Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Tous Travaux de Métallerie a demandé au tribunal administratif de la Martinique d'annuler la décision du 13 août 2018 par laquelle la commune du Prêcheur a résilié le lot n° 1 " serrurerie-ferronnerie " du marché au terme duquel elle s'était vue confier, par acte d'engagement du 30 novembre 2015, des travaux de remise en état des garde-corps métalliques de la digue de " Four-à-Chaux " située sur le territoire de cette commune et d'ordonner la reprise des relations contractuelles.
Par un jugement n°1800633 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 29 novembre 2019 et 23 avril 2021 à 10H35, la société Tous Travaux de Métallerie, représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement;
2°) d'annuler la décision du 13 août 2018 ;
3°) d'ordonner la reprise des relations contractuelles ;
4°) de mettre à la charge de la commune du Prêcheur la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête d'appel est recevable ;
- la résiliation du marché à ses torts exclusifs est irrégulière, car le retard dans l'exécution de ses prestations ne lui est pas imputable ;
- il est imputable à la livraison tardive des supports destinés à recevoir ses ouvrages, qui étaient à la charge de la commune ;
- elle a exécuté les prestations alors même qu'elle n'a pas perçu l'avance forfaitaire de 5% prévue au démarrage des travaux et que la commune a tardé à lui payer des décomptes et qu'une partie des prestations demeure impayées ;
- une fois l'annulation de la décision de résiliation prononcée, elle est fondée à demander la reprise des relations contractuelles.
Par un mémoire enregistré le 4 février 2021, la commune du Prêcheur, représentée par Me A..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête de la société Tous Travaux de Métallerie ;
2°) de mettre à sa charge la somme de 3 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que la requête d'appel n'est pas recevable, car elle est insuffisamment motivée et qu'aucun des moyens n'est fondé.
Vu :
- les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C... B...,
et les conclusions de Mme Béatrice Molina-Andréo, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par acte d'engagement en date du 30 novembre 2015, la commune du Prêcheur a confié à la société Tous Travaux de Métallerie (TTM) la réalisation du lot n°1 " serrurerie-ferronnerie " du marché de travaux relatif à la remise en état des garde-corps métalliques de la digue de " Four-à-Chaux " située sur son territoire pour un montant de 87 623,20 euros TTC. La durée des travaux était prévue pour deux mois. Un avenant au marché pour un montant de 19 457,52 euros TTC a été signé le 20 mai 2016 pour répondre à la nécessité de changer les poteaux de fixation des garde-corps. En raison des retards constatés dans la réalisation des travaux, une mise en demeure datée du 7 août 2017 a été adressée à la société TTM. Enfin, en l'absence d'achèvement des travaux malgré la mise en demeure, la commune du Prêcheur a résilié le lot n° 1 du marché aux torts exclusifs de la société le 13 août 2018. La société TTM a contesté cette décision de résiliation devant le tribunal administratif de la Martinique et demandé la reprise des relations contractuelles. Elle relève appel du jugement du 3 octobre 2019 par lequel le tribunal administratif de la Martinique a rejeté sa demande.
2. Aux termes de l'article 46 du cahier des clauses administratives générales applicable au marché (CCAG-Travaux) : " 46-1 - Il peut être mis fin à l'exécution des travaux faisant l'objet du marché avant l'achèvement de ceux-ci, par une décision de résiliation du marché qui en fixe la date d'effet. (...). Aux termes de l'article 49 du même cahier : " 49-1 - (...) lorsque l'entrepreneur ne se conforme pas aux dispositions du marché ou aux ordres de service, le représentant du maître d'ouvrage le met en demeure d'y satisfaire dans un délai déterminé, par une décision qui lui est notifiée par écrit. / Ce délai, sauf en cas d'urgence, n'est pas inférieur à cinq jours à compter de la date de notification de la mise en demeure. / 49-2 - Passé ce délai, si l'entrepreneur n'a pas exécuté les dispositions prescrites, le représentant du maître d'ouvrage peut (...) prononcer la résiliation, sans indemnité, du marché (...) ". Aux termes de l'article 11.3.1.1 du cahier des clauses administratives particulières " Entraîneront la résiliation de plein droit : (...) aux torts de l'entrepreneur : (...) le fait de ne pas apporter à ses travaux la diligence nécessaire au respect du calendrier d'exécution, (...) l'abandon du chantier (...) ". Dans le cas ci-avant la résiliation pourra être prononcée par le maître d'ouvrage après, dans le cas de retard d'intervention ou d'abandon de chantier, mise en demeure (par simple recommandé avec avis de réception restée infructueuse dans le délai réputé recevable (...) ".
