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24/03/2022 | FRANCE | N°21BX04590

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 24 mars 2022, 21BX04590


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A... B... et M. D... C... ont demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler les deux décisions verbales par lesquelles le préfet de la Guyane a refusé de renouveler leurs attestations de demande d'asile.

Par un jugement n° 2000412-2000413 du 28 octobre 2021, le tribunal administratif de la Guyane a considéré qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur les conclusions des deux requêtes aux fins d'annulation des refus verbaux de renouvellement d'attestations de demande d'asile en ce qu

i concerne la période de validité de ces refus postérieure au 6 janvier 2021,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E... A... B... et M. D... C... ont demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler les deux décisions verbales par lesquelles le préfet de la Guyane a refusé de renouveler leurs attestations de demande d'asile.

Par un jugement n° 2000412-2000413 du 28 octobre 2021, le tribunal administratif de la Guyane a considéré qu'il n'y avait pas lieu à statuer sur les conclusions des deux requêtes aux fins d'annulation des refus verbaux de renouvellement d'attestations de demande d'asile en ce qui concerne la période de validité de ces refus postérieure au 6 janvier 2021, a annulé les deux décisions de refus verbaux de renouvellement de ces attestations en tant qu'elles sont restées en vigueur au titre de la période antérieure au 6 janvier 2021 et a mis à la charge de l'État le paiement de la somme de 1 600 euros à verser à Mme A... B... et M. C... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2021 sous le n° 21BX04590, le préfet de la Guyane, représenté par Me Tomasi, demande à la cour d'annuler ce jugement du 28 octobre 2021 du tribunal administratif de la Guyane en tant qu'il annule la décision verbale de l'administration pour la période antérieure au 6 janvier 2021.

Il soutient que :

- la décision litigieuse n'est entachée d'aucun vice de compétence, dès lors que l'agent de la préfecture n'a pris aucune décision administrative et s'est borné à délivrer à l'intéressée une information orale émanant de la consultation de son dossier administratif ; les agents de la préfecture sont habilités à accepter ou refuser d'enregistrer une demande de titre de séjour conformément aux directives reçues de leur hiérarchie ; aucune disposition législative ou règlementaire ne lui impose de communiquer le nom des agents de l'accueil recevant du public.

II. Par une requête, enregistrée le 20 décembre 2021 sous le n° 21BX04595, le préfet de la Guyane, représenté par Me Tomasi, demande à la cour d'annuler ce jugement du 28 octobre 2021 du tribunal administratif de la Guyane en tant qu'il annule la décision verbale de l'administration pour la période antérieure au 6 janvier 2021.

Un mémoire a été présenté le 24 février 2022 pour M. C... et Mme A... B... par Me Pialou.

Il soulève les mêmes moyens que ceux invoqués dans la requête n° 21BX04590.

Vu les autres pièces de ces dossiers.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Éric Rey-Bèthbéder a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B... et M. C..., ressortissants syriens, sont entrés en France le 27 juillet 2019, selon leurs déclarations. Leurs demandes d'asile, enregistrées le 7 août 2019, ont été déclarées irrecevables par deux décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 30 décembre 2019. Les dernières attestations de demande d'asile délivrées à Mme A... B... et M. C... le 30 septembre 2019 ont expiré le 29 janvier 2020. Par deux décisions verbales du 29 janvier 2020, un agent du guichet d'accueil de la préfecture de la Guyane a refusé de renouveler leurs attestations de demandeur d'asile. Le préfet de la Guyane relève appel du jugement du 28 octobre 2021 du tribunal administratif de la Guyane en tant qu'il a annulé ces deux décisions pour la période allant du 29 janvier 2020 au 6 janvier 2021.

