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27/09/2022 | FRANCE | N°21BX02922

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 3ème chambre, 27 septembre 2022, 21BX02922


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux demandes distinctes, M. A... H... F... et Mme C... D..., épouse F..., ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler les arrêtés du 25 février 2021 par lesquels le préfet des Deux-Sèvres a refusé de leur délivrer des titres de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2100797-2100798 du 1er juillet 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ces demandes.r>
Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 9 juillet 2021 sous...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux demandes distinctes, M. A... H... F... et Mme C... D..., épouse F..., ont demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler les arrêtés du 25 février 2021 par lesquels le préfet des Deux-Sèvres a refusé de leur délivrer des titres de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2100797-2100798 du 1er juillet 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 9 juillet 2021 sous le n° 21BX02921, M. F..., représenté par Me Ormillien, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 1er juillet 2021 en tant qu'il le concerne ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 février 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet des Deux-Sèvres de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

Il soutient que :

- le signataire de l'arrêté litigieux n'était pas compétent pour le signer et que la délégation de signature citée par le tribunal n'est pas consultable sur internet ;

- cet arrêté est insuffisamment motivé ;

- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

- l'arrêté a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cet arrêté a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

II. Par une requête enregistrée le 9 juillet 2021 sous le n° 21BX02922, Mme D..., épouse F..., représentée par Me Ormillien, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Poitiers du 1er juillet 2021 en tant qu'il la concerne ;

2°) d'annuler l'arrêté du 25 février 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination ;

3°) d'enjoindre au préfet des Deux-Sèvres de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés pour l'instance.

Elle soutient que :

- le signataire de l'arrêté litigieux n'était pas compétent pour le signer et que la délégation de signature citée par le tribunal n'est pas consultable sur internet ;

- cet arrêté est insuffisamment motivé ;

- cet arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

- cet arrêté a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cet arrêté a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

Mme D... et M. F... se sont vu attribuer le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par des décisions du 29 juillet 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. G... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes n° 21BX02921 et 21BX02922 sont dirigées contre un même jugement, présentent à juger des questions identiques et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y lieu, par suite, de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

2. M. A... H... F... et Mme C... D... épouse F..., ressortissants algériens nés les 11 novembre 1984 et 28 janvier 1986, ont déclaré être entrés en France le 7 juillet 2019 sous couvert de visas court séjour. Ils ont sollicité la délivrance de titres de séjour en invoquant l'état de santé de M. F.... Par deux arrêtés du 25 février 2021, le préfet des Deux-Sèvres a refusé de faire droit à ces demandes, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Par deux requêtes enregistrées sous les n° 21BX02921 et 21BX02922, M. F... et Mme D... relèvent appel, chacun en ce qui le concerne, du jugement du 7 janvier 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces arrêtés.

3. En premier lieu, les appelants, qui ne contestent plus, en appel, que la signataire des arrêtés litigieux, Mme B... E... bénéficiait depuis le 24 juin 2020, d'une délégation de signature du préfet des Deux-Sèvres, soutiennent dorénavant que cette délégation n'aurait pas été publiée au recueil des actes administratifs du département et ne serait pas consultable sur le site de la préfecture. Toutefois, il ressort au contraire des pièces produites au dossier que cette délégation a été publiée le même jour au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture n° 79-2020-074 et qu'elle est librement consultable sur le site internet de la préfecture des Deux-Sèvres. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, les arrêtés attaqués comportent les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement. Par suite, ils sont suffisamment motivés au regard des dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

5. En troisième lieu, l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 stipule que : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...). / 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays. / (...). ".

6. Il ressort de l'avis émis le 27 novembre 2020 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), que l'état de santé de M. F... nécessitait une prise en charge dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une extrême gravité et qu'il pouvait voyager sans risque vers son pays d'origine. Pour contester cet avis, les appelants entendent se prévaloir de plusieurs compte-rendus émanant des centres hospitaliers de Niort, de Poitiers et de Nantes dont il ressort que M. F... est atteint d'une cécité totale lié à une dystrophie rétinienne probablement imputable à une anomalie génétique. Ces pièces médicales ne mentionnent ni l'existence d'un traitement ni la nécessité d'un suivi particulier. Si les appelants entendent également se prévaloir d'une attestation établie par un médecin généraliste, qui ne tient pas compte des investigations médicales réalisées près d'un an plus tôt et se borne à évoquer, sans plus de précision, l'existence d'une thérapie génique qui ne serait pas, " à sa connaissance ", disponible dans son pays d'origine, ce seul document ne permet pas de considérer qu'il existerait un traitement de l'affection dont est atteint M. F... ni, par voie de conséquence, qu'un défaut de prise en charge de son état de santé pourrait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dans ces conditions, les appelants ne sont pas fondés à soutenir que les arrêtés litigieux auraient méconnu les stipulations précitées du 7 de l'article 6 de l'accord franco algérien du 27 décembre 1968.

7. En quatrième lieu, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. Il ressort des pièces du dossier que les appelants sont titulaires d'un contrat de bail à Niort, que le frère et la belle-sœur de M. F... résident régulièrement sur le territoire et attestent l'aider financièrement. Par ailleurs, M. F..., titulaire d'une licence de droit algérienne, justifie également être inscrit en licence de droit à l'université de Bordeaux au titre de l'année 2020/2021, avoir suivi des cours d'informatique adaptés aux malvoyants de septembre 2019 à janvier 2020 et être membre d'un club de handisport. Mme D... justifie pour sa part avoir participé à des actions bénévoles au sein d'associations caritatives. Enfin, M. F... et Mme D... prennent des cours des français depuis leur entrée en France. Toutefois, ces éléments ne permettent pas, à eux seuls, de démontrer que les appelants disposent de liens intenses et durables sur le territoire français ou qu'ils seraient particulièrement bien intégrés dans la société française alors qu'ils ne résidaient en France que depuis moins de deux années à la date de l'arrêté litigieux et qu'ils n'établissent ni même ne soutiennent être dépourvus d'attaches dans leur pays d'origine où ils ont résidé pendant plus de trente années. Dans ces conditions, ils ne sont pas fondés à soutenir que les arrêtés litigieux auraient porté une atteinte excessive à leur droit au respect de leur vie privée et familiale au sens des stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. En cinquième et dernier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 6 et 8 du présent arrêt que les appelants ne sont pas davantage fondés à soutenir que les décisions leur refusant le séjour et leur faisant obligation de quitter le territoire seraient entachées d'une erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur leurs situations personnelles.

10. Il résulte de tout ce qui précède que les appelants ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés litigieux. Par suite leurs requêtes doivent être rejetées, y compris leurs conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Les requêtes de M. F... et de Mme D... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... H... F..., à Mme C... D..., épouse F..., et au ministre de l'intérieur et des Outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet des Deux-Sèvres.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente,

M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.

Mme Agnès Bourjol, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 27 septembre 2022.

Le rapporteur,

Manuel G...

La présidente,

Marie-Pierre Beuve Dupuy

La greffière,

Sylvie Hayet

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des Outre-mer en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX02921-21BX02922


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02922
Date de la décision : 27/09/2022
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : Mme BEUVE-DUPUY
Rapporteur ?: M. Manuel BOURGEOIS
Rapporteur public ?: Mme LE BRIS
Avocat(s) : ORMILLIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-09-27;21bx02922 ?
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