Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 23 mars 2021 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et lui a interdit de retourner sur le territoire français pour une durée d'un an.
Par un jugement n° 2101692 du 6 mai 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour administrative d'appel :
Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2021, M. B..., représenté par Me Tercero, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2101692 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse du 6 mai 2021 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 mars 2021 du préfet de la Haute-Garonne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer sa situation dès la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de l'effacer du système d'information Schengen dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
- le jugement est irrégulier dès lors que le magistrat désigné n'a pas répondu au moyen, qui n'est pas inopérant, tiré du défaut de motivation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an ;
En ce qui concerne les moyens communs aux différentes décisions :
- elles sont insuffisamment motivées et sont entachées d'un défaut d'examen de sa situation personnelle dès lors, notamment, que le préfet ne mentionne pas sa demande de titre de séjour déposée le 5 mars 2021 devant les services de la préfecture de l'Ariège ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- il a exercé des activités professionnelles et a pu bénéficier d'une promesse d'embauche ; il est soutenu financièrement et moralement par une association de trente-cinq familles et par des élus locaux dans le cadre de sa demande de régularisation par le travail ; depuis le mois de juin 2020, il participe aux travaux des champs grâce au statut de woofing et au bénévolat en maraîchage d'Emmaüs à Pamiers, ville dans laquelle il réside ; il suit des cours de français avec l'Union départementale des associations familiales de l'Ariège ; compte tenu de ce qui précède, le préfet a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
En ce qui concerne la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :
- elle est entachée d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle dès lors qu'il a sollicité son admission au séjour pour motifs exceptionnels le 5 mars 2021 et qu'il justifie disposer d'un logement stable et de garanties de représentation solides ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;
En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an :
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire ;
- elle est disproportionnée compte tenu de l'ancienneté de la mesure d'éloignement sur laquelle elle se fonde et de l'absence totale d'examen de la demande de titre de séjour présentée le 5 mars 2021.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2021, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er juillet 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant pakistanais né le 27 décembre 1992, a déclaré être entré en France le 10 mars 2016. A la suite du rejet définitif de sa demande d'asile, une mesure d'éloignement a été prononcée à son encontre le 15 novembre 2017 qui n'a pas été exécutée par l'intéressé. Par un arrêté du 23 mars 2021, le préfet de la Haute-Garonne lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée d'un an. M. B... relève appel du jugement du 6 mai 2021 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 mars 2021.
Sur la régularité du jugement :
2. Contrairement à ce que soutient M. B..., le premier juge, en écartant au point 3 de son jugement le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté attaqué pour l'ensemble des décisions contestées, n'a pas omis de se prononcer sur le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait irrégulier pour ce motif.
Sur les moyens communs aux différentes décisions :
3. En premier lieu, l'arrêté attaqué vise les textes dont il fait application, mentionne la nationalité et les faits relatifs à la situation personnelle et administrative de M. B... et indique les raisons pour lesquelles le préfet lui a fait obligation de quitter le territoire français vers son pays d'origine, tenant à son maintien irrégulier sur le territoire. Par ailleurs, l'arrêté précise les motifs pour lesquels le préfet a estimé que l'intéressé, qui s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement, ne présente pas de garanties de représentation suffisantes et a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire. Enfin, le préfet a motivé la décision d'interdiction de retour sur le territoire français prononcée à l'encontre de M. B... au regard de la mesure d'éloignement sans délai dont il a fait l'objet et, pour fixer la durée de cette interdiction, a relevé que l'intéressé ne faisait état d'aucune circonstance humanitaire, que sa présence sur le territoire était récente, que la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France n'étaient pas établis et qu'il a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement qu'il n'a pas exécutée. Dans ces conditions, les décisions en litige comportent l'énoncé des considérations de fait et de droit qui les fondent et le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
4. En second lieu, le seul dépôt d'une demande de titre de séjour ne saurait faire obstacle à ce que l'autorité administrative décide de prendre une obligation de quitter le territoire français à l'encontre d'un étranger qui se trouve dans l'un des cas mentionnés en particulier au I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur. Il ne saurait en aller autrement que lorsque la loi prescrit l'attribution de plein droit d'un titre de séjour à l'intéressé, cette circonstance faisant alors obstacle à ce qu'il puisse légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français. La circonstance, dont il est fait état dans la requête, que, le 5 mars 2021, M. B... a déposé une demande de titre de séjour pour motifs exceptionnels n'interdisait donc pas au préfet de prendre à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français. Par ailleurs, il ressort des termes même de l'arrêté contesté que le préfet a examiné la situation de l'intéressé et a tenu compte de l'ensemble des éléments à sa disposition. Dans ces conditions, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation personnelle du requérant doit être écarté.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. A l'appui du moyen tiré de ce que, eu égard à sa situation personnelle, la décision susvisée serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle, M. B... ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance, et, ainsi qu'il a été exposé au point 4, ne critique pas utilement la réponse apportée par le tribunal administratif en se bornant à indiquer que le préfet n'a pas examiné sa demande de titre des séjour pour motifs exceptionnels déposée le 5 mars 2021. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par le premier juge.
Sur la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire :
6. Aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. / (...) / Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) / d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; / (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au deuxième alinéa de l'article L. 611-3, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) ".
7. Il est constant que M. B... est entré irrégulièrement sur le territoire français et s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement en date du 15 novembre 2017 qui lui a été notifiée le 20 novembre suivant. Il entrait ainsi dans les cas où, en application des dispositions précitées du a) et du d) du 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur, le préfet pouvait légalement lui refuser l'octroi d'un délai de départ volontaire. En outre, l'intéressé ne justifie pas être en possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité et ne présente ainsi pas de garanties de représentation suffisantes au sens des dispositions du f) du même article. Ainsi, le risque de fuite doit être tenu pour établi et, quand bien même le requérant fait état de la stabilité de son domicile à Pamiers, il résulte de l'instruction que le préfet aurait pris la même décision s'il ne s'était pas fondé sur l'absence de résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale. Par suite, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que l'intéressé a déposé une demande de titre de séjour pour motifs exceptionnels le 5 mars 2021, c'est par une exacte application des textes précités et sans commettre d'erreur d'appréciation que le préfet lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
8. Ainsi qu'il été précédemment exposé, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Dès lors, le moyen invoqué par la voie de l'exception, par M. B..., de son illégalité ne peut qu'être écarté.
Sur la décision portant interdiction de retour sur le territoire français pendant une durée d'un an :
9. En premier lieu, ainsi qu'il été précédemment exposé, la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire n'est pas entachée d'illégalité. Dès lors, le moyen invoqué par la voie de l'exception, par M. B..., de son illégalité ne peut qu'être écarté.
10. En second lieu, il y a lieu d'écarter par adoption des motifs pertinents retenus par le premier juge le moyen tiré du caractère disproportionné de la décision susvisée.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique doivent être rejetées par voie de conséquence.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 17 décembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
M. Dominique Ferrari, président-assesseur,
M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 janvier 2022.
Le rapporteur,
Michaël D... La présidente,
Evelyne BalzamoLe greffier,
André Gauchon La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 21BX032152