Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme E... F... ont demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2016 par lequel le maire de Lacanau a accordé à M. C... D... et à Mme A... B... un permis de construire pour la réalisation d'une maison d'habitation sur une parcelle située 5 allée du Petit Moutchic à Lacanau.
Par un jugement n° 1700505 du 26 septembre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 6 décembre 2016 du maire de Lacanau.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 19BX04425 le 19 novembre 2019 et le 23 juin 2020, M. D... et Mme B..., représentés par la Selarl Sol-Garnaud, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 26 septembre 2019 ;
2°) de rejeter la demande de première instance de M. et Mme F... ;
3°) de mettre à la charge de M. et Mme F..., la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a estimé que le permis de construire méconnaissait l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors que le Moutchic constitue un village, tant dans les faits que dans le plan d'occupation des sols dans lequel la parcelle est classée en zone UCa constructible et dans le schéma de cohérence territoriale des lacs Médocains ;
- la construction est envisagée sur une parcelle déjà bâtie ;
- dans le cadre de l'effet dévolutif, le dossier de demande de permis de construire était complet, le recours à un architecte n'était pas obligatoire, le projet s'insérait dans son environnement et ne méconnaissait ni les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme, ni l'article UC Il du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Lacanau, ni les articles UC 14, UC 7 et UC 10 du même plan, ni les dispositions de l'article R. 431-2 du code de l'urbanisme et pas davantage celles des articles L. 121-13 et L. 121-16 du même code.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mai 2020, M. et Mme F..., représentés par Me Galy, concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent qu'aucun des moyens n'est fondé.
Par un mémoire, enregistré le 11 juin 2021, la commune de Lacanau, représentée par Me Touche, conclut à l'annulation du jugement du 26 septembre 2019 du tribunal administratif de Bordeaux.
Elle soutient que :
- le Moutchic constitue un village au sens de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors qu'il présente un nombre et une densité significative de constructions et est d'ailleurs ainsi qualifié par le schéma de cohérence territoriale des lacs Médocains ;
- par la voie de l'effet dévolutif, aucun des moyens de première instance n'est fondé.
II. Par une requête et un mémoire, enregistrés sous le n° 19BX04480 le 25 novembre 2019 et le 11 juin 2020, la commune de Lacanau, représentée par Me Touche, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 26 septembre 2019 ;
2°) de rejeter la demande de première instance de M. et Mme F... ;
3°) de mettre à la charge de M. et Mme F..., la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a estimé que le permis de construire méconnaissait l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors que le Moutchic constitue un village, tant dans les faits que dans le plan d'occupation des sols dans lequel la parcelle est classée en zone UCa constructible et dans le schéma de cohérence territoriale des lacs Médocains ;
- dans le cadre de l'effet dévolutif, le dossier de demande de permis de construire était complet, le recours à un architecte n'était pas obligatoire, le projet s'insérait dans son environnement et ne méconnaissait ni les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme, ni l'article UC Il du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Lacanau, ni les articles UC 14, UC 7 et UC 10 du même plan, ni les dispositions de l'article R. 431-2 du code de l'urbanisme et pas davantage celles des articles L. 121-13 et L. 121-16 du même code.
Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mai 2020, M. et Mme F..., représentés par Me Galy, concluent au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent qu'aucun des moyens n'est fondé.
Par un mémoire, enregistré le 23 juin 2020, M. D... et Mme B..., représentés par la Selarl Sol-Garnaud, concluent à l'annulation du jugement du 26 septembre 2019 du tribunal administratif de Bordeaux.
Ils soutiennent que :
- c'est à tort que le tribunal administratif de Bordeaux a estimé que le permis de construire méconnaissait l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors que le Moutchic constitue un village, tant dans les faits que dans le plan d'occupation des sols dans lequel la parcelle est classée en zone UCa constructible et dans le schéma de cohérence territoriale des lacs Médocains ;
- la construction est envisagée sur une parcelle déjà bâtie ;
- dans le cadre de l'effet dévolutif, le dossier de demande de permis de construire était complet, le recours à un architecte n'était pas obligatoire, le projet s'insérait dans son environnement et ne méconnaissait ni les dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme, ni de l'article UC Il du règlement du plan d'occupation de la commune de Lacanau, ni les articles UC 14, UC 7 et UC 10 du même plan, ni les dispositions de l'article R. 431-2 du code de l'urbanisme et pas davantage celles des articles L. 121-13, et L. 121-16 du même code.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Fabienne Zuccarello,
- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,
- et les observations de Me Touche, représentant la commune de Lacanau, de Me Cuvier représentant M. D... et Mme B..., et de Me Schontz, représentant M. et Mme F....
Considérant ce qui suit :
1. Le 25 octobre 2016, M. D... et Mme B... ont déposé une demande de permis de construire pour la réalisation d'une maison d'habitation pour une surface plancher totale de 119,93 m² sur un terrain situé 5 allée du petit Moutchic à Lacanau. Par un arrêté du 6 décembre 2016, le maire de Lacanau a accordé le permis de construire sollicité. Saisi par M. et Mme F..., propriétaires voisins du projet, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cet arrêté du 6 décembre 2016. M. D... et Mme B... ainsi que la commune de Lacanau relèvent appel de ce jugement.
