Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2016 par lequel la rectrice de l'académie de Toulouse a prononcé son licenciement sans préavis ni indemnité.
Par un jugement n° 1700385 du 25 avril 2019, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 12 juillet 2019 et un mémoire enregistré le 7 janvier 2022, M. A..., représenté par Me Noray-Espeig, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 25 avril 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 21 novembre 2016 par lequel la rectrice de l'académie de Toulouse a prononcé son licenciement sans préavis ni indemnité ;
3°) d'enjoindre à la rectrice de l'académie de Toulouse de supprimer de son dossier individuel toutes les pièces relatives à la sanction disciplinaire infligée et de le rétablir dans ses droits à compter du 15 mars 2017, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la sanction litigieuse a été prise en méconnaissance des droits de la défense ;
- la sanction litigieuse a été prise sans que le CHSCT ne soit régulièrement convoqué pour avis et sans consultation du conseil de l'Ordre des médecins en méconnaissance de dispositions de l'article 11-1 du décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;
- la commission administrative paritaire a rendu un avis irrégulier au regard des dispositions combinées des décrets des 17 janvier 1986 et 3 novembre 2014 ;
- ce licenciement est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation, est disproportionnée et fait état de griefs dont il n'a pas été préalablement informé en méconnaissance des droits de la défense ;
- ce licenciement est entaché d'un défaut d'impartialité en méconnaissance des stipulations de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
- ce licenciement est entaché de détournements de procédure et de pouvoir ;
- ce licenciement présente un caractère rétroactif.
Par des mémoires enregistrés les 6 septembre 2021 et 8 mars 2022, le ministre de l'éducation nationale de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;
- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;
- le décret 86-83 du 17 janvier 1986 ;
- le décret n° 2003-1306 du 26 décembre 2003 ;
- le décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 ;
- le code de justice administrative.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C...,
- les conclusions de Mme Le Bris, rapporteure publique,
- et les observations de Me Antoniolli, représentant M A....
Considérant ce qui suit :
1. Le 10 février 2014, M. B... A... a été recruté par le rectorat de Toulouse en contrat à durée indéterminée pour occuper des fonctions de médecin de prévention. Par un arrêté du 21 novembre 2016, la rectrice de l'académie de Toulouse a prononcé son licenciement sans préavis ni indemnité. Cet arrêté a été retiré le 9 février 2017 et remplacé par un arrêté aux mêmes fins du 15 mars 2017. M. A... relève appel du jugement du 25 avril 2019 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce dernier arrêté.
2. En premier lieu, aux termes de l'article 11-1 du décret n° 82-453 du 28 mai 1982, " (...) En cas de rupture du lien contractuel pour un motif disciplinaire ou lié à la personne du médecin, cette rupture ne peut intervenir qu'après avis, suivant que le médecin de prévention relève de l'administration centrale ou locale, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail compétent. L'autorité administrative met en outre l'intéressé en mesure de consulter son dossier. (...) En cas de faute professionnelle d'ordre déontologique, l'autorité administrative engage la procédure prévue à l'article L. 4124-2 du Code de la santé publique. Elle peut suspendre le lien contractuel avec le médecin de prévention en attendant la décision du conseil de l'ordre des médecins ".
3. D'une part, il ressort des pièces du dossier qu'une lettre informant M. A... de l'engagement à son encontre d'une procédure disciplinaire, le convoquant devant de la commission consultative paritaire académique (CCPA) et l'invitant à venir consulter son dossier le 15 septembre 2016 dans les locaux du rectorat lui a été signifiée par huissier le 5 septembre 2016, soit un mois avant la tenue de la réunion de cette commission. Si M. A..., qui n'a pris connaissance de cette lettre que le 14 septembre 2016, soutient qu'il lui était impossible tant de prendre connaissance de cette lettre plus tôt que de consulter son dossier le 15 septembre suivant, il ne produit aucun élément à l'appui de ces allégations alors, au demeurant, qu'en réponse à sa demande écrite, il a été invité, par un courriel du 30 septembre 2016, à prendre contact avec le rectorat pour convenir d'un nouveau rendez-vous en urgence mais qu'il n'a pas donné suite à cette invitation et ne s'est pas davantage présenté devant la CCPA ni n'a sollicité le report de la réunion de cette commission. Dans ces conditions, l'appelant n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas été mis en mesure de consulter son dossier en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 11-1 du décret n°82-453 du 28 mai 1982 sans pouvoir utilement faire valoir que le rectorat a refusé de lui adresser son dossier par voie postale.
