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18/01/2022 | FRANCE | N°21BX02513

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 18 janvier 2022, 21BX02513


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 14 avril 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et l'arrêté du même jour par lequel cette même autorité l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2101037 du 21 avril 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a admis

M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et rejeté le surplus de sa deman...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 14 avril 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et l'arrêté du même jour par lequel cette même autorité l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2101037 du 21 avril 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a admis M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 juin 2021, et un mémoire enregistré le 6 décembre 2021, M. B... représenté par Me Bouillault, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 21 avril 2021 de la magistrate désignée du tribunal administratif de Poitiers ;

2°) d'annuler l'arrêté du 14 avril 2021 par lequel le préfet des Deux-Sèvres l'a obligé à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et l'arrêté du même jour par lequel cette même autorité l'a assigné à résidence ;

3°) d'enjoindre au préfet des Deux-Sèvres, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour d'une durée d'un an dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte, passé ce délai, de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande sous les mêmes conditions et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard le temps du réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou subsidiairement de condamner l'État à lui payer la même somme sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :

- il n'y a pas non-lieu à statuer ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation particulière ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui le refus de délai de départ volontaire :

- c'est à tort que le préfet a refusé de lui accorder un délai au motif que sa présence constituerait une menace à l'ordre public et qu'il ne justifierait pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ;

En ce qui concerne la décision d'interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation particulière ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle est illégale par exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :

- elle est illégale par exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen de sa situation particulière.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er décembre 2021, le préfet des Deux-Sèvres conclut au rejet de la requête. Il fait valoir que compte tenu de l'exécution de la mesure d'éloignement du 14 avril 2021 pris à l'encontre de M. B..., le 13 octobre 2021, il y a lieu de prononcer un non-lieu à statuer.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 17 juin 2021 du bureau de l'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Nicolas Normand.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant sénégalais né en 1986, déclare être entré en France au mois de novembre 2018 sous couvert d'un passeport diplomatique. Par un arrêté du 14 octobre 2019, le préfet de la Seine-Saint-Denis l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur ce territoire pendant une durée d'un an. Consécutivement à son interpellation par les services de police, le 29 janvier 2020, pour " ivresse publique manifeste ", le préfet des Deux-Sèvres l'a, par un arrêté du 30 janvier 2020, assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours en vue de procéder à son éloignement. S'étant maintenu sur le territoire, M. B... a contracté mariage avec une ressortissante française, le 13 juin 2020, avant de solliciter, le 30 juin suivant, la délivrance d'un titre de séjour en qualité de " conjoint de français " sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 19 octobre 2020, le préfet des Deux-Sèvres a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour pendant une durée de deux ans. Par un arrêté du même jour, il l'a assigné à résidence. Par un jugement du 23 octobre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a annulé l'arrêté attaqué, en tant qu'il oblige l'intéressé à quitter le territoire français, lui refuse un délai de délai de départ volontaire, fixe le pays de renvoi, lui fait interdiction de retourner sur le territoire français pendant un an, l'arrêté du même jour en tant qu'il l'assigne à résidence et a renvoyé à une formation collégiale les conclusions à fins d'annulation et d'injonction sous astreinte dirigées contre ce même arrêté, en tant qu'il lui refuse la délivrance d'un titre de séjour. Par un arrêté du 14 avril 2021, le préfet des Deux-Sèvres a obligé M. B... à quitter le territoire sans délai, a fixé le pays de destination et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans et par un arrêté du même jour cette même autorité l'a assigné à résidence. Par un jugement du 21 avril 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a rejeté la demande de M. B... tendant à l'annulation de ces décisions. Par un arrêté du 1er août 2021, le préfet des Deux-Sèvres a pris un nouvel arrêté portant assignation à résidence à l'encontre de M. B... puis le 15 septembre 2021, il a édicté un arrêté portant placement en rétention administrative de M. B.... Ce dernier relève appel du jugement du 14 avril 2021 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 14 avril 2021.

