La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/11/2022 | FRANCE | N°20BX02418

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 30 novembre 2022, 20BX02418


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société générale factoring (SGF) anciennement dénommée compagnie générale d'affacturage (CGA) a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner la commune de Saint-Philippe à lui payer la somme de 51 639,40 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2016, correspondant à une créance résiduelle.

Par un jugement du 11 juin 2020, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un m

moire enregistrés le 30 juillet 2020 et le 26 octobre 2022, la SGF, représentée par Me Chassang, demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société générale factoring (SGF) anciennement dénommée compagnie générale d'affacturage (CGA) a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner la commune de Saint-Philippe à lui payer la somme de 51 639,40 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2016, correspondant à une créance résiduelle.

Par un jugement du 11 juin 2020, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 30 juillet 2020 et le 26 octobre 2022, la SGF, représentée par Me Chassang, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 11 juin 2020 ;

2°) de condamner la commune de Saint-Philippe à lui payer la somme de 51 639,40 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2016 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Philippe une somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- conformément à la subrogation prévue au contrat d'affacturage et en conséquence du paiement subrogatoire effectué le 12 décembre 2013, elle a seule intérêt à agir en sa qualité de subrogée dans les droits et actions de la société VST au titre de la créance objet du litige d'un montant de 51 639,40 euros après imputations ;

- la société VST n'étant plus propriétaire de la créance, la commune de Saint-Philippe ne pouvait valablement s'en libérer entre les mains de cette société, d'autant moins que la notification de la cession du marché lui faisait interdiction de régler directement entre les mains de cette dernière toute somme due au titre dudit marché dans la limite de la somme de 670 570,77 euros ;

- il n'est pas établi par la commune que les règlements d'un montant respectif de 56 259,29 euros et de 2 802,23 euros dont elle se prévaut correspondent à la créance dont le recouvrement est poursuivi ; en tout état de cause, la commune ne pouvait se libérer de sa créance en effectuant des règlements directs entre les mains de la société VST dans les droits de laquelle elle est subrogée.

Par un mémoire, enregistré le 27 juillet 2021, la commune de Saint-Philippe, représentée par Me Vergnon, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la SGF sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête est irrecevable pour défaut de demande indemnitaire préalable, pour tardiveté et pour défaut d'intérêt à agir ;

- aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code monétaire et financier ;

- le décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B... A...,

- les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique,

- et les observations de Me Chassang pour la société générale Factoring.

Une note en délibéré présentée par Me Vergnon pour la commune de Saint-Philippe a été enregistrée le 15 novembre 2022.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre du marché public ayant pour objet les travaux d'aménagement du terrain de football synthétique de Basse-Vallée, la commune de Saint-Philippe a confié, le 14 novembre 2012, à la société Vellayoudom sud terrassement (VST), l'exécution du lot n° 1 portant sur les travaux de terrassement, voirie et réseaux divers, maçonnerie et clôture, pour un montant total de 919 837,46 euros. Le 28 janvier 2013, la société VST a, à titre de garantie, cédé la créance professionnelle qu'elle détenait sur la commune de Saint-Philippe à la compagnie générale d'affacturage (CGA) devenue la société générale factoring (SGF) pour un montant de 794 887,46 euros HT soit 862 452, 89 euros TTC. Agissant en sa qualité de cessionnaire de la créance détenue par la société VST, la CGA a cherché à obtenir le paiement par la commune de Saint-Philippe de la somme de 51 639,40 euros correspondant à un impayé de travaux d'aménagement réalisés par la société VST dans le cadre du lot n° 1 dont elle était titulaire. Après avoir vainement mis en demeure la commune, le 25 mai 2016, de lui régler ladite somme et avoir en conséquence saisi, le 6 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Saint-Pierre qui par une ordonnance du 2 novembre 2017 s'est déclaré incompétent pour connaître du litige, la CGA a demandé au tribunal administratif de La Réunion de condamner la commune de Saint-Philippe à lui payer la somme de 51 639,40 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du 25 mai 2016. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.

