Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. G... D... et Mme B... E... épouse D..., agissant en leurs noms propres et en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs F... et C..., ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier de Lavaur à leur verser des provisions d'un montant total de 157 000 euros à valoir sur la réparation des préjudices qu'ils attribuent à une prise en charge fautive de l'accouchement de Mme D...
le 13 juin 2012.
Dans la même instance, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Tarn a demandé au tribunal de condamner le centre hospitalier de Lavaur à lui verser la somme
de 15 955,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 29 septembre 2016.
Par un jugement n° 1603816 du 7 février 2019, le tribunal a condamné le centre hospitalier de Lavaur à verser à M. et Mme D... les sommes de 9 849,21 au titre des préjudices de F..., de 4 000 euros chacun au titre des troubles dans leurs conditions d'existence et de leur préjudice moral et de 2 000 euros au titre du préjudice moral de C..., à verser à Mme D... la somme de 2 000 euros au titre de son préjudice d'impréparation, et à la CPAM du Tarn la somme de 15 955,13 euros avec intérêts au taux légal à compter du 20 mars 2018. Ce jugement a également mis 1 680 euros de frais d'expertise à la charge du centre hospitalier de Lavaur.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 25 mars 2019 et des mémoires enregistrés les 12 janvier, 15 avril et 26 mai 2021, M. D... et Mme E... ex-épouse D..., représentés par la SELARL Jurismedica Avocats, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :
1°) de réformer ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de leurs demandes ;
2°) de condamner le centre hospitalier de Lavaur à leur verser :
- à titre principal, dans l'attente de la consolidation de l'état de santé de F..., les sommes provisionnelles de 70 000 euros au titre des préjudices de F..., de 6 000 euros au titre de leur préjudice financier, de 15 000 euros chacun au titre de leurs préjudices personnels, de 6 000 euros au titre du préjudice moral de C..., et de 5 000 euros à Mme E... au titre de son préjudice d'impréparation, avec intérêts à compter de l'arrêt à intervenir ;
- à titre subsidiaire, si la cour entendait procéder comme le tribunal administratif, les sommes de 82 754,21 euros au titre des préjudices de F..., de 4 259,50 euros au titre de leur préjudice financier, de 15 000 euros chacun au titre de leurs préjudices personnels, de 6 000 euros au titre du préjudice moral de C... et de 5 000 euros au titre du préjudice d'impréparation de Mme E..., avec intérêts à compter de l'arrêt à intervenir ;
- à titre infiniment subsidiaire, au cas où la cour statuerait sur les préjudices définitifs au vu du second rapport d'expertise, les sommes de 235 561,33 euros au titre des préjudices de F... à l'exception du préjudice professionnel, de l'assistance d'une tierce personne au-delà du 13 juin 2030 et des préjudices sexuel et d'établissement, sur lesquels il devra être sursis à statuer, de 15 000 euros à chacun des parents au titre de leurs préjudices personnels, de 6 000 euros au titre du préjudice moral de C..., de 4 991,14 euros au titre du préjudice financier de M. D... et Mme E..., et à Mme E... de 37 219,76 euros au titre des pertes de revenus et de 5 000 euros au titre du préjudice d'impréparation, avec intérêts à compter de l'arrêt à intervenir ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Lavaur les dépens incluant 2 880 euros de frais d'expertise médicale ainsi qu'une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils sollicitent à titre principal l'allocation de sommes provisionnelles ; ils ont présenté une nouvelle réclamation au centre hospitalier de Lavaur après l'expertise réalisée
le 5 novembre 2020 pour l'indemnisation définitive des préjudices et ne souhaitent pas renoncer au bénéfice du double degré de juridiction ;
En ce qui concerne les préjudices de F... :
- ils ont exposé 840 euros de dépassements d'honoraires et de séances d'ostéopathie ;
- ils sont fondés à solliciter une somme provisionnelle de 10 000 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire jusqu'aux trois ans de l'enfant sur la base de 25 euros par jour pour un déficit de 100 % et d'un taux de 40 % compte tenu de l'état du membre supérieur gauche avant l'intervention du 21 novembre 2012, du port d'un plâtre-corset durant 20 jours après cette intervention et du déficit constaté le 3 février 2015 lors de l'expertise ;
