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04/10/2022 | FRANCE | N°20BX02326

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 04 octobre 2022, 20BX02326


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... B... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler la décision du 2 janvier 2018 par laquelle la communauté de communes de l'ouest guyanais a attribué à M. F... le marché de collecte des déchets ménagers sur la commune de Papaïchton et de condamner la communauté des communes de l'ouest guyanais à lui verser la somme de 27 600 euros au titre du préjudice subi.

Par un jugement n° 1800311 du 4 juin 2020, le tribunal administratif de la Guyane a annulé la décision du 2 janvier

2018 précitée et rejeté le surplus des demandes de M. B....

Procédure devant la c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... B... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler la décision du 2 janvier 2018 par laquelle la communauté de communes de l'ouest guyanais a attribué à M. F... le marché de collecte des déchets ménagers sur la commune de Papaïchton et de condamner la communauté des communes de l'ouest guyanais à lui verser la somme de 27 600 euros au titre du préjudice subi.

Par un jugement n° 1800311 du 4 juin 2020, le tribunal administratif de la Guyane a annulé la décision du 2 janvier 2018 précitée et rejeté le surplus des demandes de M. B....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en production de pièces, enregistrés le 24 juillet 2020 et le 28 juillet 2020, la communauté de communes de l'ouest guyanais, représentée par son président en exercice et par Me Peyrical, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guyane du 4 juin 2020 en tant qu'il a annulé sa décision du 2 janvier 2018 attribuant le marché de collecte des déchets ménagers de la commune de Papaïchton à M. F... ;

2°) de rejeter la demande de M. B... ;

3°) de mettre à la charge de M. B... une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

Sur la régularité du jugement :

- il est insuffisamment motivé au regard de l'article L. 9 du code de justice administrative dès lors que le tribunal s'est fondé sur le décret " n° 2007-568 du 17 avril 2007 " qui n'est pas applicable au litige ; il ne s'agit nullement d'une erreur de plume dès lors que le tribunal s'est trompé à la fois sur la numérotation et la date du décret applicable ;

Sur le bien-fondé du jugement :

- il est entaché d'erreurs dans l'application des textes, dès lors que, à supposer que le décret appliqué par le tribunal soit le décret " n° 2007-658 du 2 mai 2007 ", ce dernier a été abrogé et remplacé par le décret n°2017-105 du 27 janvier 2017 entré en vigueur le 1er février 2017 et ne pouvait dès lors servir de base légale pour annuler le contrat en litige ;

- le tribunal ne pouvait sans erreur de droit considérer que le décret applicable aux agents publics listant limitativement les activités accessoires autorisées fixait les modalités d'exercice de ces activités et ainsi considérer l'exécution d'un marché public comme n'entrant pas dans le champ de cette liste ; en effet l'activité de collecte de déchet entre au contraire dans le champ des activités autorisées au sens des dispositions du h) du 1° de l'article 6 du décret du 27 janvier 2017 ;

- le tribunal ne pouvait sans erreur de droit et d'appréciation omettre de vérifier si la collecte de déchets relève d'une activité d'intérêt général et, partant, retenir que l'exécution d'un marché public de collecte de déchets ne relève pas des activités autorisées ;

- dès lors que l'entreprise de M. F... comprend cinq salariés en charge de la collecte des déchets et que le contrat a une durée d'exécution de huit mois, cette activité demeurait pour lui accessoire à son activité principale d'agent technique territorial ;

- le tribunal a méconnu l'étendue de son office dès lors que tout vice entachant un marché public n'entraîne l'annulation du marché que s'il est d'ordre public ce qui n'est pas le cas en l'espèce ; l'irrégularité en cause, à la supposer établie n'affecte que les relations entre M. F... et la commune de Papaïchton qui l'emploie, elle est sans effet à l'égard du marché conclu avec M. F... et ne pouvait ainsi entrainer l'annulation du marché en cause ;

- les autres moyens soulevés en première instance tirés, d'une part, de ce que les règles de publicité et de mise en concurrence ont été méconnues dès lors que M. F... ne disposait pas de moyens matériels pour exécuter le contrat et, d'autre part, de ce que, eu égard à ses fonctions d'agent technique de la commune, il disposait d'un avantage sur les autres candidats de nature à rompre le principe d'égalité entre candidats, ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D... E...,

- et les conclusions de Mme Florence Madelaigue, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite d'un avis d'appel public à la concurrence ouvert selon la procédure adaptée, la communauté des communes de l'ouest guyanais a attribué à M. F... le marché de prestation de collecte des déchets ménagers sur le territoire de la commune de Papaïchton pour une durée de quatre mois, renouvelable une fois. M. B..., candidat évincé, a demandé au tribunal administratif de la Guyane l'annulation de ce marché et l'indemnisation de ses préjudices. Par un jugement du 4 juin 2020, le tribunal a annulé le marché précité et a rejeté le surplus de la requête de M. B.... La communauté de communes de l'ouest guyanais relève appel de ce jugement dont elle demande l'annulation en tant qu'il a fait droit à la demande de M. B... d'annulation du marché en cause.

