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17/09/2021 | FRANCE | N°20BX03764

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 17 septembre 2021, 20BX03764


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

1. M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 10 février 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2000914 du 12 juin 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

2. Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de

Bordeaux d'annuler l'arrêté du 10 février 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

1. M. B... E... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 10 février 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2000914 du 12 juin 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

2. Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 10 février 2020 par lequel la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2003051 du 18 novembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 17 novembre 2020 sous le n° 20BX03764, M. E..., représenté par Me Trebesses, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2000914 du tribunal administratif de Bordeaux du 12 juin 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 10 février 2020 le concernant ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 80 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte et lui délivrer dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la régularité du jugement :

- en méconnaissance de l'article R. 611-10 du code de justice administrative, le tribunal administratif a omis de lui communiquer la décision contestée dont elle a reçu communication le 9 mars 2020 par le préfet à la suite d'une mesure d'instruction en date du 5 mars 2020 ;

En ce qui concerne l'arrêté contesté :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé dès lors que la motivation quant à la possibilité de retour sans risque pour sa vie au Nigéria est stéréotypée et lacunaire ;

- la préfète n'a pas exercé son pouvoir discrétionnaire dès lors qu'elle s'est bornée à faire état du rejet de sa demande d'asile ;

- l'arrêté contesté est entaché d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il vit en couple avec une compatriote qui a bénéficié d'un titre de séjour au titre de son état de santé du 23 février 2017 au 22 février 2018 puis de récépissés de demande de renouvellement de titre de séjour.

Par un mémoire en défense et des pièces, enregistrés le 26 mars 2021 et le 7 juin 2021, la préfète de la Gironde conclut aux fins que la cour prononce un non-lieu à statuer.

Elle fait valoir que par un arrêté du 8 juin 2020 qu'elle joint, la décision contestée d'obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de renvoi a été abrogée.

M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 08 octobre 2020.

II. Par une requête, enregistrée le 5 avril 2021 sous le n° 21BX01414, Mme C..., représentée par Me Trebesses, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 2003051 du tribunal administratif de Bordeaux du 18 novembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 10 février 2020 la concernant ;

3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 80 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte et lui délivrer dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que contrairement à ce qu'indique la préfète dans l'acte contesté, le rapport médical de son médecin a bien été transmis à l'OFII en octobre 2019 ;

- l'arrêté contesté est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ;

- il a été pris au terme d'une procédure irrégulière en l'absence d'avis rendu par le collège de l'OFII alors que son médecin atteste de ce qu'il a envoyé un certificat médical la concernant à la préfecture ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'elle vit en couple avec un compatriote avec lequel elle a eu deux enfants et qu'elle a bénéficié d'un titre de séjour au titre de son état de santé du 23 février 2017 au 22 février 2018 puis de récépissés de demande de renouvellement de titre de séjour.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 juin 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... E..., né le 17 octobre 1980, de nationalité nigériane, entré en France selon ses déclarations le 1er janvier 2015 et compagnon de Mme C..., a sollicité le bénéfice de l'asile le 3 mai 2018. Sa demande a été rejetée par une décision du 13 septembre 2018 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), confirmée par une décision du 28 mai 2020 de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). Par un arrêté du 10 février 2020, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. E... a demandé l'annulation de cet arrêté.

2. Mme C..., ressortissante nigériane née en 1990 et compagne de M. E..., déclare être entrée sur le territoire le 4 octobre 2013. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'OFPRA du 27 février 2015, confirmée par la CNDA le 16 février 2016. Elle a toutefois obtenu la délivrance, à raison de son état de santé, d'un titre de séjour valable du 23 février 2017 au 22 février 2018, dont elle a sollicité le renouvellement le 13 décembre 2017. Par un arrêté du 10 février 2020, dont elle demande l'annulation, la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi. Mme C... a demandé l'annulation de cet arrêté.

3. M. E... et Mme C... relèvent appel des jugements du 12 juin 2020 et du 18 novembre 2020, par lesquels le tribunal a rejeté leur demande tendant à l'annulation de ces arrêtés. Les requêtes de M. E... et de Mme C... enregistrées sous les numéros 20BX03764 et 21BX01414, présentent à juger des questions communes. Il y a lieu de les joindre pour qu'elles fassent l'objet d'un seul arrêt.

Sur la requête n° 20BX03764 :

En ce qui concerne l'étendue du litige :

4. Il ressort des pièces du dossier que par un arrêté du 8 juin 2020 produit à l'instance, la préfète de la Gironde a abrogé les décisions du 10 février 2020, qui n'ont pas été exécutées, portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination prises à l'encontre de M. E.... Par suite, le litige est dans cette mesure, est devenu sans objet.