- les premiers experts ont retenu la nécessité d'une assistance particulière par les parents, excédant l'aide naturelle, d'une heure par jour, de sorte qu'ils peuvent prétendre à une somme de 58 765 euros de la naissance aux sept ans de l'enfant sur la base de 23 euros par heure ;
- ils ont exposé de 2 199,21 euros de frais divers dont 252 euros pour une coque de nuit après l'intervention du 21 novembre 2012, 447,72 euros de forfait hospitalier et 1 500 euros d'honoraires d'assistance à l'expertise ;
- les souffrances endurées peuvent être évaluées à 30 000 euros pour une paralysie du plexus ;
- le préjudice esthétique temporaire peut être évalué à 6 000 euros du fait des cicatrices et de l'amyotrophie, et le préjudice d'agrément à 3 000 euros en raison de l'impossibilité d'exercer toute activité sportive nécessitant l'utilisation des deux bras ;
- ils sont ainsi fondés à demander une somme provisionnelle de 70 000 euros à valoir sur l'indemnisation des préjudices de F... ;
En ce qui concerne les préjudices des victimes indirectes :
- la somme de 4 000 euros allouée à chacun des parents au titre de leur préjudice d'affection est insuffisante ; ils sont fondés à demander une provision de 10 000 euros chacun ;
- la somme de 2 000 euros allouée à C... est insuffisante ; ils sollicitent une provision de 6 000 euros compte tenu des répercussions du lourd handicap de F... sur les conditions d'existence de sa sœur aînée ;
- les parents sont fondés à demander une somme provisionnelle de 5 000 euros chacun au titre des troubles dans leurs conditions d'existence ;
- alors même qu'ils ne sont pas en mesure de présenter des pièces justificatives, ils ont exposé 76,96 euros pour deux déplacements à Toulouse, 353,98 euros pour trois déplacements de l'enfant et d'un accompagnant à Paris, et 2 974,40 euros pour les séances de kinésithérapie à raison de deux déplacements de 20 km par semaine durant 143 semaines d'octobre 2012 à juin 2015 ; le médecin traitant ayant indiqué que la natation était la meilleure rééducation pour améliorer le handicap de F..., ils sont fondés à demander 330 euros de frais d'abonnement à un club de bébés nageurs et 524,16 euros de frais de déplacement pour 3 trimestres ; ils sont ainsi fondés à solliciter une provision de 6 000 euros au titre de leur préjudice financier ;
- à titre subsidiaire, si la cour estimait, comme l'a fait le tribunal, qu'il est possible de statuer définitivement sur les préjudices subis du 13 juin 2012 au dépôt du rapport d'expertise le 21 mai 2016, ils sollicitent les sommes de 1 088,28 euros au titre des dépenses de santé actuelles, de 10 950 euros au titre de 1 095 jours de déficit fonctionnel temporaire, de 58 765 euros au titre de l'assistance d'une tierce personne, de 2 199,21 euros au titre des frais divers, de 10 000 euros au titre des souffrances endurées et des préjudices esthétique et d'agrément temporaires, de 10 000 euros à chacun des parents au titre de leur préjudice d'affection, de 6 000 euros au titre du préjudice d'affection de C..., de 5 000 euros à chacun des parents au titre des troubles dans leurs conditions d'existence et de 4 689,41 euros au titre du préjudice économique des parents ;
En ce qui concerne le préjudice d'impréparation de Mme E... :
- Mme E..., qui n'avait pas connaissance des risques induits par la macrosomie de l'enfant, n'a pas pu choisir la méthode d'accouchement et n'a pas pu se préparer aux complications survenues et à leurs conséquences ; elle est fondée à demander la réparation de ce préjudice à hauteur de 5 000 euros;
- à titre infiniment subsidiaire, si la cour estimait devoir statuer sur l'indemnisation définitive des préjudices après la seconde expertise, ils sollicitent les sommes de 1 088,28 euros au titre des dépenses de santé actuelles, de 4 689,41 euros au titre des frais divers, de 83 293,68 euros au titre de l'aide d'une tierce personne, de 20 391,75 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire, de 20 000 euros au titre des souffrances endurées, de 2 000 euros au titre du préjudice esthétique temporaire, de 70 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent, de 4 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent, de 30 000 euros au titre du préjudice d'agrément, de 15 000 euros à chacun des parents au titre de leur préjudice d'affection et des troubles dans leurs conditions d'existence, de 4 991,14 au titre des frais de déplacement, de 37 219,76 euros à Mme E... au titre de ses pertes de revenus, de 6 000 euros au titre du préjudice d'affection de C... et de 5 000 euros à Mme E... au titre du manquement à l'obligation d'information.
