Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2020 par lequel la préfète de l'Ariège lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination.
Par un jugement n° 2005217 du 18 juin 2021, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 6 septembre 2021, Mme B..., représentée par Me Kosseva-Venzal, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulouse du 18 juin 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2020 par lequel la préfète de l'Ariège lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Ariège de lui délivrer un titre de séjour ou à défaut de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français méconnaissent les dispositions des articles L. 313-11-7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'un défaut de base légale en raison de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire ;
- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense, enregistré le 10 janvier 2022, la préfète de l'Ariège conclut au rejet de la requête. Elle fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 24 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 17 janvier 2022 à 12h00.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 juillet 2021.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale des droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. E... D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., ressortissante albanaise, née le 17 novembre 1997, est entrée irrégulièrement en France le 4 octobre 2016, selon ses déclarations. Sa demande d'asile, présentée le 13 décembre 2016, a été rejetée par décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) le 29 mars 2017 et ce rejet a été confirmé par décision de la cour nationale du droit d'asile (CNDA) du 31 août 2017. Puis, elle a sollicité par une demande formée le 14 mai 2018 et complétée le 24 juin 2020, son admission exceptionnelle au séjour. Par arrêté du 21 septembre 2020, la préfète de l'Ariège a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination. Mme B... relève appel du jugement du 18 juin 2021 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour et celle portant obligation de quitter le territoire :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
3. Mme B... fait valoir qu'elle est présente en France, avec ses parents et ses deux frères depuis presque 6 ans et que sa présence est nécessaire auprès de sa mère, gravement malade, pour l'aider à effectuer les gestes simples du quotidien. Elle fait également valoir qu'elle est bien intégrée en France où elle a obtenu un baccalauréat professionnel ainsi qu'un BTS et qu'elle ne pourra pas poursuivre ses études en Albanie en raison des menaces de vendetta pesant sur sa famille. Elle ajoute qu'elle a donné naissance en 2017 à une petite fille, C..., désormais scolarisée en France, qui n'a jamais connu l'Albanie, et qu'elle a un compagnon, de nationalité française, depuis deux ans, et qu'ainsi, elle dispose de l'ensemble de ses liens personnels et familiaux en France. Cependant, eu égard aux circonstances que les parents de Mme B... ainsi que l'un de ses frères ont fait l'objet d'un arrêté du même jour portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français, et que rien ne fait obstacle à ce qu'ils retournent ensemble en Albanie, où la requérante a vécu jusqu'à l'âge de dix-huit ans, qu'il n'est pas démontré que la requérante ne pourrait poursuivre ses études en Albanie ni que la pathologie dont souffre sa mère ne pourrait être traitée dans ce pays et, enfin, eu égard à la durée de sa relation avec son compagnon de nationalité française et à l'absence de vie commune, à la date de l'arrêté attaqué, la requérante n'est pas fondée à soutenir que cet arrêté méconnaîtrait les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, la préfète de l'Ariège n'a pas entaché ses décisions d'une erreur manifeste d'appréciation.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ".
5. Il résulte des éléments et circonstances exposés au point 3, que Mme B... n'établit pas que son admission au séjour répondrait à des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'une carte de séjour " vie privée et familiale ". Dès lors, la préfète n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite ce moyen doit être écarté.
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. (...) ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
7. Si la requérante fait valoir que sa fille mineure C... est née en France en 2017 et y est scolarisée, il n'est pas établi qu'elle ne pourrait pas continuer sa scolarité en Albanie. Par ailleurs, ni la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour, ni la décision d'éloignement n'ont pour objet ou pour effet de séparer Mme B... de sa fille. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut être qu'écarté.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
8. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de renvoi serait entachée d'un défaut de base légale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour et de celle portant obligation de quitter le territoire français sur lesquelles elle est fondée doit être écarté.
9. En second lieu, alors que la demande d'asile de Mme B... a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides laquelle a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile, la requérante n'apporte pas d'élément nouveau de nature à établir qu'elle serait personnellement et actuellement exposée à des risques en cas de retour dans son pays d'origine. Le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaitrait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.
10. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point précédent, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la décision fixant son pays de renvoi est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.
11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté de la préfète de l'Ariège du 21 septembre 2020. Par suite, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera adressée à la préfète de l'Ariège.
Délibéré après l'audience du 19 avril 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mai 2022.
Le rapporteur,
Dominique D... La présidente,
Evelyne Balzamo Le greffier,
Christophe Pelletier
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21BX03669