4. D'autre part, aucune disposition normative ni aucun principe général, et notamment pas les dispositions précitées de l'article 11-1 du décret n°82-453 du 28 mai 1982, n'impose que l'avis du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) soit recueilli antérieurement à la réunion de la CCPA. En outre, l'arrêté initial de licenciement du 21 novembre 2016 avait été retiré à la date à laquelle le CHSCT a rendu son avis. Par suite, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que l'avis rendu le 8 mars 2017 par le CHSCT serait irrégulier aux seuls motifs qu'à cette date, la commission consultative paritaire académique s'était déjà prononcée sur une proposition de sanction, que la rectrice avait déjà pris un arrêté de licenciement à son encontre et qu'il faisait l'objet d'une nouvelle mesure de suspension à raison de son comportement lors de l'entretien préalable du 16 novembre 2016 dont l'existence aurait été susceptible, selon lui, d'influencer les membres du CHSCT.
5. Enfin, contrairement à ce que soutient M. A..., l'arrêté de licenciement litigieux ne repose sur aucune faute professionnelle d'ordre déontologique mais, sur des manquements réitérés " à l'obligation de dignité et de respect des collègues de travail et membres du CHSCTA, parfois devant des personnes tierces au service " ainsi qu'" à l'obligation de modération et de délicatesse dans ses relations professionnelles entraînant des conséquences en terme de souffrance au travail et de santé à l'égard de collègues " dont la rectrice a seulement souligné qu'ils étaient d'autant plus répréhensibles que M. A... " est soumis, de par son statut, au code de la déontologie médicale, au code de la santé publique " sans, toutefois, lui imputer aucun manquement à ces codes. Par suite, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que la rectrice aurait dû engager la procédure prévue à l'article L. 4124-2 du code de la santé publique et attendre la décision du Conseil de l'ordre des médecins avant de prononcer son licenciement.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1-2 du décret 86-83 du 17 janvier 1986 " Dans toutes les administrations de l'Etat et dans tous les établissements publics de l'Etat, il est institué, par arrêté du ministre intéressé ou par décision de l'autorité compétente de l'établissement public, une ou plusieurs commissions consultatives paritaires comprenant en nombre égal des représentants de l'administration et des représentants des personnels mentionnés à l'article 1er. ".
7. Il résulte de ces dispositions qu'une commission administrative paritaire ne peut valablement délibérer, en formation restreinte comme en formation plénière, qu'à la condition qu'aient été régulièrement convoqués, en nombre égal, les représentants de l'administration et les représentants du personnel, membres de la commission, habilités à siéger dans la formation considérée, et eux seuls, et que le quorum ait été atteint. Toutefois, si la règle de la parité s'impose ainsi pour la composition des commissions administratives paritaires, en revanche, la présence effective en séance d'un nombre égal de représentants du personnel et de représentants de l'administration ne conditionne pas la régularité de la consultation d'une commission administrative paritaire, dès lors que ni les dispositions précitées, ni aucune autre règle, ni enfin aucun principe ne subordonnent la régularité des délibérations des commissions administratives paritaires à la présence en nombre égal de représentants de l'administration et de représentants du personnel.
8. En l'occurrence, il ressort des pièces du dossier que les deux représentants du personnel de catégorie A membres de la CCPA ont été dûment convoqués par lettre du 26 septembre 2016. Dès lors, la circonstance que l'un d'eux ne se soit pas présenté à la réunion de la CCPA du 5 octobre suivant demeure sans incidence sur la régularité de la consultation de cette commission.