Par des mémoires enregistrés les 24 juin 2019, 15 septembre 2020, 20 avril 2021 et 2 juin 2021, la CPAM du Tarn, représentée par la SCPI Rastoul, Fontanier, Combarel, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures, de confirmer le jugement en tant qu'il a condamné le centre hospitalier de Lavaur à lui verser la somme de 15 955,13 euros avec intérêts à compter du 20 mars 2018, de condamner le centre hospitalier à lui verser une somme complémentaire
de 4 323,27 euros au titre du surplus de ses débours avec intérêts à compter du 20 avril 2021 ou à titre subsidiaire de réserver ses droits, et de mettre à la charge du centre hospitalier de Lavaur une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'imputabilité de ses débours est attestée par son médecin conseil ;
- si la cour estimait de pas devoir faire droit à sa demande de remboursement intégral, elle sollicite la réservation de ses droits pour le surplus de 4 323,27 euros de ses débours arrêtés au 10 février 2021.
Par des mémoires en défense enregistrés les 18 mars 2020, 29 avril 2021 et 7 juin 2021, le centre hospitalier de Lavaur, représenté par Me Le Prado, conclut au rejet de la requête et de la demande de la CPAM du Tarn.
Il fait valoir que :
- M. et Mme D... ne peuvent solliciter pour la première fois en appel une majoration de leurs préjudices propres au-delà de la somme de 29 259,50 euros demandée en première instance et les préjudices de F... ne pourront être liquidés qu'à sa majorité, de sorte que les conclusions présentées à titre infiniment subsidiaire doivent être rejetées ;
- les sommes allouées par le tribunal à M. et Mme D... sont suffisantes ;
- l'existence d'un préjudice d'agrément n'est pas établie ;
- la notification de débours de la CPAM du 14 septembre 2016 faisait état d'une créance de 11 160,99 euros et non de 15 955,13 euros et l'attestation d'imputabilité du 19 mars 2018 ne comporte aucune précision chiffrée ; la créance actualisée en appel à 20 278,40 euros n'est pas justifiée dès lors que le relevé de débours et l'attestation d'imputabilité ne sont pas détaillés et que la liste d'actes codés produite le 2 juin 2021 ne permet pas de connaître la nature des actes concernés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme A...,
- les conclusions de Mme Gallier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Roson Vales, représentant M. D... et Mme E..., et de Me De Raisme, représentant le centre hospitalier de Lavaur.
Considérant ce qui suit
1. Le 13 juin 2012, Mme E... épouse D... a accouché par voie basse au centre hospitalier de Lavaur d'un garçon prénommé F..., d'un poids de 4,5 kg, dont l'extraction par ventouse s'est compliquée d'une dystocie nécessitant la réalisation de manœuvres obstétricales qui ont provoqué une lésion des nerfs du plexus brachial, à l'origine d'une paralysie du membre supérieur gauche de l'enfant. En l'absence de récupération spontanée, une greffe nerveuse a été réalisée le 21 novembre 2012. Par une ordonnance du 24 juillet 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, saisi par M. et Mme D..., a ordonné une expertise, réalisée le 3 février 2016, dont le rapport a conclu que l'absence de reconnaissance des facteurs de risque de macrosomie (poids du fœtus à terme supérieur à 4 kg) pendant la grossesse, le défaut de communication entre les praticiens et l'absence de vérification et de validation des données à l'arrivée à la maternité, ainsi que de décision appropriée lors de l'apparition de la dystocie au cours de l'accouchement, étaient à l'origine exclusive du dommage. En l'absence de réponse à leur réclamation préalable présentée le 24 juin 2016, M. et Mme D..., agissant en leurs noms propres et en qualité de représentants légaux de leurs enfants mineurs F... et C..., ont demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier de Lavaur à leur verser des indemnités provisionnelles d'un montant total de 157 000 euros à valoir sur l'indemnisation de leurs préjudices. Par un jugement du 7 février 2019, le tribunal administratif de Toulouse a condamné l'établissement hospitalier à leur verser les sommes
de 9 849,21 au titre des préjudices de F..., de 4 000 euros chacun au titre des troubles dans leurs conditions d'existence et de leur préjudice moral et de 2 000 euros au titre du préjudice moral de C... et à Mme D... la somme de 2 000 euros au titre de son préjudice d'impréparation. M. D... et Mme E..., désormais divorcés, relèvent appel de ce jugement en tant qu'il n'a pas fait droit à l'intégralité de leurs demandes, à l'exception de celles relatives au préjudice d'impréparation de M. D... et de F.... Le jugement a également mis les frais d'expertise de 1 680 euros à la charge du centre hospitalier de Lavaur et a condamné cet établissement à verser une somme de 15 955,13 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 mars 2018 à la CPAM du Tarn. Cette dernière demande en appel une somme complémentaire de 4 323,27 euros.