Sur l'exception de non-lieu à statuer opposée par le préfet des Deux-Sèvres :

2. Si le préfet fait valoir qu'un arrêté du 14 avril 2021 ordonnant l'éloignement de M. B... a été exécuté le 13 octobre 2021, cette circonstance ne prive pas d'objet la présente requête. Par suite, l'exception de non-lieu présentée par le préfet des Deux-Sèvres doit être écartée.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. En premier lieu, pour obliger M. B... à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, le préfet des Deux-Sèvres a visé les dispositions de l'article L. 511-1 I 3° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 511-1 II du même code dont il fait application. Il précise également les conditions d'entrée et de séjour en France de M. B... et notamment que le préfet de la Seine-Saint-Denis a pris à l'encontre de l'intéressé un arrêté en date du 14 octobre 2019 portant obligation de quitter le territoire sans délai, assorti d'une interdiction de retour d'un an et fixant le pays de destination, que l'intéressé s'est maintenu irrégulièrement en France, qu'il a été assigné à résidence au domicile de sa compagne le 30 janvier 2020 mais n'a pas respecté les obligations liées à cette mesure, que le 13 juin 2020 il a épousé une française, qu'il a été auditionné par la gendarmerie le 19 octobre 2020 suite à une plainte de son épouse pour vol de carte bancaire, que 1'intéressé a déposé une demande de titre de séjour le 22 juin 2020 en tant que conjoint de française et a été invité à se présenter le 7 décembre 2020 pour une audition, accompagné de son épouse et muni de l'ensemble des éléments attestant de leur communauté de vie, que l'intéressé a fait l'objet d'un arrêté portant refus de séjour avec obligation de quitter le territoire français sans délai et interdiction de retour de deux ans et d'un arrêté portant assignation à résidence en date du 19 octobre 2020, que la légalité de la décision de refus de séjour a été confirmée par le tribunal administratif de Poitiers, qu'il a de nouveau été interpellé le 13 avril 202l pour des faits de violence sur conjoint sans incapacité et vol avec effraction dans une habitation, qu'il ressort de l'audition menée par les forces de l'ordre du l3 avril 2021, que le couple souhaite entamer une procédure de divorce, que M. B... ne dispose plus d'une résidence effective et permanente, qu'il est établi qu'il est sans enfants sur le territoire français et sans ressources, qu'il est, en outre, défavorablement connu des forces de l'ordre pour de multiples interpellations, son comportement constituant une menace réelle et actuelle à l'ordre public. Il suit de là qu'alors même que l'arrêté attaqué ne fait pas mention de la présence régulière du frère de l'intéressé dont le préfet avait connaissance et de l'annulation par un jugement en date du 23 octobre 2020 d'un magistrat désigné par le tribunal administratif de Poitiers de l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 19 octobre 2020, le moyen tiré du défaut motivation en droit et en fait de la décision, et ce quel que soit d'ailleurs le bien fondé des motifs de celle-ci, ne peut qu'être écarté.

4. En deuxième lieu, pour les motifs précités, cette décision n'est pas entachée d'un défaut d'examen de la situation particulière du requérant.

5. En troisième lieu, aux termes de stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".

6. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de l'arrêté attaqué, M. B... ne résidait en France que depuis deux ans et demi alors qu'il a passé l'essentiel de son existence dans son pays d'origine. En outre, s'il a épousé une ressortissante française le 13 juin 2020, le couple, à l'occasion de son audition par les forces de l'ordre le 13 avril 2021, a déclaré souhaiter entamer une procédure de divorce et M. B... a indiqué qu'il souhaitait quitter le domicile conjugal. Par suite, alors même que son épouse indique dans une attestation en date du 16 avril 2021 qu'elle souhaite le retour de son mari à leur domicile, que l'intéressé a participé à l'éducation des plus jeunes enfants de son épouse nés d'un autre lit, en les emmenant à l'école et en les récupérant lorsque son épouse exerçait son métier d'auxiliaire de vie, que son frère est titulaire d'une carte de résident de dix ans, et que sa sœur résiderait aussi de manière régulière sur le territoire français, le moyen tiré de la violation de l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

7. En second lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

8. Ainsi qu'il a été indiqué au point 6 du présent arrêt, le requérant ne partageait plus de vie commune avec son épouse à la date de l'arrêté attaqué. Il ne peut donc utilement soutenir que la décision attaquée méconnaitrait l'intérêt supérieur des enfants de son épouse. Dans ces conditions, le préfet des Deux-Sèvres n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant.

En ce qui concerne la décision refusant d'octroyer un délai de départ volontaire :

9. En premier lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français. Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : 1° Si le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut présenter des documents d'identité ou de voyage en cours de validité, qu'il a refusé de communiquer les renseignements permettant d'établir son identité ou sa situation au regard du droit de circulation et de séjour ou a communiqué des renseignements inexacts, qu'il a refusé de se soumettre aux opérations de relevé d'empreintes digitales ou de prise de photographie prévues au deuxième alinéa de l'article L. 611-3, qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues aux articles L. 513-4, L. 513-5, L. 552-4, L. 561-1, L. 561-2 et L. 742-2 ; (...) ".

