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10/03/2022 | FRANCE | N°20BX02823

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 10 mars 2022, 20BX02823


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B..., épouse D..., Mme E... F..., épouse B..., et M. A... B..., par trois requêtes distinctes, ont demandé au tribunal administratif de Pau, d'une part, d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2017 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a déclaré d'utilité publique au profit de la commune d'Arancou l'acquisition de terrains nécessaires à la réalisation des travaux de restauration et de sauvegarde de l'ensemble dit de B..., composé d'une fontaine, d'un lavoir et d'un puits artésien, et d'am

nagement du chemin d'accès, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 27 avril 2018 p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B..., épouse D..., Mme E... F..., épouse B..., et M. A... B..., par trois requêtes distinctes, ont demandé au tribunal administratif de Pau, d'une part, d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2017 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a déclaré d'utilité publique au profit de la commune d'Arancou l'acquisition de terrains nécessaires à la réalisation des travaux de restauration et de sauvegarde de l'ensemble dit de B..., composé d'une fontaine, d'un lavoir et d'un puits artésien, et d'aménagement du chemin d'accès, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 27 avril 2018 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a déclaré cessibles les biens immobiliers figurant sur le plan et les états parcellaires annexés.

Par un jugement n° 1800872-1801512-1801660 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de Pau a joint ces trois demandes avant de les rejeter.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 24 août 2020 et 27 septembre 2021, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, Mme C... B..., épouse D..., représentée par Me Hervois, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 16 juin 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 octobre 2017 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a déclaré d'utilité publique au profit de la commune d'Arancou l'acquisition de terrains nécessaires à la réalisation des travaux de restauration et de sauvegarde de l'ensemble dit de B..., composé d'une fontaine, d'un lavoir et d'un puits artésien, et d'aménagement du chemin d'accès, ainsi que l'arrêté du 27 avril 2018 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a déclaré cessibles les biens immobiliers figurant sur le plan et les états parcellaires annexés ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'erreur de droit et d'erreur de fait ;

S'agissant de l'arrêté du 4 octobre 2017 portant déclaration d'utilité publique,

- l'enquête publique n'a pas été précédée d'une évaluation environnementale et d'une étude d'impact, alors que le projet est susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement au sens du II de l'article L. 122-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- l'expropriation n'est pas d'utilité publique, dès lors que l'opération ne poursuit pas une finalité d'intérêt général, que l'expropriant pouvait réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, qu'elle porte atteinte à la propriété privée et a un coût disproportionné ;

S'agissant de l'arrêté du 27 avril 2018 portant cessibilité,

- ni l'arrêté ni les états parcellaires annexés n'indiquent la profession des propriétaires des parcelles et la situation matrimoniale de M. A... G... B..., en méconnaissance de l'article R. 132-2 du code de l'expropriation ;

- en application de l'article R. 132-3 du code de l'expropriation, lorsque l'opération nécessite une division de la propriété du sol entraînant changement de limite, l'arrêté de cessibilité ne peut être pris que sur la base de documents d'arpentage établis spécialement ; or, seul un extrait du plan cadastral informatisé, édité le 31 janvier 2018, est joint à

l'arrêté de cessibilité querellé, alors même que l'opération projetée nécessite différents changements de limite affectant les parcelles cadastrées section C n° 8 et n° 15 ;

- les états parcellaires dont s'agit laissent entendre que la parcelle cadastrée section C 244, d'une superficie de 12 ca, serait intégralement occupée par le puits artésien, tandis que la

localisation même approximative de la fontaine et du lavoir est tout simplement passée

sous silence, et ce alors même qu'ils sont supposés justifier l'opération litigieuse et que la

connaissance de leur emplacement constitue une donnée essentielle pour l'appréciation

de la taille et de la forme des parcelles ou parties de parcelle qui seraient nécessaires à la

réalisation de ladite opération ;