3. Le cocontractant lié à une personne publique par un contrat administratif est tenu d'en assurer l'exécution, sauf en cas de force majeure, et ne peut notamment pas se prévaloir des manquements ou défaillances de l'administration pour se soustraire à ses propres obligations contractuelles ou prendre l'initiative de résilier unilatéralement le contrat.
4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que la société TTM disposait d'un délai d'un mois de préparation du chantier et de deux mois pour réaliser l'ensemble des prestations prévues pour le lot n° 1 du marché de travaux de remise en état des garde-corps métalliques de la digue de " Four-à-Chaux " en application de l'article III de l'acte d'engagement du 30 novembre 2015 et de l'article 4.1 du cahier des clauses administratives particulières. L'ordre de service du 3 mars 2016, notifié à la société le jour-même, a fixé le point de départ du délai global contractuel au 18 avril 2016. Par ailleurs, la société TTM disposait également d'un délai de deux mois supplémentaires pour réaliser les prestations complémentaires en application de l'avenant du 20 mai 2016. Elle aurait dû ainsi finir ses prestations le 18 septembre 2016. Or, il résulte du rapport d'achèvement des travaux établi le 13 août 2018 par la commune du Prêcheur, que ses prestations n'étaient toujours pas achevées, car la société TTM avait seulement posé 84 mètres linéaires de garde-corps sur une totalité de 190 mètres linéaires. Compte-tenu de ce retard important dans l'exécution des travaux, de l'ordre de 23 mois, et de ses difficultés à pouvoir réaliser les prestations prévues malgré la mise en demeure qui lui a été adressée le 7 août 2017, la commune du Prêcheur a pu estimer que la société TTM n'était plus en mesure d'exécuter les prestations prévues par le marché dans le respect du calendrier d'exécution et décider, en raison de ces manquements à ses engagements contractuels, la résiliation à ses torts, le 13 août 2018, du marché litigieux.
5. En deuxième lieu, en application de la règle rappelée au point 3, la société TTM ne peut se prévaloir, pour expliquer l'inexécution de ses obligations contractuelles, de ce qu'elle n'aurait bénéficié d'aucune avance, ni des retards dans la livraison des supports destinés à recevoir les garde-corps, qui ne sont en tout état de cause pas établis, ni de ses défaillances dans le paiement de deux décomptes.
6. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée en défense par la commune du Prêcheur, que la société TTM n'est pas fondée à soutenir que la résiliation du contrat serait irrégulière et que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Martinique a rejeté son recours en contestation de la validité de la résiliation de son contrat et tendant à la reprise des relations contractuelles.
Sur les frais d'instance :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune du Prêcheur, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par la société TTM au titre des frais liés à l'instance. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société la somme de 1 500 euros à payer à la commune du Prêcheur sur le fondement des dispositions précitées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société TTM est rejetée.
Article 2 : La société TTM versera une somme de 1 500 euros à la commune du Prêcheur au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société TTM et à la commune du Prêcheur.
Délibéré après l'audience du 14 juin 2021 à laquelle siégeaient :
M. Didier Artus, président,
Mme Fabienne Zuccarello, présidente-assesseure,
Mme C... B..., première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 juillet 2021.
La rapporteure,
Déborah B...Le président,
Didier ARTUSLa greffière,
Sylvie HAYET
La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N°19BX004614 2