Sur la responsabilité :
2. Le centre hospitalier de Lavaur ne conteste pas sa responsabilité pour faute retenue par les premiers juges à raison de l'absence de diagnostic de la macrosomie du fœtus, d'une mauvaise utilisation de la ventouse et de la réalisation de manœuvres obstétricales qui ne respectaient pas l'ordre chronologique habituel prévu par les bonnes pratiques.
Sur l'appel de M. D... et Mme E... :
3. M. D... et Mme E..., qui ont présenté le 2 mars 2021 une nouvelle réclamation préalable au centre hospitalier de Lavaur en vue de l'indemnisation définitive des préjudices évalués par une seconde expertise réalisée le 5 novembre 2020, demandent à titre principal l'allocation de sommes provisionnelles dans le cadre du présent litige d'appel, relatif au jugement rendu sur les demandes d'allocations provisionnelles qu'ils avaient présentées dans l'attente de la réalisation de cette expertise. Seules des sommes non sérieusement contestables peuvent être mises à la charge du centre hospitalier à titre de provision.
En ce qui concerne les préjudices de F... :
4. La somme de 1 500 euros allouée au titre de l'assistance d'un médecin conseil pour l'expertise du 3 février 2016 n'est pas contestée.
5. Alors que le centre hospitalier de Lavaur fait valoir qu'une mutuelle a pu prendre en charge totalement ou partiellement les dépassements d'honoraires d'un chirurgien pour 500 euros et d'un anesthésiste pour 150 euros, M. D... et Mme E... ne produisent aucune pièce tendant à établir que ces sommes seraient effectivement restées à leur charge. Il en va de même pour le forfait hospitalier de 447,21 euros. Les frais d'ostéopathie allégués de 190 euros ne sont pas justifiés et le lien entre le handicap de F... et une inscription à un club de bébés nageurs n'est pas établi. Par suite, la provision sollicitée au titre des dépenses de santé et des frais liés au handicap doit être limitée à la somme non sérieusement contestable
de 252 euros exposée pour l'achat d'une coque de nuit.
6. La demande de provision relative à l'assistance d'une tierce personne porte sur la période allant de la naissance au septième anniversaire de F... le 13 juin 2019. Si la première expertise réalisée le 3 février 2016 a retenu une assistance particulière des parents d'une heure par jour au-delà de l'aide naturelle, en lien avec le handicap, elle n'en précise pas la nature, et l'enfant, alors seulement âgé de trois ans et sept mois, avait nécessairement besoin depuis sa naissance d'une assistance et d'une surveillance constantes. La seconde expertise réalisée le 5 novembre 2020, postérieurement au jugement, retient un besoin de 45 minutes par jour depuis la précédente expertise et jusqu'à la consolidation à l'âge de huit ans. Il résulte de l'instruction que l'aide était nécessaire du fait que F... prenait beaucoup plus de temps que les autres enfants de son âge pour la toilette, l'habillage et les repas. Un enfant ne pouvant être regardé comme autonome avant l'âge de quatre ans pour ces gestes de la vie quotidienne, il y a lieu d'évaluer le besoin d'assistance à 45 minutes par jour de quatre à sept ans, soit
du 13 juin 2016 au 13 juin 2019, sur la base de 13 euros par heure. Si le centre hospitalier de Lavaur fait valoir qu'il convient de déduire l'allocation pour l'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) et la prestation de compensation du handicap (PCH), il résulte de l'instruction que les parents de F... ont seulement perçu une AEEH de base de 132,61 euros par mois depuis le 1er janvier 2013. Par suite, la somme non sérieusement contestable devant être supportée
par le centre hospitalier de Lavaur à titre de provision au titre de la période du 13 juin 2016
au 13 juin 2019 peut être fixée à 5 900 euros.