9. En troisième lieu, M. A... soutient que l'arrêté de licenciement litigieux présente un caractère rétroactif dès lors qu'il a été empêché d'exercer ses fonctions avant le retrait de l'arrêté initial de licenciement dont il a fait l'objet et n'a pas été ensuite réintégré. Toutefois, il résulte des pièces du dossier, d'une part, que l'arrêté litigieux ne prévoyait pas son entrée en vigueur avant le jour de sa notification et que l'appelant a fait l'objet de plusieurs mesures de suspension successives au titre de la période considérée et jusqu'à son licenciement, d'autre part, qu'à l'issue du retrait du précédent arrêt, il a bénéficié d'une régularisation administrative de sa carrière.
10. En quatrième lieu, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté litigieux serait fondé sur des faits qui n'ont pas été soumis à la CCPA ni évoqués lors de l'entretien préalable du 16 novembre 2016 en se bornant à faire valoir que cet arrêté mentionnait, dans ses visas, la mesure de suspension prise à son encontre en raison de son comportement lors de cet entretien alors que ce comportement n'est pas au nombre des faits qui lui sont reprochés dans ce même arrêté.
11. En cinquième lieu, la CCPA paritaire ne constituant pas une juridiction mais une instance administrative dont les organes exercent leurs attributions sous le contrôle juridictionnel du juge administratif, M. A... ne peut utilement soutenir que l'auteur de la procédure ayant abouti à son licenciement et qui a signé l'arrêté prononçant ce licenciement a également présidé le CCPA ayant eu à en connaitre pour soutenir que ce licenciement serait intervenu en méconnaissance de son droit à un procès équitable tel qu'il est protégé par les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
12. En sixième lieu, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
13. En l'occurrence, il ressort des pièces du dossier, en particulier des alertes relayées auprès du rectorat par les organisations syndicales depuis 2014, des nombreux témoignages spontanés des collègues successifs de M. A... ainsi que des adjointes administratives et des agentes d'accueil affectées au service de médecine de prévention et d'une professeure de l'éducation nationale présente en salle d'attente mais également des courriels que M. A... a lui-même adressés à ses collègues de travail et au personnel administratif, que le comportement de l'appelant à leur égard était particulièrement agressif et dévalorisant, y compris sur un plan personnel, marqué par une volonté de mettre en cause leur travail ou leurs qualités professionnelles et un refus de coopérer avec eux. Ce comportement a engendré une souffrance au travail, parfois aigüe, chez l'ensemble des personnes travaillant à son contact. Eu égard au nombre de ces témoignages, à leurs origines, et à leur précision, ainsi qu'à la répétition dans le temps des manquements reprochés à M. A... et rappelés au point 5, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que la rectrice aurait considéré, à tort, que ces manquements étaient établis. En outre, eu égard au caractère répétitif ainsi qu'à la gravité de ces manquements et aux fonctions exercées par l'appelant, celui-ci n'est pas davantage fondé à soutenir que la sanction prononcée de licenciement sans préavis ni indemnité serait disproportionnée nonobstant l'absence d'antécédents disciplinaires.
14. En sixième et dernier lieu, l'appelant soutient que le licenciement litigieux serait entaché d'un détournement de procédure et d'un détournement de pouvoir. Toutefois, il n'établit pas que la rectrice n'aurait cherché à l'évincer qu'en raison des dysfonctionnements qu'il aurait constatés et dénoncés alors qu'il résulte de ce qui a été dit au point 13 que la sanction dont il a fait l'objet n'est pas disproportionnée au regard des manquements dont il s'est rendu coupable. Enfin, en se bornant à faire état de faits épars, ne présentant en eux-mêmes aucun caractère discriminatoire ou vexatoire, et qui sont, de surcroît, insuffisamment étayés par des éléments factuels, M. A... n'apporte pas d'éléments susceptibles de faire présumer l'existence des faits de harcèlement moral qu'il dénonce.
15. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant à l'annulation de son licenciement. Par suite, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : la requête est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'éducation nationale de la jeunesse et des sports.
Copie en sera adressée à la rectrice de l'académie de Toulouse.
Délibéré après l'audience du 14 mars 2022 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme Frédéric Faïck, président-assesseur,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 avril 2022.
Le rapporteur,
Manuel C...
Le président,
Didier Artus
La greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°19BX02943 2