Sur la jonction :

2. Les requêtes nos 21BX04590 et 21BX04595 amènent à juger les mêmes questions et sont dirigées contre un même jugement. Il y a lieu, par suite, de joindre ces deux requêtes afin qu'il soit statué par un seul arrêt.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Il ressort des pièces du dossier qu'avant l'introduction de leurs requêtes de première instance devant le tribunal administratif de la Guyane, Mme A... B... et M. C... ont formé une requête en référé-liberté, enregistrée sous le n° 2000253, à l'encontre des mêmes décisions verbales de refus de renouvellement de leurs attestations de demande d'asile, expirées le 29 janvier 2020. Il ressort notamment du mémoire en défense produit par le préfet de la Guyane lors de cette procédure d'urgence et versé aux dossiers dans chacune des deux affaires en première instance, que le préfet a déclaré en conclusion de son mémoire " c'est à bon droit que j'ai refusé aux plaignants la délivrance d'attestation de demandeur d'asile ". En première instance, le préfet de la Guyane confirmait l'existence de ces deux décisions verbales en indiquant dans ses deux mémoires en défense : " le préfet a refusé verbalement de lui délivrer une attestation de demandeur d'asile (...) ". En appel, le préfet demande à la cour de " valider la décision verbale de l'administration ". Par suite, l'existence de décisions verbales de refus de renouvellement des attestations de demandeurs d'asile de Mme A... B... et M. C... est établie. Ces décisions ayant un impact sur la situation juridique des appelants, elles constituent des décisions faisant grief susceptibles de recours pour excès de pouvoir.

4. Aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile dont les conditions de délivrance et de renouvellement sont fixées par décret en Conseil d'État. La durée de validité de l'attestation est fixée par arrêté du ministre chargé de l'asile (...) ". En vertu de l'article L. 743-1 du même code : " (...) L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent ". Aux termes de l'article L. 743-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : 1° L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris une décision d'irrecevabilité en application des 1° ou 2° de l'article L. 723-11 ; (...) Les conditions de renouvellement et de retrait de l'attestation de demande d'asile sont fixées par décret en Conseil d'État ". Selon l'article L. 741-4 de ce code : " Après qu'il a satisfait aux obligations prévues à l'article R. 741-3, si l'examen de la demande relève de la compétence de la France et sans préjudice des dispositions de l'article R. 741-6, l'étranger est mis en possession de l'attestation de demande d'asile mentionnée à l'article L. 741-1. Cette attestation ne permet pas de circuler librement dans les autres États membres de l'Union européenne (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 743-1 du même code : " L'attestation de demande d'asile est renouvelée jusqu'à l'expiration du délai fixé à l'article L. 743-1. / Le renouvellement de l'attestation de demande d'asile relève du préfet du département dans lequel le demandeur d'asile est domicilié en application des articles R. 744-1 à R. 744-4 ".

5. Il ressort des pièces du dossier et n'est pas contesté que Mme A... B... et M. C... se sont présentés, le 29 janvier 2020, à la préfecture de la Guyane afin d'y solliciter le renouvellement de leurs attestations de demande d'asile. Ces demandes ont été rejetées par un agent au guichet de la préfecture, par deux décisions verbales dont l'existence a été reconnue par le préfet de la Guyane, ainsi qu'il a été dit au point précédent. De plus, il ne ressort pas des pièces du dossier, et le préfet de la Guyane n'établit pas, que cet agent ait été régulièrement habilité à examiner le droit au renouvellement des attestations de demande d'asile des intéressés et à refuser de faire droit à ces demandes. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que la demande aurait pu être regardée comme abusive ou dilatoire. Dans ces conditions, les refus verbaux du 29 janvier 2020 de renouveler les attestations de demande d'asile de Mme A... B... et M. C... sont entachés d'incompétence de leur auteur.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Guyane n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a annulé les refus verbaux opposés le 29 janvier 2020 aux demandes de renouvellement des attestations de demande d'asile de Mme A... B... et M. C..., en tant qu'ils sont restés en vigueur au titre de la période antérieure au 6 janvier 2021.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Guyane est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... A... B..., à M. D... C... et au ministre de l'intérieur Une copie sera transmise pour information au préfet de la Guyane.

Délibéré après l'audience du 24 février 2022 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Nathalie Gay, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 mars 2022.

La présidente-assesseure,

Frédérique Munoz-Pauziès

Le président-rapporteur

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX04590, 21BX04595 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 21BX04590
Date de la décision : 24/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Eric REY-BETHBEDER
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : PIALOU

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-03-24;21bx04590 ?
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