7. M. D... et Mme E... sollicitent une provision de 10 000 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire pour la seule période allant de la naissance au troisième anniversaire de F... le 13 juin 2015. L'expertise postérieure au jugement retient un déficit fonctionnel total durant l'hospitalisation du 20 au 23 novembre 2012, de 50 %
du 24 novembre au 24 décembre 2012 et de 25 % le reste du temps. L'obligation de réparation non sérieusement contestable correspondant à ce préjudice ne saurait être inférieure
à 4 500 euros sur la base de 500 euros par mois de déficit fonctionnel total.
8. L'expertise réalisée le 5 novembre 2020, qui a fixé la date de consolidation de l'état de santé de F... au 23 juin 2020, a retenu des souffrances endurées de 4,5 sur 7 en raison de deux interventions suivies d'immobilisations, de l'astreinte aux soins, de la rééducation et du retentissement psychologique ainsi qu'un préjudice esthétique temporaire de 2 sur 7 et une gêne pour l'exercice de certaines activités sportives et de loisirs. Toutefois, le préjudice d'agrément temporaire relève des troubles de toute nature dans les conditions d'existence pris en compte au titre du déficit fonctionnel temporaire. L'obligation de réparation non sérieusement contestable au titre des souffrances endurées et du préjudice esthétique temporaire peut être évaluée globalement à 10 000 euros.
9. Il résulte de ce qui précède que la somme de 9 849,21 euros allouée à M. D... et Mme E... au titre des préjudices de F... doit être portée à titre de provision
à 22 152 euros.
En ce qui concerne les préjudices des parents et de la sœur de F... :
10. M. D... et Mme E... justifient avoir supporté 447,21 euros de frais de repas et d'hébergement pour accompagner F... lors de l'intervention réalisée à Paris le 21 novembre 2012. S'il résulte de l'instruction que le parcours de soins de l'enfant a nécessité deux déplacements à Toulouse et trois déplacements à Paris, il n'est pas établi que les frais correspondants seraient restés à la charge des parents dès lors que le centre hospitalier de Lavaur fait valoir que certains de ces déplacements ont pu été pris en charge par la sécurité sociale ou par une mutuelle et qu'aucun élément contraire n'est apporté. Les pièces du dossier ne permettent ni de connaître le nombre des séances de kinésithérapie, ni d'établir la distance alléguée de 20 kilomètres entre le domicile et le cabinet du kinésithérapeute ni le barème kilométrique applicable au véhicule utilisé. En l'état, seule la somme non sérieusement contestable de 447,21 euros peut être allouée à titre de provision à valoir sur les frais d'hébergement et de déplacement qualifiés par les requérants de préjudice financier.
11. Eu égard à la nature du handicap de F... et aux contraintes imposées à ses parents dans leur vie quotidienne, la somme de 4 000 euros chacun allouée à M. D... et Mme E... par les premiers juges n'apparaît pas insuffisante à titre de provision à valoir sur l'indemnisation des troubles dans leurs conditions d'existence et de leur préjudice d'affection.
12. M. D... et Mme E... n'apportent aucun élément factuel permettant de caractériser l'existence d'un préjudice d'affection de C..., âgée de 21 mois à la naissance de son jeune frère, ni de troubles dans ses conditions d'existence imputables au handicap modéré de F..., et le centre hospitalier de Lavaur ne présente pas d'appel incident. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que les premiers juges ont partiellement fait droit à leur demande de provision de 6 000 euros en leur allouant la somme de 2 000 euros en qualité de représentants légaux de C....
En ce qui concerne le préjudice d'impréparation de Mme E... :
13. Les premiers juges n'ont pas fait une insuffisante appréciation du préjudice d'impréparation de Mme E... en lui allouant à ce titre une somme de 2 000 euros, qui a le caractère d'une provision.
