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14/10/2021 | FRANCE | N°19BX01834

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 14 octobre 2021, 19BX01834


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 18 juillet 2016 par laquelle le recteur de l'académie de Poitiers a refusé de la titulariser, d'enjoindre au recteur de l'académie de Poitiers de la titulariser, subsidiairement de la réintégrer en qualité de stagiaire et enfin de condamner l'Etat à lui verser son traitement pour la période du 1er au 4 septembre 2016, ainsi que la somme de 35 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait du

refus de la titulariser.

Par un jugement n° 1700815 du 6 mars 2019, le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision du 18 juillet 2016 par laquelle le recteur de l'académie de Poitiers a refusé de la titulariser, d'enjoindre au recteur de l'académie de Poitiers de la titulariser, subsidiairement de la réintégrer en qualité de stagiaire et enfin de condamner l'Etat à lui verser son traitement pour la période du 1er au 4 septembre 2016, ainsi que la somme de 35 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait du refus de la titulariser.

Par un jugement n° 1700815 du 6 mars 2019, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa requête.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 mai 2019 et le 11 novembre 2020, Mme C..., représentée par Me Caijeo, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 6 mars 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 18 juillet 2016 du recteur de l'académie de Poitiers ;

3°) d'enjoindre au recteur de réexaminer sa situation et de la titulariser dans le corps des professeurs de lycée professionnel, à défaut de la réintégrer en tant que stagiaire ;

4°) de condamner l'Etat à lui verser la somme correspondant au solde de 4 jours non réglés durant son stage ainsi que la somme de 35 000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande de première instance :

- c'est à tort que le tribunal a considéré que ses conclusions à fin d'annulation étaient irrecevables ;

En ce qui concerne la décision attaquée :

- la décision de refus de titularisation est illégale en raison d'une procédure irrégulière ; le jury n'était pas régulièrement composé ; elle n'a pas obtenu communication du procès-verbal de la commission administrative paritaire et il n'a jamais été approuvé ; la commission administrative paritaire n'a pas été informée par l'administration des motifs du refus de titularisation ;

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions des articles 27 II de la loi du 11 janvier 1984 et 8 du décret du 25 août 1995 en l'absence de mesures propres à favoriser son intégration professionnelle, d'un accompagnement adapté et d'un bilan avec le rectorat préalablement au renouvellement du contrat ;

- l'administration n'a pas respecté les dispositions de l'article 6 sexies de la loi du 13 juillet 1983 et n'a pas mis en place les aménagements nécessaires de son poste de travail pour lui permettre notamment de suivre la formation universitaire parallèle dans de bonnes conditions ;

- en outre, le comportement de sa hiérarchie a entraîné une souffrance au travail ;

- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation en raison des conditions de déroulement de son stage et alors qu'elle a acquis l'ensemble des compétences requises pour les agents stagiaires exerçant des fonctions d'enseignement ;

En ce qui concerne ses demandes indemnitaires :

- elle a subi un préjudice tant en raison de l'illégalité fautive de la décision de refus de titularisation que de la discrimination dont elle a été victime en raison de son handicap et de la souffrance au travail dont elle a été victime ; son préjudice moral de ce fait s'élève à 35 000 euros ;

- elle est également fondée à obtenir le règlement de la somme correspondant aux intérêts moratoires capitalisés des 4 jours manquants de stage en raison de la non prise en compte de la totalité de ses 35 jours de congés maladie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 novembre 2020, le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- à titre principal, la demande de première instance était irrecevable car tardive ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par Mme C... à l'encontre de la décision de refus de titularisation ne sont pas fondés et aucune faute ne peut lui être reprochée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 ;

- le décret n° 92-1189 du 6 novembre 1992 ;

- le décret n° 95-979 du 25 août 1995 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christelle Brouard-Lucas,

- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public,

- et les observations de Me Caijeo, représentant Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre d'une reconversion à la suite d'un accident de travail, Mme C... a été recrutée comme professeur contractuel au sein de la section professionnelle du lycée Jean Monnet de Cognac durant les années scolaires 2012-2013 et 2013-2014. Le 1er septembre 2014, elle a été recrutée en qualité d'agent stagiaire pour une durée d'un an sur le fondement des dispositions de l'article 27 II de la loi du 11 janvier 1984 et du décret du 25 août 1995 relatif aux bénéficiaires de l'obligation d'emploi. Elle a été affectée au lycée professionnel des métiers du Pays d'Aunis de Surgères comme professeur d'économie-gestion-vente, mais n'a pas été titularisée à l'issue de cette première année de stage, et son contrat a été renouvelé pour une durée d'un an à compter du 1er septembre 2015, avec une affectation au lycée professionnel Gilles Jamain à Rochefort. Par une décision du 18 juillet 2016, le recteur a refusé de la titulariser. Mme C... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler cette décision, d'enjoindre au recteur de la réintégrer et de condamner l'Etat à réparer les préjudices qu'elle estime avoir subi. Elle relève appel du jugement du tribunal administratif de Poitiers du 6 mars 2019 qui a rejeté ses demandes.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. D'une part, l'article R. 421-1 du code de justice administrative dispose que : " (...) la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". L'article R. 421-5 du même code précise que : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d 'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ".

3. L'administration n'est, aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative, tenue de faire figurer dans la notification de ses décisions que les délais et voies de recours contentieux ainsi que les délais de recours administratifs préalables obligatoires. Si elle peut y ajouter la mention des recours gracieux et hiérarchiques facultatifs, c'est à la condition toutefois qu'il n'en résulte pas des ambiguïtés de nature à induire en erreur les intéressés dans des conditions telles qu'ils pourraient se trouver privés du droit à un recours contentieux effectif.

4. D'autre part, un recours hiérarchique faisant suite à un recours gracieux ne peut conserver le délai de recours contentieux que lorsque ces deux recours ont été présentés dans le délai de recours contentieux.

5. Il ressort des pièces du dossier que la décision du 18 juillet 2016, par laquelle le recteur de l'académie de Poitiers a refusé de titulariser Mme C..., mentionne les voies et délais de recours. En précisant que si l'intéressée souhaitait " en cas de rejet du recours gracieux ou hiérarchique former un recours contentieux, ce recours gracieux ou hiérarchique devra avoir été introduit dans le délai sus-indiqué du recours contentieux ", ce qui conservait " la possibilité de former un recours contentieux dans un délai de deux mois à compter de la décision intervenue sur ledit recours gracieux ou hiérarchique ", cette décision ne comportait pas d'ambiguïté sur le fait que le délai de recours contentieux n'était conservé qu'en cas de recours gracieux et hiérarchiques alternatifs et non successifs et n'a pas été de nature à induire en erreur l'intéressée sur ce point. Or, Mme C... a d'abord exercé, par un courrier du 16 septembre 2016, un recours gracieux à l'encontre de cette décision, qui a été rejeté par une décision du 6 octobre 2016. Elle a ensuite exercé, par un courrier du 4 décembre 2016, un recours hiérarchique auquel elle a joint la décision du 6 octobre 2016. Il en résulte que Mme C... a ainsi nécessairement eu connaissance de cette décision au plus tard le 4 décembre 2016, date à laquelle le délai de recours contentieux qui avait été interrompu par le recours gracieux a recommencé à courir. Ce délai n'a pu être de nouveau interrompu par le recours hiérarchique. Par suite, les conclusions à fin d'annulation présentées le 30 mars 2017 devant le tribunal étaient tardives et donc irrecevables.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision de refus de titularisation ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction.

Sur les conclusions indemnitaires :

S'agissant du refus de titularisation :

7. Le II de l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat dispose que les bénéficiaires de l'obligation d'emploi instituée par l'article L. 323-2 du code du travail " peuvent être recrutés en qualité d'agent contractuel dans les emplois de catégories A, B et C pendant une période correspondant à la durée de stage prévue par le statut particulier du corps dans lequel elles ont vocation à être titularisées. Le contrat est renouvelable, pour une durée qui ne peut excéder la durée initiale du contrat. A l'issue de cette période, les intéressés sont titularisés sous réserve qu'ils remplissent les conditions d'aptitude pour l'exercice de la fonction. (...) Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application des deux alinéas précédents, notamment (...) les conditions du renouvellement éventuel du contrat, les modalités d'appréciation, avant la titularisation, de l'aptitude à exercer les fonctions. (...) ".

