La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/11/2021 | FRANCE | N°21BX00307

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 04 novembre 2021, 21BX00307


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux recours distincts, M. F... I... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision par laquelle la préfète de la Gironde a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour et l'arrêté du 26 février 2020 par lequel la même préfète a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de de

ux ans, ainsi que d'enjoindre à ladite préfète de réexaminer sa demande de titre d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par deux recours distincts, M. F... I... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision par laquelle la préfète de la Gironde a implicitement rejeté sa demande de titre de séjour et l'arrêté du 26 février 2020 par lequel la même préfète a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, ainsi que d'enjoindre à ladite préfète de réexaminer sa demande de titre de séjour dans un délai d'un mois et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente.

Par un jugement n° 1902750-2001399 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté les demandes de M. I....

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en production de pièces, enregistrés les 21 janvier et 11 février 2021, M. I..., représenté par Me Cesso, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 15 juillet 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 26 février 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans ;

3°) d'enjoindre à ladite préfète de réexaminer sa demande de titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :

- la décision implicite de rejet de sa demande de titre étant illégale, son illégalité retentit sur la décision explicite postérieure et ses mesures subséquentes ; en outre, lorsque l'administration lui refuse le séjour par une décision explicite, elle n'était plus saisie d'aucune demande de sa part ; par suite, le refus de séjour qui lui a été explicitement opposé est illégal, de même que les mesures subséquentes contenues dans l'arrêté attaqué ;

En ce qui concerne le refus de séjour :

- l'avis du collège des médecins de l'OFII est antérieur de plus de 16 mois à la décision attaquée ; un tel retard est anormal ;

- l'avis a été signé par le Dr A..., alors qu'aucun médecin de ce nom n'apparaît dans la décision du 21 août 2017 fixant la liste des médecins du collège ; en outre, les noms et prénoms de ce médecin ne sont jamais orthographiés de la même façon ; par suite, la preuve n'est pas rapportée de l'identité réelle de ce médecin ;

- en tout état de cause, le refus de séjour viole les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il ne pourra avoir accès au traitement dont il a besoin dans son pays d'origine, la Metformine et en raison de ce que les sulfonylurées étant indisponibles au Cameroun ; de plus, il ne pourrait avoir, en l'absence de couverture santé universelle dans ce pays, un accès effectif aux soins ;

- le refus de séjour viole le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; il n'a, malgré les condamnations dont il a fait l'objet, jamais constitué une menace pour l'ordre public ;

- il viole également l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, car son état de santé justifiait une admission exceptionnelle au séjour ; la préfète a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation ;

En ce qui concerne la mesure d'éloignement :

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour et, du fait de son état de santé, elle viole l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle viole l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne l'interdiction de retour :

- elle ne se justifie pas et résulte d'une erreur d'appréciation, notamment eu égard à son état de santé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juillet 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. I... ne sont pas fondés.

Par une décision du 10 décembre 2020, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à M. I....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. I..., de nationalité camerounaise, né en 1971, est entré en France le 20 mars 2010, selon ses déclarations. Il a bénéficié d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade, valable du 25 novembre 2011 au 24 novembre 2012, renouvelé chaque année jusqu'au 22 octobre 2015. Par un arrêté du 5 octobre 2016, le préfet de la Gironde a refusé de renouveler son titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français, obligation à laquelle il n'a pas déféré. Le 19 novembre 2017, M. I... a, à nouveau, sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le 22 juin 2018, il a ensuite demandé son admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 et sur celui de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 26 février 2020, la préfète de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans. M. I... fait appel du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 15 juillet 2020, en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 février 2020.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'arrêté dans son ensemble :

2. Si M. I... se prévaut, à l'encontre du refus de séjour contenu dans l'arrêté du 26 février 2020 et des mesures subséquentes, de l'illégalité de la décision implicite de rejet opposée à sa demande de titre, il ressort des pièces du dossier que, par l'arrêté en question, la préfète de la Gironde a expressément rejeté la demande de délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étranger malade " ou " vie privée et familiale " présentée par M. I... le 19 novembre 2017 et complétée le 22 juin 2018. Il s'ensuit que cet arrêté, qui se prononce sur ses demandes, s'est substitué à la décision implicite de rejet née du silence initialement gardé par l'administration sur lesdites demandes. Par suite, cette décision implicite ayant disparu de l'ordonnancement juridique, M. I... ne saurait utilement exciper de son illégalité à l'encontre de l'arrêté du 26 février 2020. Par voie de conséquence également, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, les conclusions de l'intéressé dirigées contre la décision implicite de rejet doivent être regardées comme dirigées contre l'arrêté du 26 février 2020 par lequel la préfète de la Gironde a rejeté ses demandes de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire pendant une durée de deux ans.

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

3. En premier lieu, aux termes du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé ".

4. Tout d'abord, les circonstances que l'avis du collège des médecins de l'OFII, rendu le 8 octobre 2018, soit signé par le docteur " H... A... " alors que l'annexe 1 à la décision du 21 août 2017 modifiant la décision du 17 janvier 2017 portant désignation au collège de médecins à compétence nationale de l'OFII, a désigné le docteur " H... B... ", ou encore celle que son nom soit orthographié tantôt sous la forme " Khodja Mohamed B... " ou " H... B... ", sont sans incidence sur la régularité de la procédure.

5. Ensuite, la circonstance que l'avis du collège des médecins de l'OFII soit " très antérieur " au refus de séjour contenu dans l'arrêté du 26 février 2020 est également sans incidence, alors en outre que cet arrêté ne fait que confirmer un refus implicite né à la suite des demandes de titre formées par l'intéressé, auquel le refus explicite du 26 février 2020 s'est substitué.

