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13/07/2021 | FRANCE | N°21BX00223

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 2ème chambre, 13 juillet 2021, 21BX00223


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite du 28 février 2020 par laquelle la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour ainsi que l'arrêté du 16 juin 2020, s'étant substitué à cette décision implicite, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.

Par un jugement nos 2001923, 2004063 du 16 décembre 2

020, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cet arrêté du 16 juin 2020 et enjoi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite du 28 février 2020 par laquelle la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour ainsi que l'arrêté du 16 juin 2020, s'étant substitué à cette décision implicite, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.

Par un jugement nos 2001923, 2004063 du 16 décembre 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé cet arrêté du 16 juin 2020 et enjoint à la préfète de la Gironde de délivrer à M. C... une carte de séjour temporaire sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2021, la préfète de la Gironde demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Bordeaux ;

3°) de mettre à la charge de M. C... une somme de 800 euros au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative " et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ".

Elle soutient que :

- contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, M. C... ne contribue pas effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant ;

- s'agissant de sa contribution à l'entretien de l'enfant, l'intéressé ne se prévaut que de quelques tickets de caisse et de trois virements bancaires à la mère de l'enfant pour des montants de 50 à 100 euros ; c'est à tort que les premiers juges ont retenu que cette contribution était proportionnée à ses moyens alors qu'il ressort du procès-verbal de son audition par les services de police qu'il tire des revenus conséquents d'une activité professionnelle illégale ;

- s'agissant de la contribution de M. C... à l'éducation de son fils, une ordonnance d'homologation du tribunal judiciaire de Bordeaux du 6 février 2020 lui interdit de prendre contact avec la mère de son enfant et l'intéressé a été condamné à une peine de prison pour des faits de violence commis sur la mère de son fils alors qu'elle était enceinte, faits qui ont également conduit le juge des enfants à placer le jeune A... et sa demi-soeur dans une structure permettant l'accueil des mères et de leurs enfants ; M. C... a établi son domicile à plusieurs centaines de kilomètres de son fils et il n'a honoré qu'un nombre limité des visites médiatisées programmées dans un lieu neutre ;

- la situation personnelle et familiale de M. C... ne justifie pas qu'il soit admis au séjour sur le territoire français.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant marocain né en 1982, a sollicité le 28 octobre 2019 son admission au séjour sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La préfète de la Gironde relève appel du jugement du 16 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté du 16 juin 2020 refusant à M. C... la délivrance de ce titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable à la date de l'arrêté en cause : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ; (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. C... est le père d'un enfant français, le jeune A..., né le 22 juillet 2019 à Saint Flour, qu'il a reconnu par anticipation le 6 mars 2019. Il a produit devant les premiers juges la preuve de mandats réguliers au profit de la mère de son enfant d'un montant moyen d'une centaine d'euros, ainsi qu'un nombre conséquent de factures et de tickets de caisse, dont le caractère probant ne saurait être écarté au seul motif qu'ils ne sont pas nominatifs, justifiant que l'intéressé contribue effectivement à l'entretien de son fils. Si la préfète de la Gironde soutient que cette contribution est insuffisante au vu des ressources dont dispose l'intéressé, qui a déclaré lors d'une audition par les services de police au mois de septembre 2020 disposer d'un revenu mensuel de 1 400 à 1 500 euros, il ressort des pièces du dossier que l'emploi d'ouvrier agricole lui procurant de tels revenus ne lui a été proposé qu'à compter du 1er mars 2020, puis du 1er août 2020. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu que M. C... justifiait, à la date de l'arrêté en cause, contribuer à l'entretien de son fils à hauteur de ses moyens.

4. S'agissant de la contribution de M. C... à l'éducation de son fils, il ressort des pièces du dossier que le juge des enfants a décidé, le 30 juillet 2019, du placement du jeune A... et de sa demi-soeur dans le cadre d'un accueil " mère-enfants " via l'aide sociale à l'enfance pour une durée de six mois, après avoir constaté que " les mineurs concernés sont gravement en danger au domicile de M. C... " compte tenu du climat de violences qui y règne. Ce même jugement accorde à M. C... un droit de visite médiatisé sur A... en lieu neutre au moins une fois par semaine, pouvant évoluer si les conditions sont favorables vers un droit de visite libre, voire des droits de visite et d'hébergement. M. C..., qui explique résider à environ 300 kilomètres du foyer accueillant son fils et devoir s'y faire conduire par un ami faute d'être titulaire du permis de conduire, justifie par la production du planning de visite pour la période de novembre 2019 à avril 2020 avoir honoré la plupart des rendez-vous programmés durant une heure, un samedi sur deux. Par un jugement du 22 juin 2020, postérieur à l'arrêté en cause mais susceptible d'éclairer une situation de fait existante à sa date, le juge des enfants a retenu qu'en raison du confinement et de l'interdiction judiciaire de rencontre entre les deux parents, décidée par une ordonnance du 6 février 2020, les visites, qui se seraient bien déroulées, se sont interrompues mais que " dans l'intérêt supérieur de A..., il importe de préserver les liens père/enfant ". M. C... produit également une attestation de la mère de son enfant qui indique qu'il est en contact téléphonique quotidien avec son fils et qu'il se " préoccupe de son bien-être ". Compte tenu de ces éléments, de ce qu'il n'a pas été reproché à M. C... de violence dirigée contre son fils et au vu des circonstances particulières de l'espèce, c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu que M. C... justifiait contribuer à l'éducation de son fils.

5. Il résulte de ce qui précède que la préfète de la Gironde n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé son arrêté du 16 juin 2020. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions, y compris celles présentées au titre des frais exposés pour les besoins du litige.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la préfète de la Gironde est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. E... C.... Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.

Délibéré après l'audience du 29 juin 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

Mme B... D..., conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 juillet 2021.

La rapporteure,

Kolia D...

La présidente,

Catherine Girault

La greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 21BX00223


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX00223
Date de la décision : 13/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Kolia GALLIER
Rapporteur public ?: Mme BEUVE-DUPUY

Origine de la décision
Date de l'import : 03/08/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-07-13;21bx00223 ?
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