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02/06/2022 | FRANCE | N°21BX03960

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 02 juin 2022, 21BX03960


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2020 de la préfète de la Gironde portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2101097 du 16 juin 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 12 octobre,

29 novembre et 16 décembre 2021, M. A... B..., représenté par Me Astié, demande à la cour :

1°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2020 de la préfète de la Gironde portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 2101097 du 16 juin 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 12 octobre, 29 novembre et 16 décembre 2021, M. A... B..., représenté par Me Astié, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 16 juin 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2020 de la préfète de la Gironde portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer titre de séjour ou à défaut de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois sous astreinte de 80 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de séjour,

- elle est insuffisamment motivée en droit, dès lors qu'elle ne vise pas les articles de la convention franco-togolaise ;

- elle méconnaît l'article 9 de la convention franco-togolaise, qui ne conditionne pas le renouvellement du titre de séjour " étudiant " au caractère sérieux des études ;

- elle méconnaît le 5° du II de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public, et qu'aux termes de ce texte le titre de séjour étudiant est accordé de plein droit à l'étranger ressortissant d'un pays ayant signé avec la France un accord de réciprocité relatif à l'admission au séjour des étudiants ;

- elle est entachée d'une erreur d'appréciation quant au caractère réel et sérieux des études, dès lors qu'il a perdu son père et qu'il présente une dépression ;

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français,

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est privée de base légale du fait de l'illégalité du refus de titre ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors qu'il est présent en France depuis trois ans, travaille de manière régulière, peut voir régulièrement son frère qui vit en Italie et a noué des relations amicales avec sa logeuse ;

- il a droit à un titre de séjour de plein droit en application de l'article 11 de la convention franco-togolaise ;

S'agissant du pays de renvoi, il est privé de base légale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2022, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Par une décision du 16 septembre 2021, M. A... B... s'est vu refuser le bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention franco-togolaise du 13 juin 1996 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C... D...,

- et les observations de Mme E..., élève avocate sous la responsabilité de Me Debril, représentant M. F... A... B....

Considérant ce qui suit :

1. M. F... A... B..., de nationalité togolaise, est entré en France le 8 septembre 2017, muni d'un visa de long séjour étudiant valant titre de séjour valable du 29 août 2017 au 29 août 2018. Ce titre de séjour lui a été renouvelé jusqu'au 29 décembre 2020. Le 27 octobre 2020, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant, et, par l'arrêté litigieux du 18 décembre 2020, la préfète de la Gironde lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination. Il relève appel du jugement du 16 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, M. A... B... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré du défaut de motivation de la décision litigieuse. S'il fait valoir pour la première fois en appel que l'arrêté du 18 décembre 2020, après avoir visé, notamment, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la convention franco-togolaise, mentionne " qu'il n'entre dans aucun autre cas d'attribution d'un titre de séjour de plein droit en application du code et de la convention susvisés ", sans mentionner les stipulations de la convention en cause, cette circonstance n'est pas de nature à vicier la motivation de la décision contestée.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 9 de la convention franco-togolaise : " Les ressortissants de chacun des États contractants désireux de poursuivre des études supérieures ou d'effectuer un stage de formation dans des disciplines spécialisées qui n'existent pas dans l'État d'origine sur le territoire de l'autre État doivent, outre le visa de long séjour prévu à l'article 4, justifier d'une attestation d'inscription ou de préinscription dans l'établissement d'enseignement choisi, ou d'une attestation d'accueil de l'établissement où s'effectue le stage ainsi que, dans tous les cas, de moyens d'existence suffisants. / Les intéressés reçoivent un titre de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Ce titre de séjour est renouvelé annuellement sur justification de la poursuite effective des études ou du stage et de la possession de moyens d'existence suffisants ".

4. En application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour présentée en qualité d'étudiant, d'apprécier, sous le contrôle du juge, la réalité et le sérieux des études poursuivies en tenant compte de l'assiduité, de la progression et de la cohérence du cursus suivi.

5. M. A... B... est venu en 2017 poursuivre ses études de droit à l'université de Bordeaux. Il ressort des pièces du dossier qu'il s'est inscrit à trois reprises en troisième année de licence de droit, et qu'il a été ajourné avec des moyennes de 8/20 pour l'année 2017-2018, 9/20 pour l'année 2018-2019 et 8,8/20 pour l'année 2019-2020. En l'absence de toute progression dans son cursus, M. A... B... s'est inscrit pour l'année scolaire 2020-2021 en classe de première professionnelle afin d'obtenir un baccalauréat professionnel de technicien d'usinage en juin 2022. Si l'intéressé fait valoir que des raisons de santé l'ont empêché de réussir sa licence de droit, cela ne ressort pas des pièces du dossier. De plus, il ne peut utilement se prévaloir des difficultés financières rencontrées à son arrivée en France, notamment pour trouver un logement, dès lors que les stipulations précitées de l'article 9 de la convention franco-togolaise exigent, tant pour la première délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étudiant que pour son renouvellement, que l'intéressé dispose de moyens d'existence suffisants. Dans ces conditions, la préfète de la Gironde a pu estimer, sans commettre d'erreur d'appréciation au regard des stipulations de l'article 9 de la convention franco-togolaise, que M. A... B... ne démontrait pas le caractère réel et sérieux de ses études et lui refuser pour ce motif le renouvellement de son titre de séjour.

6. En troisième lieu, dès lors que l'article 9 de la convention franco-togolaise prévoit la délivrance de titres de séjour en qualité d'étudiant, un ressortissant togolais souhaitant obtenir un titre de séjour en cette qualité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-togolais.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.

8. En deuxième lieu, lorsqu'une obligation de quitter le territoire français assortit un refus de titre de séjour, la motivation de celle-ci se confond avec celle du refus de séjour dont elle découle nécessairement. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 4, la décision de refus de séjour est suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de la mesure d'éloignement en litige doit être écarté.

9. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

10. M. A... B... fait valoir qu'il séjourne en France depuis 2017, travaille de manière régulière, peut voir régulièrement son frère qui vit en Italie et a noué des relations amicales avec sa logeuse. Toutefois, il est constant que l'intéressé est célibataire et sans enfant, qu'il n'est pas dépourvu d'attaches au Togo, où il a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans, et qu'il n'a été autorisé à séjourner en France que pour y poursuivre ses études. Dès lors, dans les circonstances de l'espèce, le moyen tiré par M. A... B... de ce que l'obligation de quitter le territoire français contestée porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par la décision et méconnaîtrait par suite les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doit être écarté.

11. En quatrième lieu, si, lorsque la loi ou une convention bilatérale prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à un étranger, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'obligation de quitter le territoire français, les stipulations de l'article 11 de la convention franco-togolaise ne prévoient pas la délivrance de plein droit d'un titre de séjour.

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

12. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles 37 de la loi n° 91-347 du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... B... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 5 mai 2022 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 2 juin 2022.

La rapporteure,

Frédérique D...Le président

Éric Rey-Bèthbéder La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX03960


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 21BX03960
Date de la décision : 02/06/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : SCP ASTIE-BARAKE-POULET-MEYNARD

Origine de la décision
Date de l'import : 14/06/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-06-02;21bx03960 ?
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