Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) Logisport, filiale intégrée, et la société par actions simplifiée (SAS) Sofrapar, société mère du groupe, ont demandé au tribunal administratif de la Martinique d'augmenter le déficit de l'exercice clos en 2009 de la société Logisport, à concurrence de la somme de 924 000 euros, correspondant à une provision reprise à tort au titre de cet exercice.
Par un jugement n° 1800358 du 18 juin 2019, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 9 septembre 2019, la société Logisport et la société Sofrapar, représentées par Me Bette, demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 18 juin 2019 du tribunal administratif de la Martinique ;
2°) d'augmenter le déficit de l'exercice clos en 2009 de la société Logisport, à concurrence de la somme de 924 000 euros, correspondant à une provision reprise à tort au titre de cet exercice ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la réintégration de la provision de 924 000 euros dans les résultats de la société Logisport, au titre de l'exercice clos en 2009, a été effectuée par elle alors que le service a repris cette même provision au titre de l'exercice précédent ; en conséquence, elle est en droit de demander que le déficit constaté au titre de l'exercice 2009 soit augmenté du montant de cette provision ; elle est fondée à cet égard à se prévaloir de la doctrine administrative référencée BOI-BIC-PROV-50 n° 160 ;
- le grand livre et la liasse fiscale permettent d'établir que la provision en litige a effectivement été reprise au cours dudit exercice.
Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mars 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Gay, rapporteure,
- et les conclusions de Mme Madelaigue, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. La société Logisport, qui fait partie d'un groupe fiscalement intégré au sens de l'article 223 A du code général des impôts, dont la société Sofrapar est la société mère, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2007 et 2008. À la suite de cette vérification, l'administration fiscale a notamment mis à la charge du groupe fiscal, au titre de l'exercice clos en 2008, une cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés en raison de la réintégration dans ses résultats d'une provision pour risques et charges pour un montant de 924 000 euros. Le bien-fondé de la réintégration de cette provision a été confirmé par le tribunal administratif de la Martinique par un jugement n° 1400084 du 11 juin 2015, puis par un arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux n° 15BX03025 du 31 janvier 2017. Par réclamation du 6 juin 2016, la société Logisport a demandé à l'administration le dégrèvement de l'imposition découlant de la reprise comptable de ladite provision, réclamation rejetée par décision du 23 avril 2018. Les sociétés Logisport et Sofrapar relèvent appel du jugement du 18 juin 2019 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande tendant à l'augmentation du déficit de l'exercice clos en 2009 de la société Logisport, à concurrence de la somme de 924 000 euros, correspondant à une provision reprise à tort au titre de cet exercice.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
2. Il résulte de la combinaison des dispositions des articles 223 C et 223 E du code général des impôts que les déficits retenus pour la détermination du résultat d'ensemble ne sont pas déductibles des résultats ultérieurs de la société qui les a subis, et que l'imputation des reports déficitaires ne peut être faite, au sein d'un groupe intégré, que sur le résultat d'ensemble et dans la mesure d'un déficit d'ensemble.
3. Contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, il résulte de l'instruction que la société Logisport a repris au titre de l'exercice clos en 2009 la provision irrégulièrement constituée en 2008 d'un montant de 924 000 euros. Toutefois, le groupe fiscal d'appartenance de la société Logisport était déficitaire au titre de cet exercice et si les sociétés appelantes font valoir que la réintégration de la provision à son résultat de l'exercice clos en 2009 a diminué le montant de son déficit reportable, elles n'apportent aucun élément permettant de tenir pour établi que la rectification de la provision irrégulièrement constituée en 2008 et la reprise spontanée de cette même provision auraient fait l'objet d'une double imposition effective, le déficit d'ensemble du groupe n'ayant pas été corrigé. Par suite, les sociétés appelantes ne sont pas fondées, sur le terrain de la loi fiscale, à demander l'augmentation du déficit de l'exercice clos en 2009 de la société Logisport, à concurrence de la somme de 924 000 euros, correspondant à une provision reprise à tort au titre de cet exercice.
4. D'une part, aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration./ Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ". Ces dispositions permettent aux contribuables de se prévaloir des énonciations contenues dans les notes ou instructions publiées, qui ajoutent à la loi ou la contredisent, à la condition que les intéressés entrent dans les prévisions de la doctrine, appliquée littéralement, résultant de ces énonciations.
5. D'autre part, la doctrine BOI-BIC-PROV-50-20140416 n° 160 prévoit que " lorsque les redressements afférents à une provision litigieuse sont définitivement confirmés par le juge, une entreprise qui a déjà effectué, en cours d'instance, la reprise comptable de cette provision, peut obtenir un dégrèvement correspondant au montant de la reprise effectivement taxée lorsque le délai de réclamation est expiré. La demande de dégrèvement doit être appuyée de toutes les justifications nécessaires. "
6. L'opération en cause n'entrant pas dans les prévisions de la doctrine référencée BOI-BIC-PROV-50-20140416 n° 160 relative à la reprise comptable des provisions, la société Logisport ne peut s'en prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
7. Il résulte de tout ce qui précède que les sociétés Logisport et Sofrapar ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté leur demande d'augmentation du déficit de l'exercice clos en 2009 de la société Logisport, à concurrence de la somme de 924 000 euros, correspondant à une provision reprise à tort au titre de cet exercice.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre de ces dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Logisport et de la société Sofrapar est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée (SARL) Logisport, à la société par actions simplifiée (SAS) Sofrapar et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Ouest.
Délibéré après l'audience du 7 octobre 2021 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme Frédérique Munoz-Pauziès, présidente-assesseure,
Mme Nathalie Gay, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 novembre 2021.
La rapporteure,
Nathalie Gay
Le président,
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Angélique Bonkoungou
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX03537