Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision du 11 octobre 2017 par laquelle le président du conseil départemental de la Haute-Vienne a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son accident survenu le 19 août 2017.
Par un jugement n° 1701536 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 décembre 2019 et le 16 juin 2020, M. B..., représenté par Me Jeanjon, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 7 novembre 2019 ;
2°) d'annuler la décision du 11 octobre 2017 ;
3°) d'enjoindre au département de la Haute-Vienne de reconnaître l'imputabilité au service de son accident et de le rétablir rétroactivement dans ses droits à maintien d'un plein traitement jusqu'à la reprise du service, dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) subsidiairement, d'ordonner une expertise judiciaire ;
5°) de mettre à la charge du département de la Haute-Vienne la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision refusant de reconnaitre l'imputabilité au service de son accident est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle ne tient pas compte de la présomption d'imputabilité au service de son accident survenu pendant le trajet vers son lieu de travail ;
- cette décision est entachée d'une erreur de fait et d'une erreur d'appréciation dès lors que les conditions dans lesquelles il exerçait sa profession de veilleur de nuit et les difficultés liées à la population qu'il devait gérer n'ont pas été prises en compte.
Par un mémoire en défense, enregistré le 6 août 2020, le département de la Haute-Vienne, représenté par son président en exercice et par Me Gauci, conclut au rejet de la requête, et à la mise à la charge de M. B... de la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 25 juin 2020.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... E...,
- les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public,
- et les observations de Me Gault-Ozimek, représentant le département de la Haute-Vienne.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... B..., agent du département de la Haute-Vienne, titulaire du grade d'agent d'entretien qualifié, affecté à l'unité d'accueil d'urgence du centre départemental de l'enfance et de la famille pour y exercer des missions de surveillant de nuit, a été victime le 19 août 2017 d'un premier malaise sur la voie publique alors qu'il se rendait à pied sur son lieu de travail dans le cadre d'une astreinte, puis d'un second malaise à l'arrivée. A la suite de cet accident qui a été suivi d'une hospitalisation du 19 août 2017 au 4 septembre 2017, il a été placé en congé de maladie ordinaire, puis en congé de longue maladie. Au vu de l'avis défavorable résultant du rapport d'expertise établi le 5 septembre 2017 par le médecin agréé, le président du conseil départemental de la Haute-Vienne a, par une décision du 11 octobre 2017, rejeté la demande de M. B... tendant à voir reconnaître l'imputabilité au service de l'accident survenu le 19 août 2017. M. B... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande d'annulation de cette décision.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d'activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique a institué un " congé pour invalidité temporaire imputable au service " en insérant dans la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires un article 21 bis aux termes duquel : " I. - Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. L'autorité administrative peut, à tout moment, vérifier si l'état de santé du fonctionnaire nécessite son maintien en congé pour invalidité temporaire imputable au service. (...) / III.- Est reconnu imputable au service, lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit en apportent la preuve ou lorsque l'enquête permet à l'autorité administrative de disposer des éléments suffisants, l'accident de trajet dont est victime le fonctionnaire qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son service et sa résidence ou son lieu de restauration et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel du fonctionnaire ou toute autre circonstance particulière étrangère notamment aux nécessités de la vie courante est de nature à détacher l'accident du service. / (...) ". L'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017 a aussi, en conséquence de l'institution du congé pour invalidité temporaire imputable au service à l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983, modifié des dispositions des lois du 11 janvier 1984, du 26 janvier 1984 et du 9 janvier 1986 régissant respectivement la fonction publique de l'Etat, la fonction publique territoriale et la fonction publique hospitalière. Le IV de l'article 10, pour la fonction publique hospitalière, dispose ainsi que : " A l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée : a) Au deuxième alinéa du 2°, les mots : " ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions " sont remplacés par les mots : ", à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service " ; b) Au 4°, le deuxième alinéa est supprimé ; c) Après le quatrième alinéa du 4°, est inséré un alinéa ainsi rédigé : " Les dispositions du quatrième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue durée ".
3. L'application de ces dispositions résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 était manifestement impossible en l'absence d'un texte réglementaire fixant, notamment, les conditions de procédure applicables à l'octroi de ce nouveau congé pour invalidité temporaire imputable au service. Les dispositions de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ne sont donc entrées en vigueur, en tant qu'elles s'appliquent à la fonction publique hospitalière, qu'à la date d'entrée en vigueur, le 16 mai 2020, du décret du 13 mai 2020 relatif au congé pour invalidité temporaire imputable au service dans la fonction publique hospitalière, décret par lequel le pouvoir réglementaire a pris les dispositions réglementaires nécessaires pour cette fonction publique et dont l'intervention était, au demeurant, prévue, sous forme de décret en Conseil d'Etat, par le VI de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 résultant de l'article 10 de l'ordonnance du 19 janvier 2017. Il en résulte que les dispositions de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017 sont demeurées applicables jusqu'à l'entrée en vigueur du décret du 13 mai 2020.