Sur le bien-fondé du motif d'annulation du marché retenu par les premiers juges :

2. Pour annuler la décision portant attribution du marché de collecte des déchets ménagers de la commune de Papaïchton en litige, le tribunal a considéré que " si cependant l'article 1er du décret n° 2007-568 du 17 avril 2007 susvisé dispose que " les fonctionnaires, les agents non titulaires de droit public et les ouvriers régis par le régime des pensions des établissements industriels de l'Etat peuvent être autorisés à cumuler des activités accessoires à leur activité principale (...) ", le champ des activités autorisées, défini limitativement par les dispositions de l'article 2 de ce même décret, ne comprend pas l'exécution d'un marché de collecte des déchets ménagers, objet du marché en litige. Il suit de là que M. F..., agent de la commune de Papaïchton, titularisé par un arrêté pris par le maire de cette commune, M. A..., le 22 juin 2016 au grade d'adjoint technique territorial de seconde classe, ne pouvait se voir attribuer le marché de collecte des déchets ménagers sur cette même commune, fut-ce en sa qualité d'auto-entrepreneur. "

3. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu'au représentant de l'Etat dans le département dans l'exercice du contrôle de légalité. Si le représentant de l'Etat dans le département et les membres de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l'appui du recours ainsi défini, les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l'intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d'une gravité telle que le juge devrait les relever d'office. Le tiers agissant en qualité de concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif ne peut ainsi, à l'appui d'un recours contestant la validité de ce contrat, utilement invoquer, outre les vices d'ordre public, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction.

4. D'une part, il résulte de ce qui précède que, dans le cadre du recours de M. B..., candidat évincé, contre la validité du contrat, ne sont opérants, outre les moyens d'ordre public, que les manquements en rapport direct avec les motifs de son éviction. Or, en l'espèce, le manquement invoqué tenant à la méconnaissance des règles de cumul d'activité dans la fonction publique de l'attributaire du marché est sans rapport avec le motif d'éviction de M. B... tiré de ce que son offre n'était pas économiquement la plus avantageuse.

5. D'autre part, le contenu d'un contrat ne présente un caractère illicite que si l'objet même du contrat, tel qu'il a été formulé par la personne publique contractante pour lancer la procédure de passation du contrat ou tel qu'il résulte des stipulations convenues entre les parties qui doivent être regardées comme le définissant, est, en lui-même, contraire à la loi, de sorte qu'en s'engageant pour un tel objet, le cocontractant de la personne publique la méconnaît nécessairement. En l'espèce, le contrat en cause, qui a pour objet la collecte des déchets ménagers de la commune de Papaïchton, n'a pas d'objet illicite. En invoquant la qualité de fonctionnaire de M. F... et l'interdiction de cumul d'activité prévue par la loi du 13 juillet 1983 régissant les droits et obligations des fonctionnaires qui ne concerne que les relations entre M. F... et la personne publique qui l'emploie, le requérant ne fait état d'aucun élément de nature à démontrer l'illicéité du marché en litige en l'absence de lien direct entre cette interdiction et l'objet du contrat en litige.

6. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué, la communauté de communes de l'ouest guyanais est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a accueilli le moyen exposé au point 2 et fait droit à la demande de M. B... tendant à l'annulation du contrat en cause. Il appartient toutefois à la cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B... devant le tribunal administratif.

Sur les autres moyens invoqués :

7. En premier lieu, M. B... soutient que M. F..., attributaire du marché de collecte des déchets ménagers, ne disposerait pas des moyens matériels suffisants pour exécuter les prestations du marché. Toutefois, il n'apporte aucun élément permettant de justifier ses affirmations. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des règles de publicité et de mise en concurrence doit être écarté.

8. En second lieu, aucune disposition du code des marchés publics n'interdit à un fonctionnaire ou agent public de candidater à une procédure de mise en concurrence. D'une part, si M. B... soutient que les fonctions d'agent territorial au sein de la commune de Papaïchton exercées par M. F... étaient de nature à rompre l'égalité entre les candidats, il résulte toutefois de l'instruction que la communauté de communes de l'ouest guyanais, établissement public de coopération intercommunale, est un personne morale distincte de la commune de Papaïchton. D'autre part, aucun élément du dossier ne permet d'estimer que sa qualité de fonctionnaire ou les fonctions d'agent territorial qu'il exerçait auraient placé M. F... dans une situation privilégiée de nature à l'avantager. Par suite, le moyen tiré de ce que le principe d'égalité de traitement entre les candidats n'aurait pas été respecté doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la communauté de communes de l'ouest guyanais est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a fait droit à la demande de M. B... et a annulé le marché public de collecte des déchets ménagers de la commune de Papaïchton.

Sur les frais liés à l'instance :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 200 euros à verser à la communauté des communes de l'ouest guyanais au titre des frais liés à l'instance.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1800311 du 4 juin 2020 du tribunal administratif de la Guyane est annulé.

Article 2 : La demande de M. B... présentée devant le tribunal administratif de la Guyane est rejetée.

Article 3 : M. B... versera à la communauté de communes de l'ouest guyanais une somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la communauté de communes de l'ouest guyanais, à M. G... B... et à M. C... F....

Copie en sera adressée, pour information, au préfet de la Guyane.

Délibéré après l'audience du 12 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Florence Demurger, présidente,

Mme Karine Butéri, présidente-assesseure,

Mme Caroline Gaillard, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 octobre 2022.

La rapporteure,

Caroline E...

La présidente,

Florence DemurgerLa greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au préfet de la Guyane en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20BX02326


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX02326
Date de la décision : 04/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme DEMURGER
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : CABINET PEYRICAL et SABATTIER ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-10-04;20bx02326 ?
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