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24/03/2022 | FRANCE | N°20BX01874

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 24 mars 2022, 20BX01874


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Me Dumoulin, mandataire judiciaire de la société Groupement guadeloupéen de transport de voyageurs (GGTV), a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner la communauté d'agglomération de Nord Basse-Terre (CANBT) à lui verser la somme de 121 966,48 euros au titre du solde d'une convention d'exploitation relative à l'exploitation de lignes de transports urbains.

Par un jugement n° 1800535 du 14 avril 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a condamné la CANBT à verser

Me Dumoulin, mandataire de la société Groupement guadeloupéen de transport de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Me Dumoulin, mandataire judiciaire de la société Groupement guadeloupéen de transport de voyageurs (GGTV), a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe de condamner la communauté d'agglomération de Nord Basse-Terre (CANBT) à lui verser la somme de 121 966,48 euros au titre du solde d'une convention d'exploitation relative à l'exploitation de lignes de transports urbains.

Par un jugement n° 1800535 du 14 avril 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a condamné la CANBT à verser à Me Dumoulin, mandataire de la société Groupement guadeloupéen de transport de voyageurs, la somme de 121 966,48 euros.

Procédure devant la cour :

Par une requête et deux mémoires, enregistrés le 13 juin 2020, le 28 octobre 2021 et 17 janvier 2022, la CANBT, représentée par Me Landot, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 14 avril 2020 ;

2°) de mettre à la charge de Me Dumoulin, en tant que mandataire de la société GGTV, la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier en raison de l'absence de signature de la minute du jugement, en méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- l'article 55 de la convention prévoit une procédure de conciliation préalable à l'introduction de toute instance contentieuse, qui n'a pas été respectée, la société GGTV s'étant bornée à présenter un mémoire en conciliation, enregistré le 29 février 2016, invitant la CANBTB à payer la somme de 121 966,48 euros et la somme de 800 000 euros sans détailler le principe ni le quantum des sommes demandées ; c'est, par conséquent, à tort que le tribunal a jugé que la demande de la société GGTV était recevable ;

- la société GGTV n'est pas fondée à se prévaloir de la délibération du 13 février 2015 dans la mesure où les montants figurant dans ce document sont erronés dès lors que le montant aurait dû être calculé sur une base de calcul de dix mois, d'août 2014 à mai 2015 et non sur une base de douze mois ; le montant à retenir doit être de 406 554,60 euros et non de 487 865,53 euros ; dès lors qu'elle a réglé la somme de 365 899,05 euros, le solde correspond à la somme de 40 665,45 euros, qui est en cours de règlement par l'émission de deux mandats de 30 981,01 euros et 9 674,44 euros.

Par trois mémoires, enregistrés le 23 septembre 2020, le 23 novembre 2021 et le 2 février 2022, Me Dumoulin en qualité de mandataire liquidateur de la société GGTV, représentée par Me Gouranton, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, et, à titre subsidiaire, à la condamnation de la CANBT à lui verser la somme de 40 655,45 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 29 avril 2016 et, en tout état de cause, à la mise à la charge de la CANBT de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 relative à l'état d'urgence sanitaire portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif a dérogé aux dispositions des articles R. 741-7 à 741-9 du code de justice administrative ; le moyen tiré de l'irrégularité du jugement pour défaut de signature sera écarté ;

- la saisine du tribunal administratif de la Guadeloupe a été précédée d'une procédure de conciliation infructueuse ; c'est à bon droit que le tribunal a jugé la demande de première instance recevable ;

- par la délibération du 13 février 2015, la CANBT a octroyé à la société GGTV la somme de 487 865,53 euros ; compte tenu des règlements effectués, la somme de 121 966,48 euros reste due ; la CANBT, qui se prévaut d'une erreur de calcul, ne produit pas la délibération qui annulerait la délibération du 13 février 2015 et corrigerait cette erreur ;

- le jugement d'ouverture de la procédure collective, soit le jugement de redressement judiciaire du 21 septembre 2017, converti en liquidation judiciaire par jugement du 14 décembre 2017, est exécutoire de droit en vertu de l'article L. 641-9 du code de commerce, de sorte que tout règlement effectué après la date de son prononcé, comme l'avis de paiement de la somme de 40 655,45 euros du 9 juillet 2019, est inopposable à la procédure collective ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Nathalie Gay;