- la taille et la forme des parcelles ou parties de parcelle faisant l'objet de

l'arrêté de cessibilité attaqué ne sont absolument pas justifiées, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ; il n'est pas justifié de la nécessité de prévoir un chemin d'accès d'une largeur de 5 mètres ni de celle de disposer d'un espace compris entre 8 et 25 mètres autour de la construction abritant le puits artésien ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 février 2021, le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 juin 2021, la commune d'Arancou, représentée par Me Hiriart, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 24 juin 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 27 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;

- le code de l'environnement ;

- le décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière ;

-le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Frédérique Munoz-Pauziès,

- les conclusions de Mme Florence Madelaigue,

- et les observations de Me Hiriart, représentant la commune d'Arancou.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... B..., épouse D..., Mme E... F..., épouse B..., et M. A... B... sont propriétaires à Arancou, dans les Pyrénées-Atlantiques, d'un ensemble immobilier sur lequel se trouve notamment un puits artésien, une fontaine et un lavoir, dit du B..., sur les parcelles cadastrées C n° 8, n° 15 et n° 244, datant de la fin du XIXème siècle. Par délibération du 6 mars 2017, le conseil municipal d'Arancou a approuvé le recours à une procédure d'expropriation, au motif que les puits, fontaine et lavoir se trouvaient, faute d'entretien, dans un état très dégradé, et, par arrêté du 14 juin 2017, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a prescrit l'ouverture de l'enquête publique. Par arrêté du 4 octobre 2017, le préfet a déclaré d'utilité publique au profit de la commune d'Arancou l'acquisition de terrains nécessaires à la réalisation des travaux de restauration et de sauvegarde de l'ensemble dit de B... et d'aménagement du chemin d'accès, et, par arrêté du 27 avril 2018, il a déclaré cessibles les biens immobiliers en cause. Mme D... relève appel du jugement du 16 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur la régularité du jugement :

2. Les erreurs de fait et de droit dont serait entaché le jugement attaqué sont, à les supposer même établies, sans influence sur la régularité du jugement.

Sur l'arrêté du 4 octobre 2017 portant déclaration d'utilité publique :

3. En premier lieu, l'article L.110-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " L'enquête publique préalable à la déclaration d'utilité publique est régie par le présent titre. / Toutefois, lorsque la déclaration d'utilité publique porte sur une opération susceptible d'affecter l'environnement relevant de l'article L. 123-2 du code de l'environnement, l'enquête qui lui est préalable est régie par les dispositions du chapitre III du titre II du livre Ier de ce code ". Aux termes de l'article L. 123-2 du code de l'environnement : " I. Font l'objet d'une enquête publique soumise aux prescriptions du présent chapitre préalablement à leur autorisation, leur approbation ou leur adoption : / 1° Les projets de travaux, d'ouvrages ou d'aménagements exécutés par des personnes publiques ou privées devant comporter une évaluation environnementale en application de l'article L. 122-1 (...) ". Aux termes de l'article L. 122-1 du même code : " I. Pour l'application de la présente section, on entend par : / 1° Projet : la réalisation de travaux de construction, d'installations ou d'ouvrages, ou d'autres interventions dans le milieu naturel ou le paysage, y compris celles destinées à l'exploitation des ressources du sol (...) II. Les projets qui, par leur nature, leur dimension ou leur localisation, sont susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement ou la santé humaine font l'objet d'une évaluation environnementale en fonction de critères et de seuils définis par voie réglementaire et, pour certains d'entre eux, après un examen au cas par cas ".

4. L'opération envisagée, qui consiste en la restauration d'un puits, d'un lavoir et d'une fontaine et l'aménagement d'un chemin d'accès, et entraîne l'expropriation d'une surface totale de 1 772 m², ne constitue pas des travaux de construction, d'installation ou d'ouvrage, et n'est pas, par sa nature, sa dimension et sa localisation, susceptible d'avoir des incidences notables sur l'environnement et la santé humaine. Par suite, l'enquête publique n'était pas soumise au code de l'environnement, et le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions rappelées au point 3 doit être écarté.

