Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Potiers de condamner le Centre national d'enseignement à distance (CNED) à lui verser la somme de 100 000 euros assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait du non renouvellement de son contrat de travail.
Par un jugement n° 1802781 du 15 septembre 2020, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 30 octobre 2020 et un mémoire enregistré le 9 septembre 2022, Mme C..., représentée par Me Gaborit, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 15 septembre 2020 ;
2°) de condamner le CNED à lui verser une somme de 40 000 euros en indemnisation de son préjudice matériel et moral, assortie des intérêts au taux légal à compter du 26 juillet 2018 et de leur capitalisation à compter du 26 juillet 2019 ;
3°) de mettre à la charge du CNED la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le CNED ne justifie pas de l'existence de raisons tirées de l'intérêt général ou de sa manière de servir à l'origine de la décision de non renouvellement de son contrat ;
- la décision de ne pas renouveler son contrat est constitutive d'une sanction déguisée ;
- la décision de ne pas renouveler son contrat est illégale car elle se fonde sur une décision de suppression d'un poste, elle-même illégale dès lors qu'elle n'a pas été précédée de l'avis obligatoire du comité technique ;
- compte tenu de l'illégalité fautive de la décision 27 juin 2018, elle est fondée à solliciter la condamnation du CNED à lui verser une indemnité ramenée à 40 000 euros en réparation de la perte de chance de reprendre son contrat à compter du 1er septembre et de se voir proposer de nouveaux contrats pour l'avenir et des troubles dans ses conditions d'existence.
Par un mémoire en défense, enregistré le 7 juillet 2022, le Centre national d'enseignement à distance, représenté par Me Glaser, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de Mme C... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;
- le décret n° 2011-184 du 15 février 2011 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B... D...,
- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,
- et les observations de Me Gaborit, représentant Mme C..., et de Me Legrand, représentant le CNED.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., employée depuis 2015 en qualité de gestionnaire administrative et financière au sein de la direction des formations et des services du Centre national d'enseignement à distance (CNED), a été recrutée par un contrat à durée déterminée conclu le 10 août 2017 en qualité d'agent contractuel à temps complet pour exercer les fonctions d'acheteur public du 1er septembre 2017 au 31 août 2018. Par un courrier du 27 juin 2018, le directeur général du CNED a informé Mme C... de sa décision de ne pas renouveler son contrat. Par une demande préalable du 26 juillet 2018, Mme C... a demandé au CNED de lui verser une somme de 100 000 euros en réparation des préjudices matériel et moral et des troubles dans les conditions d'existence qu'elle estime avoir subis du fait de l'illégalité de la décision de ne pas renouveler son contrat. Mme C... relève appel du jugement du 15 septembre 2020, par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à la condamnation du CNED à lui verser cette somme.
Sur la responsabilité du CNED :
2. Un agent public qui a été recruté par un contrat à durée déterminée ne bénéficie d'aucun droit au renouvellement de son contrat. Toutefois, l'administration ne peut légalement décider, au terme de son contrat, de ne pas le renouveler que pour un motif tiré de l'intérêt du service. Lorsque le motif du non renouvellement est ainsi mis en cause par l'agent public contractuel, il appartient à la collectivité d'apporter des éléments devant la juridiction administrative de nature à démontrer que ce refus de renouvellement était motivé par l'intérêt du service.
3. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la décision du 27 juin 2018 de ne pas renouveler le contrat de Mme C... a été prise en raison de la suppression du poste d'acheteur public qu'elle occupait au sein de la direction des achats et des affaires juridiques. Pour justifier du motif d'intérêt général du non-renouvellement du contrat, le CNED fait valoir qu'il a été décidé de revoir les missions du poste et son positionnement hiérarchique afin de le faire évoluer vers des missions stratégiques d'achat et une transversalité plus importante incluant la mise en œuvre du schéma pluriannuel de stratégie immobilière. Il résulte de l'organigramme du service et de la décision portant délégation de signature du 2 décembre 2019 qu'un poste de chargé de mission de pilotage de la commande publique et stratégie immobilière, rattaché directement au secrétariat général et occupant un positionnement hiérarchique en N-2, a été créé et pourvu au sein du CNED. Les circonstances qu'un avis de vacance au poste d'acheteur public ait été publié en mai 2018 puis retiré et que le non-renouvellement du contrat n'ait pas été évoqué lors de l'entretien d'évaluation du 22 mars 2018 ne sauraient suffire à elles seules, alors que des réflexions sur l'évolution du poste étaient seulement en cours dans l'attente de la nomination d'un nouveau secrétaire général, à permettre de considérer que la suppression du poste d'acheteur public ne serait pas réelle ou que la création du nouveau poste postérieurement au refus de renouveler le contrat de l'intéressée serait de nature à caractériser une manœuvre. Ainsi, et alors même que Mme C... a fait l'objet d'appréciations élogieuses, il ne résulte pas de l'instruction que la décision de non-renouvellement de son contrat n'aurait pas été prise dans l'intérêt du service. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que le CNED aurait entaché sa décision d'une illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité.
4. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction que les accusations d'irrégularité dans la passation des marchés publics que Mme C... a portées à la connaissance de sa hiérarchie n'ont donné lieu qu'à une simple convocation à une réunion informelle le 18 mai 2018. Dès lors, en l'absence au dossier d'autre élément, la décision de ne pas renouveler le contrat de l'intéressée ne peut être regardée comme revêtant le caractère d'une sanction déguisée. Par suite, le CNED, qui au demeurant lui a remis le 10 juillet 2018 une lettre de recommandation élogieuse, n'a pas commis de faute à ce titre.
5. En troisième lieu, aux termes du II de l'article 15 de la loi du 11 janvier 1984 dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) Les comités techniques connaissent des questions relatives à l'organisation et au fonctionnement des services, des questions relatives aux effectifs, aux emplois et aux compétences, des projets de statuts particuliers ainsi que des questions prévues par un décret en Conseil d'Etat. Les incidences des principales décisions à caractère budgétaire sur la gestion des emplois font l'objet d'une information des comités techniques (...) ". L'article 34 du décret n° 2011-184 du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l'Etat dispose que : " Les comités techniques sont consultés (...) sur les questions et projets de textes relatifs : / 1° A l'organisation et au fonctionnement des administrations, établissements ou services ; / 2° A la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences ; (...) ".
6. Enfin, si Mme C... se prévaut, à l'appui de ses conclusions indemnitaires, de l'illégalité de la décision du directeur du CNED portant suppression et transformation du poste d'acheteur public, illégalité tenant, selon elle, à l'absence de consultation préalable du comité technique de l'établissement, un tel vice de procédure, à le supposer établi, ne peut être regardé comme présentant un lien de causalité suffisamment direct avec les préjudices dont Mme C... demande réparation qui résultent de la décision de non-renouvellement de son contrat à durée limitée motivée par l'intérêt du service.
7. Il résulte de ce qui précède qu'en décidant de ne pas renouveler le contrat de Mme C..., le CNED n'a commis aucune illégalité fautive de nature à engager sa responsabilité. Par voie de conséquence, les conclusions de la requérante tendant à ce qu'elle soit indemnisée des préjudices résultant de cette décision ne peuvent qu'être rejetées.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions indemnitaires.
Sur les frais liés au litige :
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CNED, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par le CNED et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.
Article 2 : Mme C... versera au CNED une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au directeur général du Centre national d'enseignement à distance.
Délibéré après l'audience du 27 octobre 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
Mme Christelle Bouard-Lucas, présidente-assesseure,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 novembre 2022.
La rapporteure,
Birsen D...La présidente,
Marianne HardyLa greffière,
Marion Azam Marche
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
2
N° 20BX03563