Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le préfet de la Gironde a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler le certificat d'urbanisme n° CU03351418S0130 que le maire de Soulac-sur-Maire a délivré à M. E... B... le 20 août 2018 pour un terrain situé allée Profonde au lieu-dit Lilhan en vue de la construction d'une maison d'habitation ainsi que la décision du 10 décembre 2018 par laquelle le maire a refusé de retirer cet arrêté.
Par un jugement n° 1900636 du 17 décembre 2019, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé le certificat d'urbanisme du 20 août 2018 et la décision du 10 décembre 2018.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 14 février 2020, la commune de Soulac-sur-Mer, représentée par le cabinet d'avocats C...-Cazcarra, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) de rejeter le déféré du préfet de la Gironde ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que le projet est conforme au principe d'extension de l'urbanisation en continuité avec les agglomérations et villages existants et, ainsi, conforme à l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 septembre 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- le projet méconnait les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dès lors qu'il se situe dans une zone d'urbanisation diffuse qui ne constitue ni un village ni une agglomération ;
- le classement de la parcelle par le schéma de cohérence territoriale et le plan local d'urbanisme est sans incidence sur la légalité du certificat d'urbanisme dès lors que celui-ci doit être conforme à la loi littoral ;
- la circonstance que des investissements ont été réalisés par la commune afin d'équiper le secteur en réseaux de voirie, d'éclairage public et d'assainissement des eaux usées et pluviales est sans incidence sur la légalité du projet.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D... A... ;
- les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public ;
- et les observations de Me C..., représentant la commune de Soulac-sur-Mer.
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 20 août 2018, le maire de Soulac-sur-Mer a délivré à M. B... un certificat d'urbanisme n° CU03351418S0130 pour le lot C de la parcelle cadastrée section D n° 441 située allée Profonde au lieu-dit Lilhan en vue de la construction d'une maison d'habitation. Par une lettre du 25 octobre 2018, le sous-préfet de Lesparre-Médoc a, dans le cadre du contrôle de légalité, formé un recours gracieux contre cette décision. Par un courrier du 10 décembre 2018, le maire de Soulac-sur-Mer a refusé de retirer ce certificat d'urbanisme. La commune de Soulac-sur-Mer relève appel du jugement du 17 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a annulé le certificat d'urbanisme du 20 août 2018, ainsi que la décision du 10 décembre 2018.
2. Aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme : " Les dispositions du présent chapitre déterminent les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres : 1° Dans les communes littorales définies à l'article L. 321-2 du code de l'environnement ; (...) ". L'article L. 121-3 du même code, dans sa version applicable à la date de la décision attaquée, dispose : " Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, aménagements, installations et travaux divers, la création de lotissements, l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes, l'établissement de clôtures, l'ouverture de carrières, la recherche et l'exploitation de minerais et les installations classées pour la protection de l'environnement. ". Aux termes de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision litigieuse : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. ".
3. Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages. L'exigence de continuité étant directement applicable aux autorisations d'occupation ou d'utilisation du sol, l'autorité administrative qui se prononce sur une demande d'autorisation d'urbanisme dans une commune littorale doit vérifier, à moins que le terrain d'assiette du projet soit situé dans une zone destinée à l'accueil d'un hameau nouveau intégré à l'environnement, si, à la date à laquelle elle statue, l'opération envisagée est réalisée " en continuité avec les agglomérations et villages existants ", et ce alors même que le plan local d'urbanisme, en compatibilité avec les orientations des schémas de cohérence territoriale et des schémas de secteur ou, en l'absence de ces schémas, avec les dispositions particulières au littoral du code de l'urbanisme, le cas échéant précisées par une directive territoriale d'aménagement ou par un document en tenant lieu, aurait ouvert à l'urbanisation la zone dans laquelle se situe le terrain d'assiette.
4. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est constitué par la parcelle cadastrée D n° 441 située allée Profonde au lieu-dit Le Lilhan sur le territoire de Soulac-sur-Mer, commune littorale au sens de l'article L. 321-2 du code de l'environnement. Ce secteur prend la forme d'un groupe d'une dizaine de maisons, distant de plus de deux kilomètres du centre-bourg de Soulac-sur-Mer, d'environ trois kilomètres du lieu-dit de l'Amélie et d'environ un kilomètre du lieu-dit Le Lilhan, au sein de vastes parcelles boisées. L'urbanisation dans ce secteur n'est pas caractérisée par une densité significative des constructions, au regard tant du faible nombre de constructions à usage d'habitation que des espaces vides de construction entourant la parcelle au sud et à l'ouest. La seule circonstance que la commune a engagé de lourds investissements afin d'équiper le secteur en réseaux de voirie, d'éclairage public et d'assainissement des eaux usées et pluviales n'est pas de nature à qualifier ce secteur d'espace urbanisé. Dans ces conditions, le projet envisagé, qui est situé dans une zone d'urbanisation diffuse, constitue une extension de l'urbanisation qui ne s'inscrit pas en continuité avec une agglomération ou un village existant, ni dans un hameau nouveau intégré à l'environnement. Par suite, dès lors que ce projet méconnait l'exigence de continuité fixée par les dispositions citées ci-dessus de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme, le maire ne pouvait légalement délivrer le certificat d'urbanisme en litige alors même que la parcelle est située en zone UD, d'urbanisation diffuse, du plan local d'urbanisme de la commune et qu'elle serait incluse dans un secteur défini comme constituant un espace urbanisé par le schéma de cohérence territoriale de la Pointe du Médoc. Dès lors, en accordant le certificat d'urbanisme litigieux, le maire de Soulac-sur-Mer a méconnu les dispositions de l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme ainsi que l'ont estimé à bon droit les premiers juges.
5. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Soulac-sur-Mer n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a annulé, à la demande du préfet de la Gironde, le certificat d'urbanisme délivré le 20 août 2018 à M. B... ainsi que la décision du 10 décembre 2018 par laquelle le maire a refusé de retirer ce certificat.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme sollicitée par la commune de Soulac-sur-Mer.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la commune de Soulac-sur-Mer est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à la commune de Soulac-sur-Mer et à M. E... B....
Copie en sera transmise au préfet de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 10 juin 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, présidente,
M. Didier Salvi, président-assesseur,
Mme D... A..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2021.
La rapporteure,
Nathalie A...La présidente,
Marianne Hardy
La greffière,
Sophie Lecarpentier
La République mande et ordonne au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 20BX00528 2