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04/11/2021 | FRANCE | N°21BX01159

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 04 novembre 2021, 21BX01159


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 juin 2019 A... lequel le préfet de la Guadeloupe lui a refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et, pendant cette période, de se présenter trois fois A... semaine à la gendarmerie, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, et, d'autre part, d'enj

oindre, sous astreinte, audit préfet de lui délivrer un titre de séjour " vie ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... D... a demandé au tribunal administratif de la Guadeloupe, d'une part, d'annuler l'arrêté du 19 juin 2019 A... lequel le préfet de la Guadeloupe lui a refusé le séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et, pendant cette période, de se présenter trois fois A... semaine à la gendarmerie, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an, et, d'autre part, d'enjoindre, sous astreinte, audit préfet de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ".

A... un jugement n° 1900765 du 16 juin 2020, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté la demande de Mme D....

Procédure devant la cour :

A... une requête et deux mémoires en production de pièces, enregistrés les 15 et 31 mars et le 4 octobre 2021, Mme D..., représentée A... Me Djimi, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 16 juin 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Guadeloupe du 19 juin 2019 ;

3°) d'enjoindre audit préfet de lui délivrer, sous astreinte de 100 euros A... jour de retard, un titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

-les décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français méconnaissent le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle réside en France depuis plus de dix ans, y vit en couple avec un ressortissant français et y a des attaches familiales fortes ; pour les mêmes raisons, tant le refus de séjour que la mesure d'éloignement méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ; le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions sur sa vie privée et familiale.

Le préfet de la Guadeloupe a produit un mémoire en défense, enregistré le 6 octobre 2021, soit après la clôture automatique de l'instruction, qui n'a pas été communiqué.

A... une décision du 12 novembre 2020, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à Mme D....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... D..., ressortissante haïtienne, née en 1978, entrée en France en 2010, selon ses déclarations, a sollicité, le 12 novembre 2018, la délivrance d'un titre de séjour, sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. A... arrêté du 19 juin 2019, le préfet de la Guadeloupe a refusé de lui délivrer le titre demandé, lui a fait obligation de quitter le territoire dans le délai de trente jours, l'a contrainte à une obligation de présentation trois fois A... semaine, et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an. Mme D... fait appel du jugement du tribunal administratif de la Guadeloupe du 16 juin 2020, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article R. 313-21 du même code, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger, qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France, doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1.- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2.- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue A... la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Mme D... fait valoir qu'elle est présente sur le territoire français depuis 2010, qu'elle forme une cellule familiale stable et ancienne avec un ressortissant français, qui a reconnu ses deux enfants, et qu'elle dispose également sur le territoire français d'attaches familiales fortes, à savoir sa sœur et ses neveux et nièces.

4. Cependant, si la requérante produit les actes de reconnaissance de ses deux fils, de nationalité haïtienne, nés à Port-au-Prince en 2007 et 2009, A... M. C..., ressortissant français, enregistrés à la mairie de Capesterre-Marie-Galante le 4 avril 2018, soit antérieurement à l'arrêté contesté, reconnaissances renouvelées le 18 mars 2021, elle ne produit pas le moindre commencement de preuve ni de ce qu'elle aurait, avec ce ressortissant français, une vie commune, alors que tous les documents produits font état de deux adresses distinctes, ni de ce que celui-ci contribuerait d'une quelconque façon à l'éducation et à l'entretien des enfants. A... ailleurs, si Mme D... produit, notamment, des factures d'achat des 6, 7 et 13 mai 2013, du 26 mars 2016, 4 juin 2016, 22 mai 2017, des factures de vêtements pour enfants et d'achat de petit électro-ménager datées de 2019, des examens médicaux datés du 27 août 2012, des documents relatifs à la scolarité de ses enfants et ses avis d'imposition sur les revenus au titre des années 2011 à 2019, au demeurant sans ressources déclarées, ces documents ne lui permettent pas d'établir l'ancienneté, la continuité et la stabilité du séjour allégué depuis 2010. Enfin, Mme D... ne justifie pas d'une insertion sociale, économique et culturelle dans la société française. Et, si elle se prévaut de la présence en Guadeloupe de sa sœur, elle ne démontre pas être dépourvue d'attaches en Haïti, où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de 32 ans. Dans ces conditions, ni la décision portant refus de séjour ni celle portant mesure d'éloignement n'ont porté atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale et n'ont pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non plus que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, ces décisions ne sont pas davantage entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle de Mme D....

5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, A... le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guadeloupe a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

6. Le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation présentées A... Mme D.... A... suite, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ne peuvent être accueillies.

Sur les frais de l'instance :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande Mme D... sur leur fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme B... D.... Copie en sera adressée au préfet de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère.

Rendu public A... mise à disposition au greffe, le 4 novembre 2021.

La rapporteure,

Florence E...

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 21BX01159


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 21BX01159
Date de la décision : 04/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : CABINET DJIMI

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-11-04;21bx01159 ?
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