Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler la décision implicite par laquelle la préfète des Landes a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour présentée le 21 janvier 2020.
Par un jugement n° 2102671 du 7 mars 2022, le tribunal administratif de Pau a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 28 mars 2022, M. B..., représenté par Me Savary-Goumi, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 7 mars 2022 ;
2°) à titre principal, de prononcer un non-lieu à statuer sur sa demande ;
3°) à titre subsidiaire, d'annuler la décision implicite par laquelle la préfète des Landes a rejeté sa demande de délivrance d'un titre de séjour du 21 janvier 2020 ;
4°) d'enjoindre à la préfète des Landes, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à défaut, de lui délivrer dans le même délai et sous la même astreinte un récépissé de demande de titre de séjour l'autorisant à travailler et de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat, et au bénéfice de son conseil, la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la décision explicite du 28 janvier 2022 s'est substituée à la décision implicite litigieuse ; que le tribunal aurait dû prononcer un non-lieu à statuer sur sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite ;
- la décision de refus de séjour a méconnu les dispositions des articles L. 435-1 et L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 7 avril 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., ressortissant malien, est né, selon ses déclarations, le 31 décembre 2001 à Diafounou Diongana Kayes au Mali. Il est entré irrégulièrement en France en novembre 2017. En exécution d'un jugement du 5 mars 2018 du tribunal de grande instance de Mont-de-Marsan, il a été pris en charge par le département des Landes au titre de l'aide sociale à l'enfance. Le 21 janvier 2020, il a présenté auprès des services de la préfecture des Landes une demande de titre de séjour, dont le récépissé, délivré le 7 juillet 2020, a ensuite été régulièrement renouvelé. M. B... relève appel du jugement du 7 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé sur cette demande par l'administration.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. En vertu de l'article 1er du décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger, une décision implicite de rejet naît du silence gardé par l'administration sur une demande de titre de séjour pendant une durée de huit mois à compter de la date à laquelle l'autorité administrative informe l'étranger de l'engagement de vérifications auprès de l'autorité étrangère compétente de l'authenticité ou l'exactitude d'un acte de l'état civil étranger. Toutefois, une décision explicite de rejet intervenue postérieurement se substitue à la première décision. Il en résulte que des conclusions à fin d'annulation de cette première décision doivent être regardées comme dirigées contre la seconde.
3. En l'occurrence, il ressort des pièces du dossier que, par un arrêté du 28 janvier 2022, la préfète des Landes a explicitement rejeté la demande de titre de séjour présentée par M. B..., lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi. Par suite, sa requête en appel doit être regardée comme dirigée contre cette décision lui refusant explicitement le séjour.
4. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le tribunal était tenu de prononcer un non-lieu à statuer sur sa demande.
Sur la légalité de la décision portant refus de séjour :
5. Compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, les conclusions de M. B... dirigées contre la décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour doivent être regardées comme dirigées contre la décision explicite du 28 janvier 2022 portant refus de séjour.
6. En premier lieu, lorsqu'il est saisi d'une demande de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'une des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, le préfet n'est pas tenu d'examiner d'office si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une autre disposition de ce code ou de cet accord, même s'il lui est toujours loisible de le faire à titre gracieux, notamment en vue de régulariser la situation de l'intéressé.
7. En l'occurrence, si M. B... soutient que la décision litigieuse aurait méconnu les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il n'établit ni même ne soutient avoir sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait dû examiner son droit au séjour sur le fondement de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne peut, dès lors, pas utilement soutenir qu'il remplissait les conditions de régularisation prévues à cet article.
8. En second lieu, aux termes de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A titre exceptionnel, l'étranger qui a été confié à l'aide sociale à l'enfance ou du tiers digne de confiance entre l'âge de seize ans et l'âge de dix-huit ans et qui justifie suivre depuis au moins six mois une formation destinée à lui apporter une qualification professionnelle peut, dans l'année qui suit son dix-huitième anniversaire, se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ", sous réserve du caractère réel et sérieux du suivi de cette formation, de la nature de ses liens avec sa famille restée dans le pays d'origine et de l'avis de la structure d'accueil ou du tiers digne de confiance sur l'insertion de cet étranger dans la société française. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. "
9. En outre, l'article L. 811-2 du même code prévoit que : " La vérification de tout acte d'état civil étranger est effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. ". Enfin, en application de l'article 47 du code civil : " Tout acte de l'état civil (...) des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. ". Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties. Pour juger qu'un acte d'état civil produit devant lui est dépourvu de force probante, qu'il soit irrégulier, falsifié ou inexact, le juge doit en conséquence se fonder sur tous les éléments versés au dossier dans le cadre de l'instruction du litige qui lui est soumis. Par ailleurs, hormis le cas où le document aurait un caractère frauduleux, il n'appartient pas aux autorités administratives françaises de mettre en doute le bien-fondé d'une décision rendue par une autorité juridictionnelle étrangère.
10. Il ressort des pièces du dossier que, pour établir son état civil, M. B... a produit un jugement supplétif d'acte de naissance du 7 mai 2018, l'extrait de naissance établi sur la base de ce jugement le 8 mai 2018 et une copie intégrale de cet acte de naissance. Il ressort également des rapports d'analyse documentaire simplifiés des 17 juillet 2018 et 17 mars 2020 que le premier exemplaire de ce jugement supplétif était une contrefaçon aux motifs, notamment, qu'il ne comportait aucune signature au recto, que le tampon de l'autorité compétente comportait des fautes d'orthographe et que le requérant a, par la suite, produit des exemplaires différents de ce même jugement. Ces irrégularités substantielles, qui ne sont pas utilement contestées, privent de toute valeur probante le jugement supplétif dont il se prévaut ainsi que l'acte de naissance établi sur la base de ce jugement, sans qu'il soit besoin de consulter l'autorité étrangère compétente sur son authenticité. Il en est de même des autres documents attestant de l'identité de l'appelant et également fondés sur ce jugement supplétif, en particulier de son passeport. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par sa décision du 22 janvier 2022, la préfète des Landes a considéré, d'une part, qu'il ne justifiait pas de son état civil et de sa nationalité en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'autre part, que sa demande de titre présentait elle-même un caractère frauduleux, et a en conséquence rejeté sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
11. Dans ces conditions, l'appelant ne peut pas utilement soutenir qu'il remplissait les autres conditions auxquelles l'article L. 435-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile subordonne la délivrance d'un titre de séjour.
12. Il résulte de tout ce qui précède que l'appelant n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.
Copie en sera adressée à la préfète des Landes.
Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Mme Agnès Bourjol, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 septembre 2022.
Le rapporteur,
Manuel C...
La présidente,
Marie-Pierre Beuve DupuyLa greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 22BX00968 2