En ce qui concerne la régularité du jugement du 12 juin 2020 :

5. Aux termes de l'article R. 611-10 du code de justice administrative : " Sous l'autorité du président de la chambre à laquelle il appartient et avec le concours du greffier de cette chambre, le rapporteur fixe, eu égard aux circonstances de l'affaire, le délai accordé aux parties pour produire leurs mémoires. Il peut demander aux parties, pour être jointes à la procédure contradictoire, toutes pièces ou tous documents utiles à la solution du litige. " Aux termes de l'article R. 776-18 du même code : " La requête est présentée en un seul exemplaire./ Lorsqu'elle est adressée par le moyen de l'application informatique mentionnée à l'article R. 414-1 ou par le téléservice mentionné à l'article R. 414-2, son auteur signale son urgence en sélectionnant le type de procédure dans la rubrique correspondante. /Les décisions attaquées sont produites par l'administration. "

6. Le requérant soutient qu'en méconnaissance du principe du contradictoire, il n'a pas eu communication de l'arrêté contesté du 10 février 2020 avant le 17 novembre 2020, date d'enregistrement de sa requête d'appel. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté en litige du 10 février 2020, bien que produit par le préfet au cours de l'instance devant le tribunal le 9 mars 2020, n'a pas été communiqué et que par ailleurs la préfète de la Gironde ne produit aucune preuve de la notification de cet arrêté à M. E.... Par suite M. E... est fondé pour ce motif à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité et à en demander l'annulation. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de M. E... en tant qu'elle concerne le refus de séjour opposé.

En ce qui concerne la légalité du refus de séjour :

7. En premier lieu, la préfète de la Gironde a, par arrêté du 12 septembre 2019, régulièrement publié le 13 septembre 2019 au recueil spécial des actes administratifs de la préfecture n° 33-2019-139 consultable sur le site internet de la préfecture, donné délégation à M. Thierry Suquet, secrétaire général de la préfecture, à l'effet de signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figure la police des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 10 février 2020 doit être écarté comme manquant en fait.

8. En deuxième lieu, la décision contestée vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, puis rappelle que l'OFPRA a refusé d'accorder à M. E... le statut de réfugié par une décision du 13 septembre 2018, confirmée par la CNDA, le 28 mai 2019, et expose des éléments de la situation personnelle du requérant, précise notamment que sa compagne fait l'objet d'un arrêté portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire concomitante et que ses deux enfants, bien que présents sur le territoire, n'ont pas droit au séjour, que la famille peut se reconstituer hors de France et qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, l'arrêté attaqué d'où il ressort que la préfète a procédé à un examen approfondi de la situation de l'intéressé, est suffisamment motivé.

9. En troisième lieu, il ne ressort pas des termes de l'arrêté contesté que la préfète de la Gironde aurait refusé de faire usage de son pouvoir discrétionnaire au seul motif qu'elle rappelle que le requérant a été débouté de sa demande d'admission au séjour au titre de l'asile par l'OFPRA et que cette décision a été confirmée par la Cour nationale du droit d'asile.

10. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

11. M. E... soutient qu'il réside en France depuis 2015 et qu'il est père de deux enfants nés en 2016 et 2018 en France. Toutefois les demandes d'asile de M. E... et de sa compagne Mme C..., compatriote, ont été définitivement rejetées par la CNDA et le couple fait l'objet d'une décision de refus de séjour du même jour. Si le requérant fait valoir que sa compagne a bénéficié d'un titre de séjour au titre de son état de santé valable du 23 février 2017 au 22 février 2018, il ressort de l'arrêté du 10 février 2021 pris à son encontre qu'il n'a pas été renouvelé. Par ailleurs, le requérant n'allègue ni n'établit avoir tissé des liens avec la France ni être dépourvu de liens au Nigéria où résident son frère et sa sœur et où la cellule familiale peut se reconstituer. Dans ces conditions M. E... n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la préfète de la Gironde aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en refusant de lui délivrer un titre de séjour ni qu'elle aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation sur la situation personnelle de l'intéressé.