Sur les demandes de la CPAM du Tarn :
14. Si le centre hospitalier de Lavaur fait valoir, au demeurant sans présenter d'appel incident, que la CPAM du Tarn, qui avait produit en première instance un relevé de débours d'un montant de 11 160,99 euros au 14 septembre 2016, n'aurait pas justifié de la somme de 15 955,13 euros allouée par le jugement, la présentation difficilement lisible de la liste des frais correspondant à cette dernière somme, annexée à l'attestation d'imputabilité du médecin conseil du 19 mars 2018, est éclairée par le relevé de débours au 12 mars 2018 produit en appel. Ainsi, l'imputabilité des débours de 15 955,13 euros à la lésion des nerfs du plexus brachial lors de la naissance H... F... au centre hospitalier de Lavaur est établie.
15. En appel, la CPAM du Tarn demande le remboursement d'une somme complémentaire de 4 323,27 euros correspondant, ainsi qu'il résulte de la comparaison des relevés des débours au 12 mars 2018 et au 10 février 2021 ainsi que de l'attestation du médecin conseil du 11 janvier 2021, à l'hospitalisation et aux soins relatifs à l'intervention chirurgicale réalisée le 16 avril 2019, postérieurement au jugement, pour la libération antérieure et le transfert tendineux du trapèze inférieur sur le tendon de l'infra épineux afin d'améliorer les séquelles de la lésion des nerfs du plexus brachial. Par suite, il y a lieu de porter la somme allouée à la CPAM du Tarn de 15 955,13 euros à 20 278,40 euros.
Sur les intérêts :
16. Aux termes de l'article 1231-7 du code civil : " En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement (...) ". Il résulte de ces dispositions que même en l'absence de demande en ce sens et même lorsque le juge ne l'a pas explicitement prévu, tout jugement prononçant une condamnation à une indemnité fait courir les intérêts, du jour de son prononcé jusqu'à son exécution. Par suite, les conclusions de M. D... et Mme E... tendant à ce que les sommes qui leur sont allouées portent intérêts à compter de la date de l'arrêt sont dépourvues d'objet.
17. La CPAM du Tarn est fondée à demander les intérêts au taux légal sur la somme complémentaire de 4 323,27 euros à compter du 20 avril 2021, date d'enregistrement du mémoire par lequel elle a demandé à la cour de condamner le centre hospitalier de Lavaur à lui rembourser cette somme.
Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :
18. Le jugement attaqué a mis les frais de 1 680 euros de la première expertise réalisée le 3 février 2016 à la charge du centre hospitalier de Lavaur. Par une ordonnance du 28 janvier 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a mis à la charge de M. D... et Mme E... une somme de 1 200 euros au titre des frais et honoraires de la seconde expertise réalisée le 5 novembre 2020. Il y a lieu de mettre ces derniers frais à la charge du centre hospitalier.
19. Le centre hospitalier de Lavaur est la partie perdante en appel. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à sa charge, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, les sommes de 1 500 euros à verser à M. D... et Mme E... et de 800 euros à verser à la CPAM du Tarn.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme que le centre hospitalier de Lavaur a été condamné à verser à M. D... et Mme E... au titre des préjudices de F..., qui a le caractère d'une provision,
est portée de 9 849,21 euros à 22 152 euros.
Article 2 : Le centre hospitalier de Lavaur est condamné à verser à M. D... et Mme E... une provision de 447,21 euros au titre de leur préjudice financier.
Article 3 : La somme que le centre hospitalier de Lavaur a été condamné à verser à la CPAM
du Tarn est portée de 15 955,13 euros à 20 278,40 euros, avec intérêts sur la somme complémentaire de 4 323,27 euros à compter du 20 avril 2021.
Article 4 : Les frais et honoraires de la seconde expertise réalisée le 5 novembre 2020, liquidés
et taxés à la somme de 1 200 euros, sont mis à la charge du centre hospitalier de Lavaur.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 1603816 du 7 février 2019 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : Le centre hospitalier de Lavaur versera les sommes de 1 500 euros à M. D...
et Mme E... et de 800 euros à la CPAM du Tarn au titre de l'article L. 761-1 du code
de justice administrative.
Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... D..., à Mme B... E...,
au centre hospitalier de Lavaur et à la caisse primaire d'assurance maladie du Tarn.
Délibéré après l'audience du 28 septembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Brigitte Phémolant, présidente,
Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,
Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 octobre 2021.
La rapporteure,
Anne A...
La présidente,
Brigitte PhémolantLe greffier,
Fabrice Benoit
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX01169