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17/12/2021 | FRANCE | N°21BX03035

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 17 décembre 2021, 21BX03035


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les décisions du 22 avril 2021 par lesquelles le préfet de la Haute-Garonne, d'une part, a prononcé son transfert aux autorités espagnoles, responsables de l'examen de sa demande d'asile, et d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2102368 du 29 avril 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requ

te, enregistrée le 22 juillet 2021, M. A..., représenté par Me Cazanave, demande à la cour :

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler les décisions du 22 avril 2021 par lesquelles le préfet de la Haute-Garonne, d'une part, a prononcé son transfert aux autorités espagnoles, responsables de l'examen de sa demande d'asile, et d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2102368 du 29 avril 2021, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 juillet 2021, M. A..., représenté par Me Cazanave, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 avril 2021 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de la Haute-Garonne du 22 avril 2021 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, et de lui délivrer dans l'attente une attestation de demandeur d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ou, en cas de défaut d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle, de lui verser la même somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en refusant de mettre en œuvre la clause de souveraineté prévue à l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

Par un mémoire en production de pièces et un mémoire en défense, enregistrés le 31 août et le 9 septembre 2021, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête de M. A....

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés et produit des pièces dont l'une indique que l'intéressé a été déclaré en fuite et que le délai de transfert a en conséquence été prolongé jusqu'au 29 octobre 2022.

Par une décision du 8 juillet 2021, M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Karine Butéri a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sierra-léonais né le 2 février 1998, est entré en France le 15 mars 2021, selon ses déclarations. Le 23 mars 2021, il a présenté une demande d'asile enregistrée par les services de la préfecture de la Haute-Garonne. Le relevé de ses empreintes décadactylaires ayant révélé qu'il avait déposé une demande similaire en Espagne, les autorités espagnoles ont été saisies le 25 mars 2021 d'une demande de reprise en charge, sur le fondement du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013, dit " Dublin III ". Ces autorités ont explicitement accepté cette demande le 30 mars 2021 sur le fondement du d) du 1 de l'article 18 de ce règlement. Par deux décisions du 22 avril 2021, le préfet de la Haute-Garonne, d'une part, a prononcé le transfert de M. A... aux autorités espagnoles, responsables de l'examen de sa demande d'asile, et, d'autre part, a assigné l'intéressé à résidence. M. A... relève appel du jugement du 29 avril 2021 par lequel la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de ces décisions.

Sur la légalité des décisions du 22 avril 2021 :

2. Aux termes de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque Etat membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. / 2. L'Etat membre dans lequel une demande de protection internationale est présentée et qui procède à la détermination de l'Etat membre responsable, ou l'Etat membre responsable, peut à tout moment, avant qu'une première décision soit prise sur le fond, demander à une autre Etat membre de prendre un demandeur en charge pour rapprocher tout parent pour des raisons humanitaires fondées, notamment, sur des motifs familiaux ou culturels, même si cet autre Etat membre n'est pas responsable (...) ". Si la mise en œuvre, par les autorités françaises, des dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013 doit être assurée à la lumière des exigences définies par les dispositions du second alinéa de l'article 53-1 de la Constitution, en vertu desquelles les autorités de la République ont toujours le droit de donner asile à tout étranger persécuté en raison de son action en faveur de la liberté ou qui sollicite la protection de la France pour un autre motif, la faculté laissée à chaque État membre de décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement, est discrétionnaire et ne constitue nullement un droit pour les demandeurs d'asile.

3. M. A... soutient que le préfet de la Haute-Garonne a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de son pouvoir discrétionnaire et en décidant de le transférer aux autorités espagnoles, responsables de sa demande d'asile, dès lors que son transfert vers l'Espagne le privera du protocole de soins mis en place pour la prise en charge de ses douleurs et d'un blocage de la mâchoire. A ce titre, il produit un compte rendu de prise en charge au CHU de Purpan du 30 mars 2021 pour un " trauma mâchoire " qui indique " qu'il s'est fait agresser dans sa ville [et qu'il] sent que sa mâchoire se bloque pour manger ou parler " et qu'il a " reçu un coup il y a trois jours " et s'interroge sur un traumatisme au niveau de l'arcade zygomatique gauche. Il produit, en outre, un document attestant d'un rendez-vous en chirurgie maxillo-faciale le 2 juillet 2021. Toutefois, ces pièces, peu circonstanciées, ne permettent pas d'établir la réalité et la gravité de la pathologie dont M. A... se prévaut. Elles ne sont pas de nature à démontrer qu'il ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié en Espagne, pays dans lequel il a d'ailleurs déjà bénéficié d'une prise en charge médicale, ni même qu'il serait dans l'impossibilité de voyager sans risque vers ce pays. Il ne produit pas davantage d'éléments de nature à établir qu'un éventuel défaut de prise en charge entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant d'appliquer la clause discrétionnaire prévue par l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 au regard de son état de santé.

4. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par l'appelant, n'implique aucune mesure d'exécution. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'État au titre des frais non compris dans les dépens dès lors qu'il n'est pas dans la présente instance la partie perdante.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Karine Butéri, présidente,

Mme Sylvie Cherrier, première conseillère,

M. Olivier Cotte, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 décembre 2021.

L'assesseure la plus ancienne

dans l'ordre du tableau,

Sylvie Cherrier

La présidente-rapporteure,

Karine Butéri

La greffière,

Catherine Jussy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 21BX03035


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX03035
Date de la décision : 17/12/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BUTERI
Rapporteur ?: Mme Karine BUTERI
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : CAZANAVE

Origine de la décision
Date de l'import : 28/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-12-17;21bx03035 ?
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