Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... C..., agissant au nom et pour le compte de sa fille B..., a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner la commune de Mérignac à lui verser la somme de 15 000 euros au titre des préjudices subis par sa fille.
Par un jugement n° 1803257 du 27 janvier 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 23 mars 2020 et un mémoire enregistré le 25 septembre 2020, M. C..., agissant au nom et pour le compte de sa fille B... et représenté par Me Boerner, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 27 janvier 2020 ;
2°) de condamner la commune de Mérignac à lui payer la somme de 15 000 euros, à valoir sur l'indemnisation du préjudice corporel subi par sa fille B... ;
3°) de missionner le docteur D..., expert judiciaire, afin qu'il se prononce sur la consolidation de l'invalidité de sa fille à la date anniversaire de ses seize ans ;
4°) de mettre à la charge de la commune de Mérignac une somme de 3 000 euros au titre des frais exposés pour l'instance.
Il soutient que :
- sa requête est recevable dès lors que le défaut d'entretien normal de l'ouvrage caractérise une cause juridique en lien avec la faute dans l'organisation du service ;
- la commune a commis des fautes de nature à engager sa responsabilité dès lors que le nombre d'encadrants ne permettait pas une surveillance adaptée à la pratique du roller et que le lieu d'exercice de cette activité était encombré de branches et de glands ;
- il justifie de la réalité et du montant des préjudices subis par sa fille dont l'état ne sera pas consolidé avant ses seize ans au plus tôt.
Par un mémoire, enregistré le 5 mai 2020, la commune de Mérignac, représentée par Me Phelip, conclut :
1°) à titre principal, au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. C... au titre des frais exposés pour l'instance ;
2°) à titre subsidiaire, à ce que le montant du préjudice subi soit ramené à de plus justes proportions et à ce que l'association S.A.M. soit condamnée à la garantir de tout condamnation prononcée à son encontre.
Elle soutient que la requête est irrecevable en tant qu'elle est fondée sur une cause juridique nouvelle ; qu'elle n'a commis aucune faute ; que le préjudice n'est établi qu'à concurrence des sommes de 2 550 ou 3 300 euros ; qu'elle a délégué l'organisation de l'activité concernée à l'association S.A.M.
Par un mémoire enregistré le 13 mai 2020, la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde, représentée par Me Girerd, conclut :
1°) à l'annulation du jugement attaqué du 27 janvier 2020 ;
2°) à la condamnation de la commune de Mérignac à lui verser, à titre provisionnel, une somme de 10 732,32 euros ;
3°) à ce qu'une somme de 1 000 euros soit mise à la charge de la commune de Mérignac au titre des frais exposés pour l'instance.
Elle soutient qu'il n'est pas établi que les conditions d'encadrement et de surveillance de l'activité étaient suffisantes et conformes aux dispositions de l'article R 227-16 du code de l'action sociale et des familles ; qu'elle justifie de la réalité et du montant des frais qu'elle a d'ores et déjà dû exposer.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E...,
- les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique,
- et les observations de Me Boerner, représentant M. C... A....
Considérant ce qui suit :
1. Le jeudi 9 octobre 2014, à 16 heures 35, au cours du temps d'activité périscolaire de roller organisée, à l'issue du temps scolaire, par la commune de Mérignac dans la cour de l'école élémentaire Jean Macé et confiée à l'association Sport Athlétique Mérignacais (S.A.M.), la fille de M. C..., alors âgée de 7 ans, a fait une chute et s'est fracturée le tibia gauche. L'expert médical missionné par le juge des référés du tribunal administratif de Bordeaux à la demande de M. C... a rendu son rapport le 10 octobre 2017. M. C... et la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde (CPAM) relèvent appel du jugement du 27 janvier 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a, respectivement, rejeté la demande du premier tendant à ce que la commune de Mérignac soit condamnée à lui verser la somme provisionnelle de 15 000 euros ainsi que la demande de la seconde tendant à ce que la commune de Mérignac soit condamnée à lui verser la somme provisionnelle de 10 732,32 euros.
2. Aux termes de l'article L. 216-1 du code de l'éducation : " Les communes, départements ou régions peuvent organiser dans les établissements scolaires, pendant leurs heures d'ouverture et avec l'accord des conseils et autorités responsables de leur fonctionnement, des activités éducatives, sportives et culturelles complémentaires. Ces activités sont facultatives et ne peuvent se substituer ni porter atteinte aux activités d'enseignement et de formation fixées par l'Etat. Les communes, départements et régions en supportent la charge financière. Des agents de l'Etat, dont la rémunération leur incombe, peuvent être mis à leur disposition. ". Il résulte de ces dispositions que les collectivités territoriales sont responsables, en cas de faute dans l'organisation du service, des dommages subis par les enfants placés sous leur surveillance dans le cadre des activités périscolaires qu'elles organisent.