5. En second lieu, il appartient au juge, lorsqu'il se prononce sur le caractère d'utilité publique d'une opération nécessitant l'expropriation d'immeubles ou de droits réels immobiliers, de contrôler successivement qu'elle répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'était pas en mesure de réaliser l'opération dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier, les inconvénients d'ordre social, la mise en cause de la protection et de la valorisation de l'environnement et l'atteinte éventuelle à d'autres intérêts publics que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente. Il lui appartient également, s'il est saisi d'un moyen en ce sens, de s'assurer, au titre du contrôle sur la nécessité de l'expropriation, que l'inclusion d'une parcelle déterminée dans le périmètre d'expropriation n'est pas sans rapport avec l'opération déclarée d'utilité publique.

6. L'opération envisagée a pour objet la restauration et la sauvegarde de l'ensemble dit de B.... Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la note de l'architecte des bâtiments de France du 21 octobre 2016, que l'ensemble présente un intérêt patrimonial évident, et que " ce patrimoine est en péril, son état ... alarmant, proche de la ruine et de la perte définitive des éléments essentiels de l'ouvrage ". L'ensemble est situé à proximité de l'église du XIIIème siècle, inscrite à l'inventaire des monuments historiques, et du chemin de Saint-Jacques de Compostelle. Il a par ailleurs fait l'objet d'une fiche à l'inventaire général du patrimoine culturel en 1999. La circonstance que la commune favoriserait le développement de l'activité d'une carrière à proximité de l'ensemble de B... ne permet pas de remettre en cause l'intention de la commune de sauvegarder son patrimoine. Ainsi, le projet répond à une finalité d'intérêt général.

7. Il ressort également des pièces du dossier, et notamment des nombreux courriers produits par la commune devant la cour, que le maire a, dès 2002, alerté les propriétaires du mauvais état d'entretien de l'ensemble. Devant leur inaction, par courrier du 26 juin 2008, le maire leur a proposé de louer l'ensemble à la commune par bail emphytéotique, afin que la commune " puisse largement participer à la réhabilitation " de l'ouvrage, mais cette proposition est restée sans effet. Par délibération du 25 octobre 2013, le conseil municipal, constatant l'état de délabrement de l'ensemble B..., a demandé au maire d'engager une procédure d'abandon manifeste et le maire a ordonné aux propriétaires l'exécution, dans un délai de six mois, de travaux consistant en la réfection du mur longeant le chemin d'accès, le nettoyage et la réfection totale des toits et parois verticales du pavillon abritant le puits artésien, et le nettoyage et la réparation des parois maçonnées et de l'exutoire du lavoir et de la fontaine. En avril 2014, à l'expiration de ce délai de six mois, la commune a été saisie d'une pétition signée par plus de 300 personnes, dénonçant la destruction du pavillon du XIXème siècle abritant le puits artésien, destruction relatée dans la presse locale. À cet égard, si la requérante soutient que le pavillon n'a pas été détruit mais démonté pour restauration, elle n'apporte aucun élément au soutien de cette allégation. Par courrier du 19 juin 2014, l'architecte des bâtiments de France a attiré l'attention du maire sur l'intérêt patrimonial de l'ensemble B..., son état de grand délabrement, la médiocrité des travaux de restauration, entrepris sans autorisation et ayant abouti à la destruction du pavillon protégeant le puits, et l'urgence d'une véritable opération de restauration. La commune ayant renouvelé sa proposition de conclure un contrat lui permettant de prendre en charge l'entretien du site, par la voie d'une convention de mise à disposition, Mme B... a refusé cette proposition dans un courrier du 5 juin 2015. Ainsi, la requérante n'est pas fondée à soutenir que, les propriétaires étant prêts à entretenir les biens, l'opération de sauvegarde de l'ensemble pouvait être réalisée dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation.