Sur les fins de non-recevoir opposées en défense :

2. En premier lieu, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction résultant du décret n° 2016-1480 du 2 novembre 2016 portant modification du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. (...) / Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. (...) "

3. Il résulte de l'instruction que, par un courrier en date du 25 mai 2016, la CGA a mis en demeure la commune de Saint-Philippe de lui verser la somme de 51 639,40 euros correspondant au montant impayé de " la situation 7 des travaux d'aménagement du terrain de foot synthétique " réalisés par la société VST dans le cadre de l'exécution du lot n° 1 du marché de travaux d'aménagement du terrain de football synthétique de Basse-Vallée. Dès lors, la décision implicite de rejet qui est née, avant que le tribunal administratif ne statue, du silence gardé par la commune de Saint-Philippe sur la mise en demeure qui lui a été adressée, a eu pour effet de lier le contentieux.

4. En deuxième lieu, d'une part, en vertu de l'article R. 421-2 du code de justice administrative, sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. Par dérogation à cette règle, l'article R. 421-3 du même code, dans sa rédaction applicable antérieurement à l'entrée en vigueur du décret du 2 novembre 2016 portant modification du code de justice administrative, disposait que " l'intéressé n'est forclos qu'après un délai de deux mois à compter du jour de la notification d'une décision expresse de rejet : / 1° En matière de plein contentieux (...) ". Il en résultait que lorsqu'une personne s'était vue tacitement opposer un refus susceptible d'être contesté dans le cadre d'un recours de plein contentieux, ce recours n'était enfermé, en l'état des textes alors en vigueur, dans aucun délai, sauf à ce que cette décision de refus soit, sous forme expresse, régulièrement notifiée à cette personne, un délai de recours de deux mois courant alors à compter de la date de cette notification.

5. Le décret du 2 novembre 2016 a supprimé le 1° de l'article R. 421-3 du code de justice administrative à compter du 1er janvier 2017 et a prévu que les nouvelles dispositions de cet article s'appliqueraient aux requêtes enregistrées à partir de cette date. Il en résulte que, s'agissant des décisions implicites relevant du plein contentieux, la nouvelle règle selon laquelle, sauf dispositions législatives ou réglementaires qui leur seraient propres, le délai de recours de deux mois court à compter de la date à laquelle elles sont nées, est applicable aux décisions nées à compter du 1er janvier 2017. En ce qui concerne les décisions implicites relevant du plein contentieux nées antérieurement à cette date, un délai franc de recours de deux mois court à compter du 1er janvier 2017, soit jusqu'au 2 mars 2017.

6. Les règles énoncées au point 5 doivent être combinées avec les dispositions issues de l'article 19 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration et désormais codifiées à l'article L. 112-6 du code des relations entre le public et l'administration, aux termes desquelles, sauf en ce qui concerne les relations entre l'administration et ses agents, les délais de recours contre une décision implicite de rejet ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception prévu par l'article L. 112-3 du même code ne lui a pas été transmis ou que celui-ci ne porte pas les mentions prévues à l'article R. 112-5 de ce code et, en particulier, la mention des voies et délais de recours. Le principe de sécurité juridique fait cependant obstacle à ce que le demandeur, lorsqu'il est établi qu'il a eu connaissance de la décision implicite qui lui a été opposée, puisse la contester indéfiniment du seul fait que l'administration ne lui a pas délivré d'accusé de réception de sa demande ou n'a pas porté sur l'accusé de réception les mentions requises. La preuve d'une telle connaissance peut résulter de ce qu'il est établi, soit que l'intéressé a été clairement informé des conditions de naissance d'une décision implicite lors de la présentation de sa demande, soit que la décision a par la suite été expressément mentionnée au cours de ses échanges avec l'administration, notamment à l'occasion d'un recours gracieux dirigé contre cette décision. Le demandeur dispose alors, pour saisir le juge, d'un délai raisonnable qui, sauf circonstances particulières, ne saurait excéder un an et court, dans la première hypothèse, de la date de naissance de la décision implicite et, dans la seconde, de la date de l'événement établissant qu'il a eu connaissance de la décision. En ce qui concerne les décisions implicites de rejet relevant du plein contentieux nées avant le 1er janvier 2017, dont il est établi que le demandeur a eu connaissance avant cette date, mais pour lesquelles l'administration, alors qu'elle était soumise à cette obligation, n'a pas délivré d'accusé de réception ou a délivré un accusé de réception ne comportant pas les mentions requises, le délai de recours expire le 31 décembre 2017, sauf circonstances particulières invoquées par le requérant.

