La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/04/2022 | FRANCE | N°20BX00542

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 14 avril 2022, 20BX00542


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... N'Guyen a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'ordonner une expertise médicale afin de déterminer les responsabilités encourues et l'étendue de ses préjudices résultant de sa chute survenue le 4 octobre 2016 lors de sa prise en charge par le centre hospitalier de Bergerac, et de réserver en l'état les demandes d'indemnisation qu'elle pourrait formuler.

Par un jugement du 18 décembre 2018, le tribunal administratif a ordonné avant-dire droit une expertise médicale.

Le ra

pport d'expertise a été déposé le 31 juillet 2019.

Mme N'Guyen a demandé au tribunal ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... N'Guyen a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'ordonner une expertise médicale afin de déterminer les responsabilités encourues et l'étendue de ses préjudices résultant de sa chute survenue le 4 octobre 2016 lors de sa prise en charge par le centre hospitalier de Bergerac, et de réserver en l'état les demandes d'indemnisation qu'elle pourrait formuler.

Par un jugement du 18 décembre 2018, le tribunal administratif a ordonné avant-dire droit une expertise médicale.

Le rapport d'expertise a été déposé le 31 juillet 2019.

Mme N'Guyen a demandé au tribunal d'ordonner une nouvelle expertise médicale.

Par un jugement n°1703611 du 27 décembre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de Mme N'Guyen et a mis les frais de l'expertise ordonnée avant-dire droit, d'un montant de 1 092 euros, à la charge de Mme N'Guyen.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 février et 31 juillet 2020, Mme N'Guyen, représentée par Me Closse, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 décembre 2019 du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) d'ordonner une nouvelle expertise médicale aux fins de déterminer les causes de ses céphalées permanentes, indiquer si elles sont en relation avec la chute dont elle a été victime le 4 octobre 2016 au service des urgences du centre hospitalier de Bergerac et donner toute indication sur l'étendue de ses préjudices.

Elle soutient que :

- l'expert n'a pas recherché s'il existait un lien de causalité entre sa chute survenue au centre hospitalier de Bergerac, qui lui a occasionné un traumatisme crânien, et les répercussions sur son état de santé actuel, a manqué d'objectivité dans l'analyse de son état de santé et n'a retenu que son ancienne toxicomanie, dont elle est pourtant guérie depuis plus de six ans ;

- l'expert n'a pas davantage recherché si la crise d'épilepsie aurait pu être détectée dès son admission au sein du centre hospitalier et si une erreur de diagnostic avait été commise ;

- l'expert n'a pas tenu compte des déclarations des médecins du centre hospitalier de Bergerac qui ont eux-mêmes admis la faute de leur service ; plusieurs éléments du dossier permettent de démontrer la faute commise par le centre hospitalier du fait de sa chute d'un brancard ;

- lors de sa prise en charge au service des urgences du centre hospitalier de Bergerac, elle a indiqué à une infirmière qu'elle avait subi une crise d'épilepsie à son domicile ; elle présentait alors un état de confusion que l'infirmière aurait dû déceler immédiatement ; elle n'a pas bénéficié des soins appropriés à son état ; il ne lui appartenait pas d'alerter l'infirmière sur la nécessité d'une prise en charge rapide ;

- c'est à tort que le tribunal a suivi les conclusions de l'expert, malgré les éléments de preuve produits ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juillet 2020, le centre hospitalier de Bergerac, représenté par Me Le Prado, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le juge n'est pas tenu de déférer à une demande d'expertise, et il ne lui revient pas d'ordonner une expertise inutile ;

- la version des faits sur laquelle Mme N'Guyen s'appuie pour solliciter une nouvelle expertise, en faisant valoir qu'elle aurait chuté d'un brancard, n'est pas avérée, la requérante s'appuyant sur des compte-rendus médicaux établis suivant ses propres déclarations par des médecins consultés postérieurement à son hospitalisation ; la requérante sollicite une contre- expertise au seul motif que l'expertise ne lui est pas favorable ;

- aucune faute n'a été commise dans la prise en charge de Mme N'Guyen ;

- la requérante n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause les conclusions de l'expert, qui a répondu point par point à la mission qui lui avait été confiée.

Par une ordonnance du 22 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 14 mai 2021.