2. Les requêtes présentées par M. D... et Mme B... et par la commune de Lacanau sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.
Sur la légalité de l'arrêté du 6 décembre 2016 :
3. Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dans sa rédaction alors applicable avant la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ". L'article L. 121-13 du même code dispose que : " L'extension limitée de l'urbanisation des espaces proches du rivage ou des rives des plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement est justifiée et motivée dans le plan local d'urbanisme, selon des critères liés à la configuration des lieux ou à l'accueil d'activités économiques exigeant la proximité immédiate de l'eau (...) ". Aux termes de l'article L. 121-16 du même code : " En dehors des espaces urbanisés, les constructions ou installations sont interdites sur une bande littorale de cent mètres à compter de la limite haute du rivage ou des plus hautes eaux pour les plans d'eau intérieurs désignés au 1° de l'article L. 321-2 du code de l'environnement ".
4. Il résulte de ces dispositions alors en vigueur, sous réserve des exceptions qu'elles prévoient, notamment pour les activités agricoles, que, dans les communes littorales, ne peuvent être autorisées, dans les zones situées en dehors des espaces déjà urbanisés, que les constructions réalisées en continuité soit avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement, et, s'agissant des espaces proches du rivage, à la condition qu'elles n'entraînent qu'une extension limitée de l'urbanisation spécialement justifiée et motivée et qu'elles soient situées en dehors de la bande littorale des cent mètres à compter de la limite haute du rivage. Ne peuvent déroger à l'interdiction de toute construction sur la bande littorale des cent mètres que les projets réalisés dans des espaces urbanisés, caractérisés par un nombre et une densité significatifs de constructions, à la condition qu'ils n'entraînent pas une densification significative de ces espaces.
5. D'une part, il est constant que le terrain d'assiette du projet de construction en litige est situé dans la bande littorale des cent mètres à compter des plus hautes eaux, dans le quartier du Moutchic à Lacanau, en bordure immédiate du rivage du lac de Lacanau, plan d'eau intérieur qui relève des dispositions de l'article L. 321-2 du code de l'environnement. Il ressort des pièces du dossier que le quartier du Moutchic comporte une soixantaine d'habitations individuelles de type pavillonnaire situées le long des voies publiques de l'allée du petit Moutchic et de l'avenue de la Plage, ainsi que quelques restaurants, des équipements nautiques et un camping. Toutefois ce quartier d'urbanisation diffuse est éloigné des agglomérations de Lacanau Océan et du bourg de Lacanau et ne saurait être regardé comme un village au sens des dispositions précitées du code de l'urbanisme dès lors qu'il ne constitue pas un espace urbanisé caractérisé par un nombre et une densité significatifs de constructions, au sens des dispositions précitées du code de l'urbanisme. Dès lors, c'est à bon droit que les juges de première instance, ont estimé que le maire de Lacanau avait méconnu les dispositions des articles L. 121-8 et L. 121-16 du code de l'urbanisme en accordant à M. D... et Mme B... un permis de construire dans un espace qui ne constituait pas un espace urbanisé au sens des dispositions précitées, alors même que la parcelle supportait déjà des maisons d'habitation qui ont été démolies.
6. D'autre part, en application des dispositions citées ci-dessus, il appartient à l'autorité administrative chargée de se prononcer sur une demande d'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de la conformité du projet avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral. Il en va ainsi alors même que le plan local d'urbanisme, en compatibilité avec les orientations des schémas de cohérence territoriale, aurait ouvert à l'urbanisation la zone dans laquelle se situe le terrain d'assiette. Aussi, les circonstances que le plan d'occupation des sols de la commune de Lacanau ait classé le terrain d'assiette de la construction dans une zone UCa constructible et que le schéma de cohérence territoriale des lacs Médocains ait qualifié le quartier du Moutchic de village ne font pas obstacle à ce que la demande de permis de construire en litige soit appréciée directement au regard de l'article L. 121-16 du code de l'urbanisme précité.
7. Il résulte de tout ce qui précède, que M. D..., Mme B... et la commune de Lacanau ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé l'arrêté du 6 décembre 2016 du maire de Lacanau.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. et Mme F..., qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que demandent M. D..., Mme B... et la commune de Lacanau au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge d'une part de M. D... et de Mme B..., et d'autre part de la commune de Lacanau la somme de 1 000 euros qu'ils verseront à M. et Mme F... sur le fondement des mêmes dispositions.
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. D... et Mme B... n° 19BX04425 et de la commune de Lacanau n° 19BX04480 sont rejetées.
Article 2 : M. D... et Mme B... verseront la somme de 1 000 euros et la commune de Lacanau versera la somme de 1 000 euros à M. et Mme F... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à Mme A... B..., à M. et Mme C... F... et à la commune de Lacanau.
Délibéré après l'audience du 2 décembre 2021, à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,
Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 décembre 2021.
La rapporteure,
Fabienne Zuccarello La présidente,
Marianne Hardy
La greffière,
Sophie Lecarpentier
La République mande et ordonne au préfet de la Gironde en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
5
N° 19BX04425, 19BX04480