7. D'autre part, un débiteur qui saisit la juridiction judiciaire, alors que la juridiction administrative était compétente, conserve le bénéfice de ce délai raisonnable dès lors qu'il a introduit cette instance avant son expiration. Il est recevable à saisir la juridiction administrative jusqu'au terme d'un délai de deux mois à compter de la notification ou de la signification de la décision par laquelle la juridiction judiciaire s'est, de manière irrévocable, déclarée incompétente.

8. Il est constant que, le 6 janvier 2017, la CGA a saisi le juge judiciaire aux fins d'obtenir le paiement par la commune de Saint-Philippe de la somme de 51 639,40 euros et que, par une ordonnance du 2 novembre 2017, qui n'était pas irrévocable, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de La Réunion a déclaré la juridiction judiciaire incompétente pour connaître de ce litige. Dans ces conditions, à supposer que la CGA, à laquelle a été délivré un accusé de réception ne comportant pas les mentions requises, ait eu connaissance avant le 1er janvier 2017 de la décision implicite qui lui a été opposée, la demande présentée le 8 février 2018 devant le tribunal administratif de La Réunion n'était pas tardive.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-23 du code monétaire et financier : " Tout crédit qu'un établissement de crédit ou qu'une société de financement consent à une personne morale de droit privé ou de droit public, ou à une personne physique dans l'exercice par celle-ci de son activité professionnelle, peut donner lieu au profit de cet établissement ou de cette société, par la seule remise d'un bordereau, à la cession ou au nantissement par le bénéficiaire du crédit, de toute créance que celui-ci peut détenir sur un tiers, personne morale de droit public ou de droit privé ou personne physique dans l'exercice par celle-ci de son activité professionnelle./(...) ". Aux termes de l'article L. 313-24 de ce code : " Même lorsqu'elle est effectuée à titre de garantie et sans stipulation d'un prix, la cession de créance transfère au cessionnaire la propriété de la créance cédée. / Sauf convention contraire, le signataire de l'acte de cession ou de nantissement est garant solidaire du paiement des créances cédées ou données en nantissement ". Aux termes de l'article L. 313-27 du même code : " La cession ou le nantissement prend effet entre les parties et devient opposable aux tiers à la date apposée sur le bordereau lors de sa remise, quelle que soit la date de naissance, d'échéance ou d'exigibilité des créances, sans qu'il soit besoin d'autre formalité... ". Aux termes de l'article L. 313-28 dudit code : " L'établissement de crédit ou la société de financement peut, à tout moment, interdire au débiteur de la créance cédée ou nantie de payer entre les mains du signataire du bordereau. A compter de cette notification, (...) le débiteur ne se libère valablement qu'auprès de l'établissement de crédit ou de la société de financement ". Aux termes de l'article L. 313-29 du même code : " Sur la demande du bénéficiaire du bordereau, le débiteur peut s'engager à le payer directement (...). / Dans ce cas, le débiteur ne peut opposer à l'établissement de crédit les exceptions fondées sur ses rapports personnels avec le signataire du bordereau, à moins que l'établissement de crédit, en acquérant ou en recevant la créance, n'ait agi sciemment au détriment du débiteur. ".