- et les conclusions de Mme Madelaigue, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. À la suite de la défaillance du précédent délégataire et dans l'attente de la passation de nouveaux contrats relatifs à l'exploitation des services publics de transport urbain de voyageurs, la communauté d'agglomération du Nord Basse-Terre (CANBT) a conclu, les 31 mai et 20 juin 2013, avec la société Groupement guadeloupéen de transport de voyageurs (GGTV) une convention d'affermage provisoire relative à l'exploitation de lignes de transport urbain à contribution financière forfaitaire sur le secteur de Petit-Bourg, desservant les communes de Petit-Bourg et Lamentin correspondant au lot n° 4. La communauté d'agglomération du Nord Basse-Terre relève appel du jugement du 14 avril 2020 par lequel le tribunal administratif de la Guadeloupe l'a condamnée à verser à la société GGTV la somme de 121 966,48 euros au titre du solde de cette convention.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ".

3. Il ressort de la minute du jugement attaqué, transmise à la cour par le tribunal administratif de la Guadeloupe, qu'elle a été signée par le président-rapporteur, l'assesseur le plus ancien et la greffière, conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative cité au point précédent. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée aux parties ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

4. Aux termes de l'article L. 211-4 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, les chefs de juridiction peuvent, si les parties en sont d'accord, organiser une mission de conciliation et désigner à cet effet la ou les personnes qui en seront chargées ". Il résulte de l'article 55 de la convention d'affermage provisoire relative à l'exploitation de lignes de transport urbain : " En tout état de cause, et préalablement à toute instance contentieuse, les deux parties conviennent de demander au tribunal compétent (...) de mener une mission de conciliation en application des pouvoirs qui leur sont confiés par l'article L. 211-4 du code de justice administrative ".

5. Il résulte de l'instruction que, par une lettre du 20 novembre 2015, le conseil de la société GGTV a saisi le tribunal administratif de la Guadeloupe en vue de l'organisation d'une mission de conciliation. Il résulte de la décision du 7 décembre 2016 par laquelle le président du tribunal administratif de la Guadeloupe a constaté l'échec de la mission de conciliation que des mémoires ont été échangés et que deux réunions de conciliation se sont tenues les 27 juin et 12 septembre 2016 avec la société GGTV et la CANBT. Par suite, la communauté d'agglomération Nord Basse-Terre n'est pas fondée à soutenir que le présent litige n'a pas fait l'objet d'une véritable tentative de conciliation préalablement à la saisine du tribunal. Par suite, c'est à bon droit que le tribunal a jugé que la demande présentée par la société GGTV était recevable.

Sur le bien-fondé du jugement :

6. D'une part, il résulte de l'article 31 de la convention d'affermage provisoire relative à l'exploitation de lignes de transport urbain des 31 mai et 20 juin 2013 que la société GGTV perçoit, en contrepartie des contraintes de service public imposées par le délégant, une contribution financière forfaitaire calculée, pour une année donnée, comme la différence entre les recettes prévisionnelles et les charges d'exploitation prévisionnelles du délégataire. Il résulte de ce même article d'une part, qu'" après l'exercice de la clôture, il est procédé à une régularisation des versements financiers de l'année (...) / Cet ajustement a lieu l'année qui suit le versement de la contribution forfaitaire concernée, au vue de l'activité réelle retracée dans le rapport d'activités visé à l'article 36 ".

7. D'autre part, il résulte de l'article 4 de la convention d'affermage que la durée du contrat est de 23 mois et que le début d'exploitation effectif est fixé au 1er juin 2013. Toutefois, l'ordre de service n° 1 du 1er juillet 2013 mentionne une date de notification du marché le 20 juin 2013 et une durée d'exécution du marché de 23 mois à compter du 1er juillet 2013. En outre, l'avenant n° 1 à la convention du 15 novembre 2013, qui a pour objet d'adapter le service aux besoins réels exprimés par les administrés en modifiant les tarifs en vigueur et en révisant les circuits pour mieux desservir les usagers, n'a pas pour objet de modifier la durée du contrat initial. Ainsi, contrairement à ce que soutient la CANBT, la seule mention dans cet avenant de ce que le délégataire est autorisé à percevoir une indemnité forfaitaire de 288 000 euros à compter du 1er août 2013, ne suffit pas à établir que les prestations de la GGVT n'ont commencé à être exécutées qu'à cette date. Par suite, il résulte de l'instruction que l'exécution de la convention d'affermage provisoire relative à l'exploitation de lignes de transport urbain a débuté le 1er juillet 2013.