8. Par ailleurs, l'assiette de l'opération est très circonscrite et ne porte que sur les terrains d'assiette du puits, de la fontaine et du chemin d'accès, ainsi que sur deux bandes de terrains limitrophes, la première de 10 ares pour relier le puits à la fontaine, et la seconde de 5 ares 80 centiares pour permettre l'entretien du mur bordant le chemin d'accès, soit une surface totale de 1 772 m² de terrains non constructibles et non exploités. En outre, Mme D... n'établit pas plus devant la cour que devant les premiers juges que l'opération la privera de tout accès à la source. Ainsi, l'opération ne porte qu'une atteinte modérée à la propriété privée. Enfin, le coût de l'opération, évalué à environ 230 000 euros, n'est pas excessif eu égard à l'intérêt patrimonial et touristique du projet.

Sur l'arrêté du 27 avril 2018 portant déclaration de cessibilité :

9. En premier lieu, aux termes de l'article R. 132-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Les propriétés déclarées cessibles sont désignées conformément aux prescriptions de l'article 7 du décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière. L'identité des propriétaires est précisée conformément aux prescriptions du premier alinéa de l'article 5 ou du premier alinéa de l'article 6 de ce décret, sans préjudice des cas exceptionnels mentionnés à l'article 82 du décret n° 55-1350 du 14 octobre 1955 pris pour l'application du décret du 4 janvier 1955 ". Aux termes de l'article 5 du décret du 4 janvier 1955 : " Tout acte ou décision judiciaire sujet à publicité dans un service chargé de la publicité foncière doit contenir les nom, prénoms dans l'ordre de l'état civil, domicile, date et lieu de naissance et profession des parties, ainsi que le nom de leur conjoint ".

10. Si la requérante fait valoir que ni l'arrêté du 27 avril 2018, ni les états parcellaires annexés n'indiquent la profession des propriétaires des parcelles et la situation matrimoniale de M. A... G... B..., ces omissions sont sans influence sur la légalité de l'arrêté contesté dès lors qu'elles n'ont fait obstacle ni à l'identification des parcelles déclarées cessibles, ni à l'exacte désignation des propriétaires intéressés.

11. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 132-3 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " Il peut n'être établi qu'un seul document d'arpentage pour l'ensemble des parcelles contiguës comprises dans une même feuille de plan cadastral. (...) ". Aux termes de l'article 7 du décret du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière : " Tout acte ou décision judiciaire sujet à publicité dans un service chargé de la publicité foncière doit indiquer, pour chacun des immeubles qu'il concerne, la nature, la situation, la contenance et la désignation cadastrale (section, numéro du plan et lieu-dit). (...) Lorsqu'il réalise ou constate une division de la propriété du sol entraînant changement de limite, l'acte ou la décision doit désigner l'immeuble tel qu'il existait avant la division et chacun des nouveaux immeubles résultant de cette division, sauf en cas de lotissement effectué dans le cadre de la législation sur les lotissements ou s'il s'agit d'immeubles situés dans les communes où le cadastre n'est pas rénové. La constitution sur une fraction de parcelle d'un droit d'usufruit, d'un droit de superficie ou d'un bail emphytéotique est considérée comme un changement de limite de propriété. / Lorsque, sans réaliser ou constater une division de la propriété du sol entraînant changement de limite, il ne concerne qu'une ou plusieurs fractions d'un immeuble, l'acte ou la décision judiciaire doit comporter à la fois la désignation desdites fractions et celle de l'ensemble de l'immeuble. La désignation de la fraction est faite conformément à un état descriptif de division, ou, éventuellement, à un état modificatif, établi dans les conditions fixées par décret, et préalablement publié ; elle doit mentionner le numéro du lot dans lequel la fraction est comprise, et, sous réserve des exceptions prévues audit décret, la quote-part dans la propriété du sol afférente à ce lot. Les dispositions du présent alinéa ne sont pas applicables lorsque l'acte ou la décision concerne soit une servitude, soit un droit d'usage ou d'habitation, soit un bail de plus de douze années. Elles sont également sans application lorsque l'acte ou la décision entraîne la suppression de la division de l'immeuble. / Les mêmes indications doivent obligatoirement figurer dans tout bordereau, extrait, expédition ou copie, déposé en vue de l'exécution de la formalité. / S'il s'agit d'immeubles situés dans les communes où le cadastre a été rénové, et faisant l'objet d'une mutation par décès, d'un acte ou d'une décision judiciaire translatif, déclaratif ou constitutif d'un droit réel susceptible d'hypothèque, la désignation est faite conformément à un extrait cadastral ayant moins de six mois de date au jour de la remise au service chargé de la publicité foncière, et, en cas de changement de limite, d'après les documents d'arpentage établis spécialement en vue de la conservation du cadastre. Cet extrait ou ces documents doivent être remis au service chargé de la publicité foncière à l'appui de la réquisition de la formalité ".

12. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'un arrêté de cessibilité déclare cessibles des parties de parcelles, ce qui implique de modifier les limites des terrains concernés, un document d'arpentage doit être préalablement réalisé afin que l'arrêté de cessibilité désigne les parcelles concernées conformément à leur numérotation issue de ce document. Si le défaut d'accomplissement de cette obligation, qui constitue alors une garantie pour les propriétaires concernés par la procédure d'expropriation, entache d'irrégularité l'arrêté de cessibilité, il n'en résulte pas que le procès-verbal d'arpentage doive être joint à l'arrêté de cessibilité dès lors que les annexes de cet arrêté, établies d'après un document d'arpentage, délimitent avec précision la fraction expropriée de la parcelle dans sa superficie et indiquent les désignations cadastrales de cette parcelle, ainsi que sa nature, sa contenance et sa situation.

13. En l'espèce, les parcelles C7 et C244, qui constituent l'assiette de la fontaine, du chemin et du puits, sont déclarées cessibles dans leur intégralité. S'agissant des parcelles C8 et C15, qui font l'objet d'une expropriation partielle, si l'extrait du plan cadastral annexé à l'arrêté délimite les portions de parcelles qui font l'objet de l'expropriation, il précise que " les contenances seront définitives après bornage des parcelles expropriées ". Ainsi, les bornes des fractions expropriées n'ont pas été délimitées d'après un document d'arpentage, permettant la parfaite identification par l'arrêté contesté des propriétés expropriées, et Mme D... est fondée à soutenir que l'arrêté de cessibilité doit être annulé en tant qu'il porte sur les parcelles C8 et C15.

14. En troisième lieu, les circonstances, avancées par la requérante, que les états parcellaires " laissent entendre que la parcelle cadastrée section C244, d'une superficie de 12 ca, serait intégralement occupée par le puits artésien ", et que le plan cadastral annexé ne localiserait pas la fontaine et le lavoir, sont sans influence sur la légalité de la décision contestée.

15. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 132-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : " L'autorité compétente déclare cessibles les parcelles ou les droits réels immobiliers dont l'expropriation est nécessaire à la réalisation de l'opération d'utilité publique. " Il ressort des pièces du dossier que l'expropriation des parcelles C7 et C244, qui constituent l'assiette de la fontaine, du chemin et du puits, est nécessaire à la réalisation de l'opération.

16. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de cessibilité du 27 avril 2018 en tant qu'il porte sur les parcelles C8 et C15. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions de Mme D... tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté du 27 avril 2018 est annulé en tant qu'il porte sur les parcelles C8 et C15.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Pau du 16 juin 2020 est réformé en ce qu'il est contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., épouse D..., au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la commune d'Arancou.

Délibéré après l'audience du 10 février 2022 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Nathalie Gay, première conseillère.

Rendu public par dépôt au greffe le 10 mars 2022.

La rapporteure,

Frédérique Munoz-Pauziès Le président

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX02823


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 20BX02823
Date de la décision : 10/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

34-01 Expropriation pour cause d'utilité publique. - Notions générales.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Frédérique MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : HERVOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-03-10;20bx02823 ?
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