10. Il résulte de ces dispositions, qui sont applicables aux créances détenues sur des personnes morales de droit public, que la cession d'une créance professionnelle effectuée dans les conditions prévues aux articles L. 313-23 à L. 313-34 de ce code, d'une part, transfère à l'établissement de crédit cessionnaire la propriété de la créance cédée et, d'autre part, est opposable aux tiers à compter de la date portée sur le bordereau visé à l'article L. 313-23 de ce code, sans autre formalité. La notification de la cession, laissée à la seule initiative de l'établissement de crédit, prévue par l'article L. 313-28 de ce code a pour effet de garantir le débiteur du caractère libératoire de son paiement. La souscription par le débiteur de la créance cédée, à la demande de l'établissement de crédit cessionnaire, de l'acte d'acceptation prévu à l'article L. 313-29 de ce code, a pour effet de créer à l'encontre de ce débiteur une obligation de paiement entre les mains du détenteur du bordereau, détachée de la créance initiale de l'entreprise et contre laquelle il ne peut faire valoir des exceptions tirées de ses rapports avec l'entreprise cédante. Lorsque la cession de créance intervient avant la présentation de la demande au tribunal, l'établissement de crédit cessionnaire, comme le cédant, a qualité pour agir afin d'obtenir le paiement de cette créance, indépendamment des procédures de notification de la cession de créance ou d'acceptation de cette cession par le débiteur.

11. Il résulte de l'instruction que, par " acte de cession de créances professionnelles à titre de garantie " signé le 28 janvier 2013 en application des dispositions des articles L.313-23 à L.313-34 du code monétaire et financier, la société VST a cédé la CGA, spécialisée dans les opérations d'affacturage, la créance d'un montant de 794 887,46 euros HT soit 862 452,89 euros TTC qu'elle détenait sur la commune de Saint-Philippe au titre du marché de travaux conclu le 14 novembre 2012 avec cette collectivité. Le bordereau de cession de créances signé le 11 décembre 2013 porte mention d'un montant total de 69 853,56 euros obtenu par l'addition des montants de trois factures. Par suite, la CGA, établissement de crédit cessionnaire, avait qualité pour agir devant le tribunal administratif, saisi le 8 février 2018, afin d'obtenir le paiement de la somme de 51 639,40 euros représentant la partie de cette créance correspondant au montant des travaux réalisés.

Sur les droits de la société appelante :

12. En premier lieu, le bordereau visé par l'article L. 313-23 du code monétaire et financier cité au point 9 doit comprendre les énonciations suivantes : " 1. La dénomination, selon le cas, "acte de cession de créances professionnelles" ou "acte de nantissement de créances professionnelles" ;/ 2. La mention que l'acte est soumis aux dispositions des articles L. 313-23 à L. 313-34 ;/ 3. Le nom ou la dénomination sociale de l'établissement de crédit bénéficiaire ;/ 4. La désignation ou l'individualisation des créances cédées ou données en nantissement ou des éléments susceptibles d'effectuer cette désignation ou cette individualisation, notamment par l'indication du débiteur, du lieu de paiement, du montant des créances ou de leur évaluation et, s'il y a lieu, de leur échéance. / (...) ". Selon ce même article : " (...) En cas de contestation portant sur l'existence ou sur la transmission d'une de ces créances, le cessionnaire pourra prouver, par tous moyens, que la créance objet de la contestation est comprise dans le montant global porté sur le bordereau. / Le titre dans lequel une des mentions indiquées ci-dessus fait défaut ne vaut pas comme acte de cession ou de nantissement de créances professionnelles au sens des articles L. 313-23 à L. 313-34. "

13. Ainsi qu'il a été précédemment exposé, il résulte de l'instruction que, par acte de cession signé le 28 janvier 2013, la société VST a cédé à la CGA, spécialisée dans les opérations d'affacturage, la créance d'un montant de 794 887,46 euros HT soit 862 452,89 euros TTC qu'elle détenait sur la commune de Saint-Philippe qui lui avait confié le 14 novembre 2012 l'exécution du lot n° 1 du marché de travaux d'aménagement d'un terrain de football synthétique. Une partie de cette créance, d'un montant total de 69 853,56 euros a fait l'objet d'un bordereau de cession signé le 11 décembre 2013 entre les mêmes parties qui désigne les créances cédées en faisant notamment référence à trois factures d'un montant respectif de 59 388,06 euros, de 7 652,29 euros et de 2 813,21 euros. Il résulte de l'instruction, notamment d'un état de " l'historique du débiteur " de la CGA, que la somme par elle réclamée de 51 639,40 euros correspond à sa créance de 59 388,06 euros après imputation d'un avoir de 1934,01 euros et d'un virement effectué de 5 814,65 euros. Dès lors, la créance dont le paiement est réclamé n'est pas douteuse.