8. L'article 8 du décret du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique pris pour l'application de ces dispositions, dans sa rédaction applicable à la décision litigieuse, dispose : " A l'issue du contrat, l'appréciation de l'aptitude professionnelle de l'agent par l'autorité disposant du pouvoir de nomination est effectuée au vu du dossier de l'intéressé et après un entretien de celui-ci avec un jury organisé par l'administration chargée du recrutement. I. - Si l'agent est déclaré apte à exercer les fonctions, l'autorité administrative ayant pouvoir de nomination procède à sa titularisation après avis de la commission administrative paritaire du corps concerné. (...) II. - Si l'agent, sans s'être révélé inapte à exercer ses fonctions, n'a pas fait la preuve de capacités professionnelles suffisantes, l'autorité administrative ayant pouvoir de nomination prononce le renouvellement du contrat pour la période prévue à l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 susvisée, après avis de la commission administrative paritaire du corps au sein duquel l'agent a vocation à être titularisé. Une évaluation des compétences de l'intéressé est effectuée de façon à favoriser son intégration professionnelle. (...) III. - Si l'appréciation de l'aptitude de l'agent ne permet pas d'envisager qu'il puisse faire preuve de capacités professionnelles suffisantes, le contrat n'est pas renouvelé, après avis de la commission administrative paritaire du corps concerné. (...) IV. - Lorsque l'agent a suivi la formation initiale prévue par le statut particulier du corps dans lequel il a vocation à être titularisé, il subit les épreuves imposées aux fonctionnaires stagiaires du corps avant leur titularisation, dans les mêmes conditions, sous réserve des aménagements éventuels imposés par son handicap. L'appréciation de son aptitude professionnelle est assurée par le jury désigné pour apprécier l'aptitude professionnelle des élèves de l'école, auquel est adjoint un représentant de l'autorité administrative ayant pouvoir de nomination ainsi qu'une personne compétente en matière d'insertion professionnelle des personnes handicapées. Cette appréciation est faite à la fin de sa scolarité. Au vu de l'appréciation de l'aptitude professionnelle de l'agent, il lui est fait application soit du I, soit du II, soit du III du présent article. (...) ".

9. L'article 10 du décret du 6 novembre 1992 relatif au statut particulier des professeurs de lycée professionnel, dans sa rédaction applicable à la décision litigieuse, dispose que : " (...) Le stage a une durée d'un an. Au cours de leur stage, les professeurs stagiaires bénéficient d'une formation organisée, dans le cadre des orientations définies par l'Etat, par un établissement d'enseignement supérieur, visant l'acquisition des compétences nécessaires à l'exercice du métier. Cette formation alterne des périodes de mise en situation professionnelle dans un établissement scolaire et des périodes de formation au sein de l'établissement d'enseignement supérieur. Elle est accompagnée d'un tutorat et peut être adaptée pour tenir compte du parcours antérieur des professeurs stagiaires. Les modalités du stage et les conditions de son évaluation par un jury sont arrêtées conjointement par le ministre chargé de l'éducation et par le ministre chargé de la fonction publique. A l'issue du stage, la titularisation est prononcée par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle le stage est accompli, sur proposition du jury. La titularisation confère le certificat d'aptitude au professorat de lycée professionnel. Le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle le stage a été effectué peut autoriser l'accomplissement d'une seconde année de stage. A l'issue de cette période, l'intéressé est soit titularisé par le recteur de l'académie dans le ressort de laquelle il a effectué cette seconde année, soit licencié, soit réintégré dans son grade d'origine ou dans son corps, cadre d'emplois ou emploi d'origine ".

10. En premier lieu, alors qu'il résulte de l'instruction que Mme A..., dont aucune pièce du dossier ne permet de remettre en cause la qualité de correspondant handicap du rectorat, a siégé lors des réunions du jury du 18 juin 2015 et du 16 juin 2016, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la composition de ce jury était irrégulière en l'absence de personne compétente en matière d'insertion professionnelle des personnes handicapées, conformément au IV de l'article 8 du décret du 25 août 1995.

11. En second lieu, il résulte de l'instruction que la commission administrative paritaire a examiné la situation de Mme C... lors de sa séance du 28 juin 2016 et il ressort du procès-verbal de cette séance que la commission a été informée des motifs du refus de l'administration, qui ont pu être discutés avant qu'un avis, au demeurant favorable à la requérante, ne soit émis. Les circonstances que la communication du procès-verbal de la commission administrative paritaire et son approbation ont été effectuées tardivement est sans incidence sur la légalité de la décision portant refus de titularisation dès lors que la garantie prévue par les textes que constitue l'examen de la situation de la candidate par la commission administrative paritaire a bien été respectée. Dès lors, le moyen tiré de l'irrégularité, pour ce motif, de la procédure doit être écarté.