8. Par une délibération du 13 février 2015, la communauté d'agglomération Nord Basse Terre a autorisé le président à valider le compte annuel de résultat permettant le versement de la contribution forfaitaire et des sujétions de service public des délégataires des lots 1, 2, 3 et 4 de transport urbain conformément aux dispositions de l'article L. 1411-3 du code général des collectivités territoriales et de l'article 34 de la convention et a fixé, en se fondant sur le compte de résultant réel de la période 2013-2014, la somme due par la communauté d'agglomération à la société GGTV à un montant de 487 865,53 euros concernant le lot n° 4. Dès lors que cette délibération mentionne expressément la période de juillet 2014 à mai 2015 et en l'absence de tout élément, en dépit des mesures d'instruction diligentées à cette fin, permettant de comprendre les modalités de calcul de la contribution forfaitaire, il ne résulte pas de l'instruction qu'aucun ratio n'aurait été appliqué afin d'ajuster la contribution forfaire annuelle en fonction de la durée restante de la convention, soit 11 mois. Par suite, en l'absence de preuve d'une erreur de calcul du montant de la contribution attribuée par délibération du 13 février 2015, la CANTB était redevable envers la société GGVT de la somme de 487 865,53 euros.

9. Aux termes de l'article L. 641-9 du code de commerce : " I. Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur (...) ".

10. D'une part, il est constant que la CANTB a payé à la société GGTV les sommes de 72 000 euros le 1er janvier 2015, 77 395,52 euros le 19 mars 2015, 175 848,08 euros le 19 mars 2015, 30 981,01 euros le 31 mars 2015 et 9 674,44 euros le 31 mars 2015, soit un total de 365 899,05 euros.

11. D'autre part, il résulte de l'instruction et notamment de deux avis de mise en paiement que la CANBT a mandaté le versement à la société GGVT des sommes de 30 981,01 euros et 9 674,44 euros, le 29 avril 2016, et que ces sommes ont été effectivement versées le 20 mai 2016. Si Me Dumoulin affirme que la société GGVT n'a pas perçu ces deux sommes d'un montant total de 40 655,45 euros, elle n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations. Par ailleurs, si elle fait valoir qu'en vertu des dispositions de l'article L. 641-9 du code de commerce, ces versements sont inopposables au liquidateur, il résulte de l'instruction que la société GGTV a été placée en redressement judiciaire par jugement du 21 septembre 2017 et que le tribunal de commerce de Pointe-à-Pitre a ouvert une procédure de liquidation judiciaire et désigné Me Dumoulin en qualité de mandataire liquidateur le 14 décembre 2017. Par suite, ce jugement étant intervenu postérieurement aux paiements de la CANTB, Me Dumoulin ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article L. 641-9 du code de commerce.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la CANBT est seulement fondée à demander que l'indemnité, que le tribunal administratif l'a condamnée à verser à la société GGVT, soit ramenée à la somme de 81 311,03 euros.

Sur les frais liés au litige :

13. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions des parties présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 121 966,48 euros que la CANBT a été condamnée à verser à la société GGVT par le jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 14 avril 2020 est ramenée à 81 311,03 euros.

Article 2 : Le jugement n° 1800535 du 14 avril 2020 du tribunal administratif de la Guadeloupe est reformé en tant qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la CANBT et de la société GGVT est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Me Dumoulin, mandataire judiciaire de la société Groupement guadeloupéen de transport de voyageurs et à la communauté d'agglomération de Nord Basse-Terre.

Délibéré après l'audience du 24 février 2022 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Nathalie Gay, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mars 2022.

La rapporteure,

Nathalie GayLe président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au préfet de la Guadeloupe, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX01874


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 20BX01874
Date de la décision : 24/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-05-01 Marchés et contrats administratifs. - Exécution financière du contrat. - Rémunération du co-contractant.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Nathalie GAY
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : WINTER-DURENNEL-PREVOT ET BALADDA SCP D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-03-24;20bx01874 ?
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