6. Enfin, la partie qui justifie d'un avis du collège de médecins de l'OFII allant dans le sens de ses conclusions doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires. En cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

7. En l'espèce, le collège des médecins de l'OFII a estimé, dans son avis rendu le 8 octobre 2018, que l'état de santé de M. I... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre des soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. L'intéressé, qui souffre d'un diabète de type II, conteste cette appréciation en faisant valoir que les médicaments nécessaires au traitement de sa pathologie ne sont pas disponibles au Cameroun et qu'en tout état de cause, il ne pourrait avoir un accès effectif aux soins. Cependant, à l'exception d'un certificat médical décrivant ses pathologies et datant de 2011, M. I... ne produit en appel aucun nouveau document médical pour étayer ses allégations. Dans ces conditions et ainsi que l'ont estimé les premiers juges, l'intéressé n'apporte pas d'éléments suffisamment récents et probants de nature à remettre en cause l'appréciation des médecins du collège de l'OFII. Par ailleurs, et s'agissant de l'accès effectif à des soins adaptés au Cameroun, le requérant se borne, sur ce point, à énoncer des généralités sur les structures sanitaires du pays qui ne sont pas de nature à établir qu'il ne pourrait y recevoir les soins requis par son état de santé. Il s'ensuit que M. I..., n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Gironde aurait méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En deuxième lieu, aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1.- Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2.- Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Il ressort des pièces du dossier que si M. I... est entré en France le 20 mars 2010 et réside sur le territoire depuis près de dix ans à la date de la décision contestée, il s'y maintient en infraction avec l'obligation de quitter le territoire français prise à son encontre le 5 octobre 2016. En outre, il ne conteste pas être célibataire et sans charge de famille. S'il se prévaut de la présence en France de deux frères, il se borne à produire un extrait du passeport français de M. D... E... et une copie de la carte de résident de M. C... G..., sans justifier de leur résidence effective sur le territoire, ni établir les liens qu'il entretiendrait avec eux. Ainsi, l'intéressé n'apporte pas la preuve de l'existence de liens privés et familiaux intenses et stables en France. M. I... ne justifie pas davantage être isolé dans son pays d'origine, dans lequel il a vécu jusqu'à l'âge de trente-neuf ans. Par ailleurs, il ressort du bulletin n° 2 du casier judiciaire de l'intéressé que ce dernier a fait l'objet d'une ordonnance pénale le 7 septembre 2012 pour des faits de conduite d'un véhicule sous l'emprise d'un état alcoolique commis le 12 mai 2012, a été condamné à payer une amende de 200 euros pour des faits de conduite d'un véhicule à moteur malgré une suspension administrative ou judiciaire du permis de conduire commis le 25 juillet 2012, et a, de nouveau, fait l'objet d'une ordonnance pénale le 20 janvier 2018 pour des faits de conduite de véhicule sous l'emprise d'un état alcoolique, ce qui démontre à tout le moins son mépris des règles qui s'imposent à lui et son absence d'intégration dans la société française. Dans ces conditions, la décision contestée ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. I... au respect de sa vie privée et familiale, et ce dernier n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Gironde aurait méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation de sa situation ne saurait être accueilli.

10. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ".

11. M.I... ne justifie aucunement de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires justifiant son admission exceptionnelle au séjour, et notamment pas, comme il le fait valoir, du fait de son état de santé, dont il ne démontre pas qu'il ne puisse être pris en charge dans son pays d'origine. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou de ce que la préfète de la Gironde aurait commis une erreur d'appréciation de sa situation sur ce fondement, ne sauraient être accueillis.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

12. En premier lieu, il résulte de ce qui précède qu'aucun moyen d'illégalité n'a été retenu à l'appui des conclusions à fin d'annulation présentées par le requérant contre la décision de refus de séjour. Par suite, M. I... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être annulée, par voie de conséquence de l'illégalité de cette dernière.

13. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

14. Il ressort des pièces du dossier, comme il a été dit, que, si l'état de santé de M. I... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de son pays d'origine, il peut y bénéficier d'un traitement approprié. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Gironde aurait méconnu les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

15. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9, la décision contestée ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit de M. I... au respect de sa vie privée et familiale, et ce dernier n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Gironde aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La préfète n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette mesure sur la situation de l'intéressé.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

16. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " III. ' L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. (...). Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ".

17. L'interdiction de retour et sa durée sont décidées par l'autorité préfectorale en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français.

18. Il ressort des pièces du dossier, comme l'ont déjà relevé à bon droit les premiers juges, que M. I... a fait l'objet d'une précédente obligation de quitter le territoire français le 5 octobre 2016 et se maintient irrégulièrement sur le territoire français. En outre, l'intéressé n'établit pas la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, et le bulletin n° 2 de son casier judiciaire comporte trois mentions relatives à des faits de conduite sous l'emprise d'un état alcoolique et de conduite d'un véhicule à moteur malgré une suspension administrative ou judiciaire du permis de conduire. Par ailleurs, il peut bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Gironde aurait entaché l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans d'une erreur d'appréciation.

19. Il résulte de tout ce qui précède que M. I... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 février 2020.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

20. Le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. I.... Par suite, ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies.

Sur les frais de l'instance :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, comme celles de l'alinéa 2 de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. I... sur leur fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. I... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. F... I.... Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,

Mme Florence Rey-Gabriac, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 novembre 2021.

La rapporteure,

Florence Rey-Gabriac

Le président,

Éric Rey-Bèthbéder

La greffière,

Angélique Bonkoungou

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

7

N° 21BX00307


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 21BX00307
Date de la décision : 04/11/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: Mme MADELAIGUE
Avocat(s) : CESSO

Origine de la décision
Date de l'import : 07/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-11-04;21bx00307 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award