10. Pour refuser d'accorder au requérant un délai de départ volontaire, le préfet s'est notamment fondé sur la circonstance que le préfet de la Seine-Saint-Denis a pris à l'encontre de l'intéressé un arrêté en date du 14 octobre 2019 portant obligation de quitter le territoire sans délai, assorti d'une interdiction de retour d'un an et fixant le pays de destination que l'intéressé n'a pas exécuté, qu'il n'avait pas davantage respecté l'assignation à résidence au domicile de sa compagne édictée par l'arrêté du 30 janvier 2020 et qu'il ressort de l'audition menée par les forces de l'ordre le l3 avril 2021, que Monsieur B... ne disposait plus d'une résidence effective et permanente en France et qu'il est sans ressources. Ce faisant, l'autorité préfectorale pouvait régulièrement estimer que l'intéressé ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque mentionné au 3° du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

11. M. B... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, les moyens tirés de ce que la décision fixant le pays de destination est illégale par exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, est insuffisamment motivée et méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il convient d'écarter ces moyens par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

12. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour (...) Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence des cas prévus au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...). ".

13. Il ressort des termes mêmes des dispositions citées au point précédent que l'autorité compétente doit, pour décider de prononcer à l'encontre de l'étranger soumis à l'obligation de quitter le territoire français une interdiction de retour et en fixer la durée, tenir compte, dans le respect des principes constitutionnels, des principes généraux du droit et des règles résultant des engagements internationaux de la France, des quatre critères qu'elles énumèrent, sans pouvoir se limiter à ne prendre en compte que l'un ou plusieurs d'entre eux. La décision d'interdiction de retour doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, de sorte que son destinataire puisse à sa seule lecture en connaître les motifs. Si cette motivation doit attester de la prise en compte par l'autorité compétente, au vu de la situation de l'intéressé, de l'ensemble des critères prévus par la loi, aucune règle n'impose que le principe et la durée de l'interdiction de retour fassent l'objet de motivations distinctes, ni que soit indiquée l'importance accordée à chaque critère.

14. Il incombe ainsi à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

15. La décision litigieuse, qui vise les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, précise que par jugement du 18 février 2021, le tribunal administratif a validé le refus de séjour de 1' intéressé, que celui-ci a été à nouveau interpellé le 13 avril 2021 par la brigade de gendarmerie de Moncoutant-Sur-Sèvres et placé en garde à vue pour des faits de violence sur conjoint sans incapacité et vol avec effraction dans une habitation, que lors de son audition par les forces de l'ordre du 13 avril 2021, le couple a indiqué souhaiter entamer une procédure de divorce et M. B... a indiqué souhaiter quitter le domicile conjugal, qu'il ne dispose plus d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale, qu'il est établi qu'il est sans enfants sur le territoire français, qu'il est sans ressources, qu'il est défavorablement connu des forces de l'ordre pour de multiples interpellations, constitue une menace réelle et actuelle à l'ordre public et que l'intéressé ne prouve pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine. Par suite, la décision portant interdiction de retour sur le territoire français, est suffisamment motivée en droit et en fait et n'est pas entachée d'un défaut d'examen de sa situation particulière.

En ce qui concerne la décision portant assignation à résidence :

16. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant assignation à résidence serait illégale en raison de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français qui la fonde.

17. En deuxième lieu, M. B... reprend en appel, sans l'assortir d'arguments nouveaux ou de critique utile du jugement, le moyen tiré de ce que la décision portant assignation à résidence est insuffisamment motivée. Il convient d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinents retenus par les premiers juges.

18. En troisième lieu, le requérant soutient que cette décision est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle dès lors qu'il n'est pas en capacité de se conformer à l'assignation à résidence qui a été prononcée à son encontre car il est dans l'impossibilité de se rendre 5 jours par semaine à la Gendarmerie de Moncoutant qui se trouve à plus de 18 km du domicile où il est assigné dans la mesure où il n'a pas le permis de conduire et qu'il n'existe aucun transport en commun permettant d'effectuer un tel trajet et que cette gendarmerie n'est pas la plus proche de son domicile. Il n'établit toutefois pas le caractère impossible de cette formalité. Par suite, son moyen doit être écarté.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et celles tendant à ce que l'Etat soit condamné au versement d'une somme d'argent au titre des frais de justice ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Deux-Sèvres.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. Nicolas Normand, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 janvier 2022.

Le rapporteur,

Nicolas Normand La présidente,

Evelyne Balzamo Le greffier,

André Gauchon La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

8

N° 21BX02513


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX02513
Date de la décision : 18/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Nicolas NORMAND
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : BOUILLAULT

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-01-18;21bx02513 ?
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