12. En dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". M. E..., dont la demande d'asile a été définitivement rejetée par la CNDA, ne peut utilement se prévaloir à l'encontre du refus de séjour contesté qui n'implique pas par lui-même son éloignement, de la méconnaissance de ces stipulations et dispositions.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de refus de séjour contestée. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Sur la requête n° 21BX01414 :

14. En premier lieu, l'arrêté contesté vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il mentionne que l'OFPRA a refusé d'accorder à Mme C... le statut de réfugié et que ce refus a été confirmé par la CNDA, puis expose des éléments de sa situation familiale et personnelle au regard de son droit au séjour au titre de son état de santé ainsi que de sa situation familiale. Il précise ensuite, notamment, que le père de ses deux enfants, qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement concomitante, a également été débouté de sa demande d'asile, et que ses deux enfants, bien que présents sur le territoire, n'ont pas droit au séjour, que la famille peut se reconstituer hors de France et qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, l'arrêté attaqué d'où il ressort que la préfète a procédé à un examen approfondi de la situation de l'intéressée, est suffisamment motivé.

15. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 de ce code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 de ce même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...)". En vertu de l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 susvisé : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; / d) la durée prévisible du traitement. (...) ".

16. D'une part, il ressort des pièces du dossier que, ainsi que l'a rappelé le tribunal, à la suite de sa demande de renouvellement présentée le 13 décembre 2017, Mme C... a été convoquée en préfecture le 15 février 2019 et invitée à transmettre, par l'intermédiaire de son médecin habituel ou d'un praticien hospitalier, son dossier complet au collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). L'intéressée n'ayant pas satisfait à cette obligation, la préfecture de la Gironde lui a adressé un courrier en date du 8 octobre 2019 lui enjoignant de fournir au service médical de l'OFII l'ensemble de son dossier médical dans un délai de quinze jours. Si la requérante produit une attestation en date du 14 janvier 2020 par laquelle le psychiatre qui la suit affirme qu'il a rédigé et envoyé le certificat requis au cours du mois d'octobre 2019, il ressort des échanges qu'elle a eus par la suite avec l'Office et notamment du courrier qui lui a été adressé le 13 novembre 2019, que ce certificat n'a pas été réceptionné. Or Mme C... n'établit pas, alors qu'elle était pleinement informée de la situation, qu'elle aurait demandé alors, par l'intermédiaire de son médecin, d'effectuer les démarches nécessaires pour que le collège des médecins puisse se prononcer sur sa demande. Dans ces conditions, en dépit du fait qu'elle a été en possession d'un récépissé de demande de carte de séjour durant l'année 2019, elle n'est pas fondée à soutenir que la préfète de la Gironde a commis une erreur de fait ou une erreur d'appréciation en rejetant sa demande de renouvellement de son titre de séjour au motif que son dossier était incomplet.

17. D'autre part, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision de refus de séjour qu'elle conteste serait entachée d'un vice de procédure au motif que la préfète s'est prononcée sans avoir obtenu au préalable l'avis du collège des médecins de l'OFII.

18. En troisième lieu, Mme C... soutient qu'elle réside en France depuis 2013, qu'elle a deux enfants nés en 2016 et 2018 sur le territoire, et qu'elle souffre de pathologies nécessitant d'être soignée en France. Toutefois, les demandes d'asile de Mme C..., et du père de ses enfants, M. E..., ont été définitivement rejetées par la CNDA et les intéressés font l'objet d'un arrêté portant refus de titre de séjour du même jour. Si elle a bénéficié d'un titre de séjour à raison de son état de santé valable du 23 février 2017 au 22 février 2018, il ressort de ce qui a été indiqué au point 16 qu'elle a été considérée à bon droit, en l'absence de production d'un certificat médical, comme ayant renoncé au renouvellement de son titre sur ce fondement. Par ailleurs, la requérante n'allègue ni n'établit avoir tissé des liens avec la France ni être dépourvue de liens au Nigéria où elle a vécu jusqu'à l'âge de 23 ans et où la cellule familiale peut se reconstituer. Dans ces conditions, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que la décision contestée aurait porté une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la préfète de la Gironde aurait méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en prenant l'arrêté contesté ni qu'elle aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation sur la situation personnelle de l'intéressée.

19. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 2000914 de M. E... en tant qu'elles concernent la mesure d'obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi du 10 février 2020.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux n° 2000914 du 12 juin 2020 est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de la demande de M. E... tendant à l'annulation du refus de séjour du 10 février 2020.

Article 3 : La demande de M. E... tendant à l'annulation du refus de séjour qui lui a été opposé et le surplus de ses conclusions d'appel présentées dans sa requête n° 20BX03764 sont rejetés.

Article 4 : La requête n° 21BX01414 de Mme C... est rejetée.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E..., à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 31 août 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme Caroline D..., première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 septembre 2021.

La rapporteure,

Caroline D...

La présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX03764, 21BX01414


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX03764
Date de la décision : 17/09/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : TREBESSES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/09/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-09-17;20bx03764 ?
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