14. En deuxième lieu, la circonstance que la cession de la créance, qui avait été régulièrement notifiée au receveur municipal de la commune par lettre recommandée avec accusé de réception le 18 février 2013 n'aurait pas été acceptée par le débiteur cédé n'a pas d'incidence sur l'obligation de payer de la commune de Saint-Philippe, une telle formalité ne constituant qu'une faculté offerte au créancier.

15. En troisième lieu, la commune de Saint-Philippe fait valoir qu'elle s'est libérée de sa dette en procédant à deux règlements respectivement de 56 259,29 euros et de 2 802,23 euros le 20 novembre 2014 au titre de " l'acompte n° 7 du 11 décembre 2013 aménagement du terrain de football synthétique Basse-Vallée ". Il résulte toutefois de l'instruction, notamment des mandats de paiement émis le 20 novembre 2014 et de l'extrait du compte 2315 du compte de gestion de l'exercice 2014, que ces règlements ont été effectués au profit de la société VST.

16. Or, il résulte des règles exposées aux points 9 et 10, en particulier des dispositions de l'article L.313-28 du code monétaire et financier, que la commune de Saint-Philippe ne pouvait se libérer valablement de sa dette, à compter de la date de la notification de la cession de créance soit du 18 février 2013, qu'auprès de la CGA et que les paiements effectués au titre de cette créance auprès d'autres personnes que cet établissement de crédit étaient par suite, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, sans incidence sur son obligation envers cet établissement.

17. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que la commune de Saint-Philippe n'est pas fondée à se prévaloir du principe selon lequel une personne publique ne peut être condamnée à payer une somme qu'elle ne doit pas.

18. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête, la SGF anciennement dénommée la CGA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a rejeté sa demande. Il y a lieu, en conséquence, d'annuler ce jugement et de condamner la commune de Saint-Philippe à payer à la CGA devenue la SGF la somme de 51 639,40 euros.

Sur les intérêts :

19. Lorsqu'ils ont été demandés, et quelle que soit la date de cette demande, les intérêts moratoires courent à compter du jour où la demande de paiement du principal est parvenue au débiteur ou, en l'absence d'une telle demande préalablement à la saisine du juge, à compter du jour de cette saisine. Il suit de là qu'il y a lieu de faire droit à la demande de la CGA devenue la SGF tendant à ce que la somme de 51 639,40 euros mise à la charge de la commune de Saint-Philippe soit assortie des intérêts au taux légal à compter de la date du 25 mai 2016, qui est celle de la réception de la réclamation.

Sur les frais liés au litige :

20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SGF anciennement dénommée CGA, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la commune de Saint-Philippe, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Saint-Philippe une somme de 1 500 euros à verser à la SGF au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de La Réunion du 11 juin 2020 est annulé.

Article 2 : La commune de Saint-Philippe est condamnée à payer à la CGA devenue la SGF la somme de 51 639,40 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de la date du 25 mai 2016.

Article 3 : La commune de Saint-Philippe versera à la CGA devenue la SGF une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société générale factoring et à la commune de Saint-Philippe.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Florence Demurger, présidente,

Mme Karine Butéri, présidente-assesseure,

M. Anthony Duplan, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 novembre 2022.

La rapporteure,

Karine A...

La présidente,

Florence Demurger

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaire de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20BX002418


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX02418
Date de la décision : 30/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme DEMURGER
Rapporteur ?: Mme Karine BUTERI
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : CHASSANG ET STILINOVIC ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-11-30;20bx02418 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award