Sur les pénalités :
2. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) / c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat ou en cas d'application de l'article 792 bis. ".
3. Il résulte de ces dispositions que la pénalité pour manquement délibéré a pour seul objet de sanctionner la méconnaissance par le contribuable de ses obligations déclaratives. Pour établir un tel manquement, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt. Pour établir le caractère intentionnel du manquement du contribuable à son obligation déclarative, l'administration doit se placer au moment de la déclaration ou de la présentation de l'acte comportant l'indication des éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt.
4. D'une part, pour caractériser l'élément intentionnel du manquement, l'administration indique, que, compte tenu du montant important des revenus de capitaux mobiliers, qui s'élèvent, pour les deux années en litige, à 450 000 euros, encaissés par Mme C..., par deux chèques émis par la société, et, de leur proportion dans ses revenus imposables, dès lors qu'ils représentent près de 98 % de l'ensemble de ses revenus non déclarés, l'intéressée ne pouvait ignorer qu'elle était tenue de les mentionner dans les déclarations de revenus, alors même que ces sommes correspondaient, selon elle, au prix de cession de ses actions dans le capital social de la société G2H. D'autre part, en sa qualité d'associée majoritaire de la société G2H, et alors qu'elle avait admis le 8 juillet 2014, que l'opération consistant pour la société G2H à lui avoir remis la somme de 250 000 euros devait être " formalisée incessamment en assemblée générale extraordinaire ", Mme C... ne pouvait méconnaitre les conditions dans lesquelles les deux sommes lui ont été versées, en vertu d'un protocole transactionnel qu'elle a signé le 16 septembre 2016, qui n'a été ni enregistré, ni approuvé par délibération du conseil d'administration de la société, ni traduit dans la comptabilité de l'entreprise par une diminution correspondante du capital non motivée par des pertes, dans les conditions prévues par l'article L. 225-207 du code du commerce. La requérante se borne à évoquer la circonstance que sa bonne foi aurait été trompée par son ex-époux dont elle est divorcée depuis 2009, président de la société G2H, qui se serait livré à des manœuvres frauduleuses, et qu'elle a été volontairement tenue à l'écart de la gestion et de la comptabilité de la société, dont elle a été licenciée en 2008, sans toutefois apporter aucun élément pour étayer ses dires. Dans ces conditions, l'administration doit être regardée comme établissant le caractère répété des insuffisances et inexactitudes des déclarations de Mme C... et de son intention d'éluder l'impôt. Dès lors, l'administration a pu à bon droit, pour les années en cause lui infliger une majoration de 40 % pour manquement délibéré.
5. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de Mme C... tendant à la décharge des pénalités pour manquement délibéré qui lui ont été appliquées doivent être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme demandée par Mme C..., au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 22 novembre 2022, à laquelle siégeaient :
Mme Eveline Balzamo, présidente,
Mme Bénédicte Martin, présidente assesseure,
M. Nicolas Normand, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 décembre 2022.
La rapporteure,
Bénédicte B...
La présidente,
Evelyne Balzamo La greffière,
Caroline Brunier
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX03328