12. En troisième lieu, si la nomination dans un corps en tant que fonctionnaire stagiaire confère à son bénéficiaire le droit d'effectuer un stage dans la limite de la durée maximale prévue par les règlements qui lui sont applicables, elle ne lui confère aucun droit à être titularisé. Ainsi, la décision refusant de le titulariser à l'issue du stage n'a pour effet, ni de refuser à l'intéressé un avantage qui constituerait pour lui un droit ni, dès lors que le stage a été accompli dans la totalité de la durée prévue par la décision de nomination comme stagiaire, de retirer ou d'abroger une décision créatrice de droits. Une telle décision n'est, dès lors, pas au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

13. En quatrième lieu, il résulte des dispositions rappelées aux point 7 à 9 que, si un agent recruté sur le fondement de l'article 27 de la loi du 11 janvier 1984 et dont le contrat a été renouvelé sur le fondement du II de l'article 8 du décret du 25 août 1995 peut faire l'objet, à l'issue de la période complémentaire d'exécution de son contrat, d'un refus de titularisation et, par suite, d'un licenciement, c'est seulement dans le cas où, malgré les mesures prises pour favoriser son intégration professionnelle après qu'il a été procédé à une évaluation de ses compétences, il apparaît en définitive inapte à exercer ses fonctions.

14. Il résulte de l'instruction que lors du renouvellement de son contrat de travail, Mme C... a fait l'objet d'un changement d'établissement d'affectation pour tenir compte des préconisations du médecin du travail et lui assurer des conditions de travail matérielles et relationnelles adaptées. Il résulte également de l'instruction qu'elle a fait l'objet d'un suivi de la part de l'inspection de l'éducation nationale et de sa tutrice dont le rapport mentionne, pour chaque trimestre, les axes de travail, les actions mises en œuvre par le tuteur et l'aide apportée, les actions mises en œuvre par le stagiaire ainsi que les évolutions et résultats observés. En outre, durant cette seconde année, l'aménagement de son emploi du temps sur deux jours a été mis en place ainsi qu'une affectation dans un établissement situé dans un secteur géographique proche de Rochefort ou de Royan, conformément aux préconisations faites par le médecin de l'éducation nationale le 27 mai 2015 et la requérante, qui n'a présenté aucune demande en cours d'année, ne soutient ni même n'allègue que les autres préconisations tenant à ce que trois demi-journées par semaine soit libérées et à ce que les classes soient situées au rez-de-chaussée ou desservies par un ascenseur n'auraient pas été respectées. Ainsi, alors que l'évaluation des compétences à l'issue de la première année n'est enfermée dans aucun formalisme et que Mme C... se borne à soutenir, sans précision sur les mesures supplémentaires qui auraient dû selon elle être mises en œuvre, qu'aucun dispositif d'accompagnement spécifique n'a été mis en place lors du renouvellement de son contrat, il ne peut être regardé comme établi que le recteur n'aurait pas pris les mesures de nature à favoriser son intégration professionnelle dans le cadre de la prolongation de son stage.

15. En cinquième lieu, il résulte de l'instruction que le jury a émis un avis défavorable à la titularisation de Mme C... au motif qu'elle ne maîtrisait pas les compétences indispensables au métier d'enseignant en raison d'une absence de maîtrise des contenus disciplinaires, de difficultés de positionnement avec les élèves et de pratiques pédagogiques inadaptées au public pris en charge. Si les évaluations réalisées à mi-stage par les inspecteurs d'académie étaient encourageantes, elles contenaient tout de même des réserves et des axes de progrès et les rapports des deux inspections finales, réalisées par deux inspecteurs d'académie différents, font état de lacunes pédagogiques et de l'incapacité de Mme C... à prendre en compte les conseils qui lui ont été prodigués et à s'adapter aux caractéristiques des élèves qu'elle prend en charge. Les avis des chefs d'établissement et de ses tutrices étaient également défavorables à l'issue des deux années, et s'il résulte de l'instruction que les relations avec la tutrice de première année étaient tendues, le rapport établi par la tutrice de seconde année fait également état de réelles difficultés s'agissant des méthodes pédagogiques, de la maîtrise du référentiel, de son positionnement personnel et de son aptitude à se remettre en question. Ainsi, alors que les attestations de collègues et d'élèves produites par la requérante, qui portent pour leur grande majorité sur la période antérieure à ses deux années de stage, ne sont pas de nature à remettre en cause ces évaluations précises et circonstanciées, le moyen tiré de ce que la décision de refus de titularisation serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté.