4. Le malaise dont M. B... a été victime étant survenu le 19 août 2017, les dispositions applicables au litige sont celles de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 dans leur rédaction antérieure à celle résultant de l'ordonnance du 19 janvier 2017.
5. Aux termes des dispositions du deuxième alinéa du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 s'agissant des accidents imputables au service dont sont victimes les fonctionnaires hospitaliers : " I.- Le fonctionnaire en activité a droit à un congé pour invalidité temporaire imputable au service lorsque son incapacité temporaire de travail est consécutive à un accident reconnu imputable au service, à un accident de trajet ou à une maladie contractée en service définis aux II, III et IV du présent article. Ces définitions ne sont pas applicables au régime de réparation de l'incapacité permanente du fonctionnaire. / Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. La durée du congé est assimilée à une période de service effectif. L'autorité administrative peut, à tout moment, vérifier si l'état de santé du fonctionnaire nécessite son maintien en congé pour invalidité temporaire imputable au service. / II.- Est présumé imputable au service tout accident survenu à un fonctionnaire, quelle qu'en soit la cause, dans le temps et le lieu du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par le fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant l'accident du service. / (...) ".
6. Il résulte de ces dispositions qu'un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet évènement du service, le caractère d'un accident de service. En outre, est réputé constituer un accident de trajet tout accident dont est victime un agent public qui se produit sur le parcours habituel entre le lieu où s'accomplit son travail et sa résidence et pendant la durée normale pour l'effectuer, sauf si un fait personnel de cet agent ou toute autre circonstance particulière est de nature à détacher l'accident du service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce.
7. Il ressort des pièces du dossier que, le 19 août 2017, alors qu'il se rendait à pied sur son lieu de travail, M. B..., agent d'entretien qualifié relevant de la fonction publique hospitalière, a été victime, sur la voie publique, d'un malaise cardiaque occasionnant une chute sans gravité. Après s'être relevé, il a repris sa marche vers son lieu de travail et, à son arrivée, il a de nouveau été victime d'un épisode identique en relation avec un trouble du rythme cardiaque, qui a conduit à son hospitalisation puis à deux interventions chirurgicales les 30 et 31 août 2017. M. B... persiste à soutenir en appel que cet accident est imputable au service. Il ressort toutefois des expertises médicales réalisées par le docteur G... C..., médecin agréé, le 20 janvier 2018 et par le docteur F... H..., également médecin agréé, le 5 juillet 2018, que M. B... était traité depuis le mois de mars 2017 pour une pathologie cardiaque préexistante majeure et évolutive et que s'il se prévaut du stress engendré par ses conditions de travail, plus précisément occasionné par l'agressivité des jeunes accueillis dans le centre dont l'un l'a agressé en mars 2017 et des responsabilités importantes qui lui ont été confiées alors qu'il n'aurait ni reçu de formation adéquate ni bénéficié d'un suivi médical régulier, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'intéressé aurait eu à supporter, le jour même ou les jours précédents son accident, une charge de travail excessive ou un état de stress important résultant de circonstances particulières.
8. Dans ces conditions, s'il est constant que l'accident de santé est survenu sur le lieu et dans le temps de service, aucun lien direct entre l'accident de santé de M. B... et les conditions d'exécution du service n'est établi. Dès lors, en refusant de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident, le département de la Haute-Vienne, qui a recherché, conformément à l'état du droit et de la jurisprudence applicable, si l'accident pouvait trouver une origine directe dans les conditions mêmes d'exercice des fonctions de M. B..., n'a commis ni erreur de fait, ni erreur de droit, ni erreur d'appréciation.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
9. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution ".
10. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. B... n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
11. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il y ait lieu pour la cour d'ordonner une expertise judiciaire, que M. B... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Limoges a rejeté ses demandes.
Sur les frais liés à l'instance :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Haute-Vienne, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que M. B... demande au titre des frais liés à l'instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 1 500 euros à verser au département de la Haute-Vienne au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera au département de la Haute-Vienne la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au département de la Haute-Vienne.
Délibéré après l'audience du 9 mai 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Karine Butéri, présidente,
M. Olivier Cotte, premier conseiller,
Mme Caroline Gaillard, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 mai 2022.
La rapporteure,
Caroline E...
La présidente,
Karine Butéri
La greffière,
Catherine Jussy La République mande et ordonne au préfet de la Haute-Vienne, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX04915