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12/05/2022 | FRANCE | N°21BX04034

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 12 mai 2022, 21BX04034


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A..., se disant M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2101410 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 octobre

2021, M. A..., se disant M. B..., représenté par Me Ormillien, demande à la cour :

1°) d'annuler...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A..., se disant M. E... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 30 avril 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2101410 du 16 septembre 2021, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 octobre 2021, M. A..., se disant M. B..., représenté par Me Ormillien, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Poitiers du 16 septembre 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Deux-Sèvres du 30 avril 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Deux-Sèvres de lui délivrer un titre de séjour, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté en litige n'est pas suffisamment motivé ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation, dès lors que l'authenticité des documents d'état civil n'a pas été valablement contestée, et qu'il est le père d'un enfant français né le 2 juin 2020, qu'il vit avec la mère de l'enfant et participe à son éducation et son entretien, qu'il effectue des missions d'intérim dans le domaine des travaux publics, et qu'il est inscrit dans une formation qualifiante par le biais de Pôle Emploi ; au regard de ces éléments, il doit être regardé comme intégré à la société française ;

- l'arrêté litigieux méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

M. A... se disant M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 24 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2015-1740 du 24 décembre 2015 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme D... C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., se disant M. B..., ressortissant guinéen né le 3 mars 1990, serait entré sur le territoire français au mois de mars 2017 selon ses déclarations, et a sollicité un titre de séjour sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur. Par un arrêté du 30 avril 2021, le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer le titre de séjour demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. A..., se disant M. B... relève appel du jugement du 16 septembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 30 avril 2021.

2. En premier lieu, l'arrêté du 30 avril 2021, après avoir visé les textes applicables, indique que les documents d'identité présentés par le requérant ont été déclaré irréguliers par les services de la direction zonale de la police aux frontière et ne peuvent être présentés à l'appui de la demande de titre de séjour formulée par l'intéressé, que l'intéressé ne relève pas d'une des situations faisant obstacle à ce que soit prononcée une obligation de quitter le territoire français à son encontre, et qu'il n'établit pas être exposé à des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine. Ainsi, l'arrêté en litige énonce les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, mettant le requérant à même de le contester utilement. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté du 30 avril 2021 doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 311-2-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " L'étranger qui demande la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour présente les documents justifiant de son état civil et de sa nationalité et, le cas échéant, de ceux de son conjoint, de ses enfants et de ses ascendants. (...) ". L'article L. 111-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit, en son premier alinéa, que la vérification des actes d'état civil étrangers doit être effectuée dans les conditions définies par l'article 47 du code civil. L'article 47 du code civil dispose quant à lui que : " Tout acte de l'état civil des Français et des étrangers fait en pays étranger et rédigé dans les formes usitées dans ce pays fait foi, sauf si d'autres actes ou pièces détenus, des données extérieures ou des éléments tirés de l'acte lui-même établissent, le cas échéant après toutes vérifications utiles, que cet acte est irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions que la force probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger peut être combattue par tout moyen susceptible d'établir que l'acte en cause est irrégulier, falsifié ou inexact. En cas de contestation par l'administration de la valeur probante d'un acte d'état civil établi à l'étranger, il appartient au juge administratif de former sa conviction au vu de l'ensemble des éléments produits par les parties.

5. Il ressort des pièces du dossier que la caisse nationale des allocations familiale a sollicité, au mois de février 2021, auprès de la direction zonale de la police aux frontières, l'analyse de l'authenticité des documents d'identité fournis par le requérant, à savoir une carte d'identité et un acte de naissance, qu'il avait également présentés à l'appui de sa demande de titre de séjour. Le bureau zonal fraude documentaire et à l'identité a conclu que la carte d'identité était une contrefaçon et que l'acte de naissance était irrégulier. Le requérant, qui se borne à se prévaloir de l'article 1er du décret du 24 décembre 2015 relatif aux modalités de vérification d'un acte de l'état civil étranger, lesquelles indiquent seulement le délai à l'issue duquel une décision de rejet naît en cas de demande de vérifications auprès des autorités étrangères, ne verse au dossier aucun élément permettant de considérer que les documents d'identité fournis à l'appui de sa demande de titre de séjour seraient réguliers, ou permettant d'attester de son état civil. Par suite, le préfet des Deux-Sèvres a pu à bon droit considérer que l'intéressé ne justifiait pas de son état civil en application de l'article R. 311-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et que cette circonstance faisait obstacle à ce qu'un titre de séjour lui soit délivré sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en tant que parent d'enfant français.

6. Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits de libertés d'autrui ". Et aux termes de l'article 3-1 de la convention de New-York relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

7. Si le requérant soutient que le centre de ses intérêts personnels et familiaux est fixé en France, dès lors notamment qu'il serait le père d'un enfant français né le 2 juin 2020 de son union avec une ressortissante française avec laquelle il vit, qu'il effectuerait régulièrement des missions d'intérim et qu'il suivrait une formation professionnelle de " Soudage TIG ", il ne peut se prévaloir de ces éléments, relatifs à M. E... B..., alors qu'il n'est pas en mesure de justifier de son état civil et donc de son identité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté dès lors qu'il n'est pas établi que la petite fille dont le requérant soutient être le père est réellement son enfant, en l'absence de justificatif de l'identité de l'intéressé.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... se disant M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... se disant M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... se disant M. E... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Deux-Sèvres.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,

Mme Charlotte Isoard, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 mai2022.

La rapporteure,

Charlotte C...La présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Stéphanie Larrue

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21BX04034 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21BX04034
Date de la décision : 12/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Charlotte ISOARD
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : ORMILLIEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-05-12;21bx04034 ?
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