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03/11/2022 | FRANCE | N°22BX00620

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 03 novembre 2022, 22BX00620


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 20 août 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°2104720 du 18 janvier 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 février 2022, Mme C..

., représentée par Me Zawada, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 20 août 2021 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n°2104720 du 18 janvier 2022, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 février 2022, Mme C..., représentée par Me Zawada, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 18 janvier 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 20 août 2021 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " à raison de son état de santé ; subsidiairement, d'enjoindre à la préfète de réexaminer sa demande et de lui délivrer, dans l'attente, un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler ou une autorisation provisoire au séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le tribunal a commis une erreur d'appréciation en motivant son jugement uniquement au regard de la conformité formelle de l'avis du collège de médecins de l'OFII ;

- le tribunal n'a pas tenu compte des pièces attestant de l'indisponibilité d'un traitement approprié dans son pays d'origine ainsi que du justificatif de décès de son conjoint ;

- la décision de refus de titre de séjour a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors qu'il n'est pas démontré que l'avis du collège de médecins aurait été pris en conformité avec les dispositions de l'article R. 425-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision est entachée d'erreur de droit dès lors qu'elle justifie ne pas pouvoir bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

- cette décision méconnaît l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la préfète a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale du fait de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 avril 2022, la préfète de la Gironde, conclut au rejet de la demande.

Elle réitère ses écritures de première instance et fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 17 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante congolaise née le 8 octobre 1961, est entrée régulièrement en France le 2 juin 2017 sous couvert d'un visa Schengen de court séjour. Le 2 novembre 2018, elle a obtenu un titre de séjour " vie privée et familiale " pour raison de santé valable jusqu'au 1er mai 2019. Par un jugement du 17 mars 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 21 octobre 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de renouveler son titre de séjour et a enjoint le réexamen de sa situation. Après avoir saisi, pour avis, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), la préfète de la Gironde a, par un arrêté du 20 août 2021, de nouveau refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme C... relève appel du jugement du 18 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort du point du 3 jugement attaqué que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments de la requérante, ont suffisamment motivé leur jugement s'agissant du moyen tiré du vice de procédure. En outre, l'erreur d'appréciation qu'aurait commise le tribunal administratif dans l'examen de ce moyen a trait au bien-fondé et non à la régularité du jugement.

3. Par ailleurs, si la requérante soutient que le tribunal n'a pas tenu compte de certaines pièces versées en première instance, ce moyen se rattache au bien-fondé du raisonnement suivi par les premiers juges et n'est pas, en tout état de cause, de nature à entacher d'irrégularité le jugement attaqué.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, Mme C... se borne à reprendre, dans des termes similaires et sans critique utile du jugement, le moyen tiré du vice de procédure invoqué en première instance. En se bornant à soutenir que le rapport médical établi par le médecin de l'OFII serait entaché d'erreurs matérielles, la requérante n'apporte en cause d'appel aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation des premiers juges qui ont suffisamment et pertinemment répondu à ce moyen qui n'était, au demeurant, pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...). La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège des médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

6. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'OFII qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.

7. Il ressort des pièces du dossier que Mme C... fait l'objet d'un suivi médical en raison d'un traitement par hormonothérapie à la suite d'un cancer du sein, traité en février 2018, d'une hystérectomie avec annexectomie bilatérale pratiquée en avril 2019, d'une apnée du sommeil nécessitant un appareillage ainsi que d'une insuffisance aortique de niveau 1 nécessitant un examen cardiologique tous les cinq ans. Par l'avis du 22 juillet 2021, le collège de médecins de l'OFII a estimé que si le défaut de prise en charge médicale de son état de santé aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pouvait bénéficier d'un traitement approprié en République Démocratique du Congo. Si la requérante fait valoir qu'elle ne peut bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine où le coût des soins générés serait disproportionné par rapport au niveau de vie moyen et où il n'existerait pas de système d'assurance maladie, les pièces qu'elles versent au dossier, et plus particulièrement les certificats médicaux établis les 29 septembre 2021, 14 octobre 2021, 29 octobre 2021 et 6 novembre 2021, par des médecins congolais, qui sont au demeurant tous postérieurs à la décision attaquée, ne sont pas, eu égard aux termes peu circonstanciés dans lesquels ces documents sont rédigés, de nature à remettre en cause l'appréciation portée par le collège de médecins de l'OFII. Par ailleurs, l'intéressée n'apporte aucun élément à l'appui de ses affirmations permettant d'estimer qu'elle ne pourrait disposer de revenus suffisants dans son pays d'origine lui permettant d'accéder effectivement aux soins appropriés à son état de santé. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la préfète de la Gironde aurait commis une erreur de droit en refusant de lui délivrer le titre de séjour sollicité.

En ce qui concerne de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de séjour pour demander l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

9. En deuxième lieu, si en application des dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ;(...) ", il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'état de santé de Mme C... ne fait pas obstacle au prononcé d'une obligation de quitter le territoire.

10. En troisième lieu, ainsi que l'ont jugé les premiers juges, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des attestations faisant état de sa participation récente à des activités associatives et de bénévolat, au demeurant toutes postérieures à la décision attaquée, que Mme C... aurait noué sur le territoire français des liens personnels, anciens et stables. En outre, elle ne conteste pas être célibataire et sans charge de famille en France. Si la requérante, qui ne produit qu'une simple attestation d'un médecin, soutient que son conjoint est décédé, elle ne justifie pas avoir rompu tout lien avec son pays d'origine où elle a vécu la majeure partie de sa vie et où résident ses cinq enfants et sa fratrie. Par suite, et compte tenu des motifs énoncés au point 7, la préfète de la Gironde pouvait, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, prendre à l'encontre de Mme C... une obligation de quitter le territoire français.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

11. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant le pays de renvoi serait dépourvue de base légale.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de la Gironde du 20 août 2021. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Une copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Christelle Bouard-Lucas, présidente-assesseure,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 novembre 2022.

La rapporteure,

Birsen D...La présidente,

Marianne HardyLa greffière,

Marion Azam Marche

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 22BX00620


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22BX00620
Date de la décision : 03/11/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : ZAWADA LUCIE

Origine de la décision
Date de l'import : 13/11/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-11-03;22bx00620 ?
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