Mme N'Guyen a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 28 mai 2020.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience

Ont été entendus au cours de l'audience publique

- le rapport de Mme Beuve Dupuy, première conseillère,

- et les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... N'Guyen, victime le 4 octobre 2016 d'une crise d'épilepsie, a été transportée par les pompiers depuis son domicile au centre hospitalier de Bergerac. A son admission au service des urgences de cet établissement, elle a été installée en salle d'attente. Alors qu'elle se trouvait au sein du service des urgences, elle a présenté une seconde crise d'épilepsie au cours de laquelle elle a fait une chute et subi un traumatisme crânien. Imputant cette chute à une faute commise par le centre hospitalier, elle a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'ordonner une expertise médicale afin de déterminer les responsabilités encourues et l'étendue de ses préjudices résultant de cette chute et de réserver en l'état les demandes d'indemnisation qu'elle pourrait formuler. Par un jugement du 18 décembre 2018, le tribunal administratif a ordonné avant-dire droit une expertise médicale, confiée à une neurologue, dont le rapport a été déposé le 31 juillet 2019. Mme N'Guyen a alors demandé au tribunal d'ordonner une nouvelle expertise médicale. Par un jugement du 27 décembre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande et a mis les frais de l'expertise ordonnée avant-dire droit, d'un montant de 1 092 euros, à sa charge. Mme N'Guyen relève appel de ce jugement.

2. En premier lieu, le rapport d'expertise, après avoir rappelé les antécédents médicaux de Mme N'Guyen, indique que l'intéressée est atteinte d'une épilepsie généralisée idiopathique évoluant depuis les premières crises survenues le 4 octobre 2016 et présente des céphalées évocatrices d'une névralgie d'Arnold, ainsi qu'un syndrome post commotionnel se manifestant par de la fatigue et des troubles de la mémoire. Contrairement à ce qui est soutenu, l'expert s'est ainsi livré à une présentation complète de l'état de santé de l'intéressée. La circonstance que l'expertise ait mentionné, parmi les antécédents médicaux, une toxicomanie désormais sevrée avec prise de Subutex, ne permet pas de remettre en cause son objectivité.

3. En deuxième lieu, l'expert a indiqué que le syndrome post commotionnel était une conséquence du traumatisme crânien survenu le 4 octobre 2016 lors de la chute de Mme N'Guyen, tandis que les névralgies d'Arnold ne pouvaient être imputées ni à ce traumatisme crânien, ni aux crises d'épilepsie. Contrairement à ce que persiste à soutenir l'appelante, l'expert a ainsi recherché s'il existait un lien de causalité entre la chute survenue au centre hospitalier de Bergerac et son état de santé actuel.

4. En troisième lieu, l'expert a indiqué qu'au cours des opérations d'expertise, Mme N'Guyen avait déclaré ne conserver aucun souvenir entre son arrivée dans la salle d'attente du service des urgences du centre hospitalier et son réveil en chambre après sa chute. Il a ensuite relevé, à l'issue d'un examen des pièces du dossier médical de l'intéressée dont il a reproduit les extraits pertinents, que la fiche d'intervention renseignée par les pompiers ayant transporté Mme N'Guyen au centre hospitalier mentionnait, non pas une crise d'épilepsie, mais un malaise au domicile avec une brève perte de connaissance, et que la fiche remplie lors de l'admission de Mme N'Guyen au service des urgences ne mentionnait pas davantage cette crise d'épilepsie. Après avoir précisé que les compte-rendus médicaux mentionnant une chute d'un brancard avaient été rédigés postérieurement à cette chute, sur la base des déclarations de la requérante, l'expert a estimé que la chute était imputable à la pathologie elle-même, et non pas à la prise en charge médicale. Si la requérante fait valoir qu'elle aurait informé l'infirmière, à son arrivée aux urgences, qu'elle avait fait une crise comitiale, cette affirmation est en contradiction avec l'état confusionnel dans lequel elle a reconnu s'être trouvée. Le rapport d'expertise est ainsi suffisamment étayé pour éclairer la juridiction.

5. Enfin, si la requérante reproche à l'expert de ne pas avoir recherché si la crise d'épilepsie survenue alors qu'elle avait été admise au service des urgences aurait pu être détectée dès son admission, elle n'apporte aucun élément de nature à démontrer qu'une erreur de diagnostic aurait pu être commise. Dans ces conditions, le rapport d'expertise ne saurait être regardé comme incomplet faute de s'être prononcé explicitement sur ce point.

6. Il résulte de ce qui précède que la demande de nouvelle expertise présentée par Mme N'Guyen aux fins de démontrer une faute du centre hospitalier de Bergerac dans sa prise en charge ne présente pas un caractère d'utilité. L'appelante n'est dès lors pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... N'Guyen est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... N'Guyen, au centre hospitalier de Bergerac et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Dordogne. Copie en sera adressée à Mme B..., experte.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 avril 2022.

La rapporteure,

Marie-Pierre Beuve Dupuy

La présidente,

Catherine Girault

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX00542


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX00542
Date de la décision : 14/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Procédure - Instruction - Moyens d'investigation - Expertise - Recours à l'expertise.

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Service public de santé.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Marie-Pierre BEUVE-DUPUY
Rapporteur public ?: Mme GALLIER
Avocat(s) : CLOSSE

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-04-14;20bx00542 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award