S'agissant de la discrimination et de la souffrance au travail :

16. L'article 4 de la loi du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations dispose que : " Toute personne qui s'estime victime d'une discrimination directe ou indirecte présente devant la juridiction compétente les faits qui permettent d'en présumer l'existence. Au vu de ces éléments, il appartient à la partie défenderesse de prouver que la mesure en cause est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. (...) ".

17. Il résulte de l'instruction, et notamment des évaluations qui ont été réalisées par les inspecteurs de l'éducation nationale et les tuteurs, des délibérations du jury et du procès-verbal de la commission administrative paritaire, que les motifs de la décision en litige reposent exclusivement sur les compétences professionnelles insuffisantes de Mme C... à l'issue de la première comme de la seconde année d'exercice des fonctions d'enseignante. A cet égard, d'une part, aucun élément du dossier ne permet d'établir que le jury aurait interrogé Mme C... sur son état de santé et, d'autre part, aucun élément du dossier ne permet d'établir que les difficultés pédagogiques et relationnelles qui lui sont reprochées seraient en lien avec son handicap. Il résulte également de l'instruction que le refus de la demande d'aménagement de son temps d'enseignement sur deux jours au lieu de trois lors de sa première année de contrat était justifié par l'intérêt du service et qu'il lui a été proposé en lieu et place un allègement de ses obligations d'enseignement à hauteur d'une journée qu'elle a refusé. En outre, ainsi qu'il a été dit au point 14, les préconisations du médecin de l'éducation nationale du 27 mai 2015 concernant les adaptations de son poste de travail ont été mises en place durant la seconde année de contrat. Ainsi, alors que les conditions de travail de l'intéressée ont été adaptées pour tenir compte de son handicap et que les éléments objectifs relatifs à la pratique de Mme C... justifiaient le refus de la titulariser, l'existence d'une alerte réalisée par le chef d'établissement et l'inspecteur du travail auprès du médecin de l'éducation nationale ainsi que la référence à des " difficultés physiques " dans l'avis défavorable du chef d'établissement ne permettent pas de considérer qu'elle aurait été victime de discrimination en raison de son état de santé.

18. Enfin, la seule circonstance que plusieurs enseignants aient exprimé une souffrance au travail, signalée par le médecin de prévention, en raison du comportement de l'inspectrice qui a procédé à une visite d'inspection de Mme C... lors de la première année de contrat ne permet pas de présumer que cette dernière a elle-même été victime d'agissements de harcèlement moral. Cette allégation n'est pas davantage corroborée par les termes employés par cette inspectrice dans ses rapports ou dans le courrier électronique dont se prévaut la requérante. L'existence d'une souffrance au travail de ce fait n'est ainsi pas caractérisée.

S'agissant de la demande de versement de quatre jours de traitement :

19. Mme C..., qui au demeurant n'a présenté aucune réclamation préalable à cette fin, procède par simples affirmations mais ne produit aucun élément permettant de considérer qu'il y aurait eu une erreur, en ce qui concerne le versement de son traitement, dans la prise en compte de ses jours d'arrêt maladie sur la période du 1er au 4 septembre 2017.

20. Il résulte de tout ce qui précède qu'en l'absence de faute de l'administration, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes indemnitaires.

Sur les frais liés à l'instance :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme C... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

Délibéré après l'audience du 16 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Hardy, présidente,

Mme Fabienne Zuccarello, présidente assesseure,

Mme Christelle Brouard-Lucas, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 14 octobre 2021.

La rapporteure,

Christelle Brouard-LucasLa présidente,

Marianne Hardy

La greffière,

Sophie Lecarpentier

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 19BX01834 3


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19BX01834
Date de la décision : 14/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Entrée en service - Nominations - Titularisation.

Procédure - Introduction de l'instance - Délais - Point de départ des délais - Notification.


Composition du Tribunal
Président : Mme HARDY
Rapporteur ?: Mme Christelle BROUARD-LUCAS
Rapporteur public ?: M. ROUSSEL
Avocat(s) : CAIJEO 1

Origine de la décision
Date de l'import : 26/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-10-14;19bx01834 ?
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