3. En premier lieu, la commune de Mérignac fait valoir que l'inscription à l'initiation au Roller est par nature, s'agissant d'une activité périscolaire, facultative et que, par suite, ce sont les parents de la jeune B... qui ont décidé de l'inscrire à cette activité avec les risques qu'elle comporte, ce dont semblent d'ailleurs convenir tant la CPAM que M. C... dans leurs dernières écritures. Les appelants soutiennent néanmoins qu'il s'agit d'une activité particulièrement dangereuse, en particulier en cas de chute, qui nécessitait dès lors une surveillance et des précautions particulières au point que les animateurs auraient dû être " constamment derrière les enfants pour les empêcher de tomber ". Toutefois ils n'apportent aucun élément à l'appui de cette allégation alors qu'il n'est pas contesté que les enfants étaient équipés de protections aux genoux, aux coudes et aux poignets ainsi que d'un casque. En particulier, M. C... ne conteste pas utilement que cet équipement était, en principe, suffisant pour assurer la sécurité des participants en se bornant à faire valoir qu'il ne comportait pas de protection spécifique des chevilles.
4. En deuxième lieu, l'article R. 227-16 du code de l'action sociale et des familles prévoit que ; " I. -Pour l'encadrement des enfants en accueils de loisirs périscolaires, lorsqu'il relève des dispositions de l'article L. 227-4, l'effectif minimum des personnes exerçant des fonctions d'animation est fixé comme suit : (...) 2° Pour les enfants âgés de six ans ou plus, un animateur pour douze mineurs lorsque la durée de l'accueil de loisirs excède cinq heures consécutives et un animateur pour quatorze mineurs lorsque la durée de l'accueil de loisirs n'excède pas cinq heures consécutives. II -L'effectif minimum des personnes exerçant des fonctions d'animation en accueils de loisirs périscolaires peut être réduit pour les activités organisées dans le cadre d'un projet éducatif territorial et dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 551-13 du code de l'éducation, sans pouvoir être inférieur à : (...) 2° Pour les enfants âgés de six ans ou plus, un animateur pour quatorze mineurs ; cet effectif est d'un animateur pour dix-huit mineurs lorsque la durée de l'accueil de loisirs n'excède pas cinq heures consécutives. ".
5. Il résulte de l'instruction et n'est d'ailleurs pas contesté que l'activité concernée ne relevait pas des dispositions de l'article L. 227-4 du même code qui ne concerne que les activités exercées à l'occasion des vacances scolaires, des congés professionnels ou des loisirs mais s'inscrivait dans le cadre d'un projet éducatif territorial et dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 551-13 du code de l'éducation relatives aux activités périscolaires proposées dans le prolongement du service public de l'éducation et en complémentarité avec lui. Ainsi le taux d'encadrement requis était d'un encadrant pour dix-huit enfants.
6. Les appelants soutiennent qu'il n'est pas établi que le seul animateur présent n'encadrait pas plus de quatorze enfants en méconnaissance des dispositions précitées. Toutefois, outre que cet animateur pouvait en réalité encadrer jusqu'à dix-huit enfants ainsi qu'il a été dit précédemment, ils ne présentent aucune argumentation ni aucun élément de fait permettant de supposer que le taux d'encadrement était effectivement insuffisant. Au demeurant, ils n'établissent pas davantage que la faute qu'aurait ainsi commise la commune présenterait un lien de causalité direct et certain avec l'accident dont a été victime la jeune B..., eu égard à son caractère subit autant qu'imprévisible.
7. Il résulte de ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que la commune aurait commis une faute dans l'organisation du service en lien avec l'accident subi par sa fille.
8. En troisième lieu, M. C... soutient, pour la première fois en appel, que l'accident a eu lieu au début du mois d'octobre et que la cour dans laquelle s'est déroulée cette activité aurait été jonchée de branches et de glands. Toutefois, il n'établit ni même ne soutient que cet accident aurait été causé par la présence de ces végétaux. Par ailleurs, l'administration fait valoir, sans être contestée, que la cour et ses environs sont dépourvus d'arbres. Par suite, M. C... n'est pas davantage fondé à soutenir que la responsabilité de la commune serait engagée au titre du défaut d'entretien normal de l'ouvrage.
9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête de M. C..., que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté leurs demandes tendant à la condamnation de la commune de Mérignac à les indemniser, respectivement, des préjudices corporels subis par la jeune B... et des frais médicaux exposés par la CPAM. Par suite, leur requête et conclusions doivent être rejetées, y compris les conclusions de M. C... tendant à ce que soit ordonnée une nouvelle expertise médicale destinée à évaluer le préjudice définitif de sa fille et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C..., la somme que demande la commune de Mérignac sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de la CPAM de la Gironde sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la commune de Mérignac tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C..., à la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde, à l'association S.A.M. et à la commune de Mérignac.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2022 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 novembre 2022.
Le rapporteur,
Manuel E...
Le président,
Didier ArtusLa greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°20BX01089 2