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13/07/2021 | FRANCE | N°21BX00567

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 13 juillet 2021, 21BX00567


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2019 par lequel le préfet du Tarn a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2000112 du 1er septembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 février 2021, M. C..., représ

enté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de To...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 25 octobre 2019 par lequel le préfet du Tarn a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2000112 du 1er septembre 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 février 2021, M. C..., représenté par Me E..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Tarn du 25 octobre 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Tarn de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêté à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et à défaut de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- les décisions de refus de séjour et d'éloignement sont entachées d'un défaut de motivation qui révèle un défaut d'examen particulier de sa situation ;

- la décision fixant le pays de renvoi est entachée d'un défaut de motivation en fait ;

- la décision de refus de séjour méconnaît l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- elle méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu notamment de son ancienneté de séjour en France et de son insertion professionnelle ;

- la décision d'éloignement est dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision fixant le pays de renvoi est dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité des décisions de refus de séjour et d'éloignement.

Par ordonnance du 7 avril 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 29 avril 2021.

Un mémoire présenté par le préfet du Tarn a été enregistré le 21 mai 2021.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 14 janvier 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code du travail ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant malien né le 1er janvier 1999, est entré en France, selon ses déclarations au mois d'août 2015. Après avoir fait l'objet d'une première mesure d'éloignement le 21 novembre 2017, il a sollicité, le 28 mai 2019, son " admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié ou étudiant ". Par un arrêté du 25 octobre 2019, le préfet du Tarn a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. C... relève appel du jugement du 1er septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. L'arrêté attaqué vise notamment les articles L. 313-10, L. 313-14 et L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il mentionne notamment que l'employeur de M. C... n'a pas fourni à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi les documents nécessaires à l'étude de la demande d'autorisation de travail, que l'intéressé n'apporte pas d'élément permettant d'apprécier des liens personnels et familiaux d'une particulière intensité et stabilité sur le territoire français et qu'en cas de non-respect du délai de retour volontaire qui lui a été accordé, il pourra être reconduit d'office à destination du Mali, pays dont il a la nationalité, ou de tout autre pays où il est légalement admissible. Dans ces conditions, les décisions de refus de séjour, d'éloignement et fixant le pays de renvoi comportent les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et sont, dès lors, suffisamment motivées, nonobstant la circonstance que leurs motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressé.

3. Cette motivation permet d'établir que le préfet du Tarn a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé.

4. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 (...) ". En présence d'une demande de régularisation présentée, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, par un étranger qui ne serait pas en situation de polygamie et dont la présence en France ne présenterait pas une menace pour l'ordre public, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire ".

5. M. C... soutient être entré en France en 2015 à l'âge de 16 ans. Il justifie avoir été pris en charge par les services de l'aide sociale à l'enfance et continuer à bénéficier d'un encadrement institutionnel depuis sa majorité grâce à un contrat d'accueil provisoire jeune majeur, renouvelé par le département du Tarn jusqu'au 31 décembre 2019. Il justifie également avoir obtenu un certificat d'aptitude professionnelle " Paysagiste " en juillet 2018 et poursuivre depuis le mois de septembre 2018 une formation en " mécanique espaces verts " qui se déroule dans le cadre d'un contrat d'apprentissage conclu pour la période allant du mois d'octobre 2019 au mois de juin 2020. S'il ressort des pièces du dossier, notamment d'un rapport éducatif de l'association l'hébergeant, que M. C... fournit des efforts pour s'intégrer, comme en témoigne son attestation de réussite à l'examen DELF A2 et qu'il s'investit dans son projet scolaire et professionnel, ainsi que les différents témoignages de son équipe éducative et de son employeur produits au dossier en attestent, il ne se prévaut d'aucune attache privée ou familiale sur le territoire français susceptible de permettre d'y situer son centre d'intérêt privé et familial. En particulier, alors que le préfet du Tarn a mentionné dans le mémoire en défense produit devant le tribunal que M. C... " aurait un frère et une soeur sur le territoire français ", le requérant ne se prévaut pas de leur présence en France ni d'aucun lien qu'il entretiendrait avec eux. Il est par ailleurs constant qu'une partie de la famille de M. C... vit au Mali et il ressort des pièces du dossier que l'intéressé n'a pas perdu contact avec eux depuis qu'il est arrivé en France, dès lors qu'il a pris l'attache de son père pour obtenir la copie d'un acte d'état civil. Dans ces conditions, nonobstant la durée de séjour en France de l'intéressé, au demeurant obtenue en méconnaissance d'une précédente mesure d'éloignement, et ses efforts d'intégration, le préfet du Tarn n'a pas méconnu les dispositions précitées en refusant de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

6. Aux termes de l'article R. 5221-20 du code du travail alors en vigueur : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes concourant au service public de l'emploi pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; / 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ; (...) / 3° le respect par l'employeur, l'utilisateur mentionné à l'article L. 1251-1 ou l'entreprise d'accueil de la législation relative au travail et à la protection sociale ; / 4° Le cas échéant, le respect par l'employeur, l'utilisateur, l'entreprise d'accueil ou le salarié des conditions réglementaires d'exercice de l'activité considérée ; / 5° Les conditions d'emploi et de rémunération offertes à l'étranger, qui sont comparables à celles des salariés occupant un emploi de même nature dans l'entreprise ou, à défaut, conformes aux rémunérations pratiquées sur le marché du travail pour l'emploi sollicité ; (...) ".

7. Pour refuser de délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " à M. C..., le préfet du Tarn a retenu que son employeur n'a pas fourni les documents nécessaires permettant d'étudier la demande d'autorisation de travail, soit une promesse d'embauche ou un projet de contrat de travail ou une attestation de l'établissement d'enseignement. Si le requérant produit au dossier des échanges de courriels entre son employeur et les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, ces documents ne sont pas de nature à établir que, contrairement à ce qu'indique l'avis défavorable émis par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi le 23 septembre 2019, l'ensemble des justificatifs nécessaires auraient été produits à l'administration en temps utile. Dans ces conditions, le préfet du Tarn n'a pas méconnu les dispositions précitées en refusant de délivrer à M. C... un titre de séjour portant la mention " salarié ".

8. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine.

9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5, les décisions de refus de séjour et d'éloignement ne méconnaissent pas les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne sont pas entachées d'une erreur manifeste dans l'appréciation de leurs conséquences sur la situation personnelle de M. C....

10. Les moyens dirigés contre la décision de refus de séjour ayant été écartés, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision d'éloignement serait dépourvue de base légale en raison de son illégalité. De la même manière, il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité des décisions de refus de séjour et d'éloignement au soutien de ses conclusions tendant à l'annulation de la décision fixant le pays de renvoi.

11. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Tarn du 25 octobre 2019. Par suite, sa requête ne peut qu'être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles à fin d'injonction et présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Tarn.

Délibéré après l'audience du 29 juin 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

Mme A... D..., conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 juillet 2021.

La rapporteure,

Kolia D...

La présidente,

Catherine Girault

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX00567


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX00567
Date de la décision : 13/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: Mme BEUVE-DUPUY
Avocat(s) : DIALEKTIK AVOCATS AARPI

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